1 CAPAVOCAT DROIT INTERNATIONAL PRIVE CORRIGE DU DST n° 3 du samedi 14 août2010

1 CAPAVOCAT DROIT INTERNATIONAL PRIVE CORRIGE DU DST n° 3 du samedi 14 août2010 PROPOSITION DE CORRECTION POUR L’EXERCICE DE COMMENTAIRE Cass. civ. 1re, 3 mars 2010 (n° 09-13.723) Statuant une nouvelle fois et de façon désormais classique sur l’office du juge dans le domaine du conflit de lois, le présent arrêt présente avant tout des qualités d’ordre pédagogique. En effet, au-delà d’un rappel des principes généraux gouvernant l’office du juge en ce domaine, la solution retenue précise également que chaque règle de conflit emporte avec elle ses propres principes de mise en œuvre. Dans le cas particulier de l’article 309 du Code civil, cela suppose de suivre un raisonnement en cascade, dont l’irrespect d’une étape ne pourra conduire qu’à la censure... comme en la présente espèce. La règle de conflit n’est décidément pas une règle comme les autres, à tout le moins pour les juges du fond ! Tel est le constat que permet de tirer, à première lecture, l’arrêt rendu par la première Chambre civile de la Cour de cassation, le 3 mars 2010. En l’espèce, un banal cas de divorce entre deux époux portugais est à l’origine de l’affaire rapportée. Plus précisément, l’affaire a débuté par l’assignation en France de son mari par une épouse - domiciliée au Portugal depuis 2000 -, sur le fondement de l’article 242 du Code civil, soit une assignation en divorce pour faute. Saisie du litige en cause d’appel, la Cour de Versailles, par application de la loi française, s’est prononcée en faveur d’un divorce aux torts partagés et a condamné l’époux au versement d’une prestation compensatoire. Contestant fort logiquement cette position, l’époux a formé un pourvoi en cassation, dont seul le premier moyen a été examiné par la Cour de cassation. En substance, celle-ci était invitée à se prononcer, une nouvelle fois, sur l’autorité de la règle de conflit de lois et l’étendue de l’office du juge dans sa mise en œuvre. De façon peu surprenante, la Haute juridiction est venue censurer la décision rendue par la Cour de Versailles au motif que cette dernière, “sans rechercher si la loi portugaise se reconnaissait compétente, alors que les deux époux étaient de nationalité portugaise et que l’épouse était, depuis 2000, domiciliée au Portugal”, a violé les dispositions des articles 3 et 309 du Code civil. Pour la Cour régulatrice, en effet, “il résulte du premier de ces textes qu’il incombe au juge français, s’agissant de droits dont les parties n’ont pas la libre disposition, de mettre en œuvre, même d’office, la règle de conflit de lois et de rechercher, au besoin avec le concours des parties, la teneur du droit étranger applicable”. En outre, la Cour rappelle “que selon le second, lorsque l’un et l’autre époux ne sont pas de nationalité française ou domiciliés en France et que les tribunaux français sont compétents pour connaître du divorce, celui-ci est régi par la loi française lorsqu’aucune loi étrangère ne se reconnaît compétente”. Par ce double visa de cassation, la Cour de cassation a rendu un arrêt que l’on peut qualifier d’éminemment pédagogique. Elle vient en effet rappeler que le juge, lorsqu’il est amené à remplir son office dans le domaine du conflit de lois, ne doit pas seulement respecter des préceptes généraux (I). Il doit en effet prendre également en compte les préceptes propres à chacune des règles de conflit qu’il est appelé à mettre en œuvre, préceptes que l’on désignera comme spéciaux (II). 2 I. Les préceptes généraux de l’office du juge rappelés L’attendu de principe qu’a retenu la Cour de cassation dans l’arrêt rapporté procède à un rappel des deux préceptes généraux que cette juridiction a dégagés, au cours des dix dernières années, relativement à l’office du juge dans le domaine du conflit de lois. Ce rappel intéresse ainsi d’abord l’autorité de la règle de conflit de lois en matière de droits indisponibles (A), ensuite la recherche de la teneur de la loi étrangère (B). A. L’autorité de la règle de conflit de lois en matière de droits indisponibles “[…] [I]l incombe au juge français, s’agissant de droits dont les parties n’ont pas la libre disposition, de mettre en œuvre, même d’office, la règle de conflit de lois”. Par cette formule, la Cour de cassation entend une nouvelle fois rappeler que, du point de vue du juge, la mise en œuvre de la règle de conflit de lois est fonction des droits en cause. Autrement dit, l’office du juge est “commandé par la nature