35 RDCEC ISSN : 2658-946X Vol 1 No 1 2020 LA CLEMENCE : UN OUTIL MODERNE DE REG
35 RDCEC ISSN : 2658-946X Vol 1 No 1 2020 LA CLEMENCE : UN OUTIL MODERNE DE REGULATION DE CONCURRENCE LENIENCY: MODERN TOOL FOR COMPETITION REGULATION MAISSAE BOUSSAOUF Enseignante à la Faculté des Sciences Juridiques, Economiques et Sociales) Université Mohammed V –Souissi- Rabat , Maroc m.bousaouf@um5s.net.ma ACHOUR HAFSA Doctorante à la Faculté des Sciences Juridiques, Economiques et Sociales) Université Mohammed V –souissi- Rabat , Maroc Hafsa-hafsa-18@outlook.fr Abstract This work aims to demonstrate that the strengthening of fines to punish the most serious anti-competitive practices, such as cartels, has gone hand in hand with the emergence of immunities related to the denunciation of cartels. The penalties for companies that breach the competition law are multiple and diverse, but their detection remains a challenge for competition authorities working to find more effective alternatives to traditional sanctions. The leniency policy as a regulatory tool offers companies involved in a cartel - which self- report and hand over evidence - either total immunity from fines or a reduction of fines applied to firms that cooperate with antitrust authorities in cartel investigations. Key words: Sanction, leniency, investigation, incitement, denunciation, rewards, efficiency. 36 RDCEC ISSN : 2658-946X Vol 1 No 1 2020 Résumé Ce travail a pour objectif d’analyser la clémence comme outil juridique de régulation de la concurrence destinée à pallier aux défis de détection et de sanction des cartels nocifs (cancers de l’économie) . Ces contraintes ont conduit à l’institution de procédures alternatives permettant aux autorités de détecter et mettre fin efficacement à ces pratiques nuisibles à la concurrence, tout en faisant une économie des moyens d’investigation. Cette procédure traduit toute la philosophie moderne de régulation de la concurrence, par le moyen de pousser les entreprises à repenser totalement leur stratégies et à éviter le contentieux, en coopérant avec l'autorité de concurrence en contrepartie d’une réduction ou suppression de la sanction . Mots clés : Sanction, clémence, investigation , incitation, dénonciation , récompenses, efficacité. Introduction « Notre repentir, ce n’est pas tellement pour le mal que nous avons fait, mais pour la peur de ses conséquences » François De La Rochefoucauld La prise de conscience au sein des instances internationales de la concurrence de la nocivité des ententes anticoncurrentielles pour l’économie mondiale s’est matérialisée à travers les recommandations formulées par l’OCDE1 en 1998 et 2001. En effet sont « qualifiées d’ententes injustifiables » par les experts de l’OCDE , ces accords secrets passés entre des entreprises en vue de fixer les prix et d’anticiper les fluctuations du marché , de limiter et répartir la production et les marchés , et de truquer les offres notamment par des soumissions concertées qui gaspillent les ressources de l’ensemble de la collectivité , ces pratiques , sont cause d’inefficience , et coutent des milliards de dollars aux consommateurs du monde entier » 2. Ces ententes injustifiables tombent directement sous le coup de l’article 101 paragraphe1 TFUE3 qui constitue une des pierres angulaires du traité instituant les communautés Européennes , disposant que : « Sont incompatibles avec le marché commun 37 RDCEC ISSN : 2658-946X Vol 1 No 1 2020 et interdits tous accords entre entreprises, toutes décisions d’associations d’entreprises et toutes pratiques concertées , qui sont susceptible d’affecter le commerce entre Etats membres et qui ont pour objet ou pour effet d’empêcher , de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l’intérieur du marché commun , et notamment ceux qui consistent à fixer de façon directe ou indirecte les prix d’achat ou de vente ou d’autres conditions de transaction , limiter ou contrôler la production , les débouchés , le développement technique ou les investissements, répartir les marchés ou les sources d’approvisionnement , les accords ou décisions interdits en vertu du présent article sont nuls de plein droit…. » 4. Dans ses lignes directrices sur l’applicabilité de l’article 101 du TFUE aux coopérations horizontales, la Commission Européenne précise que « Pour qu'un accord ait des effets restrictifs sur la concurrence au sens de l'article 101, paragraphe 1, il doit avoir, ou être susceptible d'avoir, une incidence défavorable sensible sur au moins un des paramètres de la concurrence sur