MUSIQUE CONTEMPORAINE FRANÇAISE : quelques tendances Author(s): Bruno Giner Sou

MUSIQUE CONTEMPORAINE FRANÇAISE : quelques tendances Author(s): Bruno Giner Source: Fontes Artis Musicae, Vol. 47, No. 2/3 (April-September 2000), pp. 191-204 Published by: International Association of Music Libraries, Archives, and Documentation Centres (IAML) Stable URL: http://www.jstor.org/stable/23509312 Accessed: 04-04-2018 17:47 UTC JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact support@jstor.org. Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at http://about.jstor.org/terms International Association of Music Libraries, Archives, and Documentation Centres (IAML) is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Fontes Artis Musicae This content downloaded from 128.12.245.10 on Wed, 04 Apr 2018 17:47:59 UTC All use subject to http://about.jstor.org/terms MUSIQUE CONTEMPORAINE FRANÇAISE : quelques tendances Bruno Giner1 Dresser un panorama des diverses tendances de la création musicale française aujourd'hui ressemble à une curieuse gageure. Le demi-siècle qui vient de s'é couler aura vécu, tour à tour ou simultanément, l'abandon et le retour du sys tème tonal, l'utilisation courante des micro-intervalles, les formalismes les plus stricts et aussi les improvisations les plus débridées, la musique aléatoire, mi nimale, répétitive, le théâtre musical, la musique concrète, électronique, élec troacoustique, mixte, acousmatique, l'informatique musicale, etc. Période créa tive foisonnante, prolixe et inventive, émaillée d'une multitude de courants transversaux—heureusement les compositeurs sont difficilement réductibles à une catégorie ou à une autre—une période postmoderne, multiforme, où les enjeux esthétiques sont loin d'être simples, une période métissée et talen tueuse. Partant de là, comment en quelques pages, classer, répertorier, éventuellement hiérarchiser, comment tenter d'expliciter le plus clairement possible un labyrinthe vivant, polymorphe et joyeusement désordonné ? Donc, face à l'utopie de l'exhaustivité, face à la complexité de la tâche, je présente au lecteur toutes mes excuses pour les classifications hâtives, pour quelques raccourcis esthético-théoriques et, bien sûr, pour tous les oublis, volontaires ou non. Quelques prémices : les années 1950 et 1960 Darmstadt Les années 1950 et suivantes correspondent à la grande époque des avant gardes musicales. Sérialisme, musique aléatoire, musiques concrètes, élec troniques ou mixtes, minimalisme, hasard et indétermination, toutes les ten dances qui incarnent la modernité en musique se côtoient dans l'étroit cénacle du festival de Darmstadt. Les compositeurs Karlheinz Stockhausen, Luigi Nono, Luciano Berio, John Cage, Morton Feldman, Pierre Boulez, Iannis Xenakis, Mauricio Kagel, György Ligeti et bien d'autres confrontent passion nément leurs idées et leurs œuvres comme autant de manifestes. 1. Bruno Giner est compositeur, directeur du Conservatoire intercommunal d'Athis-Möns— Juvisy et l'auteur de Musique contemporaine : le second vingtième siècle (Paris : Durand, 2000) et Weimar 1933 : la musique aussi brûle en exil (Paris : Le temps des cerises, 2001). 191 This content downloaded from 128.12.245.10 on Wed, 04 Apr 2018 17:47:59 UTC All use subject to http://about.jstor.org/terms 192 FONTES ARTIS MUSICAE 47/2-3 Olivier Messiaen En France, sans nul doute, la personnalité musicale dominante de cette période est Olivier Messiaen. Compositeur largement confirmé—il a déjà écrit quelques œuvres majeures : L'Ascension (1933), La Nativité du Seigneur (1935), Poèmes pour Mi (1936), Quatuor pour la fin du temps (1941), Trois pe tites liturgies de la présence divine (1944)—, fondateur du groupe Jeune France avec André Jolivet, Yves Baudrier et Daniel-Lesur, il est titulaire dès 1947 d'une classe d'analyse musicale au Conservatoire national supérieur de musique de Paris qui, rapidement, se transforme en classe de composition. Pendant plus de vingt ans, cette classe sera un extraordinaire vivier de compositeurs, tous horizons confondus : Pierre Boulez, Serge Nigg, Jean Barraqué, Marius Constant, Iannis Xenakis, Pierre Henry, Gilbert Amy, Jean-Pierre Guézec, Paul Méfano, François-Bernard Mâche, Nguyen-Thien Dao, Gérard Grisey, Tristan Murail, Michael Lévinas, Tona Scherchen, Didier Denis, Michèle Reverdy, Akira Tamba, Philippe Fénelon, André Bon, François Bousch, pour n'en citer que quelques-uns. L'influence de Messiaen se répercute de mille façons ; ses analyses magistrales des œuvres de l'École de Vienne (Schoenberg, Berg, Webern), ses propres recherches sérielles (Quatre études de rythme : Mode de valeurs et d'intensités pour piano, 1949), ses travaux sur le rythme et sur les « couleurs » harmoniques, son immense culture musicale et sa grande ouver ture d'esprit auront, d'une façon ou d'une autre, d'importantes répercussions sur plusieurs générations de compositeurs, chacun trouvant son chemin per sonnel, loin de tout épigonisme. Le Domaine Musical Fondé et dirigé par Pierre Boulez de 1953 à 1967, puis par Gilbert Amy de 1967 à 1973 (date de sa dissolution), le