TRAVAUX DIRIGÉS - Droit des sociétés Dissertation: « L’intérêt social » La noti
TRAVAUX DIRIGÉS - Droit des sociétés Dissertation: « L’intérêt social » La notion d’intérêt social occupe une place essentielle en droit français des sociétés, on lui associe d’ailleurs souvent le terme de boussole de l’action des dirigeants de la société. Selon les professeurs Deboissy, Viandier et Cozian, l’intérêt social est un impératif de conduite, une règle déontologique voire morale qui impose de respecter un intérêt supérieur à l’intérêt personnel d’un associé. L’intérêt social implique donc que les dirigeants de la société prennent des décisions et agissent dans le respect de l’intérêt de la société, un intérêt distinct de celui de ses associés. La jurisprudence a tenté assez rapidement de définir cette notion, en vain. Elle fait usage de cette notion sous trois aspects: le juge prend en compte l’intérêt des associés, parfois l’intérêt de la société en tant que personne morale, d’autre fois il fait référence à l’intérêt de l’entreprise. La définition de cette notion, utilisée très largement en jurisprudence, ne provient donc pas du juge. Face à cette difficulté d’appréhension jurisprudentielle, la doctrine s’est elle aussi saisie de ce débat qui reflète également la difficulté doctrinale susvisée. Selon une première conception, l’intérêt social correspond à l’intérêt commun des associés, basée sur une redécouverte de l’article 1833 qui prévoit que toute société doit avoir un objet licite et être constituée dans l’intérêt commun des associés. L’autre vision, plus extensive, est celle selon laquelle l’intérêt social serait l’intérêt propre d’une entité, à savoir une entreprise ou une personnalité morale. Face à ces débats jurisprudentiels et doctrinaux, il pourrait être tentant de prendre en compte ce qu’a prévu le législateur. Les références textuelles à cette notion d’intérêt social sont rares. Quelques références y sont faites dans le code de commerce et il parait de ce fait difficile de véritablement en extraire des conséquences sur la pensée du législateur. A l’occasion de la loi pour un plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises, dite loi PACTE de 2019, le législateur est venue donner une véritable assise légale à la notion d’intérêt social en ajoutant à l’article 1833 du code civil un second alinéa en vertu duquel la société est gérée dans son intérêt social, en prenant en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son activité. On peut toutefois regretter l’absence de définition donnée à cette occasion, ce qui rend toujours autant difficile son appréhension. L’absence de définition de cette notion ne la rend pas inutilisée pour autant, car on peut aisément se rendre compte qu’elle est le support d’un certain nombre de mécanismes de contrôles de l’action des associés ou du dirigeant, à des fins de protection de cet intérêt. Si désormais plusieurs textes y font référence, aucune définition n’est donnée. Selon le Professeur Viandier, « l'intérêt social est le concept majeur du droit moderne des sociétés », et cela interroge d’autant plus pourquoi le législateur n’a daigné donner, jusqu’alors une définition. Selon le Professeur Alain Couret, derrière la notion d’intérêt social et la divergence doctrinale qui en découle, se cachent des enjeux importants au premier rang duquel réside la perception de la nature de la société. Ce débat doctrinal renvoie ainsi à un débat plus large qui est la rivalité entre les analyses contractuelles ou institutionnelles de la société. Cette notion étant floue, elle est cependant le support de nombreux encadrement du pouvoir des associés ou des dirigeants, et peut donc être potentiellement une source d’insécurité juridique dans leur action. La notion d’intérêt social fait d’elle un instrument de protection efficace au service de la société ? Nous verrons ainsi que la notion d’intérêt social fait l’objet d’une difficulté de compréhension tant législative que doctrinale (I) dont la finalité est d’assurer la bonne marche et la protection des intérêts de la société (II). I) Une notion floue Cette notion d’intérêt social ne fait pas l’objet de définition ni jurisprudentielle, ni législative (A). La doctrine, quant à elle, est partagée entre deux acceptions de cette notion (B). A) L’intérêt social, une notion non définie Si l’intérêt social est une notion crée par la jurisprudence, elle ne lui a jamais donné de véritable définition (1), tout comme le législateur (2). 