P E R F O R M A N C E - P R O D U C T I V I T É C O N D I T I O N S D E T R A V

P E R F O R M A N C E - P R O D U C T I V I T É C O N D I T I O N S D E T R A V A I L G A I N D E T E M P S S T A N D A R D I S A T I O N S A N T É P A R T I C I P A T I O N G E S T I O N D E F L U X I M P L I C A T I O N Les méthodes d’organisation du travail : le Lean en question • Formatage effi cace ? • Effets sur les conditions de travail ? • Dépassement du modèle ? Bimestriel du Réseau Anact pour l’amélioration des conditions de travail Travail & Revue de la qualité de vie au travail N° 351 SEPTEMBRE/OCTOBRE 2013 CHANGEMENT ARGUMENTS (P. 4 À 8) Michel Bouton (Medef) Michel Masdebrieu (CGT) Dominique Gillier (CFDT) Richard Abadie (Direccte Rhône-Alpes) Fabien Mangione (enseignant-chercheur) Hassan Khomany (ergonome) Richard Kaminski (Institut Lean France) Tommaso Pardi (sociologue) Françoise Siegel (médecin du travail coordinateur) CÔTÉ ENTREPRISES (P. 9 À 14) Coiffure De nouvelles teintes pour la motivation Plasturgie Sortir du moule Industrie automobile Travailler la transparence pour une meilleure adhésion Laboratoire spécialisé L’ergonomie comme appareillage complémentaire 2 ENJEUX TRAVAIL ET CHANGEMENT N° 351 • septembre/octobre 2013 D u taylorisme au Lean en passant par le fordisme, les modèles d’or- ganisation du travail ont toujours suscité des questions. Car ils se présentent souvent comme des promesses de jours meilleurs dans les entreprises. Jours meilleurs pour la performance (gains de productivité) mais aussi pour les salariés. Et c’est là l’une des grandes ambitions du Lean (voir encadré). Déployé à partir des années 1980 dans l’industrie, puis des années 2000 dans l’ensemble des secteurs, le Lean s’est largement propagé en se revendiquant de l’amélioration des condi- tions de travail. Principal argument en la matière : la valeur créée dans l’entreprise se trouve sur le terrain, c’est-à-dire dans l’atelier, sur les lignes de production, là où les biens et les services sont produits. En la matière, le Lean avance des propositions intéressantes : ergonomie des postes, management de proximité, expression des salariés… Mais réussit-il à aller sans encombre au bout de ses promesses ? > Pas de recettes Le Réseau Anact a cherché à tirer les enseignements d’une vingtaine d’inter- ventions menées essentiellement dans le secteur industriel et dans des entre- prises de taille intermédiaire (de 250 à 5 000 salariés). L’intention n’est pas d’être pour ou contre le Lean mais de contribuer au débat en apportant des réponses aux vraies questions qu’il pose. D’un point de vue général, le Lean, comme les autres méthodes d’organisation du travail, n’est pas transposable tel quel d’une entreprise à une autre. « Il n’y a pas de déterminisme en matière d’organisa- tion, explique Mélanie Burlet, chargée de mission du département Changements technologiques et organisationnels de l’Anact. Ce qui veut dire d’abord qu’aucun modèle organisationnel n’est incontour- nable sous prétexte qu’il aurait fait ses preuves ailleurs. Ensuite, cela signifi e que Modèle d’organisation du travail très répandu, le Lean vise la performance de l’entreprise en prenant en compte les salariés, via notamment leur implication dans l’organisation. Mais qu’en est-il concrè- tement des conditions de travail ? Faut-il en rester à un modèle formaté ? Les méthodes d’organisation du travail : le Lean en question • Formatage effi cace ? • Effets sur les conditions de travail ? • Dépassement du modèle ? 1. Fonder les décisions sur une philosophie à long terme. 2. Arrêter la production dès l’émergence d’un problème de façon à produire de la qualité du premier coup. Chacun n’a pas la même notion de la qualité : qu’est ce qu’un travail bien fait ? 3. Lisser la production et la charge de travail (heijunka) : supprimer des tâches jugées inutiles. Certaines tâches jugées inutiles peuvent être des moments de récupération, de coopération et d’anticipation essentiels à la réalisation du travail. 4. Faire participer les salariés à la résolution immédiate des problèmes. Certes, mais comment ? Une vraie participation des salariés ne se limite pas à cela. Elle doit favoriser des échanges sur le travail lui-même… 5. Utiliser uniquement des technologies fi ables qui servent les collaborateurs et les processus. Cela ne suffi t pas : il faut prendre en compte les usages et pratiques différenciées dès la concep- tion des outils en y associant les utilisateurs concernés. 6. Former des responsables qui maîtrisent parfaitement le travail. L’immense majorité des managers n’est pas formée à cette démarche participative qui les met en danger car elle peut nier leur expertise et leur légitimité. Il est surtout important que les managers soutiennent la réalisation du travail au quotidien (régulation, reconnaissance…). Il faut leur en donner les moyens et porter attention à leurs propres conditions de travail. 