PRÉSIDENCE DE LA RÉPUBLIQUE ______ DISCOURS DE M. LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE

PRÉSIDENCE DE LA RÉPUBLIQUE ______ DISCOURS DE M. LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE ASSEMBLEE NATIONALE Dakar - Vendredi 12 octobre 2012 Seul le prononcé fait foi Monsieur le Président de l’Assemblée nationale, Mesdames et Messieurs les membres du gouvernement, Mesdames et Messieurs les parlementaires, Mesdames et Messieurs les membres du corps diplomatique, Mesdames et Messieurs, Je mesure l’honneur que vous me faites en m’invitant à m’exprimer au sein de votre Assemblée. J’y vois un double symbole, celui de la vitalité de votre démocratie et celui de la force du lien qui unit nos deux pays. J’effectue ici, à Dakar, mon premier déplacement en Afrique depuis l’élection qui m’a porté à la Présidence de la République française. Ce choix est celui de l’amitié. Il est aussi et surtout celui de l’avenir. Note amitié est fondée sur notre histoire. Une histoire belle, cruelle, rebelle. Une histoire qui nous lègue une langue en partage, mais aussi une culture politique en commun. Je pense en cet instant à Blaise DIAGNE, et à ses successeurs, qui ont activement participé aux travaux du Parlement français après la guerre. Je pense à Léopold SEDAR-SENGHOR qui fit partie du Comité chargé d’élaborer la Constitution de la Vème République ? L’histoire d’une fraternité, aussi. Celle de combats menés ensemble. 1/9 La France se souvient qu’en 1914 et en 1940, elle a pu compter sur le concours de nombreux Sénégalais enrôlés de gré ou de force sous le drapeau tricolore et dont le courage a permis à la France d’être ce qu’elle est aujourd’hui. Par deux fois au cours du siècle dernier, le sang africain a été versé pour la liberté du monde. Nous ne l’oublierons jamais. Cette histoire a aussi sa part d’ombre. Comme toute Nation, la France se grandit lorsqu’elle porte un regard lucide sur son passé. Je serai cet après-midi sur l’Ile de Gorée pour rendre hommage à la mémoire des victimes de l’esclavage et de la traite, en présence d’élus des Outre-mer français dont j’ai souhaité la présence à mes côtés. L’histoire de l’esclavage, nous devons la connaître, l’enseigner et en tirer toutes les leçons parce que l’exploitation des êtres humains continue de souiller l’idée même d’humanité. Il nous revient de poursuivre le combat contre ceux qui exploitent la misère et la détresse de jeunes filles, d’enfants, de réfugiés, de migrants. A la maison des esclaves, qui fait face à l’Océan Atlantique, je ne m’inclinerai pas seulement devant l’histoire : je m’engagerai pour la défense de la dignité humaine. La part d’ombre de notre histoire, c’est aussi la répression sanglante qui en 1944 au camp de Thiaroye provoqua la mort de 35 soldats africains qui s’étaient battus pour la France. J’ai décidé de donner au Sénégal toutes les archives dont la France dispose sur ce drame afin qu’il puisse les exposer au mémorial sur Thiaroye. *** Mais la meilleure raison de ma présence ici est que je veux vous parler de l’avenir et d’une valeur universelle, que nous défendons ensemble : la démocratie. Le Sénégal est un exemple pour l’Afrique. Les trois premiers présidents sénégalais ont su, dans leur diversité, transmettre tous le flambeau à leur successeur, permettant à votre pays de réussir des alternances sans déchirement. Votre Assemblée nationale, devant laquelle je m’exprime, est l’une des seules du continent à avoir exercé la totalité de ses droits, sans interruption, depuis l’indépendance. 2/9 Et quand je vois le nombre de femmes, ici, du peuple sénégalais –un nombre qui a doublé par rapport aux dernières élections- cela m’inspire, au regard de la situation pourtant récemment améliorée en France, une nécessaire modestie… Voilà ce que nous portons ensemble. Le respect des droits de l’homme, l’égalité devant la loi, la garantie de l’alternance, les droits des minorités, la liberté religieuse : autant de valeurs universelles ancrées chez vous et qui doivent s’épanouir dans toute l’Afrique. Je ne suis pas venu en Afrique pour imposer un exemple, ni pour délivrer des leçons de morale. Je considère les Africains comme des partenaires et des amis. L’amitié crée des devoirs : le premier d’entre eux est la sincérité. Nous devons nous parler librement. Nous devons tout nous dire, sans ingérence, mais avec exigence. La démocratie vaut pour elle-même. Mais elle vaut aussi pour ce qu’elle permet. Il n’y a pas de vrai développement économique ni de vrai progrès social sans pluralisme. J’ai une conviction profonde : si l’Afrique, berceau de l’humanité, parvient à faire vivre pleinement la démocratie, partout et pour tous, si elle réussit à surmonter les démons de la division, alors elle sera le continent où se jouera l’avenir de la planète. L’Afrique est portée par une dynamique démographique sans