© 2020 Pearson France – Stratégique 12e édition Stratégique 12e édition R. Whit

© 2020 Pearson France – Stratégique 12e édition Stratégique 12e édition R. Whittington, P. Regnér, D. Angwin, G. Johnson, K. Scholes F. Fréry Chapitre 3 – L’analyse de l’industrie Étude de cas Une nouvelle page pour la publicité Au début des années 2020, les agences de publicité étaient confrontées à une série de défis inédits. Les marchés historiques et les méthodes établies, développés pour la plupart en Amérique du Nord et en Europe de l’Ouest suite à l’émergence de la société de consommation au XXe siècle, étaient radicalement remis en cause. Alors que Google, Facebook ou Twitter captaient une part croissante des budgets publicitaires, la capacité à traiter les données devenait essentielle, et les agences traditionnelles se retrouvaient ainsi en concurrence avec des cabinets de conseil en systèmes d’information comme Accenture ou Capgemini. Accenture, qui en 2019 avait racheté l’agence créative Droga5 pour un montant estimé entre 300 et 400 millions de dollars, était désormais considéré dans certains classements comme la sixième agence de publicité au monde. Réciproquement, Publicis, le numéro trois mondial de la publicité, avait racheté Epsilon, un spécialiste du ciblage et du traitement des données (9 000 employés dont 3 700 analystes et 2 000 ingénieurs), pour 4,4 milliards de dollars. Alors que les frontières de l’industrie étaient profondément affectées, la réduction des budgets publicitaires alloués par les clients aux agences historiques attisait leur rivalité concurrentielle. Le modèle économique de la publicité Traditionnellement, la tâche des agences de publicité consistait, au nom de leurs clients (les annonceurs), à cibler une audience spécifique afin de la convaincre de consommer un produit ou un service. Dans cet objectif, les agences communiquaient sur les marques de leurs clients au travers de toute une série de supports. La marque permettait aux consommateurs de différencier les offres, et c’était aux agences de publicité de la positionner de telle manière qu’elle soit associée avec les attributs et les fonctions valorisées par la cible. Il pouvait s’agir de marques grand public (par exemple L’Oréal, Coca-Cola ou Toyota) ou de marques ciblant des entreprises (par exemple Airbus, IBM ou KPMG). Certaines marques s’adressaient à la fois aux consommateurs et aux entreprises (par exemple Apple ou Microsoft). Outre les entreprises privées, la clientèle des agences de publicité comprenait aussi les pouvoirs publics, qui allouaient d’importants budgets pour accompagner leurs politiques de sécurité routière, d’éducation ou de santé (comme le « Moi(s) sans tabac » en France). Le gouvernement britannique dépensait ainsi chaque année environ 300 millions de livres en publicité. Les associations, les partis politiques, les syndicats, voire les églises utilisaient également la publicité pour attirer des donateurs, recruter des adhérents ou véhiculer divers messages. Ces différents clients représentaient environ 3 % des dépenses publicitaires mondiales. Les agences se comportaient effectivement comme des « agents » : c’est au nom de leurs clients qu’elles plaçaient les publicités dans les médias (télévision, presse, radio, Internet, etc.). Les annonceurs faisaient appel aux agences pour bénéficier de leur savoir-faire, de leurs compétences, de leur créativité et de leur expérience. Les agences se rémunéraient généralement au travers d’honoraires proportionnels au temps passé à concevoir les campagnes de publicité, plus une commission sur les services et les médias achetés au nom des clients. Cependant, depuis quelques années, de grands annonceurs tels que Coca-Cola, Procter & Gamble et Unilever instauraient un nouveau modèle, dans lequel la rémunération de l’agence était fonction du résultat de la campagne, © 2020 Pearson France – Stratégique 12e édition 2 mesuré par toute une série d’indicateurs (croissance des ventes, part de marché, etc.). En 2018, dans un souci de réduction de ses coûts et de contrôle de ses données, Procter & Gamble avait même annoncé son intention de réduire de 1,25 milliard de dollars ses dépenses publicitaires (sur un total de 10,7 milliards) en remplaçant 75 % de ses agences de publicité par des équipes internes, et avait recruté à cet effet une série de spécialistes travaillant jusque là pour Omnicom, WPP ou Publicis. D’autres grands annonceurs, comme Nestlé, envisageaient de faire de même. La croissance de l’industrie Au cours des deux précédentes décennies, le montant global investi en publicité avait très fortement augmenté. Pour l’année 2018, il était évalué à plus de 196 milliards de dollars rien qu’en Amérique du Nord et à 583 milliards au niveau mondial. En dépit des aléas de la conjoncture, on estimait que le marché dépasserait les 787 milliards en 2022. Au sein de cette croissance générale, l’équilibre du marché publicitaire connaissait cependant de fortes évolutions. Des régions autrefois négligeables en termes d’investissement publicitaire prenaient une importance croissante, notamment les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud), mais