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See discussions, stats, and author profiles for this publication at: https://www.researchgate.net/publication/283720277 L'importance du droit suisse de l'arbitrage dans la résolution des litiges sportifs internationaux Article · January 2013 CITATIONS 0 READS 640 1 author: Antonio Rigozzi Université de Neuchâtel 63 PUBLICATIONS 112 CITATIONS SEE PROFILE All content following this page was uploaded by Antonio Rigozzi on 12 November 2015. The user has requested enhancement of the downloaded file. ZSR 2013 I 301 L’importance du droit suisse de l’arbitrage dans la résolution des litiges sportifs internationaux Antonio Rigozzi* Mots-clés: Arbitrage international, Chapitre 12 LDIP, Tribunal arbitral du Sport (TAS), Convention européenne des droits de l’homme (CEDH), arbitrabilité, convention d’arbitrage, Kompetenz- Kompetenz, mesures provisionnelles, motifs de recours (Art. 190 al. 2 LDIP). A. Introduction Traditionnellement, les organisations sportives sont très jalouses de leurs préro- gatives. Fortes de la liberté quasi-totale que leur laisse le droit de l’association1, elles s’organisent comme des «mini-Etats», avec leurs organes législatifs, exé- cutifs et judiciaires. Les organes judiciaires, également dits de justice sportive, ont pour fonction d’assurer le respect de la réglementation édictée par l’organisation sportive et ont typiquement comme tâche celle de connaître des recours contre les décisions de l’organisation. Pendant très longtemps, les tribunaux étatiques se sont montrés réticents à re- voir ces décisions, avec la conséquence que les athlètes et les clubs se trouvaient démunis face à la «toute-puissance»2 des fédérations sportives internationales3. Heureusement, la gouvernance des organisations sportives a évolué et permet désormais aux athlètes, aux clubs et autres parties prenantes de faire entendre leur voix, y compris en faisant valoir leurs droits en justice. La création du Tribu- nal arbitral du sport (le «TAS») a joué un rôle crucial dans cette évolution. * Avocat associé, Etude Lévy Kaufmann-Kohler, Genève; Professeur en droit, Université de Neu- châtel. 1 M. BESSON, Gouvernance des organisations sportives: importance du droit suisse, enjeux et per- spectives, RDS/ZSR 2013, pp. 283–300, passim. 2 Arrêt 4P.172/2006 du 22 mars 2007, Cañas c. ATP Tour, ATF 133 III 235 consid. 4.3.2.2. 3 C’est l’occasion de rappeler que de nombreuses fédérations sportives prévoyaient l’exclusion des membres qui osaient s’adresser à la justice. Voir ANTONIO RIGOZZI, L’arbitrage international en matière de sport, Bâle 2005, para. 178; DENIS OSWALD, Le pouvoir juridictionnel des organi- sations sportives et ses limites, in: Séminaire «Droit et Sport» du 11 septembre 2002, Publica- tions FSA (vol. 18), Berne 2003, pp. 41–52, 44. Antonio Rigozzi 302 ZSR 2013 I Dans cette contribution, nous nous proposons d’examiner le rôle essentiel du droit suisse et du Tribunal fédéral pour le bon fonctionnement du TAS. Nous retracerons les principales étapes de la jurisprudence du Tribunal fédéral au su- jet de la nature «véritablement arbitrale» du TAS (B.) avant d’examiner les principales dispositions du chapitre 12 de la LDIP qui en ont assuré le succès (C.), pour conclure en nous demandant si le législateur suisse ou le Tribunal fé- déral peuvent faire plus pour améliorer encore ce système (D.). B. La nature «véritablement arbitrale» du TAS Le TAS a été créé en 1984 par le Comité International Olympique («CIO») à une époque où, compte tenu de l’importance croissante des intérêts économiques en jeu, les athlètes et les clubs hésitaient de moins en moins à braver l’inter- diction de saisir la justice sportive et, parallèlement, les tribunaux commen- çaient à abandonner leur réticence naturelle à intervenir dans les litiges sportifs. Le but (plus ou moins avoué) du CIO en créant le TAS consistait à stopper ce qui était perçu comme une ingérence dangereuse des tribunaux étatiques dans l’organisation du sport. Le risque évident étant que l’ingérence du TAS se sub- stitue à celle des juges étatiques, le CIO a voulu s’assurer que le TAS soit une instance proche du monde du sport, capable d’en comprendre les spécificités et besoins propres. C’est ainsi que les premiers statuts du TAS prévoyaient que les arbitres devaient être impérativement choisis sur une liste d’arbitres établie par le CIO lui-même. Confronté aux inquiétudes exprimées par le Tribunal fédéral dans sa pre- mière décision portant sur une sentence du TAS4, le CIO a compris qu’il fallait limiter son rôle dans le fonctionnement de ce tribunal, pour s’assurer que l’ar- bitrage du TAS soit considéré comme un arbitrage au sens juridique du terme, condition sine qua non pour qu’il puisse être efficacement opposé à l’interven- tion des tribunaux étatiques. Pour qu’on puisse le qualifier de «véritablement arbitral» au sens du droit suisse, un tribunal doit offrir des garanties d’indépen- dance suffisantes pour être considéré l’équivalent fonctionnel des tribunaux étatiques (donc à même d’en exclure la compétence). C’est seulement si ces ga- ranties sont données que ses décisions seront reconnues comme de véritables sentences arbitrales5. 