20/10/2022 15'35 Chronique de droits fondamentaux et libertés publiques (janvie
20/10/2022 15'35 Chronique de droits fondamentaux et libertés publiques (janvier à juin 2022) | Conseil constitutionnel Page 1 sur 12 https://www.conseil-constitutionnel.fr/publications/titre-vii/chronique-de-droits-fondamentaux-et-libertes-publiques-janvier-a-juin-2022 Titre Titre VII CHRONIQUE DE DROITS FONDAMENTAUX ET LIBERTÉS PUBLIQUES N° 9 - OCTOBRE 2022 Chronique de droits fondamentaux et libertés publiques (janvier à juin 2022) ÉCRIT PAR Jean-Philippe DEROSIER, Professeur agrégé des facultés de droit à l’Univ. Lille (*) Emmanuel CARTIER, Professeur agrégé des facultés de droit à l’Univ. Lille (**) Fin de législature et, surtout, période d'élections obligent, le Parlement a suspendu ses travaux à compter du 28 février, diminuant donc tant le nombre de lois adoptées que de décisions rendues en DC au cours du premier semestre 2022 : on n'en compte que six, dont quatre sur des lois organiques et les lois ordinaires qui les complétaient. Profitant toutefois de cette - relative - accalmie contentieuse, le Conseil a adopté une décision attendue depuis plus de soixante ans : le 11 mars 2022, il a arrêté le règlement intérieur sur la procédure suivie devant lui pour les déclarations de conformité à la Constitution (contrôle a priori). Ce règlement de procédure rejoint ceux pour le contentieux électoral, pour les réclamations liées à un référendum ou pour la question prioritaire de constitutionnalité. Surtout, il confirme la pleine juridictionnalisation du Conseil, renforcée depuis 2010 et l'introduction de la QPC, mais qui émergea déjà auparavant, lors de l'ouverture de la saisine parlementaire et de la production d'observations du Gouvernement (1974), leur publication (1994 pour les observations), la présence des parties et de leurs conseils dans le contentieux électoral (1995). Ce règlement est structuré en trois parties : d'abord le dépôt, la présentation et l'enregistrement des saisines, puis l'organisation de la procédure d'instruction et, enfin, le jugement. Novateur et attendu sur la forme, il ne constitue cependant pas une révolution sur le fond, car il se borne essentiellement à codifier des pratiques d'ores et déjà existantes, tout en introduisant des nouveautés limitées. Désormais, le texte des saisines sera mis en ligne dès leur enregistrement et non plus en même temps que la décision, 20/10/2022 15'35 Chronique de droits fondamentaux et libertés publiques (janvier à juin 2022) | Conseil constitutionnel Page 2 sur 12 https://www.conseil-constitutionnel.fr/publications/titre-vii/chronique-de-droits-fondamentaux-et-libertes-publiques-janvier-a-juin-2022 permettant d'éviter toute divulgation plus ou moins instrumentalisée par les requérants. Le Conseil pourra annoncer, comme il lui est déjà arrivé de le faire, la date à laquelle il rendra sa décision et même décider de fixer une date de clôture d'instruction, rendue publique sur son site internet, avant laquelle les écritures pourront être échangées et les auditions demandées. Des parlementaires autres que les auteurs de la saisine pourront adresser des observations au rapporteur : ces dernières constitueront alors des pièces de procédure et seront transmises aux autres autorités et requérants alors que, jusqu'à présent, elles constituaient formellement une contribution extérieure et elles seront ainsi, désormais, intégrées à la procédure. À l'initiative du rapporteur, des personnes qualifiées pourront être consultées, sans qu'il soit précisé si cette consultation peut être orale et la production écrite devra être versée à la procédure et transmise aux autres autorités (une telle consultation peut être utile lorsque le Conseil examine des sujets techniques). Enfin, le règlement prévoit qu'une récusation peut être demandée par les auteurs de la saisine ou par le président de la République, le Premier ministre ou les présidents des assemblées, par un écrit spécialement motivé, accompagné des pièces propres à la justifier. Pour ce faire, il faudra introduire la demande dans les deux jours qui suivent l'enregistrement de la première saisine. Informé d'une telle demande, le membre concerné pourra la refuser. Le Conseil statuera alors par une décision spéciale, tandis que, dans le cadre d'une QPC, la demande est seulement « examinée ». Le membre concerné ne participera pas à cette décision. Entré en vigueur le 1 juillet 2022, ce règlement, qui s'inspire de celui sur la QPC, confirme la juridictionnalisation du Conseil constitutionnel et conforte sa transparence, indispensable à toute justice. Deux autres décisions méritent de plus amples développements : celle sur la loi relative à la sécurité intérieure, véritable session de rattrapage en cette matière et celle sur le passe vaccinal, où le Conseil maintient son « mouvement jurisprudentiel de crise sanitaire ». Session de rattrapage pour la sécurité intérieure Décision n° 2021-834 DC du 20 janvier 2022, Loi relative à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure, par J.