PARTIE 1ère Le droit objectif __________________________________________ Etudie

PARTIE 1ère Le droit objectif __________________________________________ Etudier le droit objectif suppose tout d’abord une réflexion sur la règle de droit (Chap. 1) et, ensuite, une analyse de ses sources (Chap.2) Chapitre 1 La Règle de Droit 18.- Le droit objectif, a-t-on dit, est un corps de règles (ou normes) générales, impersonnelles et obligatoires destinées à gouverner la vie sociale. Bien qu'elle soit juste, une telle définition s'avère insuffisante pour caractériser le droit car celui-ci n'est pas le seul régulateur de la vie sociale. Il existe bien d'autres sources de commandement et de régulation des rapports humains telles que la morale, la religion, la curiosité, voire le phénomène de mode, dans certains milieux. Comment peut-on alors faire le départ entre la règle juridique stricto sensu et la règle morale ou religieuse? La réponse à cette question impose le recensement des différentes caractéristiques de la règle de droit afin de déterminer son critère d'identification (Section I). Mais une fois la règle juridique identifiée, nous nous interrogerons sur son but (Section II) et surtout sur son fondement philosophique (Section III) avant d'opérer une classification des différentes règles de droit afin de les rendre plus facilement accessibles (Section IV). Section – I Identification de la règle de Droit1 ________________________________________ 19.- Une analyse attentive de la règle de droit montre que celle-ci présente des caractères communs avec les règles morales, religieuses ou de courtoisie (§1). Cependant elle comporte une caractéristique qui lui est tout à fait particulière c'est la coercitivité (§ 2). § 1 - Caractères communs à la règle de droit et aux autres règles de conduite sociale2 Trois traits semblent être communs à la règle de droit et aux autres règles de conduite sociale: la généralité, la finalité sociale et l'extériorité. Du fait qu’ils sont communs à ces différentes règles, ces traits ne sauraient servir, seuls, de critère d'identification de la règle juridique. I.- Le caractère de généralité et d'abstraction. 20.- De par sa formulation, la règle le de droit se présente toujours comme un ordre impersonnel adressé par le législateur à un nombre indéterminé de personnes non identifiées (quiconque, toute personne, celui qui, etc.) se trouvant dans la situation particulière qu'il cherche à réglementer: (situation de débiteur, situation de délinquant, situation de commerçant, etc.). 1 Roubier, Théorie générale du droit, 1951 2 Jeammeaud, la règle de droit comme modèle, D. 1990.chr. 199 Cette règle s'adresse à tous les individus (personnes physiques) et aux personnes morales sans viser une personne en particulier car elle a vocation à s'appliquer aux situations juridiques, et non aux personnes qui se trouvent dans ces situations. Ce caractère général et impersonnel fait que la norme juridique s'applique de façon objective (d'où le terme "objectif") indépendamment des personnes visées par son commandement. Exemple: Les règles de droit qui régissent les examens de licence en droit s'appliquent à tous les étudiant-es inscrit-es dans les différentes facultés de droit du pays, peu importe leurs noms, leur nombre, leur sexe, leur origine sociale ou encore leur région. Cependant, il faut signaler que ce caractère de généralité de la norme juridique n'est pas absolu. Car son objet est de réglementer des situations, or ces situations sont par nature délimitées dans le temps et dans l'espace et réduites aux personnes qui s'y trouvent. Par conséquent la règle juridique voit son empire circonscrit aux seules personnes se trouvant dans ces situations. Ainsi si les règles juridiques régissant les examens de licence en droit (situation juridique) concernent tous les étudiants en droit, elles n'ont aucun titre à régir les examens en vue de l’obtention de diplômes d’ingénieur, de journaliste ou d’architecte. On voit donc que cette généralité de la règle n'est pas absolue. Elle est relative. Cependant, il faut se garder de commettre l'erreur de croire que cette relativité lui fait perdre son caractère de généralité. Loin de là ; certaines règles ne concernent, dans la réalité qu'une seule personne, et pourtant elles gardent malgré tout leur caractère de généralité et d'abstraction1. Tel est le cas, par exemple, des règles régissant l'élection d'un chef d'État, par définition unique. Ce caractère de généralité et d'abstraction attaché à la règle de droit s'explique par la nécessité de mettre tous les citoyens sur le même pied d'égalité devant la loi. Car sans lui les gens ne seraient pas égaux devant les droits et les devoirs publics. C’est ce principe d’égalité qui constitue la vraie protection contre les discriminations. Il est reconnu par le droit constitutionnel. En effet, la constitution