le marché, tels que le prix, la production, la qualité ou la diversité des produits, ou l'innovation. Les accords sont susceptibles d'avoir de tels effets lorsqu'ils diminuent sensiblement le jeu de la concurrence soit entre les parties à l'accord, soit entre l'une quelconque de ces parties et des tiers. Cela signifie que l'accord doit avoir pour effet de réduire l'autonomie décisionnelle des parties , soit du fait des obligations contenues dans l'accord qui régissent le comportement sur le marché d'au moins une des parties, soit en influant sur le comportement sur le marché d'au moins une des parties en modifiant ses incitations» 5. Considérées comme des pratiques particulièrement nuisibles à l’intérêt général, les cartels sont prohibés aussi bien par la commission (au niveau communautaire) 6 que par l’Autorité de la concurrence (en France) et le conseil de la concurrence (au Maroc) et d’autres instances de régulation par le monde. Malgré cette prohibition, il est difficile de prouver l’existence d’une telle pratique et donc la mise en œuvre de la répression. Cet obstacle a suscité l’élaboration d’un moyen d’action parmi d’autres facilitant la détection des ententes, appelée « clémence ». Inspirée du droit américain, la notion de « politique de clémence » est apparue en droit européen en 1996, refondue en 2006 par une nouvelle communication de la commission et introduite en droit marocain par la loi 104-12 sur la concurrence. La clémence 38 RDCEC ISSN : 2658-946X Vol 1 No 1 2020 permet à une entreprise ayant participé à une entente anticoncurrentielle de bénéficier d’une réduction de la sanction voire même sa disparition, si elle apporte sa coopération et son aide à l’Autorité de la concurrence afin d’établir la preuve de l’existence de ladite entente. La clémence repose donc sur le principe suivant : plutôt que de sanctionner purement et simplement les contrevenants, on va les faire participer à la résolution du problème en contrepartie d’un pardon comme récompense. Ce principe signifie que les autorités de la concurrence adoptent une démarche pédagogique et pragmatique, en accordant l’immunité (totale ou partielle) à l’entreprise qui acceptera de faire son devoir en participant au respect de la libre concurrence7. Le recours à cette démarche pour l’autorité de la concurrence a été jugé par les observateurs de l’évolution et de la pratique du droit de la concurrence dans le monde, un exercice très intéressant, l’OCDE 8 va sensibiliser depuis plusieurs années les Etats membres à se doter de programmes de clémence, inspirés du système anglo-saxons « corporate leneincy programs », qui constituent désormais un instrument essentiel de la lutte des autorités de concurrence contre des pratiques fondamentalement nocives. L’intérêt porté au système de clémence par les législations comparées de la concurrence et les autorités de la concurrence depuis les vingt dernières années, et son insertion récente dans la loi marocaine, nous incitent à vouloir cerner ses atouts pour l’autorité de la concurrence d’une part et pour les entreprises parties à l’entente prohibée d’autre part. À titre liminaire, il convient de préciser ce que l’on entend par « clémence ». Dans ce cadre, sous le vocable « clémence » seront visées tant les exonérations totales de sanctions pécuniaires, c’est-à-dire les immunités, que les exonérations partielles ou réductions d’amendes. Les programmes de clémence constituent un nouveau moyen à la disposition des autorités de concurrence pour lutter contre les ententes 9, en particulier les plus graves d’entre elles, dites « cartels ». L’analyse de la clémence en tant qu’outil moderne de détection des « ententes injustifiables », impose d’abord de bien cerner le mécanisme dans sa conception théorique 39 RDCEC ISSN : 2658-946X Vol 1 No 1 2020 justifiant son esprit et le contexte de son institution ( I) , avant d’appréhender ses fonctions multiples destinées à réaliser l’efficacité escomptée dans la mise en œuvre du droit de la concurrence (II) , et qui justifient son attractivité . I- L’ESPRIT D’INSTITUTION DE LA CLEMENCE : Dans la lutte contre les ententes injustifiables, les autorités de la concurrence sont dotées d’un pouvoir de sanction. Toutefois, elles peuvent rencontrer des difficultés majeures lors de la détection des pratiques illicites 10. Les cartels sont en effet considérés comme des pratiques particulièrement nuisibles à l’intérêt général en ayant un impact direct sur les prix. Ces pratiques peuvent prendre des formes très diverses : entente sur les prix