La Gestion opportuniste du ratio de solvabilité bancaire via les ajustements ré

La Gestion opportuniste du ratio de solvabilité bancaire via les ajustements réglementaires des fonds propres : Etude d’un échantillon de banques européennes Résumé : Plusieurs études ont montré l’existence de la gestion opportuniste du ratio de solvabilité à travers les pratiques de « Earning Management ». Toutefois, elles se sont focalisées pour l’essentiel sur la manipulation des provisions. Cette étude examine la gestion opportuniste du ratio prudentiel bancaire via les ajustements réglementaires opérés sur les fonds propres. Ceux-ci sont composés d’ajustements classiques et de filtres prudentiels induits par l’application des IFRS. Adoptant une démarche diachronique et une approche instrumentale, l’étude se base sur un échantillon de banques européennes et utilise des méthodes de régression par données de panel. Les résultats obtenus confirment des possibilités de manipulation du ratio prudentiel. Mots clés : Earnings Mangement, Ratio de solvabilité, Bâle 2, Ajustements réglementaires, IFRS. Abstract : Through Earnings management practice applied to the banking industry, several studies have shown existence of capital adequacy ratio management. However, they are mainly focused mainly on loss loan provision manipulation’s. This paper deals with the possibilities of banking industry to manage the prudential ratio via the regulatory adjustments. Such adjustments are based on accounting equities. They are composed of conventional adjustments and prudential filters induced by the application of IFRS. Adopting diachronic and instrumental approaches, the study is based on a sample of European banks and uses regression methods by panel data. The results obtained confirm the possibilities of manipulation of the Prudential ratio. Key words: Earnings Mangement, Ratio de solvabilité, Bâle 2, Ajustements réglementaires, IFRS.. Introduction Ce papier s’intéresse à la gestion du ratio de solvabilité dans les banques européennes. La présente étude s’inscrit dans la lignée des travaux précurseurs ayant traité la problématique de la gestion du ratio de solvabilité dans les banques [ (Moyer (1990), Barth (1994), Beatty (1995), Beatty et al (1995), Douglas et al (1995), Ahmed et Al (1995), Ahmed (1999), Barth et al (2014), Armignon (2015), Greiner (2015) etc.]. L’étude des pratiques managériales dont l’objectif est de gérer le ratio de solvabilité, tire son intérêt de la réglementation bancaire. Celle-ci impose aux banques de présenter un ratio de solvabilité minimum, afin de fournir une assurance raisonnable sur leur capacité à faire face aux risques encourus. Dans l’Union Européenne (UE), les banques sont tenues d’appliquer la réglementation prudentielle émanant du Comité de Bâle dans le calcul et la présentation de leur ratio de solvabilité. Or, depuis le début des années 2000, la réglementation bâloise a fortement évolué, passant de Bâle 1 à Bâle 3. Parallèlement à l’évolution de la réglementation prudentielle, les groupes bancaires européens appliquent les normes IFRS depuis 2005. 1 Comme le rappelle Schiper (1989), un changement de cadre réglementaire offre toujours un potentiel significatif pour une meilleure compréhension des pratiques de Earnings Management. En effet, si un cadre réglementaire fait l’objet de pratiques de gestion opportuniste, alors tout changement dudit cadre pourrait entraîner une évolution des pratiques de gestion opportuniste. Le ratio de solvabilité bancaire est un rapport entre des fonds propres prudentiels et des exigences en fonds propres pondérées destinées à couvrir les risques. Le mode de calcul des fonds propres prudentiels exige le retraitement des fonds propres comptables afin de ne retenir que ce qui est constitutif d’éléments « antirisque ». Les fonds propres prudentiels subissent ainsi des ajustements réglementaires définis et déterminés par le régulateur. L'objectif des ajustements réglementaires est de maintenir les caractéristiques souhaitées des fonds propres prudentiels en termes d’évaluation, de mesure, de qualité et de stabilité, à des fins prudentielles, pour les établissements bancaires (Armignon et al 2015). Les ajustements réglementaires peuvent être classés en deux catégories. La première catégorie concerne les déductions opérées sur les fonds propres comptables. Il s’agit d’éléments évalués et comptabilisés mais devant être exclus du périmètre prudentiel (par exemple des participations dans des entreprises d’assurance, des actifs incorporels, etc.). La seconde catégorie d’ajustements réglementaires est liée principalement à l’application des IFRS. Communément appelés filtres prudentiels, ces ajustements sont susceptibles d’impacter les fonds propres comptables dans les deux sens (positif ou négatif) en fonction de l’évolution de la valeur des instruments financiers sous- jacents. Il s’agit des éléments dont la variation de valeur est un élément du résultat global en IFRS (Other Comprehensive Income – OCI). De facto, ils influencent les fonds propres comptables1, par exemple les actifs financiers classés dans la catégorie « Disponibles à la Vente –AFS » en IFRS. Toutefois, les banques semblent disposer d’une latitude managériale leur