Alsic Apprentissage des Langues et Systèmes d’Information et de Communication T
Alsic Apprentissage des Langues et Systèmes d’Information et de Communication Textes à paraître dans le prochain volume Textes invités L'oral à l'ère du numérique : enseigner et apprendre autrement ? Speech in a digital era: teaching and learning differently? Laura Abou Haidar Résumés Français English Cette contribution se propose d'appréhender la manière dont le numérique induit des transformations aussi bien à la manière d'envisager l'oral et de le (re)définir, que de l'enseigner et de l'apprendre. On commencera par rappeler les dimensions les plus impactées par le numérique, par rapport à un dispositif d'enseignement/apprentissage des langues basé sur le présentiel : la temporalité, les modes d'interaction et leurs rituels, la gestion de la plurisensorialité et de la multimodalité, qui sont amenées à s'adapter aux dispositifs numériques utilisés. Néanmoins, le numérique peut constituer une véritable opportunité pour ce qui est de l'oral. La multiplicité des ressources numériques permet de démultiplier les effets bénéfiques de "laboratoire de langue" puisque le smartphone ou l'ordinateur se transforment potentiellement en "cabine individuelle de langue" ; en particulier, le numérique permet un travail particulièrement ciblé, individualisé et intensif, que ce soit sur l'écoute (identifier, discriminer, comparer, comprendre…) ou sur la production (avec des logiciels de plus en plus répandus comme Audacity), ce qui permet d'augmenter les performances de perception et de production des apprenants. Cela va également dans le sens du renforcement de l'autonomisation de l'apprenant et de la diversification des stratégies d'apprentissage. Le numérique permet d'intégrer la dimension gestuelle et kinésique globale, et donne à voir/entendre une multiplicité de ressources d'une grande richesse. L'essor des corpus oraux à visée didactique, et la dynamique créative observée sur la toile, montrent, si besoin était, que l'époque où l'on parlait de la phonétique comme du "parent pauvre de la didactique" est bel et bien révolue. This contribution focuses on the way in which digital technology induces transformations in the way speech is considered and (re)defined, as well as in the way it is taught and learned. We will recall the dimensions that are most impacted by digital technology, compared to a language teaching/learning device based on face-to-face teaching: temporality, modes of interaction and their rituals, the management of plurisensoriality and multimodality, which have to be adapted to the digital devices that are been used. Nevertheless, digital technology can be a real opportunity for speech. The multiplicity of digital resources can multiply the benefits of the "language laboratory" since the smartphone or the computer can potentially be transformed into an "individual language booth"; in particular, digital technology allows for particularly targeted, individualized and intensive work, on listening (identifying, discriminating, comparing, understanding, etc.) or on production (with increasingly widespread software such as Audacity), which makes it possible to increase the learners' perception and production abilities. This is also in line with the reinforcement of the learner's autonomy and the diversification of learning strategies. Digital technology makes it possible to integrate the gestural and kinetic dimension, and to see/hear a multiplicity of resources of great wealth. The rise of oral corpora for didactic purposes, and the creative dynamics observed on the web, show, should that be necessary, that the time when phonetics was called as the "poor relation of didactics" is well and truly over. Entrées d’index Mot s-clés : oral, numérique, FLE, phonétique Keywords: oral, FFL, phonetics, ICT Rubriques : Points de vue / échanges Texte intégral 1. Introduction On a coutume de parler de l'oral des langues pour désigner tout ce qui est associé à l'utilisation simultanée d'un code linguistique et d'une activité vocale, verbalisée et gestuelle d'un individu dans cette langue. (…) On peut considérer que l'oral est abordé de façon analogue à l'écrit (Lhote et al, 1998, p. 183). La crise sanitaire, qui a amplifié et généralisé le recours au numérique dans les systèmes éducatifs du monde entier, a sans doute été un puissant accélérateur pour le développement et la diversification des dispositifs et outils numériques au service de l'enseignement et de l'apprentissage des langues. Plus particulièrement et pour ce qui est de la dimension orale, cette crise aura probablement contribué à la mise en évidence des atouts du numérique pour le développement des compétences de production, de perception et de compréhension, ainsi que d'interaction. On a pu ainsi assister à une "montée en compétences" de l'ensemble des acteurs impliqués, en premier lieu les enseignants et les apprenants, voire même des transformations dans les modalités d'apprentissage, ainsi que dans les pratiques pédagogiques et les dispositifs d'enseignement. À tel point qu'il paraît légitime de considérer que le numérique