Introduction aux activités de résolution en ligne des litiges de la société de

Introduction aux activités de résolution en ligne des litiges de la société de l’information dans le cadre européen1 Timothy Fenoulhet Direction générale de la société de l’information Commission Européenne Le développement de la société de l’information et l’essor fulgurant du commerce électronique ne pourront aller sans litiges, et donc sans créer chez les parties concernées de nouveaux besoins en matière de résolution, dont certains ont d’ores et déjà fait leur apparition. Il devient donc de plus en plus important de mettre des moyens équitables et efficaces à la disposition de la résolution des litiges de la société de l’information, d’autant plus que bon nombre d’entre eux se joueront des frontières, qu’elles soient géographiques ou juridictionnelles. De surcroît, la mise en place de mesures de redressement faciles d’accès ne peut que contribuer à instaurer un climat de confiance dans l’Internet, confiance indispensable à l’expansion du commerce électronique. L’Union Européenne a reconnu à plusieurs reprises la justesse de ces observations, notamment à l’occasion du Conseil Européen Spécial de Lisbonne, en mars 2000. À Lisbonne, le Conseil Européen a invité « la Commission et le Conseil à réfléchir aux moyens de promouvoir la confiance des consommateurs dans le commerce électronique, notamment par de nouveaux systèmes de règlement des litiges ». Lors du Conseil Européen de Feira, en juin 2000, le plan d’action eEurope, qui fait précisément de ce dernier aspect l’un de ses axes majeurs, a été avalisé. Dans sa communication du 13 mars 2001, « eEurope 2002 : Impact et Priorités »2, la Commission a pris bonne note des progrès accomplis dans la mise en œuvre du plan d’action eEurope et a présenté une liste de domaines prioritaires nécessitant une plus grande attention. Parmi ceux-ci, la Commission a souligné qu’il était « urgent de développer rapidement les systèmes de règlement en ligne des litiges et les codes de conduite pour le commerce électronique dans l'UE et au niveau mondial afin d'accroître la confiance du consommateur et la prévisibilité commerciale ». La Commission a annoncé qu’elle ferait des « propositions concrètes sur la manière de promouvoir le développement et la diffusion de ces systèmes ». Lors du Conseil Européen de Stockholm des 23 et 24 mars 2001, la Commission a également affirmé, dans les conclusions de la Présidence, son « intention de proposer (...) une communication sur la promotion de systèmes de règlement des litiges en ligne ». Cette communication est en cours de préparation. **** Le règlement des litiges dans la société de l’information : la dimension transnationale et les alternatives au système judiciaire Tout comme dans le monde réel, nous pouvons nous attendre en ligne à des formes variées de litiges, qui font déjà, d’ailleurs, leur apparition. Comme dans le monde réel aussi, ces litiges interviennent généralement entre des entreprises, ou entre des entreprises et des consommateurs, dans le cadre de relations contractuelles. 1 Nota : Les remarques exprimées dans cet article représentent les avis personnels de l’auteur, et pas nécessairement la position officielle de la Commission Européenne. 2 COM(2001)140 final Mais il existe aussi de nouvelles formes de litiges, entièrement propres au monde électronique et à la société de l’information. Un exemple notable, les litiges sur les noms de domaine, également connus sous le nom de cybersquatting, mais d’autres aspects risquent de poser problème : l’utilisation abusive d’informations à caractère personnel (atteinte à la vie privée), la responsabilité du contenu, la diffamation, les violations de droits de propriété intellectuelle, par exemple celles de contenu Web et de logiciels. Autre dimension des litiges de la société de l’information : ils tendront de plus en plus à impliquer des parties situées de part et d’autre des frontières géographiques (et juridictionnelles). Cette dimension transnationale accentue encore la complexité du règlement des litiges, car elle implique pour les parties des frais supplémentaires et l’insécurité juridique, sans compter d’interminables et tortueuses délibérations sur la juridiction ou le droit à appliquer. Ces incertitudes et leur impact sur la confiance des consommateurs dressent un obstacle majeur à l’expansion du commerce électronique en Europe. Là encore, dans le monde réel, nous avons observé ces dernières années un usage accru, de la part des entreprises comme des citoyens, des solutions extrajudiciaires de résolution des litiges. Parmi les exemples typiques de celles-ci, on compte la négociation, la médiation/conciliation et l’arbitrage, qui parviennent souvent à rapprocher les parties et à les aider à résoudre leurs différends rapidement et à l’amiable, sans nécessiter un recours coûteux devant les tribunaux. Ces modes alternatifs de résolution des litiges sont communément appelés ADR, pour Alternative Dispute Resolution. Pourtant, avec l’essor des transactions transnationales, les instances ou services ADR, qui nécessitent traditionnellement un contact personnel, doivent eux aussi être adaptés à l’univers de