Domaine Musical contribue activement à dif fuser la musique contemporaine en France, notamment les œuvres de l'École de Vienne, certaines œuvres de Bartok, Stravinsky, Debussy, Messiaen ou Varèse, ainsi que les œuvres récentes de compositeurs plus jeunes comme Luciano Berio, Luigi Nono, Karlheinz Stockhausen, Luis De Pablo, Pierre Boulez, etc.2 Néo-classicisme Messiaen n'est pas le seul à influencer les tendances musicales du moment ; dans la lignée du Groupe des Six (Poulenc, Honegger, Milhaud, Auric, Tailleferre, Durey), des compositeurs comme Henri Sauguet, Jacques Chailley ou Marcel Landowski défendent—contre la musique atonale et sérielle—une musique plus consonante, plus expressive, moins « intellectuelle ». Dès les an nées soixante, le fossé se creuse entre les partisans de la musique sérielle et ceux d'un néo-classicisme à la française. On le sait, l'antagonisme Boulez/ Landowski sera violent et s'exprimera pendant plusieurs années au travers d'une lutte de pouvoir sans merci.3 Pourtant, dès cette époque, beaucoup de compositeurs ne se reconnaissent ni dans un camp ni dans l'autre—ils sont d'ailleurs baptisés « indépendants »—et composent des musiques affranchies 2. Voir à ce propos l'ouvrage de Jésus Aguila, Le Domaine musical (Paris : Fayard, 1992). 3. Voir Pierre Boulez, « Pourquoi je dis non à Malraux », article paru dans Le Nouvel Observa teur du 25 mai 1966 et repris dans Points de Repère (Paris : Christian Bourgois, 1981) : 481. This content downloaded from 128.12.245.10 on Wed, 04 Apr 2018 17:47:59 UTC All use subject to http://about.jstor.org/terms MUSIQUE CONTEMPORAINE FRANÇAISE 193 de tout diktat esthétique de quelque obédience ment Olivier Messiaen (justement ! ), André Jol Ohana, Claude Ballif, Ivo Malec, André Boucoure Musique concrète et électronique En marge des querelles d'écriture entre « ancie nées d'après-guerre voient également la naissan jourd'hui les « nouvelles technologies ». Élaboré Club d'essai de la Radio-Télévision française, verser en profondeur la pensée musicale de la se la suite d'un banal incident technique (un si même), Pierre Schaeffer (1910-95) imagine l univers musical radicalement neuf à partir de manipulés et transformés en studio par le comp port magnétique. « Nous avons appelé notre mu est constituée à partir d'éléments préexistants matériau sonore, qu'il soit bruit ou musique hab mentalement par une construction directe, abou de composition sans le secours, devenu impossib dinaire ».4 En effet, contrairement à l'écriture tra le compositeur construit son œuvre empiriquem manent, à chaque étape de la réalisation, entre l et leur mise en forme définitive (attitude concr de bruits (Pierre Schaeffer, 1948), du Microphon 1950) et de la Symphonie pour un homme seul (S nées suivantes voient de nombreux compositeur la rue de l'Université à Paris : Luc Ferrari, Fran Parmegiani, Ivo Malec, François Bayle, Guy importantes en témoignent : Poème électroniq Orient-Occident de Iannis Xenakis (1960), La noi Pierre Henry (1961 et 1962), Capture éphémère Hétérozygote de Luc Ferrari (1963), Espaces inh (1967), Luminétudes d'Ivo Malec (1968). .. Simul périences concrètes, dans les studios de la WDR dirige les premiers travaux de musique pureme générateurs de fréquences, il devient possible d paramètres (hauteur, durée, intensité, etc.) d'un d'engendrer des structures musicales complexe cela, les prémices de l'électronique rejoignent le et combinatoires des compositeurs sériels. « Co crète, qui se sert d'enregistrements réalisés musique électronique fait exclusivement usa acoustique. Le son est produit par un générateu bande magnétique. C'est alors seulement que co 4. Pierre Schaeffer, « Introduction à la musique concrète 5. Herbert Eimert, « Musique électronique », La Revue Masse, 1957) : 45. This content downloaded from 128.12.245.10 on Wed, 04 Apr 2018 17:47:59 UTC All use subject to http://about.jstor.org/terms 194 FONTES ARTIS MUSICAE 47/2-3 des manipulations compliquées et différenciées ».5 L né, les compositeurs de musique concrète étant cons « bricoleurs » et ceux de musique électronique comm fades et stériles. Finalement, après quelques années sauvages qu'inutiles entre les adeptes de chaque cam musique électronique fusionnent sous le terme plus troacoustique. Deux œuvres inaugurales à cet égard— 1956 et signées de chacun des chefs de file—assumen de sources électroniques et concrètes. Il s'agit de Henry et Gesang der Jünglinge de Karlheinz Stockha L'ordinateur De la musique électroacoustique aux premiers balbutiements de l'informa tique musicale, des premiers synthétiseurs aux grosses machines d'IBM, il n'y avait qu'un pas. A la suite des premiers essais de composition automatique réalisés aux États-Unis par Lejaren Hiller en 1956 (Suite Illiac, première œuvre musicale programmée par ordinateur selon les règles strictes du contrepoint), le compositeur français Pierre Barbaud (1911-91) développe dès 1958 une nouvelle méthode de composition automatique baptisée « uploads/s3/ musique-contemporain-francais.pdf

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