1 CAPAVOCAT DROIT INTERNATIONAL PRIVE CORRIGE DU DST n° 4 DU SAMEDI 21 AOÛT 200
1 CAPAVOCAT DROIT INTERNATIONAL PRIVE CORRIGE DU DST n° 4 DU SAMEDI 21 AOÛT 2009 Proposition de correction relative aux cas pratiques Cas n° 1 : (sur 8 points) AMOSA est confrontée à trois questions de droit : - les effets d’une répudiation unilatérale à son encontre (§ 2) ; - l’opportunité d’un divorce ou d’une annulation de son mariage avec ABOUO (§ 3) ; - le juge compétent s’agissant de cette désunion (§ 1). Avant de répondre à ces trois questions, précisons d’emblée que la situation à laquelle nous sommes confrontés est une situation internationale. Certes, AMOSA et ABOUO ont acquis la nationalité française et avaient leur domicile commun à Paris. Toutefois, au moment où ils se sont mariés, AMOSA n’avait que la nationalité camerounaise et ABOUO la seule nationalité ivoirienne. En outre, en répudiant AMOSA, ABOUO a mis en œuvre une institution de droit musulman qui lui était ouverte dans son État d’origine. Enfin, ABOUO vit désormais en Côte d’Ivoire. Dans ces conditions, nul doute que le litige présente des éléments d’extranéité. Avant de pouvoir mettre en œuvre les règles issues du droit international privé français, il convient de vérifier, comme le demande d’ailleurs AMOSA, si le juge français est compétent pour connaître de son action en désunion. § 1 – La compétence du juge français pour connaître de l’action en désunion (2 points) AMOSA veut être certaine que le juge français se reconnaîtra bien compétent pour connaître de son action en désunion à l’encontre d’ABOUO. En matière de désunion, il existe un règlement européen qui unifie les règles de compétence juridictionnelle au sein de l’Union européenne : le Règlement n° 2201/2003 du 27 novembre 2003, dit « Bruxelles II bis ». Or, il convient de noter que ce Règlement a vocation à s’appliquer très largement. Ratione materiae d’abord, il vise toutes les actions relatives à la dissolution du mariage (divorce, séparation de corps et annulation du mariage) et les actions relatives aux mesures de protection de l’enfant. Ratione temporis ensuite, il vise toute action en désunion diligentée après le 1er mars 2005 (date de son entrée en vigueur). S’agissant de sa délimitation spatiale enfin (ratione loci), le Règlement n° 2201/2003 ne prévoit aucun critère d’applicabilité dans l’espace. Il n’est en effet pas réservé, à la différence du système instauré par le Règlement « Bruxelles I », aux litiges intégrés à l’Union. Cet instrument s’applique donc dès lors que les juridictions d’un État membre sont compétentes en vertu des règles qu’il pose. 2 À cet égard, rappelons que l’article 3, paragraphe 1, a) du Règlement prévoit sept chefs de compétence alternatifs, et dispose notamment que sont compétentes pour statuer sur les questions relatives au divorce, les juridictions de l’État membre sur le territoire duquel se trouve « la dernière résidence habituelle des époux dans la mesure où l’un d'eux y réside encore ». En l’espèce, nul doute que les champs d’application matériel et temporel du Règlement du 27 novembre 2003 sont remplis : AMOSA souhaite agir en divorce (voire en annulation de mariage) et l’on se situe clairement après le 1er mars 2005. Par ailleurs, il est indiqué qu’AMOSA tourne en rond « dans le grand appartement qu’elle a acheté avec son époux ». Elle réside donc toujours au lieu de la dernière résidence habituelle occupée par le couple à Paris. Par suite, d’après le Règlement n° 2201/2003, le juge français sera bien compétent pour connaître de l’action en désunion mise en œuvre par AMOSA. La jeune femme peut donc être rassurée. § 2 – Les effets de la répudiation unilatérale à l’encontre d’AMOSA (2 points) Après avoir eu une attitude relativement souple dans l’accueil des répudiations unilatérales prononcées à l’étranger, la Cour de cassation française a adopté ces dernières années une attitude plus sévère. Plus précisément, elle a jugé que les répudiations unilatérales qui bénéficiaient au seul mari étaient contraires à l’ordre public français dans la mesure où elles contreviennent au principe d’égalité des époux posé par l’article 5 du Protocole du 22 novembre 1984, n° 7, additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme (Cass. civ. 1re, 17 févr. 2004 - Fasc., doc. 47 ; Cass. civ. 1re, 25 oct. 2005 - Fasc., doc. 48 ; Cass. civ. 1re, 3 janv. 2006 - Fasc., doc. 49 ; Cass. civ. 1re, 10 mai 2006). Si les premiers arrêts ont justifié leur solution par la présence du domicile des époux en France, l’arrêt du 10 mai 2006 a bien précisé que la répudiation unilatérale contrevenait aussi à l’ordre public international français « spécialement lorsque les deux époux sont de