■37-201-E-10 Dyslexie de développement M. Habib La dyslexie de développement es
■37-201-E-10 Dyslexie de développement M. Habib La dyslexie de développement est la forme la plus fréquente d’un ensemble de troubles regroupés dans les classifications actuelles sous les termes de « troubles spécifiques des apprentissages », se définissant par une altération de la lecture liée à un défaut d’installation de précurseurs, en particulier linguis- tiques, de cette dernière. Son origine est en grande partie génétique, mais de nombreux facteurs liés à l’environnement semblent capables d’en moduler l’intensité. Cliniquement, trois formes sont à distinguer, ayant chacune une présentation commune (incapacité de l’enfant à entrer dans le langage écrit), avec des signes associés divers (troubles langagiers dans la première, attentionnels dans la seconde et de la coordination motrice dans la troisième), suggérant donc des mécanismes potentiellement différents à leur origine. L’apport de la neuro-imagerie à la compréhension de ces mécanismes a été majeur ces der- nières années, non tant l’imagerie fonctionnelle, démontrant les zones, essentiellement hémisphériques gauches, qui dysfonctionnent durant des tâches liées à la lecture, mais également et surtout l’imagerie morphologique, dont l’imagerie de diffusion, mettant en évidence des patrons atypiques de connectivité. Du point de vue thérapeutique, les recommandations actuelles insistent sur la nécessaire pluridisciplina- rité des prises en charge, privilégiant, selon les formes cliniques, les aspects langagiers, psychomoteurs ou neuropsychologiques de la rééducation. Les rééducations dont l’efficacité a été scientifiquement éprouvée sont rapidement passées en revue, en insistant sur celles, les plus récentes, exploitant l’hypothèse d’un défaut de connectivité intermodalitaire entre des systèmes cérébraux distincts. © 2018 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots-clés : Dyslexie ; Trouble d’apprentissage ; Imagerie cérébrale ; Phonologie ; Processus attentionnels ; Rééducation Plan ■Introduction 1 ■Généralités 2 Définitions, nosographie 2 Démographie 2 ■Présentation clinique de la dyslexie 2 ■Comorbidités 3 ■Facteurs étiologiques 4 Génétique de la dyslexie 4 Effet du statut socioéconomique (SES) 5 Effet de la langue maternelle 5 ■Mécanismes de la dyslexie 5 Une hypothèse prévalente : défaut de la conscience phonologique 5 Première hypothèse alternative : la théorie visuoattentionnelle de la dyslexie 7 Seconde hypothèse alternative : le défaut d’intégration intermodalitaire 7 ■Traitement 8 Entraînements à la phonologie 8 Entraînements non phonologiques 9 ■Tentative de synthèse et perspectives 10 ■ Introduction La dyslexie de développement, ou trouble spécifique d’apprentissage de la lecture, ci-après dénommée « dyslexie », est la forme la plus fréquente des troubles spécifiques d’apprentissage, volontiers appelés dans la tradition clinique franc ¸aise « troubles dys ». Initialement considérée comme un chapitre de la discipline pédiatrique, la persistance habituelle des troubles à l’âge adulte en fait plutôt aujourd’hui une branche de la neurologie, en réalité un « trouble neurodéveloppemental ». Ses conséquences sur la vie des enfants et des adultes sont variables mais de plus en plus souvent considérées comme relevant potentiellement du champ du handicap, pour son impact tant sur la vie scolaire que familiale et sociale des individus qui en sont porteurs. Son étiologie exacte est inconnue, mais les facteurs le plus solidement établis sont d’ordre génétique, les facteurs d’environnement jouant certainement un rôle considérable mais moins largement étudié. Les progrès réalisés ces dernières années dans les méthodes en neurosciences, et en particulier l’avènement des techniques d’imagerie du cerveau, ont considérablement modifié notre compréhension des mécanismes du trouble, et par-là même les pratiques diagnostiques et thérapeutiques des différents professionnels impliqués dans leur prise en charge. Dans cet article sont présentés succinctement les aspects défi- nitionnels, démographiques et nosographiques généraux, puis les EMC - Psychatrie/Pédopsychiatrie 1 Volume 0 > n◦0 > xxx 2018 http://dx.doi.org/10.1016/S0246-1072(18)81436-5 37-201-E-10 ■Dyslexie de développement caractéristiques cliniques des enfants et des adultes dyslexiques, avant d’aborder les mécanismes physiopathologiques et les fac- teurs étiologiques présumés à son origine. Enfin, l’état actuel des pratiques thérapeutiques est décrit, telles que celles-ci sont recommandées dans les publications de consensus nationales et internationales. ■ Généralités Définitions, nosographie Les deux grandes classifications internationales, le DSM-5 [1] (Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders-5) et la CIM- 11 (Classification internationale des maladies-11, en cours de rédaction), comportent des définitions relativement tranchées incluant un certain nombre de critères : un défaut d’acquisition de lecture entraînant un décalage par rapport aux performances réalisées par la moyenne des individus sur des tests standardisés de lecture, un retentissement significatif de ce défaut sur les appren- tissages scolaires et l’usage de la lecture dans la vie quotidienne, enfin une normalité de l’intelligence et l’absence