1) Une notion créée par la jurisprudence mais non définie par cette dernière La jurisprudence a dans son ensemble, progressivement, fait de la notion d’intérêt social une notion majeure en droit des sociétés avec une ambition claire et affichée de protéger la société, et cela via différents procédés ayant recours à cette notion d’intérêt social. Pour lui permettre une pleine efficacité, la jurisprudence lui a donné une assise large et n’a donc pas voulue lui donner une définition précise pour ne pas limiter son champ d’application. Concernant la plasticité octroyée à cette notion, le Professeur Saintourens considère que le concept d’intérêt social a été exportée par les juges qui ont usé de ce concept flou pour en faire un usage bien plus important et dans d’autres hypothèses prévues par les textes. Bien que cette notion soit d’origine prétorienne, pour lui donneuse pleine efficacité, les juges s’obstinent à ne pas lui donner de définition. Le législateur, quant à lui, ne semble pas non plus très enclin à lui donner une définition. 2) Des références textuelles dépourvues de définition Cette notion d’origine prétorienne trouve quelques modestes fondements textuels: elle est mentionnée à l’article L. 233-3 du code de commerce, ou encore aux articles L. L. 241-3 et L.242-6 du code de commerce. Cependant aucune définition n’est donnée. Le code civil, jusqu’a récemment, ne consacrait pas cette notion: la loi dite Pacte du 22 mai 2019 est venue codifier cette notion à l’article 1833 alinéa 2 du code civil et dispose que la société est gérée dans son intérêt social, en prenant en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son activité. Mais là encore, il convient de constater que si l’intérêt social est désormais légalement consacré dans le code civil, il demeure dépourvu de définition juridique précise. Le législateur semble se satisfaire de cette situation puisqu’il a considéré dans les exposés des motifs du projet de loi que « les éléments nécessaires pour déterminer si une décision est ou non contraire à l’intérêt social dépendent en effet trop étroitement des caractéristiques, protéiformes et changeantes, de l’activité et de l’environnement de chaque société ». Le législateur semble ici agir avec pragmatisme et cela semble cohérent avec la jurisprudence, pour permettre une pleine efficacité dans l’application malléable de cette notion d’intérêt social. Par ailleurs, l’introduction de la prise en considération des enjeux sociaux et environnementaux nécessitera quelques éclaircissements jurisprudentiels, car si cet ajout semble tout à fait louable, cela rajoute du flou à une notion qui souffre déjà d’un manque de définition. Elle devra donc être encadrée car potentiellement attentatoire à la sécurité juridique des associés et du dirigeant. Si cette notion trouve toute sa place en jurisprudence, et même si le législateur la reconnait pleinement, en considération des ambitions de protection des intérêts de la société associés à cette notion, ni l’un ni l’autre ne souhaite la définir. La doctrine quant à elle, est tiraillée entre deux acceptions de cette notion. B) La notion d’intérêt social, source de débats doctrinaux L’intérêt social fait l’objet de deux conceptions doctrinales différentes qui s’affrontent. D’une part, une première approche qui entend l’intérêt social comme l’intérêt d’un groupement (1), face à une seconde approche selon laquelle l’intérêt social peut s’entendre comme l’intérêt commun des associés (2). 1) L’intérêt social entendu comme l’intérêt d’un groupement, support de la thèse institutionnelle de la société L’une des deux approches doctrinales concernant l’intérêt de la société, est de considérer que c’est l’intérêt d’un groupement, d’une entité, à savoir l’intérêt de la personne morale ou celui de l’entreprise. Cette approche est soutenue trouve écho en jurisprudence car dans un arrêt du 4 février 1985 Rozemblum, la Cour de cassation a jugée que l’intérêt du groupe est un intérêt économique, social ou financier commun, apprécié au regard d’une politique élaborée pour l’ensemble du groupe. Concernant cet intérêt d’une entité, la doctrine divise son approche en considérant d’une part l’intérêt de la société au sens de sa personnalité morale, mais aussi de son intérêt social au sens de l’intérêt de l’entreprise. Pour ce qui est de l’intérêt de la personne morale, il peut se définir en opposition avec l’intérêt des associés. Les professeurs Cozian et Viandier considèrent que l’intérêt social est l’interêt propre de la société, celui qui transcende celui des associés. L’approche de l’intérêt de l’entreprise repose sur une dimension davantage économique. Pour les auteurs qui la défende, la société n’est que le support juridique de l’entreprise, c’est une structure d’accueil. Toutefois, cette distinction très théorique n’est pas très suivie. Le rapport Viénot avait d’ailleurs occulté cette différence considérant que « l'intérêt social peut se définir comme l'intérêt supérieur de la personne morale elle-même, c'est-à-dire l'entreprise considérée comme un agent économique autonome, poursuivant des fins propres, distinctes notamment de celles de ses actionnaires, de ses salariés, de ses créanciers dont le fisc, de ses fournisseurs et de ses clients mais qui correspond à uploads/Finance/ td-9-ds.pdf
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- Publié le Sep 18, 2022
- Catégorie Business / Finance
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