Lecture de la publication de Mr Chakib EL OUFIR sur « La Jurisprudence De La Co
Lecture de la publication de Mr Chakib EL OUFIR sur « La Jurisprudence De La Cour Suprême En Matière De Chèque ». I- L’émission du chèque sans provision. 3 questions fondamentales : 1- L’élément moral : L’art. 543 du CP parle d’émission , de mauvaise foi, d’un chèque sans provision, tandis que l4ART. 316 du CC incrimine le tireur qui a omis de constituer ou de maintenir la provision du chèque en vue de son paiement à la présentation. Le CC a purement et simplement supprimé la mauvaise foi en tant qu’élément constitutif de cette infraction (la jurisprudence a toujours considéré que l’omission ou la négligence de constituer une provision est une mauvaise foi. 2- Le concept d'émission Une controverse a eu lieu autour de la question suivante : la provision doit-elle exister au moment de la création du chèque (signature), ou lors de la remise du chèque au bénéficiaire ou doit-elle exister seulement au moment de la présentation. Alors que le dahir du 19 janvier 1939 formant législation sur le paiement du chèque dispose que le tiré doit avoir des fonds à la disposition du tireur au moment de la création du titre, la jurisprudence a été partagé entre le moment de la remise du chèque au bénéficiaire et entre le moment de sa création, pour déterminer le moment ou la provision doit exister. L‘article 316 du CC est venu lever cette ambigüité en disposant que l’infraction ne se réalise qu’au moment de la présentation du chèque au paiement. B / Institutionnalisation d’une justice bancaire parallèle : Ce processus de privatisation du contentieux du chèque a été désormais amorcé avec la convention interbancaire de 1989 qui avait anticipé dans ce domaine sur l’intervention du législateur. Néanmoins, ce qu’il faut retenir dans ce volet est que, si notre nouveau code se veut être dans le sillage de la loi française de 1991, il y a lieu de rappeler que toute la philosophie de ce nouveau système bancaire sévère en France a été élaborée sur la base de la dépénalisation, alors que notre code n’a fait que greffer ce même système, avec toute sa sévérité, à celui de la justice pénale traditionnelle. Ce faisant, notre code a abouti à un système avec de multiples imperfections qui se dégagent dès la phase de l’ouverture du compte en passant par les modes de régularisation et les interdictions relatives aux comptes collectifs. On s’arrêtera cependant sur deux questions fondamentales qui ont trait à la philosophie même du système. a / Absence de contrôle : Si le système de justice publique offre aux justiciables des garanties par le biais des recours susceptibles d’être exercés contre les décisions judiciaires, il y a lieu de noter que notre code de commerce a concédé aux banquiers la faculté d’exercer leur pouvoir sanctionnateur en toute autonomie, sans aucun contrôle, ni aucune possibilité de recours. Cette situation est d’autant plus regrettable que le déclenchement de cette procédure bancaire est tributaire de l’attitude exclusive des banquiers avec leur pouvoir discrétionnaire d’appréciation de l’existence ou non de la provision et donc des incidents de paiement. Or , dans la pratique , nul n’ignore qu’une grande partie des aléas de la provision est de l’œuvre des banquiers. Il suffit de penser, entre autre, aux problèmes que suscitent les découverts bancaires pour se rendre compte de la gravité de la situation; ceci d’autant plus que dans ces situations la banque se verra en même temps juge et partie. On constatera donc avec étonnement que les promoteurs de notre code, qui se sont d’ailleurs inspirés de la loi française de 1991, n’ont pas jugé nécessaire de reprendre de cette loi cette possibilité de recours à la justice publique offerte aux tireurs face au pouvoir bancaire. b / Inefficacité des mesures de protection des intérêts des bénéficiaires : Il n’est pas de doute qu’en instituant ce système de justice bancaire, le législateur vise à rendre le chèque crédible et vaincre ainsi les réticences des bénéficiaires à recevoir les chèques en paiement de leurs créances. Pour ce faire, le code a mis en place un certain nombre de mesures parmi lesquelles on peut signaler : - la procédure de régularisation qui incite le tireur à désintéresser le bénéficiaire afin de recouvrer sa capacité d'émettre des chèques; - et des sanctions de garantie à l’égard des banques qui doivent payer les chèques malgré l’absence de provision en cas de manquement à leurs diligences envers leurs clients. On remarquera cependant que ces mesures ne peuvent, éventuellement, défendre les intérêts des bénéficiaires que postérieurement aux incidents de paiement; encore puissent-elles aboutir ? Or, il existe de par le monde d’autres systèmes préventifs, inconnus en France, qui font que le chèque est plus crédible dans les pays qui les appliquent et qui, par conséquent, ignorent pratiquement les problèmes des chèques sans provision. Il suffit de penser au système selon lequel les banques accordent de manière contractuelle des garanties de paiement des formules de chèques qu’elles délivrent à leurs clients jusqu’à des plafonds considérables. On peut citer comme exemple le système “EUROCHEQUES” appliqué en Allemagne, en Belgique, au Luxembourg et aux Pays-Bas; le système -au niveau national - “des cartes chèques” en Italie ou de “check card scheme” en Grande Bretagne. Ces systèmes, contrairement à celui que nous avons emprunté de la France, offrent aux bénéficiaires des garanties de paiement de manière préventive et avant tout incident de paiement; ce qui rend le chèque fort acceptable dans ces pays. Le choix donc du Maroc de recourir au “droit comparé” à sens unique démontre de cette réalité qu’il est resté prisonnier du système français dont il n’arrive pas à s’en débarrasser. Malgré que la France a renoncé à ce système et à sa politique criminelle en la matière, le Maroc persévère à défendre cette fonction du chèque que tous les indicateurs, théoriques et pratiques, démontrent de sa fiction. uploads/S4/ lecture-de-la-publication-de-mr-chakib-el-oufir-sur-le-cheque.pdf
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- Publié le Nov 03, 2021
- Catégorie Law / Droit
- Langue French
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