Revista Brasileira de Literatura Comparada, n. 31, 2017 52 RACONTER LES VIOLENC

Revista Brasileira de Literatura Comparada, n. 31, 2017 52 RACONTER LES VIOLENCES EXTRÊMES: MÉMOIRE ET OUBLI DANS LA FICTION DE TUNUNA MERCADO, RONALDO COSTA FERNANDES, ALBERTO MANGUEL ET TEIXEIRA COELHO1 Rogério Lima2 RESUMO: Partindo da análise de algumas obras da produção recente de ficcionistas brasileiros e argentinos procuramos refletir sobre as formas e estruturas de construção da memorialística ficcional da América do Sul pós-ditatorial. PALAVRAS-CHAVES: Violências, memória e esquecimento; ficção Sul Americana e pós-ditadura; Tununa Mercado; Ronaldo Costa Fernandes; Teixeira Coelho; Alberto Manguel. ABSTRACT: From the analysis of some works of the recent production of Brazilian and Argentine fictionists, we sought to reflect on the forms and structures of the construction of the fictional memorial of post- dictatorial South America. KEYWORDS: Violence, memory and forgetfulness; South American fiction and post-dictatorship; Tununa Mercado; Ronaldo Costa Fernandes; Teixeira Coelho; Alberto Manguel. « Les chagrins quels qu’ils soient deviennent supportables si on les mets en récit ou si l’on en tire une histoire. » Isak Dinesen (Karen Blixen) « Seule, peut-être, la simplicité d’esprit peut en effet nous permettre de supporter le chaos. » Hermann Broch La première question que je voudrais soulever ici est la suivante : Comment la littérature se situe-t-elle face aux événements qui hantent l’esprit de l’homme contemporain, à savoir la politique, l’économie, la médiatisation de la vie quotidienne ? Tient-t-elle suffisamment compte de chacune des ces questions? Comment parler de la littérature aujourd’hui, comment faire de la littérature, comment l’enseigner, sans jeter un coup d’œil en direction de l’économie, sans parler de l’emploi, des salariés et des chômeurs, de la politique, de l’histoire, de la mémoire politique et de l’oubli ? Je pense que pour lire on a besoin d’un état de tranquillité. C’est très difficile, me semble-t-il, de se consacrer à la lecture sans être tranquille. Quand je regarde quelqu’un lire dans le métro ou à l’arrêt de bus je me dis : cette personne, ce lecteur-là, il a la tranquillité. Je me dis cela parce qu’il me paraît nécessaire qu’il se soit trouvé une 1 Cet article a été écrit pendant mon séjour de recherche en France, Université Rennes 2, au ERIMIT, inscrit dans le cadre du programme Estágio Sênior no Exterior (Stage Senior à l’étranger) de la CAPES - Brésil destiné aux enseignants-chercheurs brésiliens qui ont plus de huit ans de formation doctorale. La révision technique du français est de Aline Postel. 2 Universidade de Brasília/ CAPES/Université Rennes 2 - ERIMIT. Revista Brasileira de Literatura Comparada, n. 31, 2017 53 tranquillité provisoire pour lire. Je pense qu’il n’est pas préoccupé par son travail, ni par sa famille, ni par sa femme, ou tout au moins, il a réussi à mettre les soucis provisoirement de côté. Mais peut-être je me suis complètement trompé à ce sujet. Pendant l’écriture de ce texte, je me suis rappelé du poète brésilien Manuel Bandeira et de son poème «nova poética» [nouvelle poétique] : Vou lançar a teoria do poeta sórdido. Poeta sórdido: Aquele em cuja poesia há a marca suja da vida. Vai um sujeito, Sai um sujeito de casa com a roupa de brim branco muito bem en- [gomada, e na primeira esquina passa um [caminhão, salpica-lhe o paletó ou a calça [de uma nódoa de lama: É a vida. O poema deve ser como uma nódoa no brim: Fazer o leitor satisfeito de si dar o desespero. [...]. (BANDEIRA, 1974, P.287) Dans ce poème Bandeira parle de sa volonté de proposer une théorie du poète sordide. Pour Bandeira, le poète sordide est celui dont la poésie porte la tache de la vie. Il parle d’un homme qui sort de sa maison très bien habillé en tenue de ville blanche ; au premier coin de rue un camion passe et éclabousse sa veste ou son pantalon d’une tache de boue. Pour le poète la tache c’est la vie. Et la vie c’est la littérature elle-même, cette chose qui dérange le lecteur en bouleversant sa manière de voir les faits de la vie. La littérature agit en créant un nouveau sens commun, elle ne reprend pas des idées ou des représentations qui sont déjà appropriées par les lecteurs de la culture de masse. Elle reconfigure les formes du visible commun et les relations entre visibilité et significations (DUARTE-PLON, 2007). Cette politique est propre au statut de l’écriture, à sa manière de se positionner, à la forme de l’expérience sensible qu’elle raconte, au type de monde qu’elle construit avec tous les gens qui lisent : La politique