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HAL Id: tel-03533237 https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-03533237 Submitted on 18 Jan 2022 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés. Le devenir des hauteurs dans l’écriture instrumentale depuis les années 1980 : fonction, densité et pseudomorphose d’un matériau historique Camille Lienhard To cite this version: Camille Lienhard. Le devenir des hauteurs dans l’écriture instrumentale depuis les années 1980 : fonction, densité et pseudomorphose d’un matériau historique. Musique, musicologie et arts de la scène. Université de Strasbourg, 2020. Français. NNT : 2020STRAC013. tel-03533237 UNIVERSITÉ DE STRASBOURG ÉCOLE DOCTORALE DES HUMANITES Approches contemporaines de la création et de la réflexion artistiques LabEx GREAM THÈSE présentée par : Camille LIENHARD soutenue le : 25 septembre 2020 pour obtenir le grade de : Docteur de l’université de Strasbourg Discipline/ Spécialité : Arts / Musicologie Le devenir des hauteurs dans l’écriture instrumentale depuis les années 1980 Fonction, densité et pseudomorphose d’un matériau historique THÈSE dirigée par : M. Pierre MICHEL Professeur en musicologie, université de Strasbourg RAPPORTEURS : Mme Ingrid PUSTIJANAC Maître de conférences en musicologie, université de Pavie M. Martin KALTENECKER Maître de conférences HDR en musicologie, université de Paris-Diderot AUTRES MEMBRES DU JURY : Mme Béatrice RAMAUT-CHEVASSUS Professeur émérite en musicologie, université de Saint-Etienne M. Hugues DUFOURT Directeur de recherches en musicologie, CNRS 2 3 LE DEVENIR DES HAUTEURS DANS L’ECRITURE INSTRUMENTALE DEPUIS LES ANNEES 1980 Fonction, densité et pseudomorphose d’un matériau historique 4 5 REMERCIEMENTS A Pierre Michel, dont les conseils rigoureux et bienveillants ainsi que l’ouverture d’esprit m’ont accompagné dès la genèse de ce travail. Une même gratitude me lie au LabEX GREAM, qui a offert à ce projet des conditions de réalisation idéales. A celles et ceux qui m’ont fait l’honneur de constituer le jury et qui, auparavant, ont contribué à cette thèse par des travaux et des échanges essentiels. A Béatrice Ramaut-Chevassus, dont l’approche de la postmodernité musicale a été l’une de inspirations initiales de mon questionnement. A Ingrid Pustijanac, dont l’expertise de la musique spectrale a éclairé ma catégorisation analytique. A Martin Kaltenecker, dont les écrits et les très nombreuses traductions ont nourri ma réflexion sur l’esthétique musicale contemporaine. A Hugues Dufourt, dont l’œuvre musicale a été un objet fondamental de cette étude et dont l’œuvre philosophique offre le modèle d’une pensée de la musique située dans le long cours de l’histoire des idées. A celles et ceux qui, à l’université de Strasbourg, m’ont apporté un soutien fidèle. Aux membres de mon comité de suivi de thèse, Julie Walker, Alessandro Arbo et Iradj Sabai, dont les conseils ont régulièrement jalonné le cheminement de ce travail. A Mathieu Schneider, dont la confiance et l’amitié ont été indéfectibles. A Philippe Manoury, dont l’enseignement a concouru à faire naître la préoccupation théorique qui s’exprime ici. A Charles-David Wajnberg, dont l’amitié, l’aide et les conseils ont été d’une constance exceptionnelle et décisive. A tous les miens. 6 7 Introduction 8 9 La musique, beaucoup l’ont dit, n’est pas dans les notes1. Elle l’est d’autant moins depuis qu’au XXe siècle, la « libération du timbre »2, selon une expression désormais consacrée, l’a émancipée du carcan de la hauteur. L’insuffisance de ce paramètre notationnel, quantifiable et combinatoire, ne s’établit plus seulement à l’aune d’un esprit qui le transcende, mais aussi, désormais, d’une matière qui le déjoue. Il n’y a là rien, d’ailleurs, qui provienne d’une découverte en tant que telle : hors de l’espace culturel occidental, les sons inharmoniques et bruités sont au cœur de nombreuses traditions musicales. Ce que vise ce bouleversement, ce sont les musiques occidentales jusque-là formalisées ou formalisables en termes de hauteurs, et plus spécifiquement la musique écrite, c’est-à-dire la musique savante. Depuis le milieu du Moyen-Âge, celle-ci avait soumis le phénomène sonore à une rationalisation progressive par l’unité symbolique de la note, associant la sensation de hauteur déterminée – ce que l’acoustique nomme la tonie – à une coordonnée abstraite. Le timbre désignait alors les qualités sonores instrumentales non quantifiables, tenues pour résiduelles. Au XXe siècle, l’effondrement du système tonal fragmente le paysage musical. Dans une émulation dispersée, le matériau se décloisonne et intègre l’ensemble du continuum sonore. Le timbre se libère d’abord par l’extension des marges de la musique savante, c’est-à-dire par les esthétiques coloristes, primitivistes ou encore expérimentales, auxquelles les développements scientifiques ouvrent peu à peu les perspectives d’une maîtrise technologique. Avant même de quitter le domaine de l’utopie futuriste, cet horizon porte déjà, chez