1 | P a g e CAPAVOCAT PROCEDURE CIVILE CORRECTION DU DST n°4 DU LUNDI 23 août 2

1 | P a g e CAPAVOCAT PROCEDURE CIVILE CORRECTION DU DST n°4 DU LUNDI 23 août 2010 SUJET N O 1 : Dissertation : L’expertise et le principe du contradictoire Le principe du contradictoire est consubstantiel au procès (M-A Frison-Roche). Il permet de faire émerger la vérité par la discussion des parties. Il est ainsi impératif que toutes les parties puissent faire valoir son point de vue au juge. Toutefois, lorsque le juge s’appuie sur un rapport d’expertise pour statuer, on peut se demander quelle est l’utilité de la discussion des parties devant lui. En effet, si le juge s’appuie sur une expertise, c’est qu’il s’estime dépourvu des connaissances scientifiques suffisantes pour comprendre les faits du litige. On peut alors craindre qu’il ne comprenne pas pleinement les arguments des parties. L’expertise peut tantôt être judiciaire, tantôt extrajudiciaire. L’expertise judiciaire est une mesure d’instruction qui est ordonnée par le juge lorsque ce denier a besoin des lumières d’un technicien sur les faits du litige. L’expert judiciaire, désigné par le juge, bénéficie ainsi d’un gage d’objectivité et de compétence scientifique, de sorte que son avis a le plus souvent une influence décisive dans la décision du juge. L’expertise extrajudiciaire est, quant à elle, diligentée en dehors des tribunaux. Il s’agit d’une expertise purement privée qui résulte de la volonté commune des parties (expertise amiable) ou de la volonté unilatérale de l’une d’elles (expertise officieuse). Le juge sera alors plus méfiant quant aux conclusions de l’expert extrajudiciaire qui ne présente pas les mêmes garanties que l’expert judiciaire. On pourrait alors en conclure que le principe du contradictoire doit s’appliquer avec plus de vigueur lorsque l’expertise est extrajudiciaire que lorsqu’elle est judiciaire. Pourtant, on constate que la jurisprudence fait une application assouplie du principe du contradictoire en matière d’expertise extrajudiciaire. En effet, elle considère que le principe du contradictoire est respecté dès lors que le rapport de l’expert extrajudiciaire est communiqué à la partie adverse quand bien même elle n’a pas été appelée aux opérations. Par ailleurs, le principe du contradictoire a une telle importance que l’on pourrait penser que sa violation par l’expert judiciaire devrait empêcher le juge d’exploiter le rapport qu’il lui remet. Pourtant, la jurisprudence retient la solution contraire. Pour comprendre ces applications jurisprudentielles du principe du contradictoire à l’expertise, il convient ainsi de revenir sur la soumission de l’expertise au principe du contradictoire (I) puis sur la sanction de sa violation (II). I. La soumission de l’expertise au principe du contradictoire La mise en œuvre du principe du contradictoire diffère suivant qu’elle est extrajudiciaire ou judiciaire. Dans le premier cas, la mise en œuvre du principe du contradictoire suppose seulement la communication régulière du rapport de l’expert privé (A), alors que dans le deuxième, elle exige également la participation des parties à l’expertise, la prise en compte par l’expert judiciaire de toutes leurs observation et la communication par l’expert de toutes les pièces sur lesquels il s’appuie pour établir son rapport (B). A. La communication régulière du rapport d’expertise extrajudiciaire L’article 15 du Code de procédure civile impose aux parties de se communiquer en temps utile les pièces et les arguments sur lesquels elles fondent leurs conclusions. Le principe de la communication régulière s’applique à toutes les phases de la procédure et à toutes les pièces. Dès lors qu’une partie s’appuie, dans ses conclusions, sur le rapport d’un expert extrajudiciaire, il doit procéder le communiquer à la partie adverse en temps utile. L’appréciation de la notion de temps utile relève du pouvoir souverain des juges du fond (C.M., 3 février 2006). De fait, si le temps utile dépendra souvent en pratique de l’importance de la pièce 2 | P a g e ainsi que de son contenu, les parties ne peuvent plus reprocher aux juges du fond de n’avoir pas rejeté un rapport d’expertise communiqué tardivement (Civ. 2e, 22 mars 2006 : en l’espèce, le rapport technique avait été communiqué trois jours avant l’ordonnance de clôture). La partie à laquelle est communiqué tardivement un rapport d’expertise extrajudiciaire doit demander au juge de la mise en état de le rejeter (article 135 CPC), de révoquer l’ordonnance de clôture (article 784 CPC) ou d’ordonner une clôture partielle (article 780 CPC, issu du décret du 28 décembre 2005), faute de quoi, le pourvoi par lequel il contesterait la décision du juge serait irrecevable (Civ. 2e, 24 mai 2007). Au-delà de la communication régulière du rapport de l’expert privé, la jurisprudence a dû se demander si le respect du principe du contradictoire supposait l’invitation de toutes les parties