1 ** Fiche d’arrêt **  Les références de l’arrêt : l’arrêt n° 246 de la Cour d

1 ** Fiche d’arrêt **  Les références de l’arrêt : l’arrêt n° 246 de la Cour de cassation en date du 7 mai 2008 concernant le pourvoi n° 154/2/1/2007. (la chambre n’est pas spécifiée)  Les faits : des héritiers contestent la filiation paternelle d’une femme après le décès de son présumé père au motif que le défunt était stérile et que son nom de famille est différent de celui que porte l’héritière contestée. Le défendeur affirme que son nom figure sur le livret de famille du défunt et que ce dernier était présent en tant que tuteur matrimonial lors de la conclusion de son acte de mariage.  La procédure : le tribunal de première instance de Sidi Slimane a été saisi le 3 août 2005. Après avoir rejeté la demande des héritiers, ces derniers interjettent appel auprès de la Cour d’appel de Kenitra. Dans un arrêt confirmatif en date du 30/01/2007, la Cour les déboute à nouveau de leur demande et décident de se pourvoir en cassation. La Cour de cassation rejette le pourvoi en date du 7 mai 2008.  Les prétentions des parties : les demandeurs réclament leur droit à contester la filiation paternelle de l’héritière au motif que les rapports conjugaux (Al Firach) ne sont pas assortis des conditions requises pour l’application de l’article 153 du code de la famille (CF), étant donné qu’ils ont présenté un certificat de stérilité du défunt.  Le moyen au pourvoi : les demandeurs reprochent à la Cour d’appel le recours à l’article 153 du CF pour les débouter de leur demande alors que les conditions de preuve des rapports conjugaux qui y figurent ne sont pas réunies. En d’autres termes, contester une filiation paternelle ne peut pas être strictement réservé au père que lorsque les rapports conjugaux sont assortis de leurs conditions. 2  Le problème de droit : peut-on contester une filiation paternelle après le décès du présumé père ?  La motivation de la Cour de cassation : seul le père a le droit d’agir pour désavouer une filiation paternelle et ce droit n’est transmissible aux héritiers que si l’action avait été initiée de son vivant. Or, la présence du défunt en tant que tuteur matrimonial lors de la conclusion de l’acte de mariage du défendeur est considérée comme un aveu qui constitue, de facto, un des trois moyens de preuve de la filiation prévus par l’article 152 du CF.  La décision de la Cour de cassation : la Cour de cassation a rejeté le pourvoi en estimant que la Cour d’appel de Kenitra a correctement appliqué les dispositions du CF. 3 ** Commentaire d’arrêt ** De nos jours, « la filiation, est devenue une notion de sentiments beaucoup plus que de gènes », comme aime le dire l’écrivain Jean Castaldi. Cependant, quand des enjeux financiers sont en jeu, qu’elle trouve son fondement dans les gènes ou dans les sentiments, la filiation ne tarde pas à être contestée auprès des juridictions compétentes pour faire valoir des droits. C’est le cas dans l’affaire étudiée où un litige a opposé des héritiers à une héritière dont la filiation paternelle a été contestée après le décès de son présumé père. Pour désavouer sa filiation, les demandeurs ont avancé comme moyen de preuve contraire la stérilité du défunt et la discordance de son nom de famille avec celui de l’héritière contestée. Le défendeur a réfuté ces allégations en affirmant que son nom figure sur le livret de famille du défunt et que ce dernier était présent, en tant que tuteur matrimonial, lors de la conclusion de son acte de mariage. Après avoir saisi le tribunal de première instance de Sidi Slimane en date du 3 aout 2005, ce dernier a rejeté la demande des héritiers. Après avoir interjeté appel, un arrêt confirmatif de la Cour d’appel de Kenitra les déboute à nouveau de leur demande en date du 30 janvier 2007. Ainsi, ils se pourvoient en cassation et la Cour de cassation rejette le pourvoi par un arrêt en date du 7 mai 2008. Cette affaire nous conduit à nous interroger sur un problème de droit qui impacte les dévolutions successorales et la stabilité des liens familiaux, à savoir : peut-on contester une filiation paternelle après le décès du présumé père ? 