permet de faire évoluer la manière d'appréhender la dimension orale d'une langue dans une visée didactique. Il devient de plus en plus légitime d'aller au-delà de la définition étymologique de l'oral, considéré traditionnellement comme correspondant à ce qui est "articulé par la bouche (…) qui est dit de vive voix, par opposition à l'écrit"1voire, comme énoncé par Lhote et al. : 1 La médiation par le numérique pour l'enseignement et l'apprentissage de la dimension orale des langues constitue une plus-value pour enrichir et consolider le concept d'oralité (Lhote, 2001 ; Weber, 2013), que nous définissons comme étant la capacité chez l'apprenant : 2 2. L'oralité et le numérique : des contraintes à intégrer 3. Le numérique sous le signe de la multiplicité La création d'appareils qui enregistrent et reproduisent la voix humaine complète une série d'inventions qui a commencé le jour où l'homme a imaginé de dessiner un premier symbole pour représenter sa pensée. Après l'écriture, après l'imprimerie, il restait encore un progrès essentiel à faire, car ni l'une ni l'autre ne fixent ni ne transmettent la parole dans son intégrité absolue.fi à percevoir, intégrer, comprendre, produire et interagir à travers différents types de discours oraux ; à mettre en place des stratégies d'apprentissage adaptées ; à opérer des choix de niveaux de langues variés en fonction du contexte ; à être en capacité de comprendre et de manier les implicites véhiculés notamment par les paramètres intonatifs et kinésiques ; et, enfin, à savoir s'affirmer avec aisance et conviction comme interlocuteur légitime dans la langue cible. Le numérique ouvre la voie à une multiplicité de dispositifs, d'outils et d'approches qui permettent d'appréhender l'oralité dans toutes ses facettes, et qui constituent un appui réel pour l'enseignant et l'apprenant : cette ouverture permet d'intégrer des espaces-temps dans le dispositif didactique (en classe ou en parallèle) qui donnent à chaque apprenant la possibilité de mener sa propre progression en vue de l'acquisition et de la consolidation de ses compétences en oralité, selon des modalités de fonctionnement évolutives et adaptatives. 3 Il ne s'agit pas, cependant, de verser dans le tout numérique mais d'opter pour des choix raisonnés. En effet, dans la continuité d'une réflexion développée par de plus en plus d'experts (par exemple, Nowakowski, voir Le Monde marketing, 2021) sur la dimension éthique du numérique, nous plaidons pour un usage "réfléchi", opportun, équilibré et mesuré, qui n'occulte pas la place de l'humain dans les dispositifs mis en place, et qui tienne compte des risques écologiques de cet usage. D'autant que le numérique n'est pas nécessairement la panacée pour toutes les difficultés rencontrées dans un processus d'enseignement et d'apprentissage de la dimension orale des langues. Il ne constitue pas forcément un recours lorsque les dispositifs traditionnels ont échoué, il n'implique pas obligatoirement une optimisation des apprentissages, et il ne faut pas le considérer comme un "outil miracle" qui se suffirait à lui-même pour résoudre les obstacles auxquels enseignants et apprenants sont confrontés. Opter pour le numérique doit être une démarche intégrée dans un processus global d'enseignement et d'apprentissage, lorsque ce choix permet d'apporter une réelle plus-value compte tenu des propriétés qui en font un atout majeur. 4 En effet, si l'on prend pour référence le modèle SAMR (Puentadura, 2009), qui propose une "intégration réussie des outils numériques" (Lévy, 2017, p. 8), ce sont les étapes 3 ("modification") et 4 ("redéfinition) qui nous intéressent particulièrement bien plus que les étapes de rang inférieur de "substitution" ou de "transformation", car ce sont celles qui prennent en compte les "modifications fonctionnelles" et les "nouvelles tâches préalablement inconcevables", qui doivent leur émergence uniquement aux outils numériques disponibles et adaptés à une visée didactique. 5 Il est donc nécessaire de prendre en compte en amont les contraintes spécifiques à l'usage du numérique pour l'enseignement et l'apprentissage de l'oralité, telle que définie plus haut. Il existe, en effet, des contraintes de différentes natures qui doivent être anticipées et intégrées dans la planification de l'ensemble du dispositif de formation. 6 Sur le plan technique, tout d'abord, un équipement de qualité est indispensable : puissance et rapidité sont les maîtres mots. Cela implique des contraintes qui sont aussi d'ordre financier, puisque cet équipement peut vite devenir obsolète dans un champ en pleine évolution, et il a un coût que les organismes de formation, les enseignants ou les apprenants ne peuvent pas facilement prendre en charge. 7 S'agissant de l'oral, ce ne sont pas seulement des données sonores qu'il faut envisager de traiter : on a, en réalité, affaire à des données multimodales dont uploads/Management/ l-x27-oral-a-l-x27-ere-du-numerique-enseigner-et-apprendre-autrement.pdf
Documents similaires
-
19
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Nov 17, 2022
- Catégorie Management
- Langue French
- Taille du fichier 0.6430MB