A la lumière de l’histoire de l’Empire ottoman, la dramatisation d’un sujet con
A la lumière de l’histoire de l’Empire ottoman, la dramatisation d’un sujet contemporain sur les Turcs dans Bajazet de Racine Prof.Dr.Nedim KULA* Jean Racine, considéré comme l’un des plus grands dramaturges de la période classique en France, reste habituellement sous l’influence des sources d’inspiration gréco-latines en créant ses chefs-d’oeuvre intitulés La Thébaide(1664), Alexandre le Grand(1665), Andromaque( 1667), Britannicus(1669), Bérénice(1670), Mithridate(1672), Iphigénie( 1674), Phèdre(1677). A la demande de Madame de Maintenon, d’abord gouvernante des enfants naturels de Louis XIV, puis son épouse après la mort de la reine Marie-Thérèse, il assume la responsabilité de rédiger deux tragédies aux sujets bibliques pour l’éducation des jeunes filles de la noblesse pauvre dans la Maison Royale de Saint-Louis à Saint-Cyr: Esther(1689) et Athalie(1691). Mais Bajazet, une tragédie en cinq actes et en vers créée en 1672, jouée par la troupe de l’Hôtel de Bourgogne, principal lieu de représentation théâtrale de la capitale à cette époque-là, présente une histoire contemporaine concernant l’Empire ottoman. Avant de révéler le motif d’un tel choix, il faut remonter au XVI ème siècle où François Ier cherchait à trouver le moyen de fortifier toutes sortes de relations avec le pays du sultan turc Soliman le Magnifique. A la suite d’une alliance diplomatique entre ces deux civilisations ayant une forte puissance à travers le monde, les échanges socio-économiques marquent un grand développement. Grâce à de nombreux scientifiques, on réalise des recherches dans plusieurs domaines de la science, on fait des études sur le système administratif de l’Etat. Guillaume Postel qui s’adonne à l’identification de l’origine commune des langues, devient le premier orientaliste français et bientôt il est nommé professeur de langues orientales au Collège royal. Vers la fin du siècle, Savary de Brèves,ancien ambassadeur français à Constantinople, connu bien par sa connaissance da la culture turque, déploie des efforts pour que des capitulations soient signées entre les deux pays et il rapporte en France des manuscrits très précieux. Les travaux topographiques du géographe Nicolas de Nicolay en 1551 ouvrent de nouveaux horizons devant les chercheurs –voyageurs. Au XVII ème siècle où les oeuvres littéraires sont récitées dans les salons dont les plus célèbres étaient ceux de Madame de Sablé, de La Marquise de Rembouillet et de Madeleine de Scudéry,les récits de voyage de Tavernier et de Thévenot servent à avoir des informations sur l’Orient. Avec sa grande puissance sur terre, son mode de vie respectant bonnes moeurs, son raffinement dans les manières, le mystère de son harem, son habillement bizarre, sa croyance en Dieu, L’Empire ottoman réussit à faire l’admiration des occidentaux et fascine l’Europe. C’est l’époque des Turqueries. Pour les soirées mondaines, entre les nobles, l’habitude de s’habiller à l’orientale, le cérémonial du café sont vus comme les actes fréquents qui donnent un plaisir exotique. Il est possible de voir dans des tableaux l’image des aristocrates vêtus de costumes étrangers,les hommes en turban blanc, les femmes voilées. La mode des tapisseries ornées de dessins fabuleux assure l’épanouissement du coeur. Sous l’effet de ce train de vie qui domine la haute société, les écrivains éprouvent le besoin de le refléter dans leurs oeuvres. Jusqu’à la rédaction de Bajazet, nous sommes capables de constater l’existence de plusieurs ouvrages comme tragédies: La Rhodienne, ou la cruauté de Solyman(1621) de Pierre Mainfray,Le grand et dernier Solyman,ou la mort de Mustapha(1637)de Jean Mairet, Perside, ou la Suite d’Ibrahim Bassa(1644) de Nicolas Desfontaines, Le grand Tamerlan et Bajazet(1648) de Jean Magnon, Soliman, ou l’Esclave généreuse(1653) de Jacquelin, Osman(1656) de Tristan L’Hermite; comme tragi-comédies: Le Soliman(1637) de Charles de Vion d’Alibray, Roxelane(1643) de Joseph Desmares, Ibrahim, ou l’illustre Bassa(1643) de Georges de Scudéry; et comme comédie, il n’y a que Le Bourgeois gentilhomme(1670) de Molière. Cette pièce qui incarne le genre de la comédie-ballet est représentée pour la première fois au chateau de Chambord par la troupe de Molière. La plus importante raison d’une telle création est liée à la visite de Soliman Ağa, un envoyé de Mehmed IV pour restaurer les liens politiques entre les deux pays.Lors de la cérémonie d’accueil, le Roi-Soleil, avec son brocart d’or couvert de diamants,semble “environné de lumière”.Tout est organisé afin d’exposer mieux la vie fastueuse de la cour à l’éminent invité. Enfin, au sortir de la réception, l’émissaire turc, envoyé en mission privée, provoque un scandale avec ses paroles à ceux qui l’environnent. Il exprime que dans son pays, le cheval du Sultan est plus richement orné que l’habit qu’il vient de voir. Ce