La Lettre de l’AARS, No. 33 (2008) 6 Dans un article précédent (Hachid, 2004),

La Lettre de l’AARS, No. 33 (2008) 6 Dans un article précédent (Hachid, 2004), nous attirions l’attention de Moha- med Aghali-Zakara sur le fait qu’il était difficile de rejeter radicalement toute as- sociation des inscriptions rupestres à des images figuratives, à partir d’une étude basée sur deux cent inscriptions, dont aucune image ne nous était présentée, une documentation à laquelle il était unique- ment fait allusion, sans que l’on sache de quelle (s) région (s) du Sahara ces inscrip- tions provenaient (Aghali-Zakara, 2003). Dans un article réponse, notre collègue nous apprenait que ces matériaux illustra- tifs n’avaient pu être publiés “à la suite d’avatar divers” (2005 : 6). Il est difficile d’adhérer aux conclusions d’un travail lorsque celles-ci sont publiées sans être accompagnées des travaux qui ont permis de les établir, sans, non plus, leurs illustra- tions, et, sachant que le lecteur n’est pas averti que ces éléments manquants sont “à paraître”. On apprend, finalement, dans ce même article réponse que les inscrip- tions en question proviennent de l’Adrar des Ifoghas et de l’Amsak. Mais, alors que les matériaux de l’étude sont toujours absents, l’auteur persiste : il y a “non- association” pour les “deux centaines” d’inscriptions étudiées (lesquelles), et, “Le même constat de non-association (est fait) pour le “corpus” de l’Adrar des Ifo- ghas (Mali)”, un corpus qui a fait l’objet d’une étude réalisée à partir des photogra- phies de Christian Dupuy, avec la contri- bution de “collaborateurs locaux” (2005 : 7). Dans les deux articles de Mohamed Aghali-Zakara (2003 et 2005), c’est donc la même affirmation un peu péremptoire -la non-association des inscriptions à des images figuratives- qui est faite sans que l’on ait accès ni à la démonstration des faits ni à une partie, au moins, des illus- trations : il y a là un problème de méthode de travail. Nous pensions trouver la démonstration attendue dans un ouvrage récemment paru, mais celui-ci porte sur des inscriptions rupestres touarègues du Sahel nigéro-ma- lien, des inscriptions qui “ne se trouvent pas dans un contexte d’art rupestre, c’est- à-dire qu’on ne remarque pas de gravures animalières ou humaines proches” (Agha- li-Zakara et Drouin, 2007 : 12). En revan- che, il y a fort à craindre que la publication, également récente, d’“un panneau rocheux du Nord de l’Ayar (Niger)”, si elle est destinée à appuyer la non-association des inscriptions et des images figuratives, ne puisse emporter notre conviction (Aghali- Zakara, 2006 : 3). Le « panneau rocheux » de l’oued mammanet L’étude graphique et sémantique des inscriptions du “panneau rocheux” de l’Oued Mammanet, réalisée par un groupe des membres du Rilb permet “de considé- rer que gravures figuratives et inscriptions sont simplement contiguës et non pas “as- sociées” selon la formule trop rapidement et souvent employée” affirme Mohamed Aghali-Zakara (2006 : 3). Nous revenons, donc, sur quelques lacunes de cette étude qui donnent à craindre que, si la méthodo- logie employée présentement l’était pour d’autres parois gravées ou peintes, le pré- historien spécialiste de l’art rupestre ne soit, alors, guère convaincu. L’article décrit le principal personnage du panneau comme “un bonhomme aux bras levés tenant dans la main un objet qui pourrait être un bâton ou une arme”. La première erreur méthodologique nous semble résider dans le fait de n’avoir pas soumis l’image de ce “bonhomme” à un spécialiste de l’art rupestre qui aurait faci- lement identifié l’image fort bien connue du “guerrier libyen”, un thème et un étage de la période caballine finale dont il est établi, depuis longtemps, que son centre ethno-géographique se trouvait au Sahara méridional, dans les massifs de l’Ayar et l’Adrar des Ifoghas, avec des extensions au Sahara central. Cet étage a été indivi- dualisé il y a plus de trente ans mainte- nant par Henri Lhote (1972), et, étudié par plusieurs préhistoriens dans les mas- sifs de l’Ayar et de l’Adrar des Ifoghas comme au Sahara central (Hachid, 2006). Quant aux “quadrupèdes”, la qualité de la photographie produite dans l’article ne permet pas de sortir de cette identifi- cation basique. Celle-ci est prise de loin, en contrebas et sans zoom, obliquement, et, donc, déformée; les images figuratives comme les inscriptions s’en trouvent dif- ficilement lisibles. La grande majorité des trente quatre inscriptions de ce panneau prend place “de part et d’autre du bonhomme”, mais aucune photographie, ni relevé graphique direct ou indirect (à partir de photogra- phies numériques traitées ou non par les logiciels adéquats) ne sont produits, ni le texte intégral de ces messages traduits qui pourraient intéresser le lecteur. Aucune dimension n’est mentionnée. Pourtant, de telles données sont