Mémoire de Master of advanced studies (MAS) en enseignement Les usages de la la

Mémoire de Master of advanced studies (MAS) en enseignement Les usages de la langue française à Madagascar Auteur: Patrick Stuby Directeur du mémoire : Denis Gay - professeur HEP Membre du jury : Célestin Razafimbelo - maître de conférences à l’ENS d’Antananarivo Lausanne, juin 2014 Table des matières 1 Introduction ..................................................................................................................................... 1 1.1 Présentation de l’île ................................................................................................................. 2 2 Contexte de l’étude .......................................................................................................................... 3 2.1 Le projet PEERS ..................................................................................................................... 3 2.2 L’expérience de l’altérité ......................................................................................................... 5 3 Problématique et question de recherche .......................................................................................... 7 4 Structure du mémoire ...................................................................................................................... 9 5 Acteurs et méthodologie ................................................................................................................ 11 6 La langue malgache ....................................................................................................................... 15 7 Le français et l’Etat ....................................................................................................................... 16 7.1 Approche historique des politiques linguistiques et de l’enseignement ................................ 17 8 L’usage du français ....................................................................................................................... 21 9 L’usage du français à l’école ......................................................................................................... 22 9.1 La situation actuelle de l’enseignement ................................................................................ 22 9.2 Le système scolaire malgache ............................................................................................... 24 9.3 L’enseignement du français en école publique ...................................................................... 26 9.4 Le niveau de français des enseignants ................................................................................... 27 9.5 Le niveau de français des élèves ........................................................................................... 28 9.6 Les écoles privées .................................................................................................................. 30 10 L’usage du français dans la société ........................................................................................... 33 10.1 Le français dans le cadre quotidien ....................................................................................... 33 10.2 Le français dans le monde professionnel ............................................................................... 36 10.3 Le français dans l’administration .......................................................................................... 38 10.4 Le français dans les médias ................................................................................................... 39 10.5 Le français dans le monde rural............................................................................................. 42 11 Conclusion ................................................................................................................................. 46 12 Bibliographie ............................................................................................................................. 49 13 Annexes ..................................................................................................................................... 52 13.1 Annexe 1 : lieux visités et acteurs interrogés ........................................................................ 53 13.2 Annexe 2 : indications sur le niveau de vie à Madagascar .................................................... 63 13.3 Annexe 3 : l’apport d’une expérience de l’altérité sur ma propre pratique enseignante ....... 64 13.4 Annexe 4 : notes de lecture - un instituteur colonial à Madagascar au début du XXème siècle .......................................................................................... 68 1 1 Introduction La langue transporte avec elle une culture, des représentations, des valeurs et confère à celui qui l’utilise un certain statut. L’étude de la situation d’une langue dans un pays est une lunette au travers de laquelle l’observateur voit le pays dans ce qu’il a de plus intime. La langue confère à son usager un très fort sentiment d’appartenance et d’identité. S’intéresser aux langues d’un pays et à leur utilisation équivaut donc à s’intéresser au fonctionnement de la société. Leur étude ne peut donc pas être dissociée du contexte politique, historique et social du lieu où elles sont enseignées et apprises. Ceci est particulièrement vrai lorsque l’on s’intéresse aux langues « coloniales » : langues importées, voire imposées par le colonisateur et qui demeurent des langues usitées par la population après l’indépendance, même si celles-ci n’ont pas de lien linguistique avec les langues locales. Le rapport qu’ont le gouvernement et la population d’un pays à la langue de leur ancien colonisateur est un thème qui a suscité ma curiosité, car il informe sur le rapport d’un peuple à son histoire et traduit les rapports sociaux qui existent au sein de la société. J’ai eu l’opportunité de vivre quelques années dans un pays anciennement colonisé : l’Indonésie. La connaissance de la langue indonésienne a joué un rôle central dans le développement de ma compréhension de ce pays. En Indonésie, malgré le fait que des centaines de langues locales se côtoient, s’est diffusé au cours des siècles une langue véhiculaire, le Bahasa Indonesia, qui est devenue langue