CONSEIL D'ETAT statuant au contentieux N° 394989 __________ M. Joël DOMENJOUD _

CONSEIL D'ETAT statuant au contentieux N° 394989 __________ M. Joël DOMENJOUD __________ Mme Cécile Barrois de Sarigny Rapporteur __________ M. Xavier Domino Rapporteur public __________ Séance du 11 décembre 2015 Lecture du 11 décembre 2015 __________ REPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS Le Conseil d'Etat statuant au contentieux (Section du contentieux) Sur le rapport de la 2ème sous-section de la section du contentieux Vu la procédure suivante : M. Joël Domenjoud a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, de suspendre l’exécution de l’arrêté du 25 novembre 2015 par lequel le ministre de l’intérieur l’a astreint à résider sur le territoire de la commune de Malakoff jusqu’au 12 décembre 2015, avec obligation de présentation trois fois par jour à des horaires déterminés au commissariat de police de Vanves Malakoff tous les jours de la semaine et de demeurer, tous les jours entre 20 heures et 6 heures, dans les locaux où il réside. Par une ordonnance n° 1510344 du 28 novembre 2015, le juge des référés a rejeté cette demande. Par un pourvoi et deux mémoires complémentaires enregistrés les 2, 7 et 9 décembre 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. Domenjoud demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cette ordonnance ; 2°) statuant en référé, de faire droit à sa demande ; 3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. N° 394989 - 2 - ………………………………………………………………………… Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code civil ; - la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 ; - la loi n° 2000-321 du12 avril 2000 ; - la loi n° 2015-1501 du 20 novembre 2015 ; - le décret n° 2015-1475 du 14 novembre 2015 ; - le décret n° 2015-1476 du 14 novembre 2015 ; - le décret n° 2015-1478 du 14 novembre 2015 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Cécile Barrois de Sarigny, maître des requêtes, - les conclusions de M. Xavier Domino, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Garreau, Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, avocat de M. Joël Domenjoud et à la SCP Spinosi, Sureau, avocat de la Ligue des droits de l’homme ; 1. Considérant qu’aux termes de l’article L. 521-2 du code de justice administrative : « Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures » ; qu’aux termes de l’article L. 522-3 du même code : « Lorsque la demande ne présente pas un caractère d'urgence ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée, le juge des référés peut la rejeter par une ordonnance motivée sans qu'il y ait lieu d'appliquer les deux premiers alinéas de l'article L. 522-1 » ; 2. Considérant que M. Joël Domenjoud se pourvoit en cassation contre l’ordonnance du 28 novembre 2015 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté, par application de l’article L. 522-3 du code de justice administrative, sa demande, présentée sur le fondement de l’article L. 521-2 du même code, tendant à la suspension des effets de la mesure d’assignation à résidence qui a été prise à son endroit par le ministre de l’intérieur le 25 novembre 2015 ; N° 394989 - 3 - Sur l’intervention : 3. Considérant que la Ligue des droits de l’homme, qui intervient au soutien des conclusions du pourvoi, justifie, eu égard à la nature et à l’objet du litige, d’un intérêt suffisant pour intervenir dans la présente instance ; que son intervention est, par suite, recevable ; Sur les dispositions applicables : 4. Considérant qu’aux termes de l’article 1er de loi du 3 avril 1955 relative à l'état d'urgence : « L'état d'urgence peut être déclaré sur tout ou partie du territoire métropolitain, des départements d'outre-mer, des collectivités d'outre-mer régies par l'article 74 de la Constitution et en Nouvelle-Calédonie, soit en cas de péril imminent résultant d'atteintes graves à l'ordre public, soit en cas d'événements présentant, par leur nature et leur gravité, le caractère de calamité publique » ; qu’aux termes de l’article 2 de la même loi : « L'état d'urgence est déclaré par décret en Conseil des ministres. Ce décret détermine la ou les circonscriptions territoriales à l'intérieur desquelles il entre en vigueur. Dans la limite de ces