1954-02-10 INTRODUCTION AU COMMENTAIRE DE JEAN HYPPOLITE SUR LA VERNEINUNG 1 L’
1954-02-10 INTRODUCTION AU COMMENTAIRE DE JEAN HYPPOLITE SUR LA VERNEINUNG 1 L’« Introduction au commentaire de Jean Hyppolite sur la Verneinung » prononcé lors de la séance du séminaire du 10 février 1954 avant l’exposé de Jean Hyppolite, est d’abord, retravaillée et amplifiée, dans La psychanalyse, 1956, n° 1, « Sur la parole et le langage », pp. 17-28 (c’est cette version qui est ici proposée). Puis dans Écrits, Paris, Seuil, coll. « Le champ freudien », 1966, pp. 369-380 (sous le titre : « Introduction au commentaire de Jean Hyppolite sur la Verneinung de Freud ». (17)Séminaire de technique freudienne du 10 février 19541. INTRODUCTION AU COMMENTAIRE DE JEAN HYPPOLITE SUR LA VERNEINUNG Vous avez entendu la dernière fois mon commentaire sur le passage central de l’écrit de Freud sur la dynamique du transfert2. Vous avez pu y mesurer combien féconde se révèle notre méthode de recourir aux textes de Freud pour soumettre à un examen critique l’usage présent des concepts fondamentaux de la technique psychanalytique et spécialement de la notion de résistance. L’adultération qu’a subie en effet cette dernière notion prend sa gravité de la consigne que Freud a consacrée de son autorité, de donner le pas dans la technique à l’analyse des résistances. Car si Freud entendait bien là marquer un tournant de la pratique, nous croyons qu’il n’y a que confusion et contresens dans la façon dont on s’autorise d’un ordre d’urgence pour y appuyer une technique qui ne méconnaît rien de moins que ce à quoi il s’applique. La question est du sens qu’il faut restituer aux préceptes (18)de cette technique qui, pour s’être bientôt réduits à des formules toutes faites, ont perdu la vertu indicative qu’ils ne sauraient conserver que dans une compréhension authentique de la vérité de l’expérience qu’ils sont destinés à conduire. Freud, bien entendu, ne saurait y manquer non plus que ceux qui pratiquent son œuvre. Mais, vous avez pu en faire l’épreuve, ce n’est pas le fort de ceux qui dans notre discipline se rempardent à plus grand bruit derrière la primauté de la technique, – sans doute pour se couvrir de la concomitance certaine qui y accorde en effet les progrès de la théorie, dans l’usage abêti des concepts analytiques qui peut seul justifier la technique qui est la leur. Que l’on tente de serrer d’un peu plus près ce que représente dans l’usage dominant l’analyse des résistances, on sera bien déçu. Car ce qui frappe d’abord à lire ses doctrinaires, c’est que le maniement dialectique d’une idée quelconque leur est si impensable, qu’ils ne sauraient même le reconnaître quand ils y sont précipités à la façon dont M. Jourdain faisait de la prose sans le savoir, par une pratique à laquelle la dialectique est en effet immanente. Dès lors ils ne sauraient y arrêter leur réflexion, sans se raccrocher sous un mode panique aux objectivations les plus simplistes, fut-ce aux plus grossièrement imageantes. C’est ainsi que la résistance en vient à être par eux imaginée plutôt que conçue, selon ce qu’elle connote dans son emploi sémantique moyen3, soit, à bien examiner cet emploi, dans 1. On donne ici le texte recueilli d’un des colloques du séminaire tenu par Jacques Lacan, à la clinique de la Faculté à l’hôpital Sainte-Anne et consacré par lui pendant l’année 53-54 aux « Écrits techniques de Freud » et à l’actualité qu’ils intéressent. II a été seulement amplifié de quelques rappels, qui ont semblé utiles, à des leçons antérieures, sans qu’on ait pu lever pour autant la difficulté d’accès inhérente à tout morceau choisi d’un enseignement. 