l’Internet. L’ODR est peut-être la solution De fait, vu la popularité croissance du commerce électronique et la multiplication des transactions transfrontalières qui s’ensuit, et qui devrait encore s’accélérer au sein de l’Union avec l’introduction de l’euro et le marché intérieur, l’on s’intéresse de plus en plus aux technologies de l’information et de la communication pour une résolution en ligne des litiges (ODR, pour Online Dispute Resolution), particulièrement en ce qui concerne la résolution des litiges transnationaux sur l’Internet. De surcroît, l’ODR peut aussi jouer un rôle dans la résolution des litiges hors ligne – entre autres sur le marché intérieur – et faciliter ainsi la tâche des diverses instances ADR, notamment dans les secteurs auto- régulés comme les services financiers. Le difficile débat sur la juridiction et le droit applicable sur l’Internet a souligné ce potentiel, notamment au moment de l’adoption de la « réglementation de Bruxelles »3. Une convention internationale, la Convention de la Haye, est en cours de rédaction4. L’ODR est considéré comme une solution possible, pour éviter d’une part d’exposer les entreprises en ligne aux juridictions de tous les pays étrangers à partir desquels les internautes peuvent accéder à leur site Web (pays de destination) et, de l’autre côté, pour éviter d’obliger les consommateurs à faire appel au tribunal d’un pays étranger - le pays du fournisseur (pays d’origine). En d’autres termes, l’ODR évite la voie judiciaire et, plus encore, la voie judiciaire à l’étranger. Toutefois, si l’une des parties le choisit, ou si la procédure d’ADR s’achève sans accord, l’option judiciaire reste ouverte. 3 http://www.europa.eu.int/eur-lex/en/lif/dat/2001/en_301R0044.html 4 http://www.europa.eu.int/comm/justice_home/unit/civil/audition10_01/en/resume_juin_2001.pdf Qu’est-ce que l’ODR ? Les technologies de l’information et de la communication, notamment l’Internet, sont déjà utilisées, principalement en Amérique du nord, comme un véhicule de résolution des litiges par contact en ligne (via site Web, e-mail, vidéo-conférence, etc.) entre les entreprises et les consommateurs, à l’aide d’un médiateur ou d’un arbitre. En règle générale, ces systèmes fournissent un espace Web confidentiel, dans lequel l’affaire peut être traitée, avec un médiateur distant qui facilite l’accord sur un compromis reposant sur les objectifs finaux et les preuves fournies par les parties en litige. Ils sont par exemple utilisés pour des réclamations d’assurance, des remboursements de produits insatisfaisants, des ventes aux enchères en ligne... Les systèmes ODR varient dans leur sophistication (du simple e-mail à la plate-forme Web complexe), mais présentent à la fois avantages et inconvénients. Les avantages : la vitesse, l’efficience, le coût et la capacité à rapprocher les parties situées dans des pays différents ou à une certaine distance l’une de l’autre (rapprochement virtuel). Les inconvénients : la difficulté pour les médiateurs et les parties de trancher un litige sans face-à-face (quoique la vidéoconférence puisse aider) et la nécessité de former les médiateurs aux technologies de l’information et de la communication. Il existe d’autres difficultés techniques, dont le traitement de documents, la confidentialité et la disponibilité de ces services dans différentes langues. L’authentification de l’identité des parties et l’accréditation des médiateurs sont également des questions qui exigeront une certaine attention, sans oublier la viabilité commerciale de ces systèmes, aspect dont il convient de ne pas sous-estimer l’importance. Il peut en effet s’avérer difficile de trouver des business models idoines pour des systèmes aussi onéreux et complexes, particulièrement s’il incombe à des organismes privés de les mettre gratuitement à la disposition des consommateurs. Enfin, l’application des résolutions ODR demeure un obstacle majeur. Les activités de la Commission jusqu’à présent… La Commission travaille activement à promouvoir l’utilisation de l’ADR - spécialement pour régler les litiges de consommateurs. À cet égard, elle a adopté deux recommandations (98/257/CE et 2001/310/EC5) qui énoncent les lignes directrices que doivent mettre en œuvre les instances ADR pour assurer une protection correcte des consommateurs. Ces textes mettent en place un système de notification, par l’entremise duquel les États membres signalent à la Commission les organismes ADR conformes aux normes prescrites. Ces instances sont reliées via un réseau dans les États membres : le réseau extrajudiciaire européen (réseau EJE)6, qui sera soutenu par une infrastructure d’information et de communication facilitant les échanges entre les points de contact et l’accès pour les consommateurs. Ce réseau se compose actuellement des organismes ADR existants, qui ne fonctionnent pas avec la médiation en ligne. La Commission a en outre lancé récemment avec les États membres de l’Union un réseau ADR spécialement destiné aux litiges uploads/S4/ fenoulhet-vf.pdf

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  • Publié le Aoû 06, 2022
  • Catégorie Law / Droit
  • Langue French
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