Faculté de Droit Master 2 Droits de l’Homme et Droit Humanitaire Année 2011-201
Faculté de Droit Master 2 Droits de l’Homme et Droit Humanitaire Année 2011-2012 Mars 2012 Mémoire Dans le cadre du séminaire de Contentieux des Droits de l’Homme Thème Les files d’attente nocturnes à la Préfecture de l’Essonne, Evry (91) / M. Serge Slama, Maître de conférences à l’Université d’Evry-Val d’Essonne M. Jean-François Dubost, Responsable Anne-Laure Sablé du Programme Personnes déracinées Marjorie Simonet à Amnesty International France Carole Utchanah SOMMAIRE Introduction…………………………………...............................................................1 I. L’accueil des étrangers à la préfecture de l’Essonne : une réalité loin des idéaux nationaux…………………………………………………………...….........................6 A. L’amélioration du service public : historique d’une politique nationale………………………………………..……………………………………………...6 B. Témoignages d’une réalité violente……………………………..……………….10 1. Une nuit à la préfecture d’Evry……………………………………………….…....10 2. La parole aux étrangers……………………………………………………….……12 3. Les médias, associations et politiques : extraits d’articles et semaine de mobilisation…………………………………………………………………………...13 II. L’adaptation du service public des étrangers à la préfecture de l’Essonne…………………………………………………………………………..….20 A. L’évolution perpétuelle du droit des étrangers………………………………...20 1. Le résultat de politiques publique et communautaire……………………………...20 2. La réception des textes par le bureau des étrangers d’Evry………………………..22 B. Les ajustements propres à la préfecture de l’Essonne…………………………24 1. Les améliorations revendiquées par l’Administration……………………………..24 2. Les contradictions relevées au cours d’observations………………………………26 III. Illégalité des pratiques administratives de la préfecture de l’Essonne : quelle justiciabilité ?...............................................................................................................38 A. Une pratique externe : les files d’attente nocturne…………………………….38 1. Procédure extra juridictionnelle : le Défenseur des droits…………………………38 2. Procédure juridictionnelle : le référé-liberté……………………………………….40 B. Les pratiques internes……………………………………………………………44 1. Le refus de dépôt d’une demande d’asile…………………………………………..45 2. L’absence de délivrance de document permettant de prouver le dépôt de dossier de demande d’asile…………………………………………………………………………….....47 3. Le refus de délivrer le formulaire de changement de statut ou d’enregistrer le dépôt de dossier de changement de statut plus de deux mois avant l’expiration du titre de séjour en cours…………………………………………………………………………………………...49 4. Le refus de renouveler un récépissé plus de trois jours avant l’expiration du récépissé en cours......................................................................................................................51 1 Introduction Au premier semestre du Master 2 Droit public mention Droits de l’Homme et droit humanitaire de la faculté de droit de l’Université d’Evry-Val d’Essonne (91), le séminaire de Contentieux des droits de l’Homme animé par Serge Slama, maître de conférences en droit public, nous a conduit dès novembre 2011 à nous pencher sur le droit si spécifique des étrangers et, pour l’évaluation de la matière, à analyser au choix un aspect de ce droit dans le but de contribuer à son amélioration au besoin en utilisant un recours devant une juridiction. Que savions-nous du droit des étrangers à l’entrée du Master? A défaut d’avoir reçu un enseignement à part entière, nous avions au moins croisé durant notre parcours universitaire quelques jurisprudences en la matière, notamment celle rendue par le Conseil d’Etat le 8 décembre 1978 en vertu de laquelle et au nom d’un nouveau principe général du droit, « les étrangers résidant régulièrement en France ont, comme les nationaux, le droit de mener une vie familiale normale »1, ou encore la décision du Conseil constitutionnel du 13 août 1993 consacrant notamment la pleine valeur constitutionnelle du droit d’asile tel qu’il est affirmé par l’alinéa 4 du Préambule de 1946. Nos engagements auprès d’associations telle que la Cimade, dispensant des conseils juridiques aux étrangers, avaient également pu nous permettre d’aborder quelque peu cette branche du droit. Mais surtout, nous ne pouvions comme tout un chacun échapper au discours ambiant en matière d’immigration sur la scène politique et médiatique dans des proportions encore jamais atteintes. Force est de constater que, depuis plusieurs décennies, le discours officiel provenant du sommet de l’Etat a fait de l'immigration un thème central du débat public. Associée dans un premier temps à l’accroissement du chômage2, l’immigration serait également devenue source d’insécurité et entraînerait la ruine de nos systèmes de protection sociale et la mise en péril de la pérennité de notre identité nationale3. 