18 adsp n° 35 juin 2001 accréditation et qualité des soins hospitaliers Née dan
18 adsp n° 35 juin 2001 accréditation et qualité des soins hospitaliers Née dans l’industrie, la démarche qualité est un mode de management. Son application au monde de la santé nécessite de préciser ce que recouvre la qualité des soins. Les principes généraux de la qualité Du management de la qualité au management par la qualité L a qualité a évolué à travers les âges pour être aujourd’hui un mode de management des entre- prises incontournable et performant. En partant de son historique et en abordant les différentes phases de son évolution, nous découvrirons les véritables enjeux socio-économiques des démarches qualité. De l’émergence du contrôle de la qualité… au management de la qualité La qualité est une notion ancienne. Mais le concept qualité, lui, apparaît plus récemment avec le dévelop- pement de la production industrielle de masse au cours des années vingt. C’est la période du taylorisme, défi nie comme une organisation scientifi que du travail fondée sur la segmen- tation des tâches de production en opérations simplifi ées à l’extrême. Les opérateurs sont entièrement soumis à un rythme de travail imposé, afi n que soient assurés les objectifs de productivité de la direction. Un service de contrôle indépendant de la production intervient au terme des étapes jugées déterminantes pour vérifi er la conformité des produits fabriqués. Dans une entreprise célèbre, la Bell Telephone, aux États-Unis d’Amérique, est créé en 1924 un service qualité sous la férule de W. Shewart (ingénieur statisti- cien). Suite à de gros problèmes de non-qualité survenus sur les produits de la fi rme, Shewart, qui avait étudié les travaux de Fisher dans le domaine des statistiques, propose l’idée d’un contrôle organisé des produits et des services. Il pose ainsi les bases de la maîtrise statistique des procédés (MSP). Dans le contexte de l’époque, ce contrôle reste confi é à des services indépendants de ceux qui produisent. Ainsi sont nés les services censeurs de la production, cons- tatant a posteriori la conformité des produits livrés. L’utilisation des cartes de contrôle va permettre l’amé- lioration du produit de la fabrication et l’intégration de la qualité le plus en amont possible de la production. On ne se contente plus de constater le niveau de conformité. La Seconde Guerre mondiale et l’effort de guerre des industries américaines d’armement ont participé à l’évolution du contrôle en maîtrise de la qualité par le développement des abaques statistiques appelés Military Standards, encore utilisés de nos jours par les industries. Shewart s’intéressa également à la responsabilité du management et à la prise en compte des attentes des clients dans la défi nition des spécifi cations d’un produit ou d’un service. Au lendemain de la guerre, le Japon est vaincu, son économie est en ruine. Le rêve du « grand Extrême-Orient prospère » fondé sur les conquêtes militaires s’est envolé. L’archipel du Japon, plus petit que la Californie mais dix fois plus peuplé, dépourvu de ressources naturelles, doit relever un important défi . Pour ce faire, MacArthur mandate des experts américains de la gestion d’entre- prise et du contrôle qualité, parmi lesquels se trouve Deming. Deming démontra que l’obtention de la qualité est dépendante de l’implication de tous les acteurs de l’entreprise : les clients, les fournisseurs, les actionnaires Fabien Martinez Qualiticien, respon- sable développement qualité, AP-HP adsp n° 35 juin 2001 19 Les principes généraux de la qualité A uguste Comte disait : « On ne connaît bien une science que lorsqu’on en con- naît l’histoire. » L’histoire de la qualité commence il y a plus de quarante siècles dans le royaume de Babylone. Le roi de Babylone Hammou- rabi (1792-1750 avant J.-C.) fi t graver un code de 300 articles dans une stèle faite d’un énorme bloc de diorite. La notion de responsabilité médicale (arti- cle 218) prévoyait que : « si un médecin opère un homme pour blessure grave avec une lancette de bronze et cause la mort de l’homme ou s’il ouvre un abcès à l’œil d’un homme avec une lancette de bronze et détruit l’œil de l’homme, il aura les doigts coupés ». De même, l’article 233 introduit la notion de maîtrise de la qualité en production : « si un maçon a construit une maison pour quelqu’un mais n’a pas exécuté son travail suivant les normes et si un mur est penché, ce maçon, à ses frais, renforcera le mur ». Au XVe siècle avant J.