précédent : la population au sud du Sahara doublera en l’espace de quarante ans –pour atteindre près de 2 milliards de femmes et d’hommes en 2050. Le nombre d’habitants aura été multiplié par dix en un siècle : c’est un changement sans équivalent dans l’histoire humaine. L’Afrique est la jeunesse du monde. Elle est aussi une terre d’avenir pour l’économie mondiale. Sa croissance, ces dix dernières années, a été supérieure à celle de beaucoup d’autres régions émergentes. Les besoins d’infrastructure sont énormes. La qualité de son agriculture, ses ressources naturelles, ses richesses minières, recèlent des possibilités immenses et encore largement inexploitées. Ses paysans, ses artisans, ses étudiants, ses entrepreneurs, ses savants constituent une ressource humaine exceptionnelle. Les grands pays émergents se tournent vers vous et investissent massivement. Vous n’avez pas à avoir peur de cet intérêt nouveau, à la condition expresse que vous sachiez, grâce à vos 3/9 institutions et vos pratiques, guider et orienter cet afflux d’hommes et de capitaux, et écarter les prédateurs. Votre défi c’est de renforcer la place de votre continent dans la mondialisation. De lui donner une finalité plus humaine, d’y prendre la place qui doit être la vôtre, d’assumer une nouvelle responsabilité. Aucun enjeu planétaire ne pourra être traité sans l’Afrique. Toutes les réponses essentielles passent déjà par votre continent : l’économie, les matières premières, l’environnement, l’énergie, la gouvernance mondiale. Dans toutes les négociations internationales sur ces sujets, la France –et au-delà l’Union Européenne, et l’Afrique partagent la même vision de l’avenir. Dans ces négociations vous êtes notre premier partenaire. Nous sommes votre premier allié. Et notre devoir, c’est de vous accompagner dans les domaines d’avenir : l’agroalimentaire, les télécommunications, les services financiers… *** C’est vers cette Afrique de demain que je regarde en venant ici au Sénégal. Le changement viendra d’abord et avant tout des peuples. Les Africains ont pris leur destin en main et ce mouvement ne s’arrêtera pas. Chaque pays connaît sa propre dynamique et parfois ses rechutes. Chaque pays adapte ses institutions à son histoire ou à ses réalités. Chaque pays est chahuté par des mouvements qui contestent les frontières issues de la colonisation. Mais j’ai confiance, l’Afrique est en marche et les principes sur lesquels elle peut fonder son développement sont ceux que vous portez. La transparence, vous avez raison de l’exiger de toutes les entreprises qui viennent investir chez vous ou occuper des positions et notamment dans le secteur minier et forestier. La bonne gouvernance, car c’est une condition de la stabilité, de la sécurité et de la probité. C’est pourquoi je salue l’initiative du Président SALL de lancer une opération de récupération des biens mal acquis. La lutte contre la corruption, les abus financiers et contre l’impunité est l’affaire de tous. Nous devons être intraitables face à ceux qui pourraient se croire autorisés à voler les deniers de leur propre pays ou face à ceux qui viennent chercher des contrats en ne négligeant aucun moyen de pression ou d’influence. L’égalité : car si l’Afrique se développe, le nombre de pauvres ne cesse de progresser. Près de la moitié des pays du continent sont en passe d’atteindre les Objectifs du Millénaire. Mais trop 4/9 nombreux sont ceux qui restent au bord du chemin. La question des inégalités, est, pour vous comme pour nous, au cœur du message que nos peuples attendent de nous. Et notamment les femmes, qui en Afrique constituent une formidable force de changement et de transformation. Elles sont de plus en plus nombreuses à s’impliquer dans la vie économique et sociale. Elles jouent un rôle majeur auprès de la jeunesse africaine qui représente les deux tiers de la population du continent. Mais je n’ignore pas les menaces auxquelles vous faites face et les périls que vous affrontez : les crises alimentaires, les changements climatiques, les trafics de toutes sortes, les conflits, les fondamentalistes. Car nous sommes confrontés au même combat, celui de la dérive identitaire, celui du terrorisme. Je pense particulièrement au Mali victime de groupes extrémistes qui font régner la terreur dans le Nord. C’est votre sécurité qui est en jeu, c’est aussi la nôtre, celle de l’Europe qui connaît la valeur inestimable de la paix pour laquelle elle a obtenu aujourd’hui l’illustre récompense du Prix Nobel. Le futur de l’Afrique se bâtira par le renforcement de la capacité des Africains à gérer eux- mêmes les crises africaines. Les organisations telles que la CEDEAO uploads/Geographie/ le-discours-de-francois-hollande-devant-l-x27-assemblee-nationale-du-senegal-a-dakar-le-12-octobre-2012.pdf

  • 18
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager