L’ailé et l’aptère : l’art alchimique inspiré et inspirant L'alchimie, l'art al

L’ailé et l’aptère : l’art alchimique inspiré et inspirant L'alchimie, l'art alchimique, les artistes alchimiques Publié le 17/02/2020 à 19:10 - 27 min - Modifié le 19/02/2020 par AGdG - http://www.linflux.com/art/laile-et-aptere-lart- alchimique-inspire-et-inspirant/ ********De l'alchimie inspirée ou les images alchimiques éblouissantes, à l'alchimie inspirante ou quelles traces alchimiques dans l'œuvre d'artistes, pour explorer l'alchimie, de l'ailé à l'aptère (qui n'a pas d'aile), du volatil au fixe, de l'esprit au corps********* Aurora Consurgens 1420, Zürich, Zentralbibliothek, Ms. Rh. 172: Aurora consurgens (https://www.e- codices.ch/en/list/one/zbz/Ms-Rh-0172). L’alchimie ? « Tous les dragons de notre vie » Elle s’appelle Cupriavidus metallidurans. Il s’appelle Nathan Magarvey. Elle “mange” des métaux toxiques et en fait de l’or . Il l’a découverte, elle et son don de chrysopée, un matin doré, dit-on. A eux deux, ils auraient fait sans doute rougir d’excitation Cléopâtre l’Alchimiste (4e siècle ap.J.C), l’une des figures les plus marquantes de l’histoire de cette source de connaissances et de créations inouïes : l’alchimie. L’alchimie est tout d’abord une connaissance visant à la transformation des métaux vils en or (la chrysopée) via le Grand Oeuvre et à la recherche du remède de longue vie. Il s’agissait notamment de rendre fixe ou aptère (« qui n’a pas d’ailes ») la matière ailée, volatile. Souvent parée à outrance d’oripeaux ésotériques, de pensées magiques, l’alchimie est pourtant aujourd’hui admise comme une part de l’histoire de la chimie. Mais elle est plus que cela. Si on suit la voie des chercheurs comme Bernard Joly ou encore Didier Khan, l’alchimie se dévoile comme une forme de savoir multiséculaire et colossale, posée sur papier dans des traités d’alchimie, conservés et mise en ligne par de prestigieuses bibliothèques, comme la nôtre. Et puis, si elle est la recherche de la matière contenue dans la nature, elle est aussi une philosophie, une pensée, une quête, un parcours initiatique et spirituel de l’Être, une recherche de Salut, de transformation intérieure, celle de l’alchimiste lui-même, un savoir universel fondé sur le principe de l’accord des opposés (concordia oppositorum). “Tous les dragons de notre vie sont peut-être des princesses attendant de nous voir beaux et courageux” Lettre à un jeune poète de Rainer Maria Rilke (1875-1926). L’art alchimique ? « Autant de sommes que la nuit de l’or » « Deux vicaires temporels très différents sont à la disposition des mortels : l’image, le mot. L’image voit ce qui manque. Le mot nomme ce qui fut. Derrière l’image, il y a le désir, c’est le fantasme le jour, c’est le rêve la nuit, c’est l’oracle la veille. » Sur l’image qui manque à nos jours de Pascal Quignard. Mais l’alchimie est bien plus qu’une pensée posée sur papier. Plastiquement, l’alchimie a créé. L’alchimie fut (est ?) inspirée graphiquement. Elle est en effet à l’origine d’un corpus d’images époustouflantes, du Moyen Age au 18e siècle. Selon l’histoire d’art belge Jacques Van Lennep, “L’image fut pour l’alchimiste un moyen d’expression primordial (…) Ce répertoire qui n’intéressa jusqu’ici que les esprits avides d’hermétisme, doit entrer triomphalement dans le domaine de l’histoire de l’art”. Il y a des images “techniques”, représentant des ustensiles ou des fours, comme dans cet ouvrage conservé par exemple à la bibliothèque universitaire de Santé de Paris, de 1529, ci- contre. Et puis, il y a les images symboliques, métaphoriques, comme le . Sujettes aux interprétations fumeuses ou autocentrée , elles sont pour les initiés, un langue des oiseaux limpide. Ailée et aptère, l’art alchimique est “le seul qui, depuis le moyen âge employa l’image comme des mots et les assembla en “textes” allégoriques défendant une philosophie ou retraçant des opérations mystiques.” explique J. Van Lennep. MUTUS LIBER, Bibliothèque nationale de France D’une beauté éblouissante, certaines images sont de purs chefs d’œuvres, des gravures souvent anonymes et siégeant dans des manuscrits ou des ouvrages imprimés qui sont devenus des pièces maîtresses de l’histoire de l’alchimie en image, comme le MUTUS LIBER. Véritable « livre d’artiste », sa position radicale sans texte (!) découle d’une tradition de l’image qui s’est développée à partir du 14e siècle et qui s’étire jusqu’au 18e siècle. ou l’ AURORA CONSURGENS, chef d’oeuvre, ci-dessous : «L’alchimie qui ne cessera jusqu’à la fin du 18e siècle de produire d’admirables œuvres d’art souvent anonymes, peintures d’une interprétation ardue sous leur revêtement d’époque, et surtout illustrations de livres qui sont autant de « sommes » que la nuit de l’or. » L’Art Magique (p.166) par André Breton Les artistes et l’alchimie ? « Say my name » L’alchimie a irrigué l’oeuvre de certains artistes. Ils en ont