G. I. BRATIANU LE THÈME DE BULGARIE ET LA CHRONOLOGIE DE L'ANONYME HONGROIS Dan

G. I. BRATIANU LE THÈME DE BULGARIE ET LA CHRONOLOGIE DE L'ANONYME HONGROIS Dans son ouvrage classique o Les sources byzantines de I'histoire des petrples turcs >, édition revue et augmentée de son premier ravail sur . Les ,o,rr.oiyàrr- tines de l'histoire hongroise ', le prof. Moravcsik a passé en revue tous les aureurs byzantins susceptibles de fournir des renseignemeîts sur ces peuples et leurs rap- Ports aYec l'empire d'Orientl). Il serait oiseux d'insister sur les mérites de cette publication, dont la contribution au progrès des études byzantines et de I'histoire des pzuples de langue turque est aussi importante qu'incontestable. c'est en marge de ce vaste répertoire que nous voudrions ajouter quelques notes, qui n'ont d'autie prétention que de suggérer, par l'exemple que nous avons droisi, rutitité d,un travail pour ainsi dire complémentaire, qui recueiller ait dans les drroniques de ces voisins de Byzance, les renseignements qu'elles peuvent donner sur l'empire des basileis, ses guerres et ses relations diplomatiques, et en une certaine mesure sur ses institu- tions. C'est là assurément un domaine plus restreint, et les informations de cette nature présentent peut-étre moins d'intérét pour I'histoire byzantine propremenr dite, qu'elles ne permettent de préciser certains points litigieux, concernant les sources mèmes dont il est loisible de les extraire. Tel nous semble ètre le cas de I'une des plus anciennes drroniques hongroises, celle attribuée au notaire anonyme du roi Béla, dont la drronologie a donné lieu a d'amples discussions. Il n'y a pas lieu d'examiner a nouveau ce que I'on a appelé à juste titre . l'i1ig- me du plus ancien historien hongrois '2). on sait qu'après avoir été lorrgt"ropr.oi- sidéré comme un vénérable témoin du passé le plus reculé, des temps mythiiues de l" occupation , de la Pannonie par les tribus magyares, la critique acerb" de Riisl"r, au siècle dernier, fit de son euvne un dssu de fables et d'érymologies naives, dépourvu de toute valeur historique. Mais par l'efiet de certe réacdon naturelle de l'esprit, qui, en bonne dialectique, fait succéder presque toujours la synthèse a l,op- position des thèses et des antithèses, les travaux plus récents onr rendu a h drronique de l'" Anonyme " une partie de son presrige. Il suff,t d'opposer à I'affirmation dédaigneuse d'A. de Bartha, d'il y a un demi-siècle: " il est impossible de la consi- _ ) A l!ryyar T6nén9t Biz/nci Forr{sai, Budapesq 1934; Byzantinoturcica, I, Die byzan- tioisóe Quellen der Gesdridrte der Tiirkvólker, Budapest,'r9izi Spodrt.rt" der Túrkv6lker in den byzantinisdren Quellen, Budapest, 1943 t) A. E&hardt, Revue des études hongroises et finno-ougriennes, III, r9z5 rot dérer comme une source sérieuse au point de vue de la conquète du pays "s), le jugement de I'historien hongrois N. H&pn, en r92r: < son récit construit avec soin, rnt du point de vue stratégique que géographique, prouve un esprit critique péné- ùant, une pensée méthodique et des connaissances approfondies . . . "a). Il faut évidemment remettre les c}oses au point: cette drronique tient plus du genre épique que du récit proprement historique. Il n'est pas difficile d'y relever des confusions et des anadrronismes, et ces derniers s'expliquent par la méthode méme de l'auteur; à l'instar de ceux qui ont rédigé les grandes Gestes du Moyen Age, la Chanson de Roland, celle des Nibelungen ou le Cantar del mio Cid, dans leur forme dernière qui est parvenue jusqu'à nous, il a utilisé une relation plus ancienne des faits qu'il a entrepris d'exposer - en I'espèceles Gesta Ungarorum de l'époque de saint Ladislas - mais il y a ajouté ou suPerPosé des noms de lieux et de pzuples plus familiers à ses lecteurs, concernant sans doute la mème région géographique, mais représentant la réalité contemporaine ou très rapprodrée de l'époque à laquelle il écrivait. C'est le procédé courant de la littérature et de I'art du Moyen Age, avant la réaction classique de la Renaissance, qui se plaît a travestir en drevaliers bordés de fer les héros de la guerre de Troie, à ranger parmi les adversaires de Charlemagne des . infidèles " qu'il n'a jamais eu l'occasion de connaître, ou a faire paraître à la cour d'Attila des seigneurs qui ne pouvaient rendre hommage qu'au roi chrétien de Hongrie, six ou sept siècles plus tards). Après tant d'études qui ont permis de distinguer ces alluvions sucessives dans la composition des grandes légendes épiques médiévales, qu'il s'agisse des hauts faits de Roland ou de ceux du paladin byzantin Digénis Akritaso) - il n'est past difficile de conclure que les .. Coumans " de l'Anonyme représentent en réalité les Petdrénègues qui les ont précédés, et que le nom de Vlaques, pour n'étre pas attesté a l'époque de la " Landnahme r, n'en désigne pas moins la population romane ou romanisée, qui habitait ces régions à l'arrivée des conquérants. Il est également possible de retrouver dans la relation des guerres des premiers drefs magyars le reflet d'événements plus récents, se rapportant aux camPagnes du XIIe siècle des armées byzantines contre les Flongrois. Mais la controverse essentielle, qui n'a pas encore été entièrement résolue, reste quand mème celle de la date qu'il convient d'attribuer a la drronique. L'Anonyme se désigne lui-mème par une simple initiale: P. dictus magister . . . 