permettant d’évaluer tout ou partie des ajustements réglementaires de manière discrétionnaire. Ce faisant, elles influencent le niveau du ratio de solvabilité. L’objectif de cet article est de mettre en évidence les éléments susceptibles d’influencer la gestion opportuniste du ratio de solvabilité via les fonds propres prudentiels. Pour ce faire, il se fonde sur les travaux académiques portant sur le même sujet. Son principal intérêt est sa contribution à une meilleure compréhension des pratiques de gestion du ratio de solvabilité. De nombreuses études focalisées sur l’industrie bancaire ont mis en évidence l’existence de pratiques de gestion du ratio de solvabilité. Elles ont pour caractéristiques communes de faire un focus sur la gestion des résultats et d’en dériver la gestion du ratio de solvabilité. En outre, elles ont pour la plupart, choisi pour variable principale, le niveau de provisionnement (LLP loss loan provision). La présente étude est uniquement axée sur la 1 Ces ajustements réglementaires sont dénommés « Filtres prudentiels » IFRS. Techniquement, les filtres prudentiels concernent plusieurs normes IAS/IFRS, et portent sur des sujets variés tels que: les instruments financiers disponibles à la vente (AFS), les gains actuariels nets sur les engagements de retraite, l’inclusion des parts sociales des établissements mutualistes, l’inclusion des Titres super subordonnés à durée indéterminée TSSDI, la couverture des flux de trésorerie, la réévaluation des immobilisations corporelles, la juste valeur des immeubles de placement, le risque de crédit propre etc. Par la mise en place des filtres prudentiels, le régulateur tente d’amoindrir voire annuler la supposée volatilité des fonds propres comptables induite par l’application des IFRS. 2 gestion du ratio de solvabilité, via les fonds propres prudentiels. Plus précisément, elle cherche à montrer que la gestion opportuniste des ajustements réglementaires influence les fonds prudentiels et par conséquent le ratio de solvabilité. A la différence des études antérieures, celle-ci utilise n’utilise pas les LLP, mais les ajustements réglementaires comme variable principale. Adoptant une démarche diachronique et une approche instrumentale, l’étude se base sur un échantillon de banques européennes et utilise des méthodes de régression par données de panel. Les résultats obtenus tendent à confirmer l’existence de possibilités de manipulation des fonds propres prudentiels via les ajustements réglementaires. La suite de l’article se présente ainsi : une section est dédiée à une brève revue de la littérature permettant de mieux saisir le cadre théorique et bâtir les hypothèses de recherche. Ensuite, une autre section est chargée d’établir le design de la recherche en présentant, l’échantillon, les modèles et les variables de modélisation. Enfin une dernière section se charge de présenter et discuter les résultats de l’étude. 1 Cadre théorique et hypothèses 1.1 Les motivations de la gestion du ratio de solvabilité Les études portant sur la gestion du ratio de solvabilité ont mis en évidence les motivations des dirigeants de banques. Celles-ci concernent l’objectif d’atteinte d’un seuil minimal afin d’éviter les coûts réglementaires (Moyer 1990), les incitations de reporting financier et les attentes et réactions du marché financier (Douglas et al 1995, Ahmed et al 1995, Beatty et al 1995, Beaver 1996, Beaver et al 1996, Barth et al 2012). En outre, Le souci d’être en conformité avec la réglementation prudentielle et d’éviter la sanction de l’autorité de tutelle peut influer sur la gestion opportuniste du ratio de solvabilité (Combes-Thuélin 2001). De plus, le respect du ratio de solvabilité est l’une des contraintes majeures à laquelle la banque fait face vis-à-vis de son autorité de tutelle, et le non-respect du ratio peut compromettre la continuité de l’exploitation (Galai et al 2012). L’étude de Moyer (1990) porte sur un échantillon composé de 845 données annuelles de banques entre 1981 et 1986. Le modèle posé par Moyer (1990) suppose que le manager peut influencer le niveau du ratio de solvabilité via les mises en perte ou les LLP. L’étude montre que les banques ajustent les mesures comptables afin de réduire les coûts réglementaires associés à un non-respect du minimum réglementaire. Les résultats sont généralement cohérents avec l'hypothèse que les managers appliquent une pratique de gestion du ratio de solvabilité notamment dans les cas où le ratio a tendance à décliner et tendre vers son minimum. L’étude de Douglas et al (1995) s’intéresse aux évolutions du ratio de solvabilité relativement aux incitations fiscales et aux exigences de reporting financier. Ils examinent l'impact de l'évolution des niveaux des fonds propres, les résultats annuels et les impôts sur les décisions des banques individuelles à gérer la comptabilisation des éléments suivants : les gains et pertes sur les placements financiers, les provisions, les write off, les actions, les dividendes distribués. L’étude porte uploads/Finance/article-afc.pdf

  • 28
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager
  • Détails
  • Publié le Jul 09, 2021
  • Catégorie Business / Finance
  • Langue French
  • Taille du fichier 0.2761MB