de la littérature n’est pas la politique des écrivains. Elle ne concerne pas leurs engagements personnels dans les luttes politiques ou sociales de leur temps. Elle ne concerne pas non plus la manière dont ils représentent dans leurs livres les structures sociales, les mouvements politiques ou les identités diverses. L’expression « politique de la littérature » implique que la littérature fait de la politique en tant que littérature. Elle suppose qu’il n’y a pas à se demander si les écrivains doivent faire de la politique ou se consacrer plutôt à la pureté de leur art, mais que cette pureté même a à voir avec la politique. Elle suppose qu’il y a un lien essentiel entre la politique comme forme spécifique de la pratique collective et la littérature comme pratique définie de l’art d’écrire. (RANCIÈRE, 2007, P.11) En 1945, Carlos Drummond de Andrade, un autre poète brésilien important, contemporain de Manuel Bandeira, a publié le poème « A procura da Poesia » [Recherche de la poésie], dans son ouvrage Rosa do Povo (ANDRADE, 2002, p.117-118) : Não faças versos sobre acontecimentos. Não há criação nem morte perante a poesia. Diante dela, a vida é um sol estático, não aquece nem ilumina. As afinidades, os aniversários, os incidentes pessoais não contam. Revista Brasileira de Literatura Comparada, n. 31, 2017 54 Não faças poesia com o corpo, esse excelente, completo e confortável corpo, tão infenso à efusão lírica. Tua gota de bile, tua careta de gozo ou de dor no escuro são indiferentes. Nem me reveles teus sentimentos, que se prevalecem do equívoco e tentam a longa viagem. O que pensas e sentes, isso ainda não é poesia. Não cantes tua cidade, deixa-a em paz. O canto não é o movimento das máquinas nem o segredo das casas. Não é música ouvida de passagem, rumor do mar nas ruas junto à linha de espuma. O canto não é a natureza nem os homens em sociedade. Para ele, chuva e noite, fadiga e esperança nada significam. A poesia (não tires poesia das coisas) elide sujeito e objeto. Não dramatizes, não invoques, não indagues. Não percas tempo em mentir. Não te aborreças. Teu iate de marfim, teu sapato de diamante, vossas mazurcas e abusões, vossos esqueletos de família desaparecem na curva do tempo, é algo imprestável. Não recomponhas tua sepultada e merencória infância. Não osciles entre o espelho e a memória em dissipação. Que se dissipou, não era poesia. Que se partiu, cristal não era. Penetra surdamente no reino das palavras. Lá estão os poemas que esperam ser escritos. Estão paralisados, mas não há desespero, há calma e frescura na superfície intata. Ei-los sós e mudos, em estado de dicionário. Convive com teus poemas, antes de escrevê-los. Tem paciência se obscuros. Calma, se te provocam. Espera que cada um se realize e consume com seu poder de palavra e seu poder de silêncio. Não forces o poema a desprender-se do limbo. Não colhas no chão o poema que se perdeu. Não adules o poema. Aceita-o como ele aceitará sua forma definitiva e concentrada no espaço. Chega mais perto e contempla as palavras. Cada uma tem mil faces secretas sob a face neutra e te pergunta, sem interesse pela resposta, Revista Brasileira de Literatura Comparada, n. 31, 2017 55 pobre ou terrível, que lhe deres: Trouxeste a chave? Repara: ermas de melodia e conceito elas se refugiaram na noite, as palavras. Ainda úmidas e impregnadas de sono, rolam num rio difícil e se transformam em desprezo1. Ce poème porte sur l’impossibilité de création poétique après la deuxième guerre mondiale et ses horreurs. Le poète refuse l’idée d’une poésie facile et pleine de clichés. Drummond rejette la poésie qui donne des représentations stéréotypées de la vie. D’une certaine manière nous sommes devant l’idée de la poésie comme un acte de l’extrême (MISSTIC, 2008), sans concessions à la pensée du sens commun sur la poésie et le poétique. Parler de la littérature aujourd’hui Aujourd’hui, parler de littérature est un problème difficile, car la culture humaniste est questionnée et accusée d’être un instrument de domination de la culture et des foules. Selon le philosophe Peter Sloterdijk: l’humanisme moderne est arrivé à sa fin comme modèle d’école philosophique et de formation. Il ne peut plus soutenir l’illusion que les plus grandes structures politiques et économiques puissent être organisées selon l’agréable modèle de la société littéraire (SLOTERDIJK, 2000, P.12). De la même façon que les plus importants penseurs et théoriciens de son temps, Sloterdijk dit que le livre n’occupe plus la position de média privilégiée uploads/Litterature/ 415-1573-1-pb 1 .pdf

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