à participer aux opérations d’expertise extrajudiciaire. Depuis un arrêt du 13 avril 1999, la Cour de cassation considère que le principe du contradictoire est respecté dès lors que le rapport est régulièrement versé aux débats contradictoires des parties. Cette solution a par la suite été confirmée (Civ. 1re, 18 octobre 2005 et Civ. 2e, 14 septembre 2006). Cette solution ne peut se comprendre que si l’on se souvient que l’expertise extrajudiciaire n’a pas le même poids dans le procès que l’expertise judiciaire. En effet, contrairement au rapport d’expertise judiciaire, il ne s’agit que d’une pièce parmi d’autres sur laquelle le juge ne saurait s’appuyer exclusivement pour fonder sa décision. La Cour de cassation estime en effet que cela serait contraire au principe de l’égalité des armes qui découle de l’article 6§1 CEDH (Civ. 3e, 3 février 2010). B. La participation et la discussion des parties au cours de l’expertise judiciaire L’expertise judiciaire est une mesure d’instruction. A ce titre, elle peut fonder à elle seule la décision du juge. C’est en raison de sa particulière importance dans le processus juridictionnel que l’article 160 du Code de procédure civile prévoit que l’expert judiciaire doit convoquer les parties à toutes les opérations d’expertise. En effet, la jurisprudence considère que le seul versement du rapport à la discussion des parties ne suffit pas à satisfaire le respect du principe du contradictoire (Civ. 2e, 20 décembre 2001). Il faut, pour que le rapport d’expertise judiciaire soit opposable à toutes les parties, qu’elles aient toutes été appelées ou représentées à toutes les opérations d’expertise (Civ. 3e, 22 juin 2005). La seule convocation des parties par l’expert judiciaire à la première opération est insuffisante à le rendre opposable (Civ. 1re, 9 juin 1981). La Cour de cassation fait du reste une application très stricte de l’article 160 CPC en imposant à l’expert judiciaire le respect du formalisme pour convoquer les parties. Celles-ci peuvent l’être oralement à la fin d’un rendez-vous et à défaut, elles doivent l’être par lettre recommandée avec accusé de réception (Civ. 3e, 7 février 2007). Néanmoins, lorsque les opérations sont purement techniques, la présence des parties aux opérations n’est pas utile, de sorte que l’expert n’est pas tenu de les convoquer. Ce sera par exemple le cas de l’expertise génétique ou encore graphologique. Il faut tout de même que le principe du contradictoire soit respecté et la Cour de cassation exige alors que l’expert communique aux parties le résultat de ses investigations techniques (Civ. 2e, 28 février 2006). La participation des parties aux opérations d’expertise judiciaire doit leur permettre de discuter des faits avec l’expert judiciaire lui-même. Ce dernier doit ainsi prendre en compte toutes leurs observations (art. 276 CPC). Toutefois, pour combattre la pratique de certains plaideurs qui formulaient une très grande quantité d’observations, le pouvoir réglementaire a ajouté en 2005 un deuxième alinéa à l’article 276 CPC qui permet à l’expert judiciaire de fixer un délai aux parties pour formuler leurs observations. Suivant le même mécanisme qu’une ordonnance de clôture, l’expert n’est pas tenu de prendre en compte les observations faites après l’expiration de ce délai, sauf s’il existe une cause grave et dûment justifiée de retard. Dans le même esprit, le pouvoir réglementaire a également ajouté un alinéa 3 au même article prévoyant désormais que les observations des parties doivent être récapitulatives. En pratique, pour s’assurer du respect du principe du contradictoire, les experts ont pris l’habitude de remettre aux parties un « pré-rapport », qui est un projet de rapport définitif et qui permet aux parties de réagir en temps utile. 3 | P a g e C’est également pour permettre la discussion avec les parties que l’expert doit leur communiquer tous documents sur lesquels il s’appuie pour établir son rapport, même lorsqu’ils proviennent d’un tiers au procès (Civ. 3e, 26 mai 2009). De même, l’expert qui a annexé à son rapport celui d'un confrère, expert privé, doit le communiquer aux parties, même si de dernier a été étroitement associé aux opérations d'expertise et que son rapport n'est que la reproduction de ce qui a été affirmé pendant les réunions d'expertise (Civ. 2e, 21 janvier 2010). L’application du principe du contradictoire en matière d’expertise judiciaire est plus stricte qu’en matière d’expertise extrajudiciaire car son influence dans la décision du juge est bien supérieure. Bien souvent, le rapport de l’expert judiciaire est en pratique intégré dans la décision du juge. Cela se comprend puisqu’en ordonnance l’expertise judiciaire, le juge fait l’aveu de ne pas pouvoir uploads/S4/ pciv-dst-4-corriges.pdf

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  • Publié le Sep 23, 2021
  • Catégorie Law / Droit
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