Publié en traduction espagnole pp. 253-278 in : Interculturas, transliteraturas
Publié en traduction espagnole pp. 253-278 in : Interculturas, transliteraturas, Amelia Sanz Cabrerizo (coord., Grupo LEETHI), Madrid : Arcos Libros (Bibliotheca Philologica, Serie Lectu- ras), 2008, 287 p. DE L’APPROCHE COMMUNICATIVE À LA PERSPECTIVE ACTIONNELLE, ET DE L’INTERCULTUREL AU CO-CULTUREL par Christian Puren Professeur à l’Université de Tallinn (Estonie) et à l’Université de Saint-Étienne (France) christian.puren@univ-st-etienne.fr CELEC-CEDICLEC (Université de Saint-Étienne) SOMMAIRE 1. Introduction ............................................................................................................2 2. Modèle d’évolution historique des configurations didactiques...........................................3 3. Commentaires du modèle ..........................................................................................4 3.1 « Action » comme agir social versus « tâche » comme agir scolaire ............................4 3.2 Modification de l’action sociale de référence et ruptures méthodologiques....................4 3.3 La « perspective actionnelle » comme relation entre action de référence et tâche de référence.................................................................................................................6 3.4 La relation entre perspective actionnelle et perspective culturelle ...............................7 3.5 Des représentations de l’Autre aux conceptions de l’action avec l’Autre .......................9 4. Diversités.............................................................................................................. 10 4.1 Diversité des approches interculturelles ................................................................ 10 4.2 Diversité des méthodes de l’éducation interculturelle .............................................. 11 4.3 Diversité du « culturel » dans l’éducation interculturelle .......................................... 11 4.4 Diversité des objectifs sociaux de référence........................................................... 12 4.5 Diversité des « entrées » didactiques ................................................................... 13 4.6 Diversité des réglages objet-sujet........................................................................ 13 5. Conclusion............................................................................................................. 14 6. Bibliographie.......................................................................................................... 15 1 2 1. Introduction Cela fait maintenant trois bonnes décennies que l’approche interculturelle a émergé en didacti- que des langues-cultures, et vingt ans au moins qu’elle s’y est imposée comme orientation dominante. Du moins dans les colloques et publications des didacticiens, parce que sa pré- sence est restée bien plus discrète dans les manuels (où l’on voit plus de transmission de connaissances que d’activités proposées aux apprenants eux-mêmes sur leurs représenta- tions)1, et plus encore sans doute dans les salles de classe : le moment serait d’autant plus propice à un bilan critique que la « configuration didactique » dans le cadre duquel cette ap- proche est apparue, est en train d’être remplacée par une autre, et qu’on peut de ce fait l’aborder maintenant avec le recul historique nécessaire non seulement par rapport à cette toute dernière évolution, mais par rapport aux approches culturelles antérieures. C’est cette mise en perspective historique que je me propose d’effectuer dans le présent article.2 Les « configurations didactiques » sont des cohérences historiques constituées par des rela- tions étroites qui ont pu s’établir à certains moments entre un objectif social de référence, une action de référence, une tâche de référence, et enfin la construction didactique correspon- dante. Le tableau suivant modélise l’évolution de ces configurations didactiques en France de- puis un siècle3 : 1 On trouve de nombreuses propositions systématiques d’activités interculturelles dans des manuels spé- cialisés dans cette approche, comme ceux de BERTOCCHINI P. et al. 1994, CAIN A. et al. 1996 ou encore HUBER-KRIEGLER M. et al. 2005. Pour des exemples tirés d’une dizaine de manuels différents, voir FENNER Anne-Britt, NEWBY David 2002. 2 Je reprends dans le présent article des idées et des contenus que j’ai développés depuis quelques an- nées dans différents article, en particulier ceux de 1998, 2002, 2005 et 2006(a, b, c, d). 3 Cette évolution est sans doute en partie différente dans les autres pays européens, mais j’ai l’impression (qui serait à confirmer ou infirmer par des recherches spécifiques) est qu’elle est en grande partie commune. 2. Modèle d’évolution historique des configurations didactiques Compétences sociales de référence langagière culturelle Actions sociales de référence Tâches scolaires de référence Constructions didactiques correspondantes 1. capacité à relire les grands textes classiques capacité à entretenir sa formation d’honnête homme en se replongeant dans ces grands textes pour y recon- naître et partager les valeurs univer- selles qui constituent le « fonds com- mun d’humanité » (É. Durkheim) : compétence transculturelle lire traduire (= lire, en paradigme indirect) méthodologie traditionnelle (XIXe siècle) 2. capacité à entretenir à dis- tance un contact avec la langue-culture étrangère à partir de documents authen- tiques capacité à mobiliser les connaissances sur la culture des autres : compé- tence métaculturelle parler sur « explication de textes » au moyen d’une série de tâches en langue cible (paradigme direct) : paraphraser, analyser, interpréter, extrapoler, comparer, réagir, transposer méthodologie directe pour le se- cond cycle scolaire (1900-1910) et méthodologie active (1920- 1960) parler avec –simulations et jeux de rôles 3. capacité à échanger ponc- tuellement des informations avec des étrangers capacité à maîtriser les représenta- tions croisées dans l’interaction avec les autres : compétence intercultu- relle agir sur –actes de parole approche communicative (1980- 1990) 4. capacité à cohabiter en per- manence avec des étrangers ou des compatriotes de cultures différentes capacité à comprendre les comporte- ments des autres et adopter des comportements communs acceptables dans une société culturellement di- verse : compétence multiculturelle vivre avec activités de médiation entre des langues et des cultures différentes : interprétation, reformula- tion, résumés, périphrases, équivalences,… − didactique du plurilinguisme (1990-?) − compétence plurilingue et pluri- culturelle et compétence de mé- diation dans le CECRL (2000-?) 5. capacité à travailler dans la durée en langue étrangère avec des locuteurs natifs et non natifs de cette langue capacité à élaborer avec les autres des conceptions communes de l’action collective sur la base de valeurs contextuelles partagées : compé- tence co-culturelle agir avec actions collectives à dimension collective (acti- vités de type « pédagogie du projet) ébauche d’une « perspective ac- tionnelle » » dans le CECRL (2000-?) 3 3. Commentaires du modèle Les différents exemples historiques donnés dans ce modèle suffisent à mon avis pour définir les concepts utilisés dans les titres de ses cinq colonnes.4 Je passerai donc directement aux quelques commentaires qui me semblent indispensables pour mon propos, présentés ici dans un ordre non significatif. 3.1 « Action » comme agir social versus « tâche » comme agir scolaire Ni en langue courante (français ou espagnol), ni dans le Cadre européen commun de référence pour les langues (CECRL), n’est faite la distinction que je propose ici entre action dans le sens de l’agir « social » ou « d’usage », et tâche dans le sens de l’agir « scolaire » ou « d’apprentis- sage ». Voici en effet comment est définie la nouvelle « perspective actionnelle » par les au- teurs du CECRL : Un cadre de référence pour l’apprentissage, l’enseignement et l’évaluation des langues vivantes, transparent, cohérent et aussi exhaustif que possible, doit se situer par rap- port à une représentation d’ensemble très générale de l’usage et de l’apprentissage des langues. La perspective privilégiée ici est, très généralement aussi, de type actionnel en ce qu’elle considère avant tout l’usager et l’apprenant d’une langue comme des acteurs sociaux ayant à accomplir des tâches (qui ne sont pas seulement langagières) dans des circonstances et un environnement donné, à l’intérieur d’un domaine d’action particu- lier. Si les actes de parole se réalisent dans des activités langagières, celles-ci s’inscrivent elles-mêmes à l’intérieur d’actions en contexte social qui seules leur don- nent leur pleine signification. Il y a tâche dans la mesure où l’action est le fait d’un (ou de plusieurs) sujet(s) qui y mobilise(nt) stratégiquement des compétences dont il(s) dispose(nt) en vue de parvenir à un résultat déterminé. (CECRL, chap. 2.1, p. 15) On voit que les auteurs du CECRL ne proposent pas de termes différents pour désigner l’agir d’apprentissage et l’agir d’usage : ils utilisent indistinctement « action », « tâche » et « activi- té », sans doute sous l’influence de l’approche communicative, dont l’exercice de référence, la simulation, vise précisément à neutraliser la différence entre activité scolaire et activité so- ciale ; on y demande en effet aux apprenants de faire en classe comme s’ils étaient des usa- gers en société. Mais à partir du moment où ces auteurs du CECRL (très sainement, à mon avis, et enfin !) établissent la différence entre usager/usage et apprenant/apprentissage, il aurait été nécessaire qu’ils distinguent conceptuellement entre les deux types d’agir. Je pro- pose pour ma part « agir » et « activité » comme concepts génériques, « action » pour l’agir/l’activité d’usage ou social, et « tâche » pour l’agir/l’activité d’apprentissage ou scolaire. 3.2 Modification de l’action sociale de référence et ruptures méthodologiques C’est la recherche constante de la relation la plus étroite possible entre l’action de référence et la tâche de référence qui explique le mécanisme historique des ruptures historiques entre construction méthodologique et la suivante : une modification qualitative de l’objectif social de référence provoque en chaîne la modification de l’action de référence, de la tâche de référence puis de la construction didactique, celle-ci apparaissant désormais comme inefficace parce qu’inadaptée. La succession suivante des paragraphes de la Circulaire relative à l’enseignement des langues publiée le 15 novembre 1901 par le Ministère de l’Instruction publique français met parfaite- ment en évidence un tel mécanisme : 4 Je signalerai seulement que le concept d’ « action sociale de référence » est proche de celui de « prati- que sociale de référence » utilisé depuis les années 1980 par les didacticiens de certaines disciplines (les sciences, les Arts plastiques, l’éducation physique et sportive,…). 4 L'enseignement des langues, malgré les progrès accomplis ces dernières années, n'a pas uploads/Management/ puren-2008e-ac-pa-culturel-coculturel.pdf
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