-Ph. Derosier La loi relative à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure constituait une forme de session de rattrapage, partiellement réussie, de la loi pour une sécurité globale préservant les libertés, qui avait été assez largement censurée . Tenant compte des exigences issues de cette décision de censure pour incompatibilité avec le droit au respect de la vie privée, la loi introduit un dispositif de vidéosurveillance dans les cellules de garde à vue et de rétention douanière, selon des conditions qui satisfont désormais cette exigence constitutionnelle. En particulier, il est strictement réservé à des cas exceptionnels et justifiés, tandis que l'autorité judiciaire y est plus étroitement associée. Le Conseil relève ainsi qu'il ne peut en être fait un usage généralisé et discrétionnaire car il est limité aux cas où il existe des raisons sérieuses de penser que la personne concernée risque de s'évader ou présente des menaces pour elle-même ou pour autrui. Il ne peut s'appliquer que pendant une durée strictement nécessaire au regard du comportement de la personne concernée et au maximum pour vingt-quatre heures. L'autorité judiciaire doit être informée sans délai et elle peut y mettre fin à tout moment. Elle est la seule à pouvoir décider sa prolongation pour une durée ne pouvant excéder, en tout état de cause, celle de la garde à vue ou de la retenue douanière. De plus, le dispositif précédent permettait que ces enregistrements soient également utilisés pour la collecte de preuves, ce qui n'est plus le cas, à l'exception du besoin d'un signalement à l'autorité judiciaire dans les conditions prévues à l'article 40 du Code de procédure pénale. er (3) (3) 20/10/2022 15'35 Chronique de droits fondamentaux et libertés publiques (janvier à juin 2022) | Conseil constitutionnel Page 3 sur 12 https://www.conseil-constitutionnel.fr/publications/titre-vii/chronique-de-droits-fondamentaux-et-libertes-publiques-janvier-a-juin-2022 En revanche, le Conseil, fidèle à sa jurisprudence, refuse d'aller sur le terrain de l'article 66 de la Constitution, retenant que « le placement sous vidéosurveillance d'une personne placée en garde à vue ou en retenue douanière ne constitu[e] pas une mesure privative de liberté » (paragr. 14 de la décision). Au sens strict, on ne peut que souscrire à cette appréciation. Toutefois, la surveillance permanente d'une personne, quoique encadrée par les conditions susmentionnées et limitées dans la durée, est tellement intrusive dans la vie privée qu'une évolution de la jurisprudence du Conseil sur ce point aurait été non seulement compréhensible, mais aussi bienvenue : une telle intrusion aurait pu être assimilée à une mesure privative de liberté. Gageons qu'un tel dispositif, initialement mis en place afin d'éviter que le dernier survivant des attentats du 13 novembre 2015, Salah Abdeslam, ne mette fin à ses jours , ne puisse se développer davantage. La loi reprenait également les mécanismes de vidéosurveillance par drone et par caméras embarquées. Concernant les premiers, le Conseil avait validé le principe même d'un tel dispositif dans sa décision sur la loi pour une sécurité globale, en ce qu'elle répond aux objectifs de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public et de recherche des auteurs d'infractions, à la condition toutefois, eu égard à la mobilité et à la hauteur à laquelle ces appareils peuvent évoluer, d'assortir de tels systèmes de surveillance de garanties particulières de nature à sauvegarder le droit au respect de la vie privée, car ils sont susceptibles de capter, en tout lieu et sans que leur présence soit détectée, des images d'un nombre très important de personnes et de suivre leurs déplacements dans un vaste périmètre (repris au paragr. 21 de la décision). Or le dispositif antérieur fut censuré car son déploiement était insuffisamment encadré (tout type d'infraction, y compris des contraventions, aucune limitation de durée ni de périmètre, etc.). Désormais, l'encadrement est beaucoup plus strict. Si le Conseil valide la possibilité d'y recourir en matière de police judiciaire, car un tel dispositif ne peut alors être déployé que pour de graves infractions, tel n'est pas le cas en matière de police administrative, où il opère un contrôle étendu et ne valide le dispositif que partiellement, tout en l'assortissant de plusieurs réserves. Une surveillance par drone ne peut ainsi être autorisée par le préfet qu'après que ce dernier s'est assuré que d'autres moyens moins intrusifs ne peuvent être utilisés, sauf à ce qu'ils soient susceptibles d'entraîner des menaces graves pour l'intégrité des agents : cette condition de subsidiarité, déjà identifiée dans la décision sur la loi pour une sécurité globale , est retenue par le Conseil pour valider la constitutionnalité du dispositif (paragr. 27 et 28 de la décision). Il considère également que, si la loi précise bien que ces dispositifs ne peuvent procéder à la captation du son, ni comporter de traitements automatisés de reconnaissance uploads/S4/ derosier-et-cartier-chronique-de-droits-fondamentaux-et-liberte-s.pdf
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- Publié le Mai 11, 2021
- Catégorie Law / Droit
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