fait leur matière à penser, à créer. “L’art alchimique eut enfin des répercussions et des influences manifestes sur les créations artistiques traditionnelles. De nombreux artistes tels Bosch ou Bruegel puisèrent dans ses trésors symboliques.” souligne J. Van Lennep. L’alchimie leur est inspirante. Pour Nicolas Bourriaud, théoricien majeur de l’art contemporain notamment sur la question de l’esthétique relationnelle, l’alchimie et les artistes contemporains auraient développé des process communs : « Le laboratoire alchimique n’est finalement qu’un lieu de pratique qui n’aboutit pas à un résultat, puisque par définition, l’or de l’alchimie est un or philosophique. C’est dans l’oratoire que se déroule véritablement la pratique alchimique qui est une ascèse. Le laboratoire n’est ici qu’une métaphore : le lieu où l’on effectue les gestes qui légitiment le travail de l’oratoire. En un sens, c’est très proche de ce que font les artistes aujourd’hui. Le laboratoire est devenu effectivement une sorte de forme pour l’atelier qui, de plus en plus, n’est pas le lieu où se fabriquent les choses mais où on les pense. » L’étincelle, journal de création de l’IRCAM. « Say my name » Walter Hartwell White HICHAM BERRADA (1986-…) Artiste contemporain de reconnaissance internationale, toute son oeuvre explore les entrelacements entre sciences et art. “Mes pinceaux et pigments seraient le chaud, le froid, le magnétisme et la lumière.« Des nuages se forment, des sédiments se créent, sous nos yeux, fulgurants. De la nature et des interactions entre la matière, il sonde les possibles, il en filme les réactions, dans des béchers ou à ciel ouvert. Il est l’artiste alchimiste. Sa démarche n’ambitionne pas la chimie pure mais l’état d’âme. “Je choisis un référentiel; il s’agit souvent d’un aquarium, d’un terrarium ou de tout autre contenant clos dans lequel je peux contrôler les paramètres. A partir de là, je procède comme un scientifique, alternant expériences et intuition. C’est un aller-retour. Je choisis des conditions de départ en termes de température, de taux d’acidité, de matériaux que je fais progressivement évoluer en fonction des résultats obtenus. Chaque pièce, chaque forme que vous voyez est le fruit de longues heures de tests en atelier. Je cherche à faire en sorte que chacun de ces petits mondes puisse ressembler à un écosystème et générer, si possibles des émotions chez le spectateur.” Dans la série “Présage” 2003, il met en contact, dans une cuve en acier et en verre, des éléments chimiques de natures diverses qui produisent des formes de croissance rapide mais qui auraient pris des milliers d’années dans des conditions naturelles. Dans “Céleste” (2014) , il disperse dans le ciel gris des fumées colorées azur, éphémères mais rendues éternelles par leur captation filmée. Dans « Masse et Martyre » (2017), il établit des conditions chimiques permettant l’accélération du procédé d’oxydation sur deux formes de bronze à la cire perdue. En 7 mois, l’oxydation est totale. Dans la nature, elle aurait durée précisément 74 803 jours doit 2 siècles. Sans employer de dispositifs stricts aux sciences expérimentales, ces œuvres manifestent la beauté de la transformation de la temporalité et de la transformation tout court : “Aucune matière n’est arrêtée. Aucune forme n’est aboutie. Tout tend vers le chaos.” Comme si ces œuvres étaient (à) la recherche du temps à venir. Comme si la nature était à la fois le poème et le poète. L’hallucination de l’alchimiste, (1897) Portrait de Geber, alchimiste arabe par Thévet, André, 1504-1592 Bibliothèque municipale de Lyon (F16THE000201) “Mon travail artistique a débuté lorsque j’ai découvert une lettre de Berlioz à un ami dans laquelle il décrit une expérience physique qui est, à mes yeux, comparable à ce mal inexprimable qu’est le spleen. (…) Il s’agit de la surfusion de l’eau (…) Cette description est pour moi essentielle car toute la démarche relève de cette quête : générer, par des expériences physiques, une poésie qui toucherait l’esprit humain.” En constellation, l’alchimiste au travail : la représentation de l’alchimiste au travail est un motif iconographique récurrent dans l’histoire de l’art : David Teniers le jeune, Rembrandt et Bruegel l’Ancien….Elle symbolise le Grand Oeuvre (processus qui implique l’appareil psychique de l’alchimiste tout comme le corps des matériaux). ll peut être aussi représenté par le » mont des philosophes » (ci-contre). « le mont de philosophe » dans Cabala, Spiegel der Kunst und Natur in Alchymia par Michelspacher, Steffan, 1663, collection Getty. En constellation : Alva Noto & Ryuichi Sakamoto Vrioon PARMIGGIANINO (1503-1540) L’artiste Francesco Mazzola, dit « le Parmesan » ou « Parmigianino” (1503-1540) est l’une des plus belles mains de l’histoire du uploads/s3/ l-x27-aile-et-l-x27-aptere-art-alchimique-inspire-et-inspirant.pdf

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