CONSEIL DE L’EUROPE COUNCIL OF EUROPE COUR EUROPÉENNE DES DROITS DE L’HOMME EUR
CONSEIL DE L’EUROPE COUNCIL OF EUROPE COUR EUROPÉENNE DES DROITS DE L’HOMME EUROPEAN COURT OF HUMAN RIGHTS AFFAIRE ASSENOV ET AUTRES c. BULGARIE (90/1997/874/1086) ARRÊT STRASBOURG 28 octobre 1998 1 ARRÊT ASSENOV ET AUTRES DU 28 OCTOBRE 1998 En l’affaire Assenov et autres c. Bulgarie1, La Cour européenne des Droits de l’Homme, constituée, conformément à l’article 43 de la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales (« la Convention ») et aux clauses pertinentes de son règlement A2, en une chambre composée des juges dont le nom suit : MM. R. BERNHARDT, président, L.-E. PETTITI, Mme E. PALM, MM. A.B. BAKA, G. MIFSUD BONNICI, J. MAKARCZYK, D. GOTCHEV, P. VAN DIJK, V. TOUMANOV, ainsi que de MM. H. PETZOLD, greffier, et P.J. MAHONEY, greffier adjoint, Après en avoir délibéré en chambre du conseil les 29 juin et 25 septembre 1998, Rend l’arrêt que voici, adopté à cette dernière date : PROCEDURE 1. L’affaire a été déférée à la Cour par la Commission européenne des Droits de l’Homme (« la Commission ») le 22 septembre 1997, dans le délai de trois mois qu’ouvrent les articles 32 § 1 et 47 de la Convention. A son origine se trouve une requête (no 24760/94) dirigée contre la République de Bulgarie et dont trois ressortissants bulgares, M. Anton Assenov, Mme Fidanka Ivanova et M. Stefan Ivanov, avaient saisi la Commission le 6 septembre 1993 en vertu de l’article 25. La demande de la Commission renvoie aux articles 44 et 48 ainsi qu’à la déclaration bulgare reconnaissant la juridiction obligatoire de la Cour (article 46). Elle a pour objet d’obtenir une décision sur le point de savoir si les faits de la cause révèlent un manquement de l’Etat défendeur aux exigences des articles 3, 5, 6, 13, 14 et 25 de la Convention. Notes du greffier 1. L’affaire porte le n° 90/1997/874/1086. Les deux premiers chiffres en indiquent le rang dans l’année d’introduction, les deux derniers la place sur la liste des saisines de la Cour depuis l’origine et sur celle des requêtes initiales (à la Commission) correspondantes. 2. Le règlement A s’applique à toutes les affaires déférées à la Cour avant l’entrée en vigueur du Protocole n° 9 (1er octobre 1994) et, depuis celle-ci, aux seules affaires concernant les Etats non liés par ledit Protocole. Il correspond au règlement entré en vigueur le 1er janvier 1983 et amendé à plusieurs reprises depuis lors. 2 ARRÊT ASSENOV ET AUTRES DU 28 OCTOBRE 1998 2. En réponse à l’invitation prévue à l’article 33 § 3 d) du règlement A, les requérants ont émis le vœu de participer à la procédure et ont désigné leur conseil (article 30). 3. La chambre à constituer comprenait de plein droit M. D. Gotchev, juge élu de nationalité bulgare (article 43 de la Convention), et M. R. Bernhardt, alors vice-président de la Cour (article 21 § 4 b) du règlement A). Le 25 septembre 1997, le président de la Cour, M. R. Ryssdal, a tiré au sort en présence du greffier le nom des sept autres membres, à savoir M. L.-E. Pettiti, Mme E. Palm, M. A.B. Baka, M. G. Mifsud Bonnici, M. J. Makarczyk, M. P. van Dijk et M. V. Toumanov (articles 43 in fine de la Convention et 21 § 5 du règlement A). 4. En sa qualité de président de la chambre (article 21 § 6 du règlement A), M. Bernhardt a consulté par l’intermédiaire du greffier l’agent du gouvernement bulgare (« le Gouvernement »), l’avocat des requérants et le délégué de la Commission au sujet de l’organisation de la procédure (articles 37 § 1 et 38). Conformément à l’ordonnance rendue en conséquence, le greffier a reçu les mémoires des requérants et du Gouvernement le 9 mars 1998. 5. Le 2 et le 13 février 1998 respectivement, M. Bernhardt a autorisé l’European Roma Rights Center et Amnesty International à soumettre des observations écrites (article 37 § 2 du règlement A). Pareilles observations sont parvenues au greffe les 29 et 30 avril 1998. 6. Ainsi qu’en avait décidé le président, les débats se sont déroulés en public le 25 juin 1998, au Palais des Droits de l’Homme à Strasbourg. La Cour avait tenu auparavant une réunion préparatoire. Ont comparu : – pour le Gouvernement Mme V. DJIDJEVA, coagent, ministère de la Justice, agent ; – pour la Commission M. M.A. NOWICKI, délégué ; – pour les requérants Mme Z. KALAYDJIEVA, conseil. La Cour a entendu M. Nowicki, Mme Kalaydjieva et Mme Djidjeva. 