d’autre patho- logie susceptible d’interférer avec cet apprentissage. Ce dernier point est cependant relatif puisqu’on peut tout de même parler de dyslexie chez un enfant souffrant de déficience intellectuelle ou de déficience sensorielle si les performances en lecture sont inférieures à celles attendues eu égard à la pathologie en cause. L’une des avancées de ces deux classifications par rapport aux versions antérieures qu’étaient le DSM-IV et la CIM-10, est qu’il existe une rubrique spécifique non plus dénommée « dyslexie » ou « trouble de la lecture », mais « trouble spécifique d’apprentissage » (DSM-5) ou encore « trouble d’apprentissage développemental » (CIM-11) incluant également deux autres domaines qui faisaient précédemment l’objet de rubriques séparées : les troubles de l’écriture et les troubles du calcul. Cette évolution nosographique, qui peut paraître anodine, représente en fait un changement radical dans les concepts autour de ces troubles, changement qui a été à l’évidence motivé par l’observation clinique, large- ment partagée, que le trouble de lecture est, plus souvent que l’inverse, associé à d’autres difficultés cognitives, ce qui pour le clinicien rendait artificielle son individualisation stricte. À cet égard, cette nouvelle vision des choses est bien plus conforme à la réalité clinique. Elle possède cependant l’inconvénient d’aboutir potentiellement à bannir le terme de dyslexie, ce qui, dans l’état actuel des pratiques et des connaissances, peut paraître prématuré. Un autre débat autour de ces notions terminologiques concerne l’écart à la norme, une notion forcément arbitraire, surtout si l’on considère, comme beaucoup l’ont avancé, que la dyslexie ne constitue, en termes de compétences en lecture, que la partie basse de la norme, la portion la plus faible d’une distribution continue des performances à des tests standardisés. Cet écart à la norme était, dans la version précédente des deux classifications, spéci- fié comme devant se concevoir relativement à l’âge, mais aussi au quotient intellectuel (QI). Actuellement, il n’est plus question d’écart par rapport au QI mais seulement à l’âge, ce qui a l’avantage d’inclure potentiellement un plus grand nombre d’individus en difficulté d’apprentissage, mais l’inconvénient majeur, qui com- mence à être dénoncé, d’exclure des individus à haut potentiel intellectuel, pour qui les performances en lecture sont dans la norme de leur tranche d’âge, ce qui pourrait les priver d’une prise en charge dont ils auraient pourtant besoin [2]. Démographie La prévalence de la dyslexie et des troubles dys varie de fac ¸on importante selon les études, de 5 à 15 %, de sorte qu’on avance en général des chiffres moyens tenant compte de cette variabi- lité, soit de 6 à 8 % des enfants d’âge scolaire. Lorsqu’on utilise la définition du DSM-IV, on retrouve, de manière grossièrement identique dans tous les pays où des études épidémiologiques sur le sujet ont été réalisées, 5 à 8 % de dyslexiques parmi la population générale. Ces chiffres varieraient en fonction de deux princi- Tableau 1. Critères résumés du DSM-5 du « Trouble spécifique des apprentissages » et leur spécification pour les troubles de la lecture a. A. Difficulté à apprendre et à utiliser les aptitudes académiques, comme indiqué par la présence depuis au moins 6 mois de l’un des symptômes suivants au moins 1. lecture de mots inexacte, lente ou laborieuse 2. difficulté à comprendre la signification de ce qui est lu (même si lu correctement) 3. difficultés d’orthographe (spelling) 4. difficultés dans l’expression écrite (ex : erreurs de ponctuation ou grammaticales, manque de clarté de l’expression des idées) 5. difficulté à maîtriser le sens des nombres, les faits numériques, ou le calcul 6. difficulté dans le raisonnement mathématique B. Significativement en dessous de ceux attendus pour l’âge et interfère significativement avec les performances académiques ou les occupations C. Commence durant les années d’école mais peut n’être manifeste que dès lors que les demandes excèdent les capacités limitées de l’individu D. Pas mieux expliquées par déficience intellectuelle, acuité auditive ou visuelle non corrigée, autres troubles neurologiques ou mentaux, adversité psychosociale, etc. a Spécification « avec atteinte de la lecture », exactitude dans la lecture de mots, vitesse ou fluidité de la lecture, compréhension en lecture. Le DSM-5 (Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders-5) précise que « le terme dyslexie est un terme alternatif utilisé pour se référer à un profil de difficultés d’apprentissage, caractérisé par des difficultés à reconnaître des mots courants de fac ¸on exacte ou fluide et de faibles habiletés de décodage et d’orthographe. Si le terme dyslexie est utilisé pour spécifier ce profil de difficultés, il est important d’identifier toute autre difficulté présente, comme des difficultés de compréhension de lecture ou de raisonnement mathématique ». paux facteurs d’environnement : le milieu socioéconomique et la langue maternelle. Sans entrer encore dans les détails, il apparaît clairement que les difficultés uploads/Litterature/ dyslexie-de-developpement-m-habib.pdf
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- Publié le Nov 09, 2022
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