aussi le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord. On avait ainsi vu apparaître des agences spécialisées dans le marketing islamique, qui veillaient à véhiculer des messages respectueux des convictions des consommateurs musulmans. L’analyse des tendances futures montrait l’émergence de marques de grande consommation dans des régions du monde où les investissements publicitaires étaient encore embryonnaires (voir tableau 1). Tableau 1 : Dépenses publicitaires par région sur les principaux supports : journaux, magazines, télévision, radio, cinéma, affichage, Internet (en millions de dollars américains, conversions au taux moyen de 2017) 2015 2016 2017 2018 2019 (estimation) Amérique du Nord 175 024 183 075 191 130 196 099 201 982 Europe de l’Ouest 114 712 119 531 124 790 128 035 132 004 Asie-Pacifique 130 711 137 639 145 695 149 483 156 509 Europe de l’Est 35 514 36 691 37 305 38 275 40 839 Amérique latine 36 836 38 530 39 226 42 315 43 034 Afrique Moyen- Orient 28 044 29 334 28 608 29 352 27 943 Monde 520 841 544 800 566 754 583 599 602 312 Sources : ZenithMedia, Statista, décembre 2018. En termes d’industries, trois des dix plus gros annonceurs mondiaux étaient des constructeurs automobiles. Cependant, les trois entreprises dont les budgets publicitaires étaient les plus élevés étaient Procter & Gamble, Nestlé et L’Oréal. L’automobile, l’agroalimentaire, la santé, les cosmétiques, la distribution, les télécommunications et le divertissement figuraient parmi les 20 principaux clients de la publicité. Les marques globales étaient celles qui dépensaient le plus : les 100 plus gros annonceurs représentaient environ 50 % des dépenses publicitaires mondiales. La concurrence Il existait toutes sortes d’agences publicitaires, depuis de minuscules boutiques d’une ou deux personnes (qui sous-traitaient l’essentiel de leur activité à des créatifs indépendants), jusqu’à des groupes mondiaux rassemblant plus de 130 000 salariés. L’industrie avait connu une phase de concentration qui avait donné naissance à des réseaux d’agences globaux (voir tableau 2), dont les plus gros avaient leur siège à New York, Londres, Paris ou Tokyo. Ces réseaux multi-agences s’appuyaient sur la créativité de leurs équipes (mesurée par de nombreux classements et trophées), leur pouvoir de négociation dans l’achat d’espaces dans les médias, leur connaissance des marchés, leur présence internationale et de plus en plus leur maîtrise des outils numériques. Certains groupes s’étaient intégrés verticalement pour proposer toute une gamme de services à leurs clients. Omnicom avait ainsi fait l’acquisition d’imprimeurs et de centres d’appel. Derrière les géants mondiaux, les concurrents de taille moyenne s’appuyaient sur leur connaissance approfondie de certains marchés, se spécialisaient dans certains services comme le numérique, ou construisaient une réputation d’innovation et de créativité grâce à des campagnes © 2020 Pearson France – Stratégique 12e édition 3 particulièrement remarquées. Cependant, ils utilisaient plus souvent des créatifs indépendants que les grands réseaux. Tableau 2 : Les cinq plus gros réseaux mondiaux d’agences publicitaires en 2019 Nom du réseau Chiffre d’affaires Marge opérationnelle Nombre de salariés Agences et marques WPP (Royaume-Uni) 13,2 milliards de livres 1 561 millions de livres 130 000 JWT, Grey, Ogilvy, Young & Rubicam Omnicom (États-Unis) 14,9 milliards de dollars 2 122 millions de dollars 70 400 BBDO, DDB, TBWA Publicis (France) 9,8 milliards d’euros 1 699 millions d’euros 75 588 Leo Burnett, Saatchi & Saatchi, Publicis, BBH IPG (États-Unis) 8,6 milliards de dollars 1 090 millions de dollars 54 000 McCann Erickson, FCB, MullenLoweGroup Dentsu (Japon) 9,6 milliards de dollars -30,6 millions de dollars 62 608 Aegis, Carat, Denstu Media, iProspect, Isobar Sources : Omnicom, WPP, Publicis, IPG, Dentsu. Beaucoup de petites agences apparaissaient et beaucoup disparaissaient. La plupart étaient fondées par d’anciens salariés des grandes agences. Réciproquement, les grands réseaux rachetaient fréquemment des petites agences spécialisées afin d’acquérir leurs compétences, de parfaire leurs gammes de services ou de cibler de nouveaux clients. Avec le développement d’Internet et de la publicité en ligne, un nouveau type d’agences était apparu, à l’image de Razorfish (acquis par Publicis pour 530 millions de dollars en 2009) et d’AKQA (racheté par WPP pour 540 millions de dollars en 2012). Elles offraient toute une série de services dédiés à Internet : conception de sites, référencement sur les moteurs de recherche, réalisation de bannières, conseil. Elles étaient qualifiées d’agences, car elles créaient elles aussi des campagnes et négociaient l’achat d’espaces pour leurs clients sur Facebook, Twitter, YouTube ou Instagram. Cependant, contrairement aux médias traditionnels tels que la télévision, il était souvent impossible de négocier uploads/Marketing/ chapitre-3-la-publicite.pdf

  • 21
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager
  • Détails
  • Publié le Oct 16, 2021
  • Catégorie Marketing
  • Langue French
  • Taille du fichier 0.1675MB