1 HISTOIRES D'HOMMES de Xavier Durringer Une production "Le T emps Présent" ave

1 HISTOIRES D'HOMMES de Xavier Durringer Une production "Le T emps Présent" avec Claudie Cohen-Solal Mise en scène Gérard Foucher Contact: 06 08 94 00 22 2 HISTOIRES D'HOMMES 4. Les mecs tièdes sont à chier, à vomir, à oublier. Le mec qui vous dit de belles paroles, si chaudes que vous fondez, des mots sucrés enrobés de sérieux, du très sérieux, le mec qui vendrait des esquimaux aux esquimaux. C'est simple vous fondez. Il vous prend la main mine de rien et dit vous avez chaud ? Il vous demande ça comme ça. Et vous, vous répondez un peu. Vous êtes brûlante et vous dites un peu, j'ai un peu chaud, c'est le manque d'air, le manque de vent, je boirais bien un peu d'eau fraîche, une carafe entière avec des glaçons. Il dit garçon, de l'eau fraîche avec des glaçons s'il vous plaît. Il dit ça en riant, un charme fou et vous vous dites qu'est-ce qui se passe là, pourquoi moi ? Non pas que j'ai pas confiance en moi bien que je me sois fait baiser un paquet de fois, baiser dans le sens avoir, je me suis fait avoir, mais ça va de pair généralement. 3 Mais je me dis en le voyant dire en riant "glaçons", je me dis c'est incroyable ce que j'ai envie qu'il me prenne dans ses bras. C'est stupide, j'ai le cœur qui tape et le ventre qui se dilate, puis se serre, faut que je me lève que j'aille aux toilettes, me regarder dans les yeux, voir de quoi j'ai l'air. Et tout se passe comme sur des roulettes. Et c'est reparti le manège, le premier soir, lui c'est pas comme les autres, il rit et les gens qui rient ne jouent pas de double jeu sinon ils riraient jaune, ils oseraient pas rire, ils feraient juste les sérieux mais lui il rit et je me sens bien, tranquille, nature, envie de tout donner, de ne rien retenir, pas faire semblant, donner tout. Comme si je sautais en parachute, me lâcher, me laisser flotter et me laisser aller au gré du vent, de ses désirs, on part loin, on verra bien où on s'arrête. 4 Mais le truc, c'est que l'histoire s'arrête vite. Déjà le lendemain, à sa façon de se rhabiller, de se retourner, ses gestes furtifs pour mettre la chemise dans le pantalon, de dire je t'appelle un taxi, avant d'avoir bu le café ensemble. Je t'appelle un taxi. 5 Non, non, n'appelle pas c'est bon. Je vais marcher c'est bon, j'en trouverai un en marchant et il vous dit sur la droite, t'en trouveras sur ta droite au coin du boulevard, y a une station sur ta droite, ta droite, c'est ce "ta" qui tue et là il rit plus du tout, tout ce qu'il fait est très sérieux, beaucoup trop sérieux, la moindre chose qu'il fait a de l'importance, c'est du sérieux de chez sérieux, il a pas le temps, il a plus le temps. Là vous avez le parachute qui vrille en torche, vous tombez de haut, vous avez tout donné dès le premier soir. Vous vous êtes racontée de la petite enfance à aujourd'hui avec force détails de A à Z et vous tombez de haut quand il vous ramène à la porte en regardant sa montre le salaud comme un rendez-vous chez le gynécologue. Il regarde sa montre et vous prend dans ses bras sans vous embrasser, il vous serre fort, trop fort, limite claque dans le dos, deux trois tapes, gentil gros chien gentil et vous dit dans un souffle, à bientôt, j'ai ton numéro, je t'appelle vite c'est promis, ça veut bien dire ce que ça veut dire, je t'appellerai, ça veut dire m'appelle pas c'est pas la peine, je t'appellerai. Et vous savez qu'il sait déjà plus où il 6 a foutu votre foutu numéro le petit con. T out d'un coup il a rapetissé, nettement moins beau, plus petit. Envie de lui mettre une gifle d'éducation comme un éclair à quoi bon. Et digne vous descendez les marches, envie de pleurer, velours d'époque, vous poussez la double porte vitrée poignées dorées, vous appuyez sur le bouton de la grosse porte d'entrée et ça sonne, un drôle de son, de clac et vous la prenez la claque en pleine gueule et vous marchez jusqu'à la station de taxis, les lunettes de soleil de travers et y en a pas de taxis, et là y a un homme, jeune cadre costumé qui vous sourit et vous dit, y a jamais de taxi dans cette station, à cette heure-ci, ils font l'escargot à Roissy. Et vous dites ah bon, ils font l'escargot, comme ça. 7 Et vous fondez en larmes. Et l'homme vous dit, ça va pas ? Et vous répondez, ça va, ça va mieux, ça va passer en remettant vos lunettes d'aplomb. Et ça ne passe jamais complètement. C'est pour ça qu'on prend des cachets chéri. Pour que ça continue. Jusqu'au jour où on décide d'en finir. Ils ne savent pas que je suis une princesse quelque part tous ces abrutis. Le prochain s'en souviendra. 