des droits litigieux” (B. ANCEL & Y. LEQUETTE, Les grands arrêts de la jurisprudence française de droit international privé, Dalloz, 5e éd., 2006, n° 74-78, spéc. p. 685). L’on reconnaît alors aisément, quoique avec quelques menues variations, la formule qui avait été retenue par la Cour de cassation, pour la première fois, dans son arrêt Belaïd A. (Cass. civ. 1re, 26 mai 1999, Bull. civ. I, n° 174, p. 114 ; Grands arrêts, préc., pp. 675-676). Le principe paraît donc aujourd’hui, onze ans après l’arrêt Belaïd A., nettement fixé. À la question de savoir si, en l’absence d’invocation d’une loi étrangère par l’une au moins des parties, le juge saisi a l’obligation ou au contraire la simple faculté de mettre en œuvre la règle de conflit du for, la réponse est claire : en matière de droits indisponibles (comme le divorce, pour la présente espèce), le juge du for à l’obligation de mettre en œuvre la règle de conflit de lois pertinente. Cela explique ainsi (pour partie, v. infra, II) la mention de l’article 309 du Code civil dans le visa de l’arrêt rapporté. La solution de compromis que la Cour de cassation avait entérinée dans son arrêt du 26 mai 1999 (et dans son “faux jumeau”, du même jour : Cass. civ. 1re, 26 mai 1999, Soc. Mutuelles du Mans IARD, Bull. civ. I, n° 172, p. 113 ; Grands arrêts, préc., p. 675), après les hésitations du “tout facultatif [au] tout obligatoire” (B. ANCEL & Y. LEQUETTE, op. et loc. cit.) de l’arrêt Bisbal à la jurisprudence Rebouh - Schule (Cass. civ. 1re, 12 mai 1959, Bisbal ; Cass. civ. 1re, 11 octobre 1988, Rebouh, Bull. civ. I, n° 278, p. 190 ; Cass. civ. 1re, 18 octobre 1988, Schule, Bull. civ. I, n° 293, p. 199, Grands arrêts, n° 74-78, préc.), paraît donc bien avoir vocation à s’inscrire dans la durée. L’on observera enfin que le changement qu’avait opéré l’arrêt Belaïd A. par rapport à l’arrêt Rebouh - sur le plan du fondement juridique de l’autorité de la règle de conflit de lois vis-à- vis du juge -, est pareillement entériné : l’article 3 du Code civil paraît également avoir définitivement supplanté l’article 12 du Code de procédure civile sur ce point. Il semble toutefois que la souplesse et la malléabilité qu’offre le fondement actuel (sur cette question, v. H. MUIR WATT & D. BUREAU, Droit international privé, t. I, Partie générale, PUF, Coll. Themis droit, 2007, n° 377, spéc. pp. 374-376), que la Cour de cassation paraît affectionner du point de vue de l’autorité de la règle de conflit, ne soit pas privilégiée au stade ultérieur de la recherche de la teneur de la loi étrangère. 3 B. La recherche de la teneur de la loi étrangère En sus de l’obligation qui lui incombe, en matière de droit indisponibles, de mettre en œuvre la règle de conflit de lois, le juge voit également peser sur lui une seconde obligation : il lui faut en effet, aux termes du présent arrêt, “rechercher, au besoin avec le concours des parties, la teneur du droit étranger applicable”. Une fois encore, la formule employée dans cet attendu de principe, partiellement reproduit, rappelle indéniablement celle que la Chambre commerciale de la Cour de cassation avait utilisée dans son fameux arrêt Soc. Itraco (Cass. com., 28 juin 2005, Bull. civ. IV, n° 138, p. 148, Grands arrêts, préc., n° 82-83 - Fasc., doc. 22, p. 136. Du même jour, v. aussi Cass. civ. 1re, 28 juin 2005, Aubin, Bull. civ. I, n° 289, p. 240 - Fasc., doc. 21, pp. 135-136). Cette position ne peut d’ailleurs qu’être approuvée. En effet, chaque fois que le droit étranger désigné demeure hors de portée, “celui-ci ne pourra être mis en œuvre et la règle de conflit aura tourné à vide” (B. ANCEL & Y. LEQUETTE, op. cit., n° 82-83, p. 721). Aussi ne peut-on que se féliciter du fait que la Cour de cassation ait entendu une nouvelle fois assurer l’efficacité de la mise en œuvre de la règle de conflit par la garantie d’une recherche de la teneur de la loi étrangère désignée comme applicable. Il reste toutefois qu’aux termes des principes dégagés dans la jurisprudence Aubin - Itraco, l’obligation faite au juge de procéder à pareille recherche de la teneur de la loi étrangère est indépendante du point de savoir si l’on se situe ou non en matière de droits disponibles ou indisponibles. La formule usitée est en effet très générale (“[…] il incombe au juge français qui reconnaît applicable uploads/S4/ dip-dst-3-corriges.pdf

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  • Publié le Mar 31, 2021
  • Catégorie Law / Droit
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