Les concepts de la Renaissance : Les grands thèmes Publié le 17/11/2005 Auteur(
Les concepts de la Renaissance : Les grands thèmes Publié le 17/11/2005 Auteur(s) : Jean-Pierre Potier Entre le XVIe et le milieu du XVIIIe siècle, les idées économiques se transforment avec des colorations nationales très marquées. Il n'existe donc pas de véritable "école mercantiliste", ou de "système économique mercantiliste". Il est toutefois possible de dégager un fond commun d'idées, un certain nombre de grands thèmes "mercantilistes", qui reviennent de façon plus ou moins récurrente chez la plupart des auteurs, du XVIe au milieu du XVIIe siècle. En revanche, du milieu du XVIIe jusqu'au milieu du XVIIIe siècle, les contributions de William Petty, de Boisguilbert et de Richard Cantillon, s'accordent mal avec la notion de "mercantilisme", tant du point de leurs apports analytiques que du point de vue de leurs propositions de politique économique. SOMMAIRE Le concept controversé de "Mercantilisme" La théorie de la "balance du commerce" Industrialisme et populationnisme Vers la formation des premiers systèmes d'économie politique Introduction Entre le XVIe et le milieu du XVIIIe siècle, les idées économiques se transforment avec des colorations nationales très marquées. Il n'existe donc pas de véritable "école mercantiliste", ou de "système économique mercantiliste". Il est toutefois possible de dégager un fond commun d'idées, un certain nombre de grands thèmes "mercantilistes", qui reviennent de façon plus ou moins récurrente chez la plupart des auteurs, du XVIe au milieu du XVIIe siècle. En revanche, du milieu du XVIIe jusqu'au milieu du XVIIIe siècle, les contributions de William Petty, de Boisguilbert et de Richard Cantillon, s'accordent mal avec la notion de "mercantilisme", tant du point de leurs apports analytiques que du point de vue de leurs propositions de politique économique. Le concept controversé de "Mercantilisme" F. Quesnay dans l'article (non publié) « Hommes » (1757) de l'Encyclopédie évoque le "système des commerçants". Dans La Philosophie rurale ou Economie générale et politique de l'agriculture (1763), Mirabeau critique l'« inconséquence absurde du système mercantile ». Enfin, dans la Richesse des nations, Adam Smith se livre à une critique détaillée du "mercantile system" ou du "commercial system". Le vocable de "Merkantilismus" est plus tardif, car il naît en Allemagne dans la seconde moitié du XIXe siècle chez les auteurs qui tentent de le justifier historiquement. Schématiquement, on peut dire que chez les historiens de la pensée économique il existe deux grandes approches dans la considération du "mercantilisme". La première approche découvre dans le "mercantilisme" un système cohérent de théorie et de politique économique. Eli F. Heckscher (Mercantilism, trad. anglaise 1935, vol. I, p. 19) voit ainsi à la fois un système de pouvoir politique, un système de réglementation de l'activité économique, un système protectionniste et aussi un système monétaire avec la théorie de la balance du commerce. La seconde approche refuse de concevoir le "mercantilisme" comme un système cohérent de pensée dans cet ensemble d'idées variées, de croyances, de préceptes de politique économique et de pratiques, système que l'on pourrait opposer au "libéralisme". Mark Blaug note ainsi que « le mercantilisme, en tant qu'étiquette pour une phase de l'histoire de la politique économique, a été qualifié de "valise encombrante", de "diversion d'historiographie", et de "baudruche théorique géante" » (4e édition, p. 11). Dans les manuels d'histoire de la pensée économique, le mot "mercantilisme" sert à désigner à la fois des pratiques économiques dans tel ou tel pays, à telle ou telle époque, des règles de politique économique destinées à servir aux hommes d'Etat et enfin quelques ébauches de réflexions théoriques, très disséminées, des analyses partielles et parfois contradictoires. Les écrits dits "mercantilistes" se présentent sous la forme de pamphlets, de mémoires, de traités, rédigés par des conseillers du Prince (Montchrestien), des dirigeants de grandes compagnies de commerce (Mun, Child), des financiers (Law). Les vocables de "système mercantile" et de "mercantilisme" donnent l'impression que ces idées seraient dominées par une vision à proprement parler économique. Or, si les idées économiques de la période sont sans doute autonomes vis-à-vis de la morale et de la religion, elles ne le sont pas vis-à-vis de la politique et du social. L'économie vise au renforcement au pouvoir de l'Etat. Adam Smith notait dans la Richesse des nations qu'il s'agissait d'une « économie au service du Prince ». Monnaie et richesse Les Physiocrates, puis les économistes classiques accuseront les auteurs de la période "mercantiliste" d'avoir identifié purement et simplement dans leurs écrits la richesse avec le métal précieux. Le point de vue d'Adam Smith Que faut-il penser de ces accusations smithiennes ? Dans sa critique du "système mercantile", Adam Smith associe l'"idée populaire" qui confond la richesse avec le métal précieux aux pratiques bullionnistes de certains Etats. Le "bullionnisme" (de "bullion", lingot) correspond avant tout à des pratiques économiques, qui en réalité, existaient déjà dans les cités du Moyen Age, donc bien avant la période dite "mercantiliste" et se sont prolongées ensuite. Parmi ces pratiques, on peut mentionner, par exemple : 1 - L'interdiction d'exporter les lingots d'or et d'argent. 