nationale après l’indépendance. Durant les trois siècles de présence coloniale néerlandaise, la langue néerlandaise a peu à peu été imposée dans l’école et dans l’administration. Pourtant dès le départ des colons, cette langue a été consciemment évincée des écoles et du langage au profit du Bahasa Indonesia qui a été ainsi confirmé dans son statut de langue de communication à travers tout l’archipel. Aujourd’hui, le néerlandais n’est enseigné que dans quelques facultés universitaires et n’est parlé que par une poignée d’octogénaires. Madagascar a, quant à elle, suivi une route différente. La langue française, imposée par les colonisateurs au tournant du XXème siècle, fait aujourd’hui partie intégrante du paysage linguistique malgache plus de 50 ans après l’indépendance du pays. Pourtant, comme les Indonésiens, les habitants de Madagascar partagent une langue commune : le malgache. Cette différence de parcours linguistique entre deux peuples qui partagent une origine semblable m’a interpellé1. C’est pourquoi je souhaite à travers cette étude comprendre quelle est la place de la langue française aujourd’hui à Madagascar. 1 Les ancêtres d’une grande partie des Malgaches sont des habitants de l’archipel indonésien qui ont traversé l’Océan Indien en pirogue pour s’installer et peupler cette île. La langue malgache partage donc des racines communes avec le Bahasa Indonesia. 2 1.1 Présentation de l’île Il me semble important de présenter brièvement cette île qui est unique à de nombreux points de vue. Géographiquement, la cinquième plus grand île du monde appartient au continent africain mais son identité est plus complexe. Isolée depuis 150 millions d’années, l’île a développé une faune et une flore largement endémiques. L’origine de ses habitants est également particulière. L’île a été peuplée par des migrants de l’archipel indonésien qui ont traversé l’Océan Indien en vagues successives durant les deux derniers millénaires. Ils ont apporté leur langue, la riziculture et diverses caractéristiques culturelles qui, mêlées aux cultures des immigrants de la côte est- africaine, ont créé la culture malgache au sens large. Néanmoins, même si ses habitants partagent une langue commune, ce qui est rare en Afrique subsaharienne, Madagascar est caractérisée par sa diversité. L’île compte en effet 22 millions d’habitants mais 18 groupes ethniques distincts. L’une d’elle mérite notre attention : ce sont les Merina. Ce groupe ethnique, majoritaire dans la région de la capitale (Antananarivo) et de notre ville d’étude (Antsirabe), a dominé le pays avant la colonisation française et leur langue a servi de modèle au malgache officiel. Ils habitent dans la région des Hautes-Terres qui englobe les plateaux d’altitude aux paysages de terre rouge ponctués de rizières. La côte est offre un climat tropical à la végétation luxuriante alors que le sud est très sec. Madagascar est un pays rural dans lequel de nombreuses régions sont difficiles d’accès. L’enclavement est l’une des raisons expliquant les problèmes de développement du pays. L’instabilité politique et la corruption en sont des autres. Pour indication, Madagascar se trouve au 151ème rang sur 187 pays selon l’indice de développement humain du PNUD2. L’éducation est un problème majeur dans un pays dont la population est de plus en plus jeune du fait de l’accroissement démographique. Actuellement, 2 L’IDH (ici pour 2012) est un indice statistique composite, créé par le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) pour évaluer le niveau de développement humain des pays du monde. L'IDH se fonde sur trois critères majeurs : l'espérance de vie à la naissance, le niveau d'éducation, et le niveau de vie. La Suisse est en 9ème position. 1L'île de Madagascar (www.tselana.com) 3 le taux d’alphabétisation des jeunes de plus de 15 ans et des adultes se situe entre 64 et 65%3. Même si Madagascar se différencie du reste de l’Afrique et même si ses habitants ne se définissent pas comme Africains, l’île rouge partage nombre des difficultés de ses voisins. 2 Contexte de l’étude 2.1 Le projet PEERS Le présent mémoire est le résultat d’une étude de terrain menée sur l’île de Madagascar dans le cadre de mes études à la Haute école pédagogique de Lausanne (HEPL). Il a été rendu possible par ma participation au programme PEERS (Projets d’étudiants et d’enseignants- chercheurs en réseaux sociaux) mis en place par la HEPL. Ce programme est le résultat de la stratégie d’internationalisation de l’école. Son objectif est de faire collaborer des étudiants et des enseignants de Suisse et de pays partenaires sur une thématique éducative dans un cadre international et interculturel. Le programme est déjà actif aux Etats-Unis, en Bolivie, à Singapour, au Mozambique, au Burkina-Faso mais j’ai eu la chance de participer à l’ouverture de ce programme à Madagascar. Avec deux autres étudiantes de la HEP et sous la direction d’un professeur de cette école, nous sommes entrés en contact avec trois étudiants4 de l’ENS (Ecole normale supérieure) d’Antananarivo et leur enseignant5, didacticien d’histoire et de géographie. Cette école forme les futurs enseignants des lycées malgaches. La collaboration s’est opérée par paires d’étudiants travaillant sur une thématique de recherche similaire. Ainsi, j’ai travaillé sur le thème de la langue française en collaboration avec Harinaivo (à droite sur l’image). Cet étudiant de 40 ans possède déjà une 3 Selon l’UNICEF pour la période 2008-2012. Source : http://www.unicef.org/french/infobycountry/madagascar_statistics.html 4 Sur la photographie, de gauche à droite : Tokimandimby HERITIARAY, futur enseignant de physique-chimie, Tolotravahatriniaina RAJOBISON, futur enseignant d’histoire-géo et enfin Harinaivo RATRIMOARIKOTO, futur enseignant d’histoire-géo et mon collaborateur lors de l’étude de terrain. 5 Célestin RAZAFIMBELO, maître de conférences à l’ENS d’Antananarivo. 2 Nos trois correspondants de l'Ecole normale supérieure 4 longue expérience dans l’enseignement primaire et se forme pour devenir enseignant d’histoire et de géographie au lycée. Le programme PEERS se divise en deux parties : - une visite de Madagascar uploads/Geographie/ les-usages-de-la-langue-francaise-a-madagascar-memoire-de-master-of-advanced-studies-mas-en-enseignement 1 .pdf

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