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__________________________________ Copyright © 1999 - École des Hautes Études Commerciales (HEC), Montréal. Tous droits réservés pour tous pays. Toute traduction ou toute reproduction sous quelque forme que ce soit est interdite. Les textes publiés dans la série des cahiers de recherche de la Chaire d’entrepreneurship Maclean Hunter n’engagent que la responsabilité de leurs auteurs Cet article a paru dans la Revue Organisations & Territoires, volume 8, no 1 et 2, printemps-été 1999, p. 131-148 Une version préliminaire en anglais de cet article a fait l'objet du cahier de recherche no 97-05 De l'entrepreneuriat à l'entreprenologie par Louis Jacques FILION Cahier de recherche no 1999-08 Décembre 1999 ISSN : 0840-853X De l'entrepreneuriat à l'entreprenologie ____________________________________________________________________________________ ____________________________________ Copyright © 1999 - École des HEC, Montréal 1 Résumé Ce texte présente un sommaire de la recherche sur l'entrepreneur et parle des tendances relatives à l'évolution du champ d’étude de l’entrepreneuriat. Dans un premier temps, les pionniers du domaine sont introduits: Cantillon, Say et Schumpeter. Les apports d’autres économistes sont mentionnés. Dans un deuxième temps, les contributions de behavioristes, avec une emphase particulière sur celle de McClelland, sont présentées. On y aborde les caractéristiques les plus couramment attribuées aux entrepreneurs. À compter des années 1980, on observe un éclatement du champ de l'entrepreneuriat lequel se voit approprié par presque toutes les disciplines des sciences humaines. On constate une évolution vers une tendance appliquée et une tendance à théoriser. C'est pourquoi on peut dire que ce champ d’étude tend à se scinder entre l’entrepreneuriat (dimension appliquée) et l’entreprenologie (dimension théorique). Avant de conclure, une définition de l'entrepreneur est suggérée et quelques réflexions sont faites sur l'orientation du domaine. Introduction Le champ de l'entrepreneuriat compte plus de 1000 publications par an présentées dans plus de 50 colloques et une vingtaine de revues spécialisées. Des articles sur le sujet sont aussi publiés dans des centaines de revues et magazines. Il comprend de très nombreuses spécialisations. Nommons-en quelques-unes : innovation et créativité; création, démarrage et fermeture d'entreprises; croissance d'entreprises; travail autonome et micro-entreprises; franchises; études sur des dimensions diverses de l'entrepreneur : comportements, systèmes d'activités, processus entrepreneurial, intrapreneurs et entrepreneuriat corporatif, technopreneurs, développement régional, entrepreneuriat ethnique, systèmes de soutien à l'entrepreneuriat et politiques gouvernementales, entrepreneuriat coopératif, éducation entrepreneuriale, entrepreneuriat féminin, études sur la PME avec tout ce que cela implique d'approches fonctionnelles, telles que la finance de PME, le marketing de PME, la gestion des opérations PME, la gestion des ressources humaines de la PME, les systèmes d'information de PME, la stratégie de PME. Cet article s'adresse tant au débutant qu'à l'expert. Nous venons de mentionner un certain nombre des multiples composantes du champ de l'entrepreneuriat. Évidemment, ce texte ne les couvre pas toutes. Il vise à présenter et à discuter l'essentiel des connaissances sur l'entrepreneur. Ce texte offre une synthèse de textes plus élaborés déjà publiés sur le sujet (Filion, 1997 a et b; 1998 a et b). Dans un premier temps, nous aborderons le monde de l'entrepreneur tel que vu par les pionniers du domaine, les économistes, puis par ceux d'une autre discipline qui se sont beaucoup intéressés à l'entrepreneur : les behavioristes. Ensuite, nous présenterons quelques illustrations de l'éclatement du champ et de son intégration dans presque toutes les disciplines des sciences humaines et administratives. Avant de conclure, une définition de l'entrepreneur est suggérée; elle se veut représentative des courants traditionnels de recherche dans le champ. Le monde de l'entrepreneur Les gens qui oeuvrent dans le domaine de l'entrepreneuriat diront qu'il existe une confusion peu commune relativement à la définition de l'entrepreneur. Nous préférons parler de différences dans les façons de définir l'entrepreneur. Chacun tend à voir et à définir l'entrepreneur à partir des prémisses de sa discipline. Vue sous cet angle, la confusion n'est peut-être pas si grande que l'on pense, puisque des lieux communs quant à la façon de voir l'entrepreneur tendent à apparaître dans chaque discipline (Baronet,1996). Par exemple, les économistes ont beaucoup associé l'entrepreneur à l'innovation, alors que les behavioristes ont beaucoup écrit sur les caractéristiques créatives et intuitives attribuées à l'entrepreneur. Nous y reviendrons. De l'entrepreneuriat à l'entreprenologie ____________________________________________________________________________________ ____________________________________ Copyright © 1999 - École des HEC, Montréal 2 Les économistes Il faut d'abord nuancer la croyance populaire qui attribue l'origine de l'entrepreneuriat à la seule science économique. Une lecture attentive des deux premiers