55 2. JURIDIQUE Résiliation des contrats de distribution Au regard de la jurisp
55 2. JURIDIQUE Résiliation des contrats de distribution Au regard de la jurisprudence marocaine Au Maroc, le contrat de distribution ne fait pas l’objet d’un régime spécifique. Le contrat de distribution fait partie des contrats innomés soumis à l’application de différentes sources de droit. Les dispositions du droit commun du Dahir formant Code des Obligations et des Contrats (ci-après dénommé « DOC ») notamment celles relatives à la formation, conditions de validité et d’exécution du contrat vont s’appliquer naturellement au contrat de distribution. D’autres droits spécifiques vont aussi intervenir comme notamment la loi n° 31-08 édictant des mesures de protection du consommateur ou encore la loi n° 104-12 sur la liberté des prix et de la concurrence. Les contrats de distribution peuvent soulever un certain nombre de difficultés notamment au moment de la fin des relations contractuelles, dans le cadre de la résiliation ou d’un non renouvellement du contrat de distribution. En effet, la fin d’un contrat de distribution avec un partenaire stratégique, dont la relation commerciale ou contractuelle, s’avère plus ou moins établie dans le temps, peut être source de litiges et de risques judiciaires pour les parties, notamment pour le concédant. Les enjeux relatifs à la cessation de tels contrats peuvent être dès lors nombreux, notamment juridiques, financiers, sociaux et réputationnels. Ils requièrent des parties, une diligence particulière tant en amont, lors de la phase rédactionnelle, qu’en aval, une fois la rupture consommée pour aménager un risque de contentieux dans la mesure où aussi bien la jurisprudence marocaine ou la jurisprudence française est tatillonne sur les conditions et circonstances de cette rupture. C’est dans ce contexte que le présent article tente de faire un focus sur la résiliation des contrats de distribution à la lumière de la position prétorienne à leur égard et des conséquences de cette rupture que les parties ont intérêt à anticiper et à gérer. 1. Conditions de résiliation d’un contrat de distribution 1.1. Résiliation des contrats à durée déterminée La plupart des contrats de distribution sont conclus pour une durée déterminée. Le terme a un effet extinctif. Il met fin aux obligations réciproques des parties. Chaque contractant reprend sa liberté. Le contrat, en tant que loi des parties, doit être exécuté conformément aux accords convenus entre elles. L’article 230 du DOC dispose que : « Les obligations contractuelles valablement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ou dans les cas prévus par la loi ». Au regard du principe de la force obligatoire du contrat, lorsque celui-ci est conclu pour une durée déterminée, chaque partie doit l’exécuter jusqu’à son terme, incluant la période de préavis. L’ensemble des obligations incombant à l’une ou l’autre des parties doivent être scrupuleusement respectées pendant la période de préavis. En cas de manquement à leurs obligations contractuelles, les parties engagent leur responsabilité contractuelle. L’activité de la distribution est une activité économique consistant à acheminer des produits du producteur au consommateur final, dans laquelle différents acteurs interviennent, notamment le producteur, le distributeur et le client final. Le contrat de distribution est un contrat d’affaires fréquemment utilisé par les entreprises à la tête de réseau de distribution et ce, dans tout type de secteur d’activité (automobile, pharmaceutique, grande distribution, etc.). Le contrat de la distribution doit être distingué du contrat de consommation. Le contrat de distribution lie un fournisseur au distributeur et a pour objet l’acheminement des produits vers le consommateur. Alors que le contrat de consommation lie le distributeur au consommateur et a pour objet la satisfaction du consommateur final. Le contrat de consommation est soumis au droit spécial de la consommation, notamment la loi n° 31-08 édictant des mesures de protection du consommateur. LEÏLA BAZZI Directrice Juridique GSK Afrique du Nord Membre fondateur et Présidente du Cercle Marocain des Directions Juridiques LETTRE D’ARTEMIS 1er TRIMESTRE 2020 56 Le contrat à durée déterminée prend fin de manière automatique à l’arrivée du terme, par le seul effet de la force obligatoire attachée aux conventions, sans qu’il y ait besoin de motiver le non-renouvellement du contrat et de dédommager la partie aspirant à renouveler le contrat. Le non-renouvellement est un droit reconnu à la partie qui désire ne pas poursuivre les relations contractuelles qui prennent fin, à leur échéance. Dans le cadre d’un contrat de concession automobile, la Cour d’appel de Casablanca, dans son arrêt 400/1 du 23 janvier 2008 a affirmé : « Est considéré comme un contrat à durée déterminée, le contrat de