1 Dans cet arrêt G.I.S.T.I C.F.D.T C.G.T, l’Assemblée du Conseil d’Etat annule le décret du 10 novembre 1977 qui réservait le droit au regroupement familial aux membres de la famille qui ne demandaient pas l’accès au marché du travail 2 A partir des années 80 3 Sur ce sujet, voir l’ouvrage « Immigration : fantasmes et réalités », sous la direction de Claire Rodier et d’Emmanuel Terray, Collection Sur le vif, paru en octobre 2008 De fait, la France - comme la plupart des Etats européens - a cherché à rendre plus difficile l’entrée et le séjour des étrangers sur sol en développant des théories comme celle de l’immigration « choisie »4. Alors que l’objectif affiché par le gouvernement français dès 2007 était de favoriser la migration par le travail et de modifier par là même la proportion entre la migration professionnelle, jugée très faible, et la migration familiale alors dominante, l’arrivée de Claude Guéant au ministère de l’Intérieur5 le 27 février2011 a changé la donne puisqu’une lutte contre l’immigration « tout court » est en marche se traduisant notamment par les objectifs d’atteindre le quota6 de 30 000 reconduites d’étrangers en situation irrégulière pour l’année 2011 et, désormais, de réduire le nombre d'entrées légales d'étrangers en France. Corrélativement, on assiste depuis 2002 à une succession de lois qui vont toutes dans le sens d’un durcissement des conditions d’entrée et de séjour des étrangers, avec rien que pour l’année 2011, trois nouvelles lois. (cf. infra II. A. 1.) Avec cette politique du chiffre, cette volonté manifeste de restreindre l’immigration, qu’elle soit illégale ou non, et ces retouches incessantes du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit des étrangers, l’accueil des étrangers en France s’est vu fortement dégradé. Pour preuve, les files d’attente devant les préfectures ne cesse alors de s’empirer et pas très loin de notre université, la préfecture de l’Essonne illustre parfaitement ce phénomène ayant cours depuis le début de l’année 2011 : « Depuis mars, les files devant la préfecture d’Evry ne cessent de s’allonger. Retrait de titre de séjour ou dossier pour un regroupement familial, des démarches simples qui entraînent des heures d’attentes avec parfois une nuit passée dehors »7. Nous avons donc choisi de nous consacrer aux files d'attente nocturnes à la préfecture d'Evry. Il nous restait à trouver une association de défense des Droits de l’Homme pour travailler en lien avec elle8. Or, courant novembre 2011, lors d’une intervention de Jean- François Dubost9 sur les demandes d’asile dans le cadre du séminaire de Contentieux des Droits de l’Homme, nous apprenons justement qu’il ne dispose guère d’information sur la 4 Par opposition à l’immigration « subie », l’immigration « choisie » a pour fondement l’immigration professionnelle sous couvert de lutter contre l’immigration illégale 5 Ministère de l'Intérieur, de l'Outre-mer, des Collectivités territoriales et de l'Immigration 6 Les quotas de reconduites à la frontière des personnes en situation irrégulière ont été mis en place en 2007, simultanément à la création en mai 2007, dans le gouvernement Fillon I, d’un ministère entier dédié à l’immigration, à l’intégration, à l’identité nationale et au développement solidaire, supprimé en novembre 2010 7 Reportage sur BFM en septembre 2011, intitulé « Préfecture d’Evry – Nuits d’attente à la préfecture pour un dossier » 8 Cela faisait partie de l’objectif assigné par notre enseignant 9 Responsable du Programme Personnes déracinées à Amnesty International France préfecture d’Evry. Le contact est aussitôt pris avec M. Dubost qui accepte de superviser notre travail. Si M. Dubost fut notre partenaire privilégié pour nous guider dans notre réflexion juridique, cette étude nous a conduit à rencontrer plusieurs interlocuteurs avec, dans l’ordre des rencontres10 : -M. Julien Monier, journaliste, rédacteur en chef d’Essonne Info, auteur d’une série de papiers sur la préfecture d’Evry - Mme Yvette Le Garff, militante LDH 91 et membre de RESF 91 -M. Christian Vedelago, chef du service des étrangers de la Préfecture d’Evry -M. Pascal Sanjuan, Secrétaire Général de la Préfecture d’Evry Ainsi avons-nous pu prendre en compte, outre l’aspect juridique de la question avec M. Dubost, d’autres paramètres: - le militantisme, dans le domaine associatif, avec Mme Le Garff notamment, - les médias, avec M. Monier et les journalistes de Canal +11 entre autres, - la pratique administrative, avec les responsables administratifs de la préfecture. A noter en décembre 2011 le contact pris par Gaylord Van Wymeersch auprès de nous, reporter pour l'émission de France Inter "Là-bas si j'y suis", suite à la publication de notre témoignage12 sur le blog « Combat Pour les Droits de l’Homme » (CPDH) animé par Serge Slama. Il souhaitait discuter avec nous de notre démarche et de notre travail de terrain mais se trouve jusqu’à ce jour occupé à terminer d’autres sujets… …Effectivement, tout a commencé par une démarche sur le terrain. Il nous paraissait indispensable d’aller nous rendre compte par nous-mêmes de la situation, ne serait-ce que de visualiser une file d’attente nocturne, de faire un repérage et un état des lieux13, pour essayer 10 Pour le calendrier des rencontres, cf. annexe n°1 11 Présents lors du rassemblement du 8 décembre 2011, cf. p. 17 12 Cf. annexe n°2 13 D’où notre veillée nocturne le 1er décembre 2011 d’en comprendre les tenants et les aboutissants. Il en ressort une confusion générale, aussi uploads/S4/les-files-d-x27-attente-nocturnes-a-la-prefecture-de-l-x27-essonne-evry.pdf
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- Publié le Jui 12, 2021
- Catégorie Law / Droit
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