circonscriptions, les zones où l'état d'urgence recevra application seront fixées par décret. La prorogation de l'état d'urgence au-delà de douze jours ne peut être autorisée que par la loi » ; 5. Considérant qu'après les attentats commis à Paris le 13 novembre 2015, l’état d’urgence a été déclaré sur le territoire métropolitain, y compris en Corse, par le décret délibéré en conseil des ministres n° 2015-1475 du 14 novembre 2015 ; que le décret n° 2015-1476 du même jour a décidé que les mesures d’assignation à résidence prévues à l’article 6 de la loi du 3 avril 1955 pouvaient être mises en œuvre sur l’ensemble des communes d’Ile-de-France ; que ce périmètre a été étendu, à compter du 15 novembre à zéro heure, à l’ensemble du territoire métropolitain par le décret n° 2015-1478 du 14 novembre 2015 ; que l’état d’urgence a, en outre, été déclaré à compter du 19 novembre 2015, sur le territoire des collectivités de Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique, de la Réunion, de Mayotte, de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin, par le décret délibéré en conseil des ministres n° 2015-1493 du 18 novembre 2015 ; 6. Considérant que la loi du 20 novembre 2015 prorogeant l’application de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l'état d'urgence et renforçant l'efficacité de ses dispositions a prorogé, pour une durée de trois mois à compter du 26 novembre 2015, l’état d’urgence déclaré par les décrets délibérés en conseil des ministres des 14 et 18 novembre 2015 ; que la loi du 20 novembre 2015 a modifié certaines des dispositions de la loi du 3 avril 1955, en particulier celles de l’article 6 de cette loi ; que les modifications résultant de cette loi sont applicables aux mesures prises après son entrée en vigueur, qui est intervenue, en vertu des dispositions particulières de son décret de promulgation, immédiatement à compter de sa publication le 21 novembre 2015 ; 7. Considérant qu’aux termes de l’article 6 de la loi du 3 avril 1955, dans sa rédaction résultant de la loi du 20 novembre 2015 : « Le ministre de l'intérieur peut prononcer l'assignation à résidence, dans le lieu qu'il fixe, de toute personne résidant dans la zone fixée par le décret mentionné à l'article 2 et à l'égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace pour la sécurité et l'ordre publics dans les circonscriptions territoriales mentionnées au même article 2. Le ministre de l'intérieur peut la faire conduire sur le lieu de l'assignation à résidence par les services de police ou les unités de gendarmerie. / La personne mentionnée au premier alinéa du présent article peut également être astreinte à demeurer dans le lieu d'habitation déterminé par le ministre de l'intérieur, pendant la plage horaire qu'il fixe, dans la limite de douze heures par vingt-quatre heures. / L'assignation à N° 394989 - 4 - résidence doit permettre à ceux qui en sont l'objet de résider dans une agglomération ou à proximité immédiate d'une agglomération. / En aucun cas, l'assignation à résidence ne pourra avoir pour effet la création de camps où seraient détenues les personnes mentionnées au premier alinéa. / L'autorité administrative devra prendre toutes dispositions pour assurer la subsistance des personnes astreintes à résidence ainsi que celle de leur famille. / Le ministre de l'intérieur peut prescrire à la personne assignée à résidence : / 1° L'obligation de se présenter périodiquement aux services de police ou aux unités de gendarmerie, selon une fréquence qu'il détermine dans la limite de trois présentations par jour, en précisant si cette obligation s'applique y compris les dimanches et jours fériés ou chômés ; / 2° La remise à ces services de son passeport ou de tout document justificatif de son identité. Il lui est délivré en échange un récépissé, valant justification de son identité en application de l'article 1er de la loi n° 2012-410 du 27 mars 2012 relative à la protection de l'identité, sur lequel sont mentionnées la date de retenue uploads/S4/ assignation-a-residence-decision-du-conseil-d-x27-etat-du-11-decembre-2015.pdf

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  • Publié le Sep 21, 2022
  • Catégorie Law / Droit
  • Langue French
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