concession commerciale conclu pour une durée de trois années renouvelables par tacite reconduction, au terme de cette période, pour une durée d’une année. Le concédant n’est pas tenu de motiver sa décision de mettre fin au contrat, et ne peut être condamné au versement de dommages et intérêts pour rupture abusive, dès lors qu’il a respecté le préavis contractuel ». Il résulte de cette décision que le contrat reste à durée déterminée même si les parties conviennent de le renouveler tacitement d’année en année. Le renouvellement du contrat de manière annuelle ne lui enlève en aucun cas son contrat à durée déterminée. Le concessionnaire est ainsi libre de ne pas renouveler le contrat de concession dans le respect des dispositions du contrat, sauf si les conditions de non-renouvellement sont fautives. Le préavis est ainsi indispensable à définir dans les contrats dont le renouvellement s’opère par tacite reconduction. En effet, si à l’arrivée du terme, le fournisseur n’a pas notifié sa volonté de ne pas renouveler le contrat, celui- ci sera automatiquement reconduit. Cela nous rappelle que les contrats à durées successives et marqués par la tacite reconduction, ressemblent sur cet aspect, à leurs « homologues » à durée indéterminée. Les uns et les autres, nécessitent en effet, une action d’au moins une partie pour qu’ils soient terminés. 1.2. Résiliation des contrats à durée indéterminée En présence d’un contrat à durée indéterminée, le principe général de la liberté contractuelle s’applique de plein droit entre les parties. Au regard du principe de prohibition des engagements perpétuels, chaque partie est libre de mettre un terme à tout moment à un contrat conclu à durée indéterminée. Le fournisseur est en droit de rompre un contrat de distribution à tout moment, sauf si les circonstances de la rupture sont abusives. Ce principe de la liberté contractuelle a été renforcé par une jurisprudence constante en la matière. Dans un arrêt du 14 juillet 2004 (Arrêt n°846), la Cour de Cassation a considéré que : « Lorsque le contrat de concession exclusive de vente est conclu pour une durée indéterminée, chacune des parties peut y mettre fin à tout moment sous réserve de respecter un préavis contractuel ou d’usage ». Cet arrêt pose les fondements, la portée et la mise en œuvre du droit de résiliation unilatérale dans une relation contractuelle conclue pour une durée indéterminée. De plus, cet arrêt fait la distinction entre le contrat de concession et le mandat qui se trouve régi par les dispositions de l’article 879 du DOC et qui peut aboutir sur le versement de dommages et intérêts, si la rupture est brusque, imprévisible et intervenue sans préavis. Au cas particulier, le contrat de concession est soumis aux dispositions du droit commun et ne saurait être soumis à des textes régissant les contrats nommés. L’arrêt de la Cour de Cassation précité a par ailleurs confirmé que « l’article 94 du DOC dispose qu’il n’y a pas lieu à responsabilité civile, lorsqu’une personne, sans intention de nuire, a fait ce qu’elle avait le droit de faire, que ces conditions ne sont pas réunies dans l’affaire d’espèce, l’attaquante n’ayant fait qu’exercer son droit de mettre fin à la relation commerciale la liant à l’autre partie, sachant que cette relation ne peut pas durer indéfiniment, qu’a ce résultat illogique que l’arrêt a abouti, que dés lors que chaque partie a le droit de mettre fin à la relation commerciale si elle le désire, dans le respect des conditions de la résiliation, on ne saurait alléguer l’existence d’un abus de droit violant l’accord ». Le contrat étant la loi des parties, une résiliation unilatérale qui serait faite dans le respect des dispositions contractuelles, du respect du délai de préavis convenu entre les parties et sans intention de nuire, n’ouvre droit à aucune indemnisation. Cette jurisprudence constante rejette ainsi toute sanction pour abus de droit en privilégiant les termes du contrat prévoyant un préavis qui a été mis en œuvre sans intention de nuire à l’autre contractant. Néanmoins ce principe doit être relativement tempéré au regard de la spécificité de ce type de contrats d’affaires et des enjeux économiques qu’ils emportent. En effet, bien qu’en principe, l’auteur du non-renouvellement n’ait pas à motiver sa décision, ce droit n’exclut pas la possibilité d’un contrôle judiciaire notamment lorsque le juge est requis pour vérifier un éventuel usage abusif de ce droit et des conséquences négatives qu’il peut engendrer pour la partie qui le subit. 2. La rupture abusive La rupture d’un contrat de distribution comme exposé auparavant constitue un droit selon uploads/S4/ resiliation-des-contrats-de-distribution.pdf
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- Publié le Jul 25, 2021
- Catégorie Law / Droit
- Langue French
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