comportement, loin de remarquer la splendeur de la fête, blesse l’orgueil du souverain devant ses sujets.Après être le témoin vif d’une telle froideur blessante, Louis XIV ordonne à Molière de composer une pièce de théâtre pour ridiculiser les Turcs et en vérité, pour se venger de l’affront subi.Dans cette pièce réalisée par la collaboration d’un parfait musicien Jean-Baptiste Lully, Molière, par l’intermédiaire de monsieur Jourdain, fait la description de l’ambition sociale d’un riche bourgeois imitant le genre de vie des nobles. Malgré la perfection de la texture, le succès de l’oeuvre dépend de révéler bien ce qu’on appelle les turqueries, un sujet de préoccupation universel. Comme promis, Molière introduit les Turcs dans l’acte IV. Tout commence par l’entrée de Covielle qui se fait passer pour un ami du père de monsieur Jourdain. En le saluant comme “un fort honnête gentilhomme”, il gagne sa confiance.Il lui fait croire que le fils du Grand Turc est amoureux de sa fille Lucile et veut devenir son gendre. Cléonte, déguisé en turc, entre dans la salle et il fait semblant de parler en turc. En l’honneur de monsieur Jourdain, vêtu à l’orientale, une cérémonie d’ennoblissement est préparée. Avec accompagnement de danseurs et musiciens, monsieur Jourdain acquiert le droit d’être coiffé de turban et de porter le sabre en acceptant ainsi d’être l’adepte de la religion musulmane. L’intention burlesque garde sa place non seulement dans la langue soi-disant turque pleine de mots aux consonnes, mais aussi dans les vêtements qui donnent l’impression de superflu. Pour élever le ton de sa comédie, l’écrivain a l’habitude d’avoir recours à l’exagération. Lors de la cérémonie, le Mufti(interprète officiel de la loi musulmane) et les deux derviches( membre de certaines confréries religieuses, personne suivant la voie ascétique soufie) paraissent en scène en turban d’une grosseur étrange et en bonnets pointus, tous garnis de bougies allumées. Il ne faut pas oublier aussi l’importante contribution du chevalier d’Arvieux à l’élaboration duBourgeois gentilhomme.Ce célèbre voyageur français reste douze ans en Orient. Grâce à ses relations solides avec les élites locales, il fait du commerce dans l’Empire ottoman et il trouve la possibilité d’y apprendre les langues orientales comme le turc et l’arabe. Les autorités françaises, informées de sa profonde connaissance, le considèrent comme l’homme nécessaire dans le service diplomatique. Molière a la chance de se lier d’amitié avec ce chevalier ayant un grand talent, grâce à lui, il est capable de doter son esprit de détails merveilleux sur les habillements et les manières des Turcs. Même aujourd’hui, ceux qui ont envie de faire des études pour fournir tant d’anecdotes au sujet de turqueries, sont obligés de se référer aux Mémoires du chevalier. Bien que le champ de nos activités soit restreint, après avoir donné ces renseignements utiles à mettre en lumière la mode de turquerie pendant la période classique, maintenant, il est convenable de prendre en main Bajazet, de nos jours, pièce la moins jouée de Racine, dont toutes les tragédies sont impregnées de sentiments d’amour, de haine et bien sûr d’ambition, et de révéler da façon détaillée les éléments réels ayant les caractéristiques de la turquerie. Dans la première préface de Bajazet, Racine indique les sources principales contribuant à la formation de cette tragédie: “Quoique le sujet de cette tragédie ne soit encore dans aucune histoire imprimée,il est pourtant très véritable.C’est une aventure arrivée dans le sérail, il y a plus de trente ans. M. le comte de Cézy était alors ambassadeur à Constantinople. Il fut instruit de toutes les particularités de la mort de Bajazet; et il y a quantité de personnes à la cour qui se souviennent de les lui avoir entendu conter lorsqu’il fut de retour en France. M. le chevalier de Nantouillet est du nombre de ces personnes, et c’est à lui que je suis redevable de cette histoire, et même du dessein que j’ai pris d’en former une tragédie.”(Racine, 1870: 300) Comme nous constatons dans ces lignes, Racine apprend cette histoire de M. de Nantouillet qui l’avait entendue de M. de Cézy, c’est-à- dire, il respecte la tradition orale. Mais quand même, ce récit est formé trente ans plus tard, quelques détails risquent de disparaître. Vers la fin de cette préface, il confesse la vérité, il dit qu’il se sentait obligé de changer quelques circonstances, mais ce changement n’est pas considérable, et ça ne vaut pas la peine de le marquer au lecteur.Il explique ce qu’il a réalisé, ce à quoi il faisait attention: “La principale chose à quoi je me suis attaché, ç’a été de ne rien changer ni aux moeurs ni aux coutumes de la nation;et j’ai pris soin de uploads/Litterature/ racine-francais.pdf
Documents similaires
-
25
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Mai 27, 2022
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
- Taille du fichier 0.6965MB