3 ARRÊT ASSENOV ET AUTRES DU 28 OCTOBRE 1998 EN FAIT I. LES CIRCONSTANCES DE L’ESPECE 7. Les requérants sont une famille de ressortissants bulgares d’origine tzigane qui résident à Sumen, en Bulgarie. M. Anton Assenov est né en 1978, ses parents, Mme Fidanka Ivanova et M. Stefan Ivanov, sont nés en 1956 et 1952 respectivement. A. Les événements survenus le 19 septembre 1992 et après cette date 1. L’arrestation et la garde à vue 8. Le 19 septembre 1992, alors qu’il se livrait à des jeux d’argent sur la place du marché de Sumen, M. Assenov (alors âgé de quatorze ans) fut appréhendé par un policier qui n’était pas en service et emmené à la gare d’autobus située à proximité, d’où le policier appela du renfort. 9. Par la suite, les parents de M. Assenov, qui travaillaient tous deux à la gare d’autobus, firent leur apparition et demandèrent la libération de leur fils. Désireux de montrer qu’il administrerait lui-même la correction nécessaire, M. Ivanov s’empara d’une latte de contre-plaqué et en frappa son fils. A un certain moment, deux autres policiers arrivèrent. Au dire des requérants, ils frappèrent l’adolescent à coups de matraque. S’ensuivit alors une dispute entre les parents du garçon et la police ; il semble que M. Assenov lui-même ne fit preuve d’aucune agressivité et se montra docile. Après avoir été menottés, Anton et son père furent contraints de monter à bord d’une voiture de police. Emmenés au poste de police, ils y furent gardés pendant environ deux heures, avant d’être relâchés sans avoir été inculpés. M. Assenov affirme que des policiers présents au poste l’ont frappé à l’aide d’un pistolet factice et de matraques et lui ont donné des coups de poing dans l’estomac. 2. Les preuves médicales 10. Le 21 septembre 1992, premier jour ouvrable après l’incident, les requérants consultèrent un médecin légiste. Ils lui expliquèrent que M. Assenov avait été frappé à coups de matraque et de crosse de pistolet par trois policiers et que sa mère avait reçu des coups de matraque. Le médecin examina les deux intéressés et leur délivra des certificats médicaux. 4 ARRÊT ASSENOV ET AUTRES DU 28 OCTOBRE 1998 11. D’après le certificat le concernant, le premier requérant présentait un hématome formant une bande d’environ cinq centimètres de long et un centimètre de large sur la face externe de la partie supérieure du bras droit, trois hématomes formant des bandes d’environ six centimètres de long et un centimètre de large sur le côté droit de la poitrine, une ecchymose d’environ quatre centimètres de long au-dessus de l’omoplate gauche, un hématome de deux centimètres de diamètre sur l’arrière du crâne et cinq éraflures d’environ cinq centimètres de long sur le côté droit du thorax. Le certificat concernant Mme Ivanova indiquait que l’intéressée présentait une ecchymose d’environ cinq centimètres de long sur la cuisse gauche. Le médecin conclut que les ecchymoses pouvaient avoir été causées de la façon décrite par les requérants. 3. L’enquête menée par la Direction régionale de l’Intérieur 12. Le 2 octobre 1992, Mme Ivanova déposa auprès de la Direction régionale de l’Intérieur (« la DRI ») une plainte dans laquelle elle alléguait que son fils avait été battu à la gare d’autobus et au poste de police, et demandait que les policiers responsables fussent poursuivis (paragraphe 58 ci-dessous). 13. La plainte fut examinée par le colonel P., inspecteur au service du personnel de la DRI. Le 15 octobre 1992, il entendit chacun des requérants et établit des procès-verbaux de leurs dépositions. M. Assenov fut entendu en présence d’un enseignant, M. G. Dans leurs déclarations, les requérants livrèrent la version des faits figurant aux paragraphes 8–9 ci-dessus. 14. Le colonel P. ordonna également aux trois policiers présents à la gare d’autobus, ainsi qu’à celui qui était de service au poste de police, de fournir des explications écrites, ce qu’ils firent les 21, 22 et 26 octobre 1992. D’après leurs déclarations, le sergent B., qui ne travaillait pas ce jour-là et n’était pas en uniforme, avait vu des personnes se livrer à des jeux d’argent alors qu’il passait devant la gare d’autobus. Il avait appréhendé M. Assenov et l’avait emmené à la gare d’autobus, d’où il avait appelé le policier de service. Là-dessus, M. Ivanov était arrivé, avait invectivé son fils et lui avait porté deux ou trois coups sur le dos au moyen d’une latte en contre-plaqué. Avec sa femme, arrivée peu après, ils avaient commencé à protester contre l’arrestation de leur fils et à tirer celui-ci vers eux. uploads/S4/ affaire-assenov-et-autres-c-bulgarie.pdf
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- Publié le Mai 01, 2021
- Catégorie Law / Droit
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