auteurs, généralement identifiés comme les pionniers du domaine, Cantillon (1755) et Say (1803; 1839;1996), nous fait découvrir des auteurs qui s'intéressaient tant à l'économie qu'aux entreprises, à leur création, leur développement, et leur gestion. Cantillon était essentiellement un banquier qu'on qualifierait, de nos jours, de prêteur de capital de risque. Ses écrits nous révèlent quelqu'un à la recherche d'occasions d'affaires, préoccupé par une gestion astucieuse et économe, qui optimise le rendement sur le capital investi. Vérin (1982) nous a montré l’origine et l’évolution du terme «entre-preneur». On peut constater que le terme a acquis sa signification actuelle au cours du XVIIe siècle. Même si le terme était utilisé avant Cantillon, on peut constater, comme Schumpeter (1954 : 222) l’a noté, que Cantillon fut le premier à présenter une conception claire de l’ensemble de la fonction de l’entrepreneur. Certains auteurs ont associé Cantillon à l'une ou l'autre école de pensée. Il est peu probable que ce soit le cas, car Cantillon était un individualiste. Les circonstances de sa vie ne l'ont pas amené à prendre racines dans un pays donné. L'essentiel de son existence s'est déroulé entre l'Irlande, son pays d’origine d’où il dut s’exiler pour des raisons politiques, l'Angleterre et la France où il entretint par la suite des résidences à des époques différentes. Il vit de ses rentes et recherche des occasions d'investissement. Le risque est très présent dans les écrits de Cantillon. Il exprime un intérêt pour les questions économiques et un besoin de rationalité, typiques des Européens de son époque. Il voyage beaucoup. Ses descriptions de la culture du thé aux Indes sont remarquables. Il sait analyser une opération, voir où elle est profitable et où elle pourrait le devenir davantage. On peut déceler des éléments précurseurs du taylorisme chez Cantillon. Au début du XVIIe siècle, il investit même dans des opérations de postes de traites le long du Mississippi 1. Il est donc d'abord et avant tout un prêteur de capital de risque à la recherche de bonnes occasions d'affaires, qui se donne un cadre d'analyse pour s'aider à évaluer le risque par rapport au profit potentiel. Jean-Baptiste Say est le deuxième auteur qui s'est beaucoup intéressé aux activités de l'entrepreneur. Il voyait le développement de l'économie par la création d'entreprises. Il rêvait de voir la révolution industrielle anglaise se transposer en France (Say, 1815; 1816). On l’a qualifié d’économiste car, à l’époque et jusqu’à la moitié du XXe siècle, les sciences de l’administration étaient inexistantes. On classifiait alors comme économiste toute personne qui s'intéressait aux organisations, qui parlait de création et de distribution de richesses. Si on avait à classifier Say de nos jours, il se rapprocherait sans doute davantage d'un Peter Drucker que d'un Kenneth Galbraith. On peut déjà observer, à partir des écrits de Cantillon et de Say, que leur intérêt pour l'entrepreneuriat ne facilite pas leur classification dans une discipline donnée. Ce sera là le lot de presque tous ceux qui s'intéresseront au domaine : ils le regardent à partir des prémisses d'une discipline établie, mais dès qu'ils s'avancent un peu et commencent à dégager des cadres structurants de leurs analyses empiriques, ils débordent les frontières de cette discipline, ne s'y retrouvent plus aussi bien et n'y sont plus toujours aussi bien acceptés et reconnus. Cantillon et Say voyaient l'entrepreneur surtout comme un preneur de risques puisqu'il investit son propre argent. Pour Cantillon, l'entrepreneur achète une matière première - souvent produit de l'agriculture - à un prix certain pour la transformer et la revendre à un prix incertain. C'est donc quelqu'un qui sait saisir une opportunité dans le but de réaliser un profit, mais qui doit en assumer les risques. Say fera une différence entre l'entrepreneur et le capitaliste, entre les profits de l'un et de l'autre (Say, 1803; 1815; 1816 : 28-29; Schumpeter, 1954 : 555). En ce sens, il associe l'entrepreneur à l'innovation. Il voit l'entrepreneur comme un agent de changement. Entrepreneur lui-même, il est le premier à avoir défini l'ensemble des 1 Ce sont dans ces mêmes postes que la famille Perreault de Québec et de Trois-Rivières est impliquée. Le père de François-Joseph Perreault ira d’ailleurs à St-Louis après la conquête de 1760. Rappelons que François-Joseph Perreault est considéré comme un des pères de l’éducation au Québec, pour y avoir créé les premières écoles privées au début du XIXe siècle. De l'entrepreneuriat à l'entreprenologie ____________________________________________________________________________________ ____________________________________ Copyright © 1999 - École des HEC, Montréal 3 paramètres de ce que fait l'entrepreneur dans le sens où nous l'entendons de nos jours. Schumpeter (1954) a observé qu'une grande partie de sa propre contribution a consisté à faire connaître aux Anglo-saxons la compréhension du monde de l'entrepreneur à partir des écrits de Jean-Baptiste Say. Compte tenu qu'il fut uploads/Management/ 1999-08epientreprenologie.pdf
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- Publié le Mai 20, 2021
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