nationalité française ». Ajoutons que, dans la grande majorité des cas, le mécanisme même de la répudiation unilatérale suffit à faire apparaître l’inégalité existant entre les deux époux… c’est dire si une telle répudiation a peu de chance d’être désormais reconnue en France. En l’espèce, AMOSA et ABOUO ont la nationalité française et leur domicile commun à Paris. En outre, la répudiation est intervenue de manière unilatérale, en Côte d’Ivoire, alors qu’AMOSA était restée en France. Autrement dit, on peut supposer qu’elle n’a pas eu son mot à dire. Compte tenu de ces éléments et de la jurisprudence qui a été invoquée, il est raisonnable de penser que les juges français estimeront que ladite répudiation n’est pas conforme à la conception française de l’ordre public international et qu’ils ne lui reconnaîtront donc aucun effet dans l’Hexagone. AMOSA peut donc à nouveau être rassurée sur ce point. § 3 – Le choix entre le divorce ou l’annulation du mariage (4 points) AMOSA hésite à demander l’annulation du mariage ou à divorcer. Il s’agit de lui conseiller la meilleure solution. Il faut donc étudier ces deux possibilités. En premier lieu, l’annulation du mariage. 3 Pour l’obtenir, AMOSA invoque le fait que le mariage n’a pas été célébré religieusement. Il convient alors de rappeler que l’annulation est la sanction d’une condition de formation du mariage. Ainsi, la possibilité d’obtenir l’annulation du mariage doit donc être examinée, avant tout, au regard de la loi applicable à la forme de ce mariage. Sur ce dernier point, l’on sait que la loi applicable à la forme du mariage est la loi du lieu de célébration du mariage, la lex loci celebrationis, solution posée par le célèbre arrêt Caraslanis (Cass. civ. 1re, 22 juin 1955, Grands arrêts, n° 27) et réaffirmée depuis lors (Cass. civ. 1re, 29 sept. 2004 - Fasc., doc. 40). La référence à l’arrêt Caraslanis est d’ailleurs doublement importante en la cause, étant donné que cette décision a aussi indiqué que la célébration religieuse du mariage était une condition de forme. En l’espèce, le mariage entre AMOSA et ABOUO ayant été célébré en France, la loi applicable à la forme de ce mariage est par conséquent la loi française. Or, en droit français, le mariage est parfaitement valable alors même qu’il n’aurait pas été célébré religieusement. Ainsi, le fait que le mariage n’ait pas été célébré religieusement n’est pas une cause de nullité du mariage au regard de la loi française. Partant et en l’absence d’éléments supplémentaires, il semble d’ores que la voie de l’annulation du mariage ne soit pas véritablement pertinente pour AMOSA, dans la mesure où, au regard du droit français, elle ne pourra pas l’obtenir : son mariage n’a pas en effet été célébré religieusement. Remarque : en l’espèce et en l’absence de toute indication sur ce point, on peut supposer que les conditions de fond du mariage, régies par la loi nationale de chaque époux, à savoir les lois ivoirienne et camerounaise (Cass. civ. 1re, 19 sept. 2007 – Fasc., doc. 35), sont satisfaites. Vérifions à présent, en second lieu, si le divorce paraît plus adapté. En la matière, le texte pertinent est l’article 309 du Code civil. Il dispose que la loi française revendique son application pour régir un divorce lorsque l’un et l’autre époux sont de nationalité française, lorsque les époux ont, l’un et l’autre, leur domicile sur le territoire français ou lorsqu’aucune loi étrangère ne se reconnaît compétence alors que les tribunaux français sont compétents pour connaître du divorce ou de la séparation de corps. La Cour de cassation a en outre précisé, s’agissant du champ d’application de cet article, que lorsque les individus intéressés ont la double nationalité, seule la nationalité française doit être prise en considération (Cass. civ. 1re, 13 oct. 1992, Camara). En l’espèce, ABOUO et AMOSA ont chacun une double nationalité, dont la nationalité française. Aussi et conformément au principe posé par l’arrêt Camara, c’est cette nationalité qui sera seule prise en considération par le juge français. En d’autres termes, le juge français considérera qu’ABOUO et AMOSA ont une nationalité commune : la nationalité française. Partant, en application de l’article 309 du Code civil, le droit français sera applicable au divorce d’AMOSA et d’ABOUO. Celle-ci peut ainsi espérer bénéficier du divorce pour faute dans la mesure où ABOUO n’a pas agi conformément au devoir de fidélité et de respect qui lui est imposé par l’article 212 du Code civil. En effet, uploads/S4/ dip-dst-4-corriges 1 .pdf
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- Publié le Dec 09, 2022
- Catégorie Law / Droit
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