marocaine du 13 septembre 19962 se réfère, dans son préambule, aux chartes des organismes internationaux3 et proclame le principe d’égalité devant la loi4, quant à la jouissance des droits politiques5, et à l’accès aux fonctions et emplois publics6. « Mais l’égalité n’est pas nécessairement l’uniformité. Il est légitime de traiter différemment en droit ce qui est différent en fait. Le tout est de savoir si la différence de fait justifie la différence de droit7 ». Le principe de généralité et d’abstraction permet, par ailleurs, de distinguer la règle juridique des mesures et décisions individuelles telles que les nominations de fonctionnaires ou les 1 Il y a, certes, un rétrécissement du domaine de la règle de droit qui entraîne, à priori, l’affaiblissement de la protection personnelle contre les discriminations. 2Dahir n° 1-96-141 du 24 août 1996 B.O du n° 4407bis du 26 Août 1996 3 Formulation suivante : « Conscient de la nécessité d'inscrire son action dans le cadre des organismes internationaux, dont il est un membre actif et dynamique, le Royaume du Maroc souscrit aux principes, droits et obligations découlant des Chartes des dits organismes et réaffirme son attachement aux droits de l'Homme tels qu'ils sont universellement reconnus. » 4 Article 5 « Tous les Marocains sont égaux devant la loi. » 5 Art 8 al 1er « L'homme et la femme jouissent de droits politiques égaux. » 6 Article 12 « Tous les citoyens peuvent accéder, dans les mêmes conditions, aux fonctions et emplois publics. » 7 F. Chabas ; Introduction à l’étude du droit. Montchrestien. 1996. 11ème éd. n° 4-2. décisions des tribunaux. Ces décisions et nominations sont strictement personnelles et restent intimement liées aux personnes qu'elles concernent. De même les décisions de justice demeurent personnelles et n'obligent, en principe, que les parties au procès (autorité relative de la chose jugée) quand bien même elles émaneraient de la cour suprême. D'ailleurs la loi interdit aux tribunaux de se prononcer par les décisions générales et abstraites sinon le juge deviendrait législateur et le principe de la séparation des pouvoirs serait sacrifié. Cependant, valable pour marquer la différence entre la norme juridique et la décision individuelle, le caractère de généralité est-il a même de permettre la distinction entre la règle de droit et les autres règles de conduite sociale? La négative ne fait aucun doute, car ce caractère de généralité est inhérent à toute règle quelle qu'elle soit et sans lui, celle-ci ne serait qu'un simple cas d'espèce et non une règle au sens plein du terme. Bien plus, on constate que la règle religieuse est plus générale et plus abstraite que la règle juridique. Les religions monothéistes (Islam, Christianisme et judaïsme) s'adressent à tous les humains sans distinction de nationalité de couleur ou de race. Au vu de tout ce qui précède, on peut conclure que la généralité de la règle juridique est loin d'en constituer le critère déterminant. En est-il de même de sa finalité sociale? Fiche n°5 Christian Atias, Ce que savent les juristes Les états du droit RTD Civ. 2013 p. 315 23. Le « droit positif » oscille en permanence entre la généralité de la règle et la spécialité de la décision. Sa fonction n'est pas de ramener de force le complexe des faits à la simplicité de la règle, le divers à l'unique. Elle est d'extraire, du divers inédit, ce qui peut relever d'une règle commune à une série de cas, afin de fonder une position appropriée. La généralité est seulement la contre-épreuve relative et imparfaite des raisons qui ont paru convaincantes et justifiées ; elle peut en révéler les limites. La place que lui attribue le savoir juridique est déterminante. Il la suppose volontiers supérieure et plus juridique parce qu'elle échappe à l'insaisissabilité du fait et parce qu'elle est la forme donnée aux règles instituées. Cette supériorité est toute relative ; le droit ne se dit pas en général. Pour régir réellement les particuliers et leurs relations, le droit descend du piédestal de la généralité. Les résultats auxquels il parvient ne peuvent être négligés ; ils font partie intégrante du droit le plus positif qui soit. II - La finalité sociale. 21.- Pour Kantorowicz1 « le droit est un ensemble de règles sociales susceptibles d'être employées par un organe de jugement ». Autrement dit, le conflit, le litige, le différend est l'élément clé qui provoque la clarification et l'intervention de la règle, dont la mission devient immédiatement de prévenir l'occurrence de problèmes semblables dans l'avenir2. A première vue, la règle de droit se distingue nettement des règles morales ou religieuses quant à sa uploads/S4/ ied-1.pdf

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  • Publié le Dec 30, 2021
  • Catégorie Law / Droit
  • Langue French
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