4 Arrêt du TF 4P.217/1992 du 15 mars 1993, Gundel c. Fédération équestre internationale, ATF 119 II 271, Bull. ASA 1993, p. 398. 5 Arrêt du TF 4P.217/1992 du 15 mars 1993, Gundel c. Fédération équestre internationale, ATF 119 II 271, Bull. ASA 1993, p. 398; 5P.83/1999 du 31 mars 1999, Lu Na Wang et al. c. FINA; 5P_427/2000 du 4 décembre 2000, Raducan c. CIO, Bull. ASA 2001, p. 508, consid. 1b et 1c; 4P.267–270/2002 du 27 mai 2003, Lazutina c. CIO, ATF 129 III 445, Bull. ASA 2003, p. 601, consid. 3.3.4. L’importance du droit suisse de l’arbitrage dans la résolution des litiges sportifs internationaux ZSR 2013 I 303 Cela fait maintenant 10 ans que le Tribunal fédéral a admis pleinement la nature arbitrale du TAS (I.), tout en précisant que le système demeurait perfec- tible (II.). I. L’indépendance du TAS selon le Tribunal fédéral Dans le célèbre arrêt Lazutina de 2003, le Tribunal fédéral a décrit dans le détail la nouvelle organisation du TAS et la manière dont sa structure a été adaptée pour pouvoir assumer pleinement ses fonctions juridictionnelles et gagner sa qualification de véritable tribunal arbitral6. L’arrêt Lazutina a mis en exergue les deux développements majeurs qui ont permis d’améliorer l’indépendance du TAS, à savoir la création du Conseil International de l’Arbitrage en matière de Sport (le «CIAS») et l’adoption d’un Code de l’arbitrage en matière de sport (le «Code TAS»). Dans une première partie, plutôt descriptive, de son arrêt, le Tribunal fédéral relève que le but proclamé du CIAS est de «sauvegarder l’indépendance du TAS et les droits des parties»7 (art. S2 du Code). En pratique cet objectif se concrétise par une série d’attributions initialement du ressort du CIO, en parti- culier celles «d’adopter et de modifier le Code, d’administrer et de financer le TAS, d’établir la liste des arbitres du TAS pouvant être choisis par les parties, de statuer en matière de récusation et de révocation des arbitres et de nommer le Secrétaire général du TAS»8. Le Tribunal fédéral a également tenu à souli- gner que pour assurer encore davantage l’indépendance du TAS, chaque mem- bre du CIAS devait «signer une déclaration solennelle d’indépendance»9, ne pouvait pas agir comme conseil ou comme arbitre dans une procédure devant le TAS et, le cas échéant, devait se récuser spontanément en cas de conflit d’intérêts10. En d’autres termes, le CIAS a été conçu comme un organe censé mettre de la distance entre le CIO (et les fédérations sportives) et le TAS. Dans une seconde partie, plus analytique, de l’arrêt Lazutina, le Tribunal fé- déral a ensuite examiné si, en raison de sa structure et de son organisation, le TAS pouvait être considéré comme un véritable tribunal arbitral11. Le Tribunal 6 Arrêt 4P.267–270/2002 du 27 mai 2003, Lazutina c. CIO, ATF 129 III 445, Bull. ASA 2003, p. 601. 7 Id. consid. 3.3.1; art. S2 du Code TAS. 8 Ibid.; art. S6 du Code TAS. 9 Ibid.; art. S5 du Code TAS. 10 Ibid.; art. S5 et S11du Code TAS. 11 Voir par exemple PIERMARCO ZEN-RUFFINEN, La nécessaire réforme du Tribunal Arbitral du Sport, in: Citius, Altius, Fortius, Mélanges en l’honneur de Denis Oswald, Bâle et al. 2012, pp. 483–537; MICHAEL STRAUBEL, Enhancing the Performance of the Doping Court: How the Court of Arbitration for Sport Can Do Its Job Better, 36 LOY. U. CHIC. L.J. 1205 (2005); DE MONTMOLLIN – PENTSOV – Do Athletes Have Right to a Fair Trial in Doping Cases – Am. Rev. Intl Arb. 2011/2, pp. 187–240, disponible à l’adresse: http://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm? abstract_id=2004981. Antonio Rigozzi 304 ZSR 2013 I fédéral a considéré que, quand bien même les athlètes n’étaient pas libres de choisir «leur» arbitre, puisque leur choix était limité aux arbitres figurant sur une liste fermée, la liste n’était plus constituée par le CIO et était désormais suf- fisamment étendue12 pour permettre un choix suffisant tout en assurant «un rè- glement rapide, simple, souple et peu onéreux des litiges, par des spécialistes au bénéfice de connaissances à la fois juridiques et sportives, [...] indispensable tant pour les athlètes que pour le bon déroulement des compétitions»13. Ainsi, et de manière pragmatique, le Tribunal fédéral confirma la validité du système de la liste fermée d’arbitres pratiqué par le TAS, car celui-ci était propre à favo- riser une résolution efficace des litiges sportifs et était compatible avec les «exi- gences constitutionnelles uploads/S4/ rigozzi-importance-droit-suisse-arb-resolution-litiges-sportifs-int-rds-zsr-2013.pdf
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- Publié le Jui 22, 2022
- Catégorie Law / Droit
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