nécessaires à un ré- pertoire et à la numérisation de celui-ci. Il semble que l’auteur n’ait découvert les avantages de la photographie numérique que postérieurement à cet article, avanta- ges dont il souligne qu’ils “ménagent bien des surprises au regard de ce qui n’était pas décelable à l’oeil nu” (Aghali-Zakara et Drouin, 2007 : 2). Si effectivement, des chercheurs comme F. Nicolas, Raymond Mauny ou Henri Lhote n’ont pas eu la chance d’avoir accès à cette technologie photographique (Aghali-Zakara et Drouin, 2007 : 2, note 1), les spécialistes de l’art rupestre en font usage depuis longtemps déjà, sans compter les logiciels qui vien- nent ensuite affiner la lecture de l’image numérique, notamment quand il s’agit des inscriptions peintes dont le contour des lettres est alors plus précisément dé- limité, l’ocre se détachant de la couleur de la paroi encaissante. L’article ne fait pas de commentaires sur la manière dont les inscriptions ont été inscrites entre les figures, puisque, selon le groupe de tra- vail du Rilb, elles leur sont postérieures. Même si, présentement, l’étude linguis- tique permet de départager facilement le contexte figuratif des inscriptions, il faut parfois, et, pour d’autres parois, faire ap- pel à un spécialiste de l’art rupestre pour, éventuellement, repérer des cas précieux de superposition entre les inscriptions et les éléments figuratifs, mêmes partiels et réduits, et, situer chronologiquement les gravures figuratives, pour, ainsi, appré- cier leur distance temporelle par rapport aux inscriptions. Cet article est, donc, une étude stric- tement linguistique qui n’associe pas, au moins, un examen minimal des ima- ges figuratives, puisqu’elle identifie, de manière élémentaire, un “bonhomme” et des “quadrupèdes”; même si ce langage est volontairement “prudent”, il est ce- pendant trop minimaliste. Avec une photo difficilement lisible par un préhistorien, cette étude n’est donc utile qu’au linguis- te. Pourtant, dans sa réponse, Mohamed Aghali-Zakara affirme que la démarche du Rilb est pluridisciplinaire, que “l’ap- port interdisciplinaire était pour nous une exigence...”, et, nous reproche de négli- ger “l’article de Lionel Galand (1984), à l’origine du projet du Rilb, qui détaillait les indispensables conditions à réunir pour ce travail épigraphique” (2005 : 6). Aucun de ces critères n’est, en tous les cas, pris en compte dans le présent ar- ticle. De plus, cet auteur nous apprend que Christian Dupuy, spécialiste de l’art rupestre de l’Adrar des Ifoghas, n’a pas collaboré à l’étude des inscriptions de ce même massif (2006 : 6). Nous prenons, également, note du fait qu’après avoir in- validé “la régionalisation” possible des in- cipit, une hypothèse que nous avions pré- cédemment émise (Hachid, 2004), notre collègue, lui, en fait état et usage pour le panneau rocheux de l’oued Mammanet en parlant d’ “incipit formulaires fréquents dans le massif de l’Aïr...” (2006 : 3) : si un incipit est fréquent sur les parois de l’Ayar est-il, oui ou non, un incipit qui a valeur régionale ? Si, non, comment peut- il être fréquent dans une région sans être régional ? Et, si, oui, au nom de quelle rè- gle, il ne pourrait en être autant au Sahara central ou dans l’Atlas saharien ? Des inscriptions et des images rupestres figuratives bel et bien associées dans le massif de l’Ayar Nous avons quelque peu été rassurée de lire dans son article que Mohamed Agha- li-Zakara avait quelque peu révisé sa po- sition tranchante en concluant que la non- association des inscriptions et des images figuratives sur ce “panneau” de l’Oued Mammanet, était “localisée” et “qu’il faut évidemment étudier chaque situation, cas par cas, sans généraliser à priori” (2006 : 3). Cependant, sa prise de position semble reprendre le dessus puisque récemment encore, il réfutait un cas d’association publié par Jean-Loïc Le Quellec (Aghali- m i s c e l L a n é e s s a h a r i e n n e s — Des inscriptions et des images rupestres figuratives bel et bien associées dans le massif de l’Ayar La Lettre de l’AARS, No. 33 (2008) 7 Zakara, 2007; Le Quellec, 2007). Par ailleurs, nous allons le voir, à proximité du “panneau rocheux” et dans le même Oued Mammanet, d’autres ins- criptions sont, elles, bel et bien associées à des images figuratives, et, pas n’im- porte lesquelles, puisqu’il s’agit de hé- ros fondateurs de la tradition touarègue et de commentaires les accompagnant. Il semble que Mohamed Aghali-Zakara n’ait pas eu connaissance de ce cas fort intéressant bien qu’il se trouve dans une région qui ne lui est pas étrangère, le massif uploads/Histoire/ des-inscriptions-et-des-images-rupestres-figuratives-bel-et-bien-associees-dans-le-massif-de-l-x27-ayar.pdf

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  • Publié le Sep 10, 2021
  • Catégorie History / Histoire
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