7. Aller sur le terrain pour bien comprendre la situation (genchi genbutsu). Tout est dans la posture sur le terrain : posture « résolution de problème » versus « pression sur les indicateurs et les pres- criptions… ». Il faut focaliser l’attention sur le travail lui-même, par nature variable, soumis à des aléas. Les savoir-faire professionnels consistent précisément à anticiper et gérer cette variabilité. 8. Devenir une entreprise apprenante grâce à la réfl exion systématique (hansei) et à l’amélioration continue (kaizen) : créer des dysfonctionnements pour les anticiper. Mettre le système volontairement sous tension peut créer des situations contre- productives et intensifi er le travail. Favoriser l’apprentissage et l’innovation s’accommode diffi cilement du cadre standardisé visé par l’amé- lioration continue. 9. Standardiser les tâches. Convoquer l’expertise de salariés pour ensuite simpli- fi er leurs tâches peut être risqué et peut transformer les métiers. Voire être contre-productif : les salariés peuvent avoir intérêt à taire leurs diffi cultés pour conserver des marges de manœuvre. 10. Former des individus et des équipes qui appliquent stricto sensu. Les choses ne se passent jamais comme prévu et demandent justement une expertise opérationnelle permettant de faire face à l’imprévu pour combler les écarts (et donc de faire des écarts) 11. Utiliser des systèmes tirés pour éviter la surproduction et les stocks (juste à temps). Attention à l’absence de marge de manœuvre et aux risques d’intensifi cation du travail. 12. Utiliser des contrôles visuels pour qu’aucun problème ne reste caché. Peut engendrer un sentiment de contrôle et mettre en concurrence les salariés, ce qui nuit au travail collectif propice à la recherche de performance. 13. Tirer les sous-traitants vers la même démarche stricto sensu. Or un modèle n’est pas transposable d’une entre- prise à une autre… 14. Appliquer rapidement les décisions. Les « irritants » jamais résolus donnent l’impression que seules les décisions ayant un impact sur la productivité sont entendues. La dimension systémique du lean est un important point d’attention. Elle invite les entreprises à dépasser le modèle pour mieux défi nir leurs enjeux de performance et de conditions de travail en sortant du prescriptif et en s’adaptant à leur propre contexte et besoins. LES 14 PRINCIPES DU LEAN (littéralement « maigre ») ET LES POINTS DE VIGILANCE SUR LES CONDITIONS DE TRAVAIL Source : http://fr.slideshare.net les effets de tout modèle organisationnel dépendent en partie de la façon dont l’entreprise a déployé celui-ci selon les enjeux auxquels il répond, le système qui l’accueille et les arrangements dont il fait l’objet. Le Lean n’existe pas en tant que tel : il s’inscrit dans des dispositifs orga- nisationnels existants. » Cela explique la grande diversité de pratiques que l’on observe dans les entreprises autour du Lean, certaines allant jusqu’à le mettre en œuvre sans le nommer… > Rythme accéléré Aujourd’hui, sa mise en œuvre fait débat. D’une part, il est porteur d’opportunités qui peuvent faire levier sur les conditions de travail, comme l’importance accordée au terrain ou l’implication des salariés à travers leur participation à la résolution de problèmes. D’autre part, il implique des risques, puisque ses principes de réduction des coûts, de chasse aux temps « inutiles », d’intégration systématique des besoins des clients très en amont du processus de production (devenant ainsi des prescripteurs qui imposent des délais et un cahier des charges éloignés des réalités du travail) accélèrent le rythme de travail. L’augmentation des cas de troubles musculosquelettiques (TMS) ou de risques psychosociaux (RPS) a déjà été observée par des médecins du travail après la mise en place d’une organisation Lean. « Un lien causal entre la mise en œuvre du Lean et la dégradation de la santé des salariés n’est pourtant pas facile à établir, poursuit Mélanie Burlet, notam- ment dans des contextes où les mutations sont nombreuses. Au-delà des risques d’intensifi cation du travail, il est important de se préoccuper des effets potentiels du Lean sur la transformation des métiers pour comprendre les problèmes concrets qu’il pose à l’activité des salariés. Car, au quotidien, il contient des paradoxes : il prétend mettre sous tension sans mettre uploads/Management/lean-management-pdf.pdf

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  • Publié le Aoû 20, 2022
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