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Directeur de la publication : Edwy Plenel www.mediapart.fr 1 1/3 Brexit: l’envoyé de Juncker fait le service minimum auprès de Farage PAR LUDOVIC LAMANT ARTICLE PUBLIÉ LE JEUDI 28 JANVIER 2016 Il est l’homme choisi par Juncker pour déminer le Brexit. Mercredi, le discret Jonathan Faull débattait à Bruxelles avec ses adversaires les plus coriaces : les eurodéputés du UKIP, emmenés par l’europhobe Nigel Farage. De notre envoyé spécial à Bruxelles. Selon les mots jargonnants de Jean-Claude Juncker, président de la Commission, l’Europe est confrontée cette année à une « polycrise non entièrement maîtrisée ». Parmi les fonctionnaires de l'institution chargés de dégrossir ce mille-feuille de crises, Jonathan Faull occupe un rôle clé. Ce grand Britannique à la tignasse grise, né en 1954 dans le Kent, est l’homme que Juncker a choisi d’envoyer au front pour calmer l’une des secousses les plus vives du moment : le spectre d’un Brexit – une sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne (UE) – d’ici fin 2017. Peu bavard depuis sa nomination en juin 2015 à la tête d’une task force très spéciale, Faull s’est livré pendant une heure à Bruxelles au jeu des questions réponses, devant un public particulier : les 22 eurodéputés du UKIP, le parti anti-UE et anti-migrants de Nigel Farage, et leurs alliés au sein du Parlement européen (en particulier les élus italiens du Mouvement 5 Étoiles de Beppe Grillo). C'est en partie sous la pression du UKIP, après son succès aux européennes de 2014, que le conservateur David Cameron, au pouvoir à Londres, a radicalisé son discours sur l'UE, et mis sur les rails ce projet de référendum sur l'Union. Ce mercredi, les deux camps – la Commission d'un côté, le UKIP de l'autre – savaient d’entrée de jeu leurs positions irréconciliables, et personne n’a cherché à convaincre l’autre du bien-fondé de ses positions. Le ton des échanges, ponctués par des plaisanteries de Farage, est resté très cordial. On doit aux députés Roger Helmer et Ray Finch le moment le plus animé du débat, sur le financement de la campagne à venir. Puisque l’exécutif de Jean-Claude Juncker prône le maintien du Royaume-Uni dans l’UE, quel budget, ont interrogé les élus, la Commission a-t-elle prévu de dépenser en « propagande » dans les mois à venir, pour convaincre les citoyens britanniques ? Va-t-elle déclarer publiquement les sommes engagées, comme l’y invite la loi britannique ? « La Commission ne dépensera pas un penny en propagande pendant la campagne », a tranché Faull, provoquant quelques remous dans la salle. Mais des élus sceptiques ont rappelé les précédents des deux consultations organisées en Irlande pour la ratification du traité de Lisbonne (en 2008 puis en 2009), pour lesquelles la Commission avait lancé, d’après eux, une campagne d’affichage massive et dépensé sans compter. Commentaire amusé de Nigel Farage : « Vous n’appelez peut-être pas ça de la propagande, mais de l’information… » Le UKIP a fait du budget communication de la Commission de Bruxelles l’un de ses chevaux de bataille, estimant inacceptable que « l’argent des contribuables » serve à financer la promotion d’une institution à ses yeux illégitime. « Merci d’être venu, M. Faull, mais qui croyez-vous berner ? » a conclu Ray Finch. [media_asset| eyJtZWRpYSI6eyJpZCI6IjU2YTkwZmUxMjRkZTNkM2 Pour le reste, Faull, qui était déjà intervenu début janvier devant une commission spécialisée au sein du même Parlement, s’est contenté du service minimum, tant il savait le terrain piégé. D’autant qu’à Bruxelles, la tension monte ces jours-ci, à l’approche d’un conseil européen, les 18 et 19 février, durant lequel David Cameron, à l’origine de la manœuvre, pourrait conclure sur le sujet un deal avec ses 27 homologues. Le chef de gouvernement britannique, qui joue son avenir politique sur cette consultation, s’est engagé à mener campagne pour le maintien de la Grande- Bretagne dans l’UE, s’il obtenait, entre-temps, des garanties pour des réformes liées à quatre dossiers. C’est ce qu’il avait expliqué dans sa lettre du 10 novembre au président du Conseil européen, Donald Tusk (que Mediapart a déjà décryptée ici). Ce dernier devrait faire circuler dès lundi une première proposition d'accord. Directeur de la publication : Edwy Plenel www.mediapart.fr 2 2/3 « Honnêtement, je suis incapable de dire ce qui sortira du sommet dans trois semaines », a prévenu Faull, qui a répété que la Commission se limitait à jouer le rôle de « facilitateur » entre Londres et les autres États membres, pour faire accoucher d’un accord. Dès février, ou plus tard dans l’année. « Nous voulons aider à trouver un accord juste qui permette au Royaume-Uni de rester dans l’Union européenne, a-t- il insisté. Certaines des demandes de Londres sont plus compliquées que d’autres, d’un point de vue politique ou juridique, mais aucune d’entre elles n’est simple, de toute façon. » Si l’on résume à gros traits, Cameron espère obtenir des avancées sur quatre fronts : • La souveraineté. Londres ne veut plus être soumis à cette expression des traités, qui promet une « union sans cesse plus étroite » (ever closer union). • La compétitivité. En résumé : approfondir le marché unique, signer le traité de libre-échange avec les États-Unis, effacer les régulations considérées comme trop lourdes pour les entreprises… • La relation entre les pays membres de la zone euro et les autres. Londres veut surtout s’assurer que l’intégration renforcée de la zone euro, par exemple via l’union bancaire sous l’effet de la crise, ne va pas nuire aux intérêts de la City. • L’immigration. C’est le point le plus délicat, pas encore réglé, parce qu’il instaurerait une discrimination entre travailleurs européens : Cameron veut suspendre le versement d’aides sociales aux immigrés européens pendant leurs quatre premières années au Royaume-Uni. Selon des sources proches des négociations, la dernière mouture du texte se contenterait d'évoquer un mécanisme baptisé « frein à main » qui autoriserait l'exécutif britannique à déclencher l'interdiction, s'il parvient à prouver que ses services administratifs sont sous forte pression à cause des flux migratoires. Aux yeux du UKIP, ces revendications, même si elles débouchaient en l’état, sont insuffisantes. Les élus britanniques ont donc utilisé une bonne partie de l'interrogatoire de mercredi pour démontrer à quel point ces réformes restaient superficielles. Point décisif : faudra-t-il en passer par une réforme en bonne et due forme des traités ? Londres a un temps laissé penser qu’elle était nécessaire. Mais Jonathan Faull a botté en touche : « Nous avons décidé de nous concentrer sur les contenus et de nous mettre d’accord sur le fond, avant de voir comment appliquer, ensuite, ces réformes. »« Il semblerait qu’il ne soit plus question de réforme des traités à l’horizon », a ironisé Farage. [[lire_aussi]] Plusieurs élus non britanniques se sont inquiétés des risques d’effets dominos, si la démarche initiée par Londres finit par aboutir. Chaque État pourrait alors formuler ses propres revendications, avec la perspective d’une Europe à la carte, de plus en plus morcelée… Faull, sur ce front, a appelé au « pragmatisme ». Après tout, l’Europe à plusieurs vitesses existe depuis longtemps. Sur les seules questions monétaires, 19 pays intègrent la zone euro, quand les neuf autres États membres ont conservé leur monnaie nationale (deux d’entre eux, le Royaume-Uni et le Danemark, disposent d’un statut spécifique, qui précise qu’à aucun moment ils ne rejoindront la zone euro). Refusant de « spéculer » sur les conséquences économiques d’un Brexit pour l’Europe, Jonathan Faull, ex-porte-parole de la Commission, ancien patron de la direction générale des services financiers, a affirmé que l’exécutif bruxellois n’avait lancé aucune étude sur le sujet. Il n’est pas interdit de trouver cela inquiétant. Directeur de la publication : Edwy Plenel www.mediapart.fr 3 3/3 Directeur de la publication : Edwy Plenel Directeur éditorial : François Bonnet Le journal MEDIAPART est édité par la Société Editrice de Mediapart (SAS). Durée de la société : quatre-vingt-dix-neuf ans à compter du 24 octobre 2007. Capital social : 28 501,20€. Immatriculée sous le numéro 500 631 932 RCS PARIS. Numéro de Commission paritaire des publications et agences de presse : 1214Y90071 et 1219Y90071. Conseil d'administration : François Bonnet, Michel Broué, Gérard Cicurel, Laurent Mauduit, Edwy Plenel (Président), Marie-Hélène Smiéjan, Thierry Wilhelm. 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  • Publié le Apv 30, 2022
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