2 - L'interdiction d'exporter la monnaie nationale. 3 - Un système, qui a été désigné au XIXe siècle comme celui du "Balance of bargains System", la balance des contrats. Ce système consiste dans une politique de surveillance des contrats entre les commerçants nationaux et les commerçants étrangers de façon à favoriser l'entrée de monnaie dans le pays. Il s'agit là encore d'une pratique qui existait déjà dans les cités du Moyen Age. Le système de la balance des contrats a fonctionné en Angleterre et en Espagne, mais non en France. En réalité, dans les différents pays, aucun écrivain de premier plan ne prend la défense des pratiques bullionnistes. Les principaux auteurs dits "mercantilistes" souhaitent développer la production industrielle nationale. Ils rejettent donc le "bullionnisme", car il faut se résoudre à accepter une sortie minimale de métal précieux afin de se procurer les matières premières indispensables à la production. Certes, les auteurs des XVIe et XVIIe siècles accordent une prééminence à la richesse monétaire et ils insistent généralement sur les avantages de la possession du métal précieux monétisé comme moyen de conserver la richesse (pouvoir d'achat). Certains ont pu promouvoir la formation ou l'accroissement du trésor de guerre du Prince ou de l'Etat. Mais, pour la plupart d'entre eux, la monnaie permet avant tout la production et la circulation de la richesse. On rencontre souvent l'analogie entre la circulation de la monnaie celle du sang dans le corps humain. On tient Bernardo Davanzati (Lezione delle monete,1588) comme l'un des premiers auteurs à utiliser cette analogie. Après la découverte de la circulation du sang par William Harvey, en 1628, on la retrouve par exemple chez Thomas Hobbes dans le Leviathan (1651). La monnaie est aussi assimilée au capital, en particulier au capital circulant, à la disposition des marchands et des industriels. Le banquier écossais John Law (1671-1730) apportera un éclairage particulier avec ses Considérations sur le numéraire et le commerce (1705) puisqu'il propose de substituer la monnaie de papier émise par les banques aux espèces afin d'adapter la quantité de monnaie aux besoins de la production et de la circulation. La France sera un terrain d'expérience de son "système" de 1716 à 1720. John Law sera gratifié du qualificatif de "mercantiliste fiduciaire". Mais les auteurs du XVIIe siècle s'interrogent aussi sur la nature de la véritable richesse Selon Montchrestien, la richesse ne réside pas dans l'abondance de l'or ou de l'argent, mais dans "l'accomodement des choses nécessaires à la vie et propres au vêtement" (p. 241). En pratiquant toutes sortes d'industries, on peut attirer l'or et l'argent dans le pays. Mais la richesse la plus grande de la France est sans conteste "l'inespuisable abondance de ses hommes" (p. 24), le travail humain. L'homme est une richesse à condition qu'on l'éduque, qu'on le forme aux "arts". Thomas Mun dans England's Treasure by Forraign Trade (1664, p. 9) distingue deux types de richesses : la richesse naturelle, composée de biens de subsistance et la richesse artificielle qui consiste dans les biens manufacturés et les biens ré-exportables par le commerce extérieur. Plus tard, Vauban (Projet d'une dixme royale, 1707) déclare : "[_] ce n'est pas la grande quantité d'or et d'argent qui font les grandes et véritables richesses d'un Etat, puisqu'il y a de très grands Païs dans le monde qui abondent en or et en argent, et qui n'en sont pas plus à leur aise, ni plus heureux [_]. La vraye richesse d'un Royaume consiste dans l'abondance des Denrées, dont l'usage est si nécessaire au soûtien de la vie des hommes, qu'ils ne sçauroient s'en passer" (pp. 77-78). Les auteurs du XVIIIe siècle franchiront un pas supplémentaire. Inspiré par W. Petty, Cantillon affirme dans l'Essai sur la nature du commerce en général (1755) : « La terre est la source ou la matière d'où l'on tire la richesse ; le travail de l'homme est la forme qui la produit : et la richesse en elle-même, n'est autre chose que la nourriture, les commodités et les agréments de la vie » (p. 1). La question du quantitativisme monétaire Ce que l'on nommera la "Révolution des uploads/Geographie/ les-concepts-de-la-renaissance 1 .pdf
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- Publié le Apv 04, 2021
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