8 5. Qu'est-ce que tu crois mon petit gars, que tout est rose pour les filles ? Enlève-toi ça tout de suite de la tête. Faudrait pouvoir chasser cette couleur des poupées, des petites robes et de tout ce qui touche de près ou de loin les petites filles. Plus jamais de cette couleur. Rien n'est rose, rien. Y a rien de rose. Gardons cette couleur pour les bonbons, pour la guimauve, pour les sucettes, pour la pochette des Sex Pistols. Jackie était en rose le jour de l'assassinat de JFK, non ? Le rose c'est bon pour les robes de vieillesse avec un vert émeraude en liseré. T out ça, ça va. C'est très beau. T out ça ça va. Mais plus jamais de rose pour les petites filles ! Jamais. Vous avez compris ? 9 6. Faut pas que je t'aie dans la tête. Faut pas que je t'aie dans la tête. Je vis plus. Je pense plus qu'à toi. T'es comme le centre et je tourne autour. Je papillonne. Tu vois le truc, je papillonne tout autour de toi. T u m'aveugles. Je volette et je brûle. Je tape dans le mur. Je tombe. C'est aussi simple que ça. Je tombe. J'arrête pas de tomber comme si ça s'arrêtait jamais. Un trou sans fond. Je peux plus rien faire, je me traîne comme une âme en peine. Je rôde vers tes endroits, je déambule, comme une bulle d'eau. Je fais le culbuto. J'en crève. Ma fille, ne pense plus à lui, il te brûle, il brûle ta vie. Personne ne sait que moi, personne ne sait, y a que moi, y a que moi qui sais. Vous, vous vous imaginez des trucs mais vous êtes bien loin de savoir pourquoi. Pourquoi je suis comme ça avec lui. 10 C'est… c'est… c'est dur à dire, à expliquer… C'est comme un sortilège. Il est rentré… et… et… et… Ça a fait un truc comme une vague chaude… Comme un choc… Comme la montagne à la mer. Je peux pas dire, je suis pas forte en mots, y a rien qui tombe juste comme je voudrais, tout ce que je dis c'est un peu à côté, pas bon… Je vais pas vous parler de sexe, mais là c'est comment je pourrais dire, physiologique, naturel, compulsif, physique, quand il vient, j'ouvre… C'est pas très beau, mais c'est tellement bon. Je tremble de partout. Comme des milliers de langues de feu qui courent sur mon ventre, sur mon corps, il débouche chaque pore de ma peau, m'aspire, m'assèche. Puis me fait couler comme une fontaine. 11 7. 12 La nuit je ne dors pas. J'aurais dû faire bonne sœur pour me lever pour la prière, mais j'aime trop l'amour même avec un petit a minuscule aaaahh. La nuit je ne dors pas, je trinque, je trinque à moi, sublime, je valdingue m'écrouler dans le canapé, je me laisse aller aux programmes délicieux de la nuit, je veux dire les programmes télé, très chouettes, pas dérangeants, faciles à comprendre tout va bien, on est dans une drôle de merde, passons. Je fume un peu, remets un coussin, drôle d'effort, bien caler le coussin comme il faut, je plaisante pas, c'est des années de pratique, des nuits entières pour bien le caler d'un coup, légèrement bombé dans le coin parfait du canapé, contre le boudin mou. Je m'allonge moitié Grecque moitié Romaine complètement explosée, lutteuse au repos. Je me love. J'aime bien dire love. Je me love dans ma nuisette dentelle mauve. Je file d'histoires en visages, d'infos en rediffusion, des animaux à l'histoire de l'homme, je trinque, je trinque. Je ne dors pas. J'ai les paupières en plomb qui tombent et se relèvent comme un obturateur d'appareil photo clic-clac. Où en est le monde chérie, où j'en 13 suis moi dans tout ça, qu'est-ce que je comprends uploads/S4/ texte-durringer.pdf

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  • Publié le Sep 07, 2022
  • Catégorie Law / Droit
  • Langue French
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