4 La Cour de cassation a motivé le rejet du pourvoi en estimant qu’une action destinée à désavouer une filiation paternelle n’est transmissible aux héritiers que si elle avait été initiée du vivant du présumé père. De plus, la Cour a considéré la présence du défunt à l’acte de mariage du défendeur, en tant que tuteur matrimonial, comme un aveu de filiation qui est un des trois moyens de preuve prévus par l’article 152 du code de la famille (CF). Afin d’apporter des éléments de réponse au problème de droit susmentionné, il conviendra d’étudier dans un premier temps la faisabilité de contester une filiation paternelle qui découle des rapports conjugaux (A) avant de jeter la lumière sur la possibilité de désavouer une filiation paternelle ayant l’aveu comme moyen de preuve (B). A- La contestation de la filiation paternelle qui découle des rapports conjugaux. A ce niveau, seront étudiées les conditions requises pour disposer du droit d’agir au regard de l’article 153 du CF (1) avant d’aborder les limites que pose l’application dudit article (2). 1- Du droit d’agir La filiation paternelle exprime le lien légitime qui unit le père à son enfant. Elle se transmet de père en fils et s’établie par la présomption. Le CF a prévu, dans son article 152, trois moyens de preuve desquels découle cette filiation. Les rapports conjugaux (Al Firach) en constituent un. Dans l’article 153 du CF, il est clairement stipulé que lorsqu’ils sont assortis de leurs conditions, ces rapports constituent une preuve irréfutable d’établissement de la filiation paternelle qui ne peut être contestée que par le mari suivant une procédure déterminée et sous réserve de certaines conditions. D’ailleurs, la Cour de cassation s’est basé sur cet article pour rejeter le 5 pourvoi en estimant que la Cour d’appel a fait une application juste des dispositions du CF. A supposer que le demandeur ait la qualité d’agir et l’intérêt d’agir, le droit d’agir pour désavouer une filiation paternelle qui trouve son fondement dans les rapports conjugaux ne peut se réaliser que si les conditions requises pour l’application de l’article 153 ne sont pas réunies. Autrement dit, les cas où les rapports en question ne sont pas assortis de leurs conditions. Or l’alinéa 1° de cet article stipule que «les rapports conjugaux sont prouvés par les mêmes moyens que le mariage ». En d’autres termes, par la réunion des conditions stipulées dans l’article 13 du CF auxquelles est subordonnée la conclusion du mariage. Au regard de l’attestation de stérilité fournie par les demandeurs et qui sous-tend une incapacité, la condition qui nous intéresse est celle de la capacité de l’époux. Mais en l’absence de précision quant à la nature de cette capacité figurant à l’article 13 du CF, on peut deviner que le législateur fait référence à la capacité matrimoniale qui s'acquiert, aux termes de l’article 19, à dix-huit ans grégoriens révolus pour ceux et celles jouissant de leurs facultés mentales. Ainsi, vu que rien n’indique que le défunt ait été dépourvu de ses facultés mentales au moment de son mariage et qu’il avait un âge légal lui permettant de se marier, la stérilité du défunt, si elle était légalement prouvée, n’exclue pas la capacité matrimoniale dans la mesure où elle n’empêche ni le mariage tel que défini par l’article 4 du CF, ni la réalisation de ses objectifs (la vie dans la fidélité réciproque, la pureté et la fondation d'une famille stable sous la direction des deux époux) vu que rien ne stipule que fonder une famille stable est corrélé à l’obligation d’avoir une descendance. Il s’en suit que la Cour d’appel de Kenitra a fait une juste application de l’article 153 pour rejeter la demande des héritiers et c’est ce qu’a été confirmer par la Cour de cassation. Néanmoins, force est de constater que le texte de l’article 153 se prête à la critique. 6 2- Les limites à l’application de l’article 153 du CF. Au niveau de l’article 153 (alinéa 1°), le législateur a lié la preuve des rapports conjugaux aux moyens de preuve requis pour la validité du mariage alors qu’il s’agit de deux aspects de la vie conjugale qui ne requièrent pas les mêmes prérequis. Si les conditions auxquelles est subordonné le mariage (l’article 13 du CF) paraissent pertinentes au regard de la loi islamique et au regard du bon sens, la situation est loin d’être réaliste lorsque le législateur conditionne la preuve des rapports conjugaux comme moyen irréfutable de la filiation paternelle à la réunion de ces mêmes conditions. Ainsi, il aurait été judicieux d’avoir séparé les conditions de preuve de chaque aspect de la vie conjugale et de conditionner la preuve d’Al Firach par une double capacité physique et biologique telles que les définies uploads/S4/ exemple-fiche-d-x27-arret.pdf

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  • Publié le Dec 31, 2022
  • Catégorie Law / Droit
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