Varèse, l’écriture à l’échelle du son complexe, bientôt explorée par les approches massiques de Ligeti, Penderecki ou Xenakis. D’un autre côté, la dynamique de rationalisation de la hauteur se radicalise avec le structuralisme sériel de Darmstadt, jusqu’à atteindre le point de saturation de la « table rase ». Dès la fin des années 1950, l’unité de la hauteur-note a manifestement perdu sa fonction de rationalisation avancée. Dans les décennies qui suivent, la synthèse sonore se développe, s’informatise, et repousse les limites du contrôle microphonique. Le post-sérialisme passe à la dimension des groupes, travaille la sonorité, investit l’électronique. La musique concrète instrumentale et le spectralisme se définissent explicitement par le son complexe. Toutes les approches compositionnelles n’ont, certes, pas suivi ce mouvement. Bien qu’elle fût toujours irréductible à un ordre esthétique entièrement univoque, la question de la 1 La citation, qui apparaît dans diverses formulations et sous plusieurs attributions, est notamment prêtée à Mahler. Voir Richard Specht, Gustav Mahler, Brême, Europäischer Literaturverlag, 2012 p. 87. 2 Cette formule renvoie précisément aux titres respectifs d’un article d’Ivan Wyschnegradsky (« Libération du son » (1923) dans Libération du son : Ecrits 1916-1979, éd. Pascale Criton, trad. fr. Michèle Kahn, Lyon, Symétrie, 2013, p. 201-206) et d’un autre d’Edgard Varese (« The Libération of Sound » dans Elliott Schwartz (éd.), Barney Childs (éd.), Contemporary Composers on Contemporary Music, New York, Holt, Rinehart & Winston, 1967, p. 196-208). 10 rationalisation du matériau sonore a scindé de façon inédite la musique savante en orientations irréconciliables : rejet radical de son formalisme historique, d’une part, du côté des tendances expérimentales, conceptuelles ou minimalistes ; renoncement non moins explicite à l’idéal moderniste d’un « progrès » objectivable du côté des tendances néo-tonales. Mais la centralité institutionnelle de ce qu’il est convenu d’appeler la « musique contemporaine » se fixe – au-delà d’une infinie diversité d’écoles, de courants et, surtout, de démarches individuées – dans une visée esthétique globale que l’on peut qualifier de « post-Darmstadt ». Entendons par-là non pas forcément la perpétuation d’un structuralisme propre à l’ascendance sérielle, mais, plus largement et sous quelque forme qu’il soit, la poursuite d’un processus historique de rationalisation du matériau sonore, désormais sinon porté, du moins rapporté à l’échelle du son complexe. Non plus une musique de hauteurs, mais une musique de spectres, de timbres, de textures, de masses, d’espaces sonores, etc. Les mots ne manquent pas. Et pourtant : les hauteurs-notes n’y ont pas disparu. Dans le cours des années 1980, la permanence de ce paramètre s’affirme même à plus d’un titre. D’abord parce que l’espace qui les sous-tend, celui de l’écriture instrumentale et la lutherie classique, n’a été renversé ni par les velléités expérimentales et conceptuelles des années 1960 et 1970, ni par l’essor de l’informatique musicale. De l’Itinéraire à Lachenmann en passant par Sciarrino, les esthétiques du son complexe apparues dans les années 1970, bien qu'étroitement nourries de modèles exogènes, sont à proprement parler instrumentales. Un autre courant instrumental émergeant, la New Complexity, peut être considéré comme une écriture du son complexe malgré son apparente rhétorique musicale postsérielle, en considération des techniques instrumentales utilisées et, surtout, par l'effet de sa saturation discursive délibérée. L'arrivée de l'électronique en temps réel permet entre autres au post-sérialisme de conserver la structure et le geste propre à l'écriture instrumentale. Enfin, l'ensemble de ces esthétiques (à l'exception de la New Complexity) assouplissent leurs positions initiales les plus radicales et réarticulent les sons complexes avec des logiques mélodico-harmoniques plus classiques. Ce faisant, sans que les identités s’estompent, une partie des techniques se métissent en l'espèce d'une lingua franca implicite. Mais quel rapport entretiennent dès lors les hauteurs-notes instrumentales, matériau historique de l’écriture classique, avec les modèles du son complexe ? que dit un tel rapport des perspectives contemporaines de la rationalisation du matériau sonore, et du devenir même de la rationalité musicale ? Ce questionnement vise en quelque sorte l’envers de la libération du timbre : la permanence de la hauteur, comme paramètre devenu, à son tour, résiduel. Mais plus que d’un paramètre, c’est 11 d’un paradigme technique et esthétique dont il s’agit de saisir ici le retournement historique. Bien avant le modernisme des avant-gardes du XXe siècle, la hauteur a servi à objectiver l’idée plus ou uploads/Litterature/ lienhard-camille-2020-ed520-inc.pdf
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- Publié le Jul 01, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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