3) Roumains et Magyars devant d'histoire, Paris, 1899, p.7o sq. a) La première période de l'historiographie hongroise, Revue des Etudes hongroises, III, 1925, p. 16o 5) Cf. B. Flfnan, Gesdridrtliúes im Nibelungenlied, Ungarisdre Jahrbiidrer, Tll, t923, P. 2o7 sq, t u) E. Mireaux, La chanson de Roland et l'histoire de France, Paris, 1943, p. r43 sq. L'ouvrage récent de M. H. Grégoire sur Digénis Akritas, paru à New York, ne m'a pas été accessible t o 6 Bele regis Hangariae notarius. Ce P. est-il l'indication d'un Peftns ou d'un Paalus, ou faut-il lire simplement, comme d'autres l'ont cru: predictus? Et puis de quel Bela s'agit-il? Des quatre rois de ce nom que la dynastie arpadienne a donnés a la Hongrie, on est conv€nu d'éliminer le premier (ro6o-ro63) dont les années de règne ne correspondent pas a d'autres indices concernant l'auteur de la drronigue. Certains songeaient au quatrième et dernier du nom (146-rz7o), ce qui rendait le témoignage de l'Anonyme plus récent et plus contesable; Nicolas Iorga avait adopté ce point de vueT). Mais en général l'opinion des historiens hongrois, qui ont consacré a h question des redrerdres plus approfondies, oscille entre les règnes de Bela II (rr3r-rr4r) et Bela III (try3-t196).Le notaire est ainsi tant6t P(etus) contemporain du premier de ces monarques, tantót (P(ailas) ancien notaire royal en rrTZ etévéque en Transylvanie sous le règne du seconds). Un ouvrage aussi récent que tHistoire d,e Ia Transylaanie de M. L. Mekkai cite ..le notaire anonyme du roi Bela III > (fin du XIIe sièclee)), sans tenir compte tou- dres de caractère paléographique aboutissent a faire de l'auteur de la óronique un contemporain de Bela II, antérieur d'un demi-siècle. Selon la dernière de ces études, il s'agirait d'un certain Barnabas, qui a été effectivement le notaire de ce souverain. La difiérence n'est pas sans importance: certaines informations 1nur'ant ètre rapportées à l'époque du drroniqueur ont un tout autre relief, si elles P€uvent étre datées de la première moitié du XIIe siècle, et une valeur moindre, si elles ont éd insérées dans le tcxte de la drronique cinquante ans plus tard. Il y a lieu de tenir compte de certaines particularités du style: I'Anonyme reconnaît devoir I'inspiration qui l'a poussé a raconter les hauts faits de son peuple a la lecure du récit de la guere de Troie par Dares Phrygius, euvre très en vogue auprès des clercs de Paris au XIIe siècle. Or c'est à cette méme source qu'a puisé le ùroni- queur allemand Othon de Freising, dont l'une des auvres a été rédigée Yers rr4o. Si l'on relit avec artention les deux textes, on ne peut se dissimuler le fait que cer- taines tournures de phrases sont tout à fait semblables. Faut-il en induire une influence de la drronique allemande sur la reladon du notaire hongrois, ou les rapporter toues dzux a cette source commune d'inspiration et au centre de ?) Les plus anciennes drroniques hongroises et le passé des Roumains, Acad. roumaine Bullet. de la sect. hist., IX, r9zr, p. 2ot sq.; Histoire des Roumains, III' p. y3 8) Cette dernière opinion dirns l'étude de C. Sebesryén, Ki volt Anonymus?, Budapest, 1879, a été reproduite par E. Iakubovidr dans le Magyar Nyelv, XIII, rgzy e) Paris, r946,p.68 10) P. Mester, Adalékok az Anonymus-Kérdéshez, Emlékkónyv Dr Gróf Klebelsberg, Buda- pest, r92t, p. 16o sq. 11) Wer war Anonymus, dans le Jahrbudr des Instituts fúr Ungarisdre Gesdridrte in Vien, 1932. Nous ne connaissons de dernier ouvrage que d'après un compte rendu de In, Z. Pàcliganu dans la Revista istoricà romànà XY, ry45, p. 5r4 Í07 rayonnemenr intellectuel qu'était déjà Paris au remps de Sugar et d'Abélard? Il y a là le sujet d'une étude qui pourrait étre particulièrement atadrante. Je voudrais cependant attirer l'attention sur un problème de bien moindre enYel$ure' mais qui pourrait contribuer à déterminer alrec plus uploads/Histoire/ bratianu-theme-bulgarie 1 .pdf

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  • Publié le Oct 27, 2021
  • Catégorie History / Histoire
  • Langue French
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