-C., les Égyptiens pra- tiquaient le contrôle du travail des tailleurs de pierre par des inspecteurs indépendants. Au Moyen Âge, Le Livre des mestiers d’Étienne Boileau (publié entre 1258 et 1268) dressait les « cahiers des charges » des principaux métiers de l’époque. Jean-Baptiste Colbert (1619-1683), secrétaire d’État de Louis XIV , fi t une décla- ration le 3 août 1664 qui reste d’actualité : « Si nos fabriques imposent, à force de soin, la qualité supérieure de nos produits, les étrangers trouveront avantage à se fournir en France et leur argent affl uera dans les caisses du royaume. » De l’improvisation à l’organisation Au début du XXe siècle, Frederick W. Taylor (1856-1915), père du management scien- tifi que, fi t passer l’industrie de l’improvi- sation à l’organisation rationnelle, notam- ment grâce à la mesure du temps exigé par chaque tâche. La productivité fut mul- tipliée par trois et les salaires grimpèrent. Cependant, ce système excluait le travail en équipe et séparait « les hommes qui pensent de ceux qui agissent ». En 1916, le pionnier du management, Henri Fayol (1841-1925) expliquait les prin- cipes de la gestion globale d’entreprise dans un ouvrage : « administrer, c’est prévoir, organiser, coordonner et contrôler ». Cela- devait assurer une production économique, tout en éliminant les gaspillages et en optimisant les ressources. Formalisation de la qualité En 1926, l’Association française de nor- malisation (Afnor) fut créée, ainsi que la Fédération internationale des associations nationales de normalisation (ISA), ancê- tre de l’ISO (International Organisation for Standardization) qui entrera en fonction le 23 février 1947. Walter A. Shewart (1891-1968) fut nommé à la direction technique des Bells Labs à New York en 1925, en charge d’étudier des méthodes pour améliorer la qualité et la productivité. Il y perfectionnera sa théorie de la carte de contrôle. Il publie en 1931 le résul- tat de ses travaux qui permet une ap proche scientifique de la qualité dans La qualité : 4 000 ans d’histoire et la collectivité. De plus, elle repose sur la maîtrise des processus basés sur un cycle dynamique et itératif : G planifi er, préparer, défi nir (plan), G faire, mettre en œuvre (do), G vérifi er, analyser, contrôler, évaluer (check), G agir, améliorer, décider (act). Aussi, Deming élabore quatorze règles d’action qui sont les principes de base du management de la qualité : 1. Gardez le cap de votre mission en améliorant cons- tamment les produits et les services. 2. Adoptez une nouvelle philosophie de management. Une absence de politique de formation, des matières premières de faible qualité, des produits défectueux, un service client laxiste, autant de points inaccep- tables et à éliminer. 3. Faites en sorte que la qualité des produits ne demande qu’un minimum de contrôles. Le corollaire d’un tel contrôle est l’acceptation du défaut, aussi vaut-il mieux prévenir et investir dans l’élimination du défaut à la source et faire du contrôle par échan- tillonnage. 4. Abandonnez la règle des achats au plus bas prix. Cherchez plutôt à réduire le coût total. Réduisez au minimum le nombre de fournisseurs par article, en établissant avec eux des relations à long terme de loyauté et de confi ance. 5. Développez d’une manière constante la qualité des produits et des services. Les rebuts et gaspillages doivent être réduits, tous les process de l’entreprise doivent être retravaillés. 6. Instituez une formation permanente pour tout le personnel. 7. Instituez une forme moderne d’autorité (leadership) ayant pour but de faciliter le travail des hommes et des machines. 8. Faites disparaître la crainte, pour que chacun puisse contribuer au succès de l’entreprise. 9. Abattez le cloisonnement entre services. La commu- nication entre services est indispensable. Des cercles de qualité multidisciplinaires ne peuvent que contribuer à l’enrichissement des tâches et des solutions. 10. Supprimez les exhortations, les slogans et les objec- tifs qui demandent aux employés d’atteindre le « zéro défaut » et d’augmenter la productivité. 11. Supprimez les quotas de production, la méthode dite « direction par objectifs (DPO) » et toute forme de management par les chiffres. 12. Supprimez les obstacles qui empêchent les employés, les ingénieurs et les cadres d’être fi ers de leur travail. 13. Instituez un programme dynamique de formation et d’amélioration personnelle. 14. Créez la structure de l’amélioration permanente, chacun devant participer. Dans les années soixante-dix, la crise économique et l’arrivée massive des produits japonais (notamment 20 adsp n° 35 juin 2001 accréditation et qualité des soins hospitaliers dans le secteur automobile) poussent les industriels occidentaux à initier des démarches de type « assurance qualité » et « qualité totale ». C’est à cette époque que Crosby se fait connaître. Son message s’adresse aux directions afi uploads/Industriel/les-principes-generaux-du-management-de-la-qualite.pdf
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- Publié le Aoû 05, 2021
- Catégorie Industry / Industr...
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