2. Il s’agit de l’article : Zur Dynamik der Uebertragung auquel on accédera de la façon la plus simple dans les Gesammelte Werke, VIII, pp. 364-374, Imago publishing, London. Ou en anglais dans les Coll. Papers, II, pp. 312-332. Nous ne saurions recommander l’usage de la traduction française dont les inexactitudes sur le plus vif du sujet ici traité, rendent préférable pour le lecteur non averti le recours direct au texte allemand. 3 Celui-ci, disons-le en passant, comporte certainement des oscillations non négligeables quant à l’accentuation de sa transitivité, selon l’espèce d’altérité à laquelle il s’applique. On dit : to resist the evidence comme to resist the authority of the Court, – mais par contre nicht der Versuchung widerstehen. Notons la gamme des nuances qui peuvent se répartir beaucoup plus aisément dans la diversité du sémantème en allemand : widerstehen, – widerstreben, – sich straüben gegen, andauern, fortbestehen, moyennant quoi widerstehen peut être intentionnellement plus adéquat au sens que nous allons dégager comme étant le sens proprement analytique de la résistance. 1954-02-10 INTRODUCTION AU COMMENTAIRE DE JEAN HYPPOLITE SUR LA VERNEINUNG 2 une acception transitive indéfinie. Grâce à quoi « le sujet résiste » est entendu « il résiste à… » – À quoi ? – Sans doute à ses tendances dans la conduite qu’il s’impose en tant que sujet névrotique, à leur aveu dans les justifications qu’il propose de sa conduite à l’analyste. Mais comme les tendances reviennent à la charge, et comme la technique est là pour un coup, cette résistance est supposée sérieusement mise à l’épreuve : dès lors (19)pour la maintenir il faut qu’il y mette du sien et, avant même que nous ayons le temps de nous retourner, nous voici glisser dans l’ornière de l’idée obtuse que le malade « se défend ». Car le contresens ne se scelle définitivement que de sa jonction avec un autre abus de langage : celui qui fait bénéficier le terme de défense du blanc-seing que lui confère son usage en médecine, sans qu’on s’aperçoive, car on n’est pas meilleur médecin pour être mauvais psychanalyste, qu’il y a là aussi maldonne quant à la notion, si c’est à son sens correct en physiopathologie qu’on entend faire écho, – et qu’on ne trahit pas moins, car on n’est pas plus instruit en psychanalyse pour être ignorant en médecine, l’application parfaitement avertie que Freud en a faite dans ses premiers écrits sur la pathogénie des névroses. Mais, nous dira-t-on, à centrer votre visée d’une idée confuse sur son point le plus bas de désagrégation, ne tombez-vous pas dans le travers de ce qu’on appelle proprement un procès de tendance. C’est qu’aussi bien, répondrons-nous, rien ne retient dans cette tendance les usagers d’une technique ainsi appareillée, car les préceptes dont ils parent sa confusion originelle ne remédient en rien à ses suites. C’est ainsi qu’on profère que le sujet ne peut rien nous communiquer que de son moi et par son moi, – ici le regard de défi du bon sens qui reprend pied à la maison ; qu’il faut pour arriver à quelque chose viser à renforcer le moi, ou tout au moins, corrige-t-on, sa partie saine, – et les bonnets de hocher à cette ânerie ; que dans l’usage du matériel analytique nous procéderons par plans, – ces plans dont nous avons bien entendu en poche le relevé garanti ; que nous irons ainsi de la surface à la profondeur, – pas de charrue avant les bœufs ; que pour ce faire le secret des maîtres est d’analyser l’agressivité, – pas de charrue qui tue les bœufs ; enfin voici la dynamique de l’angoisse, et les arcanes de son économie, – que nul ne touche, s’il n’est expert hydraulicien, aux potentiels de ce mana sublime. Tous ces préceptes, disons-le, et leur parure théorique seront délaissés de notre attention parce qu’ils sont simplement macaroniques. La résistance en effet ne peut être que méconnue dans son essence, si on ne la comprend pas à partir des dimensions du discours où elle se manifeste dans l’analyse. Et nous les avons (20)rencontrées d’emblée dans la métaphore dont Freud a illustré sa première définition. Je veux dire celle que nous avons commentée en son temps4 et qui évoque les portées où le sujet déroule « longitudinalement » pour employer le terme de Freud, les chaînes de son discours, selon une partition dont le « noyau pathogène » est le leit-motiv. Dans la lecture de cette partition, la résistance se manifeste « radialement », terme opposé au précédent, et avec une croissance proportionnelle à la proximité où vient la ligne en cours de déchiffrage de celle qui livre en l’achevant la mélodie centrale. Et ceci au point que cette croissance, souligne Freud, peut être tenue pour la mesure de cette proximité. C’est dans cette métaphore que certains ont même voulu trouver l’indice de la tendance mécanistique dont la pensée de Freud serait grevée. Pour saisir l’incompréhension dont cette réserve fait la preuve, il n’est que de se référer à la recherche que nous avons menée pas à pas dans les éclaircissements successifs que Freud a apportés à la notion de résistance, et spécialement à l’écrit sur lequel nous sommes et où il en donne la plus claire formule. Que nous y dit Freud en effet ? Il nous découvre un phénomène structurant de toute révélation de la vérité dans le dialogue. II y a la difficulté fondamentale que le sujet rencontre dans ce uploads/Management/ lacan-introduction-au-commentaire-de-jean-hyppolite-sur-la-verneinung-de-freud.pdf
Documents similaires
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/SjCzpDxhGzmemkin9Fe6aWrGQtbVmHuy6EAOOmpzxlbEB8aeirYFnMaZA39erji2jI6U1OjPH65KsijoT3Uu0quK.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/nbZF2bKSxAtfdahdxiw079qgnJoQinZg35mzqvdAc5ljnkFE6CwvpRn1IvviEffc717BVtyjL5NtLuiPKIBOHSJl.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/wugNP7RMGnzBQWarWGqDtHiN13knaJu2Oh3w42AS2L3tJhleXrE6InhYWPCxRt9qILf5ns8DA2KeOzMeUuESO8an.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/QWEGfbUC62dP8MMurwbhDGsSSgxf7ufJfP6YSXUEukE31IDRRYZdChDn2KcuVIHpBPjTWJ3v9eS1UJidNgHgYC8h.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/DNtcIQeJi46sGnm2IWzLsRWVGU0NAaL2aK4nrUKC6iqSsROoSlhI1FAjIJxBxntQQZHOVwTN0X2IjKmgiiDPXCcD.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/HU8D8SzV9fa5VCFqM4e7BPnVwmhh4PuuZIDoCc6r4NDPOrVGqDG1CQGaTidB27zvtFe2wsvhFk6epRvmfTYokknq.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/aZVxpAMrDb2tgiBqRQMySGACz0TNCI6AXgiXsq1LfzmjDZF1DQ9RN1Cl1VCH2PV1hLqFKAbv0LQdOjBcTAqT7g2m.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/pVKsbFvTkLb3KxASajgMzs9WTwdRqtNb1xNjb7vET6ilFA7GyJhygq6AqO20zaLciRT9PEMTs6H3eguaTvUruTrn.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/6BW04MUV7gY5bO7OVbODBDuJnWzIuu3DeWQ1eGCILOwmSCX4UyOaDJvCAzIPmaiLZ6E1Y3C6ZjcZxIdqLZBl1pW9.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/rS6L1R9HaP8KplSKj8brdZY5Ku1NJvuThmjfWF7isw3PMcw91jkRTdQDvjlqauSW4b02d1GgkQ342de5VzvpwZ58.png)
-
19
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Jan 24, 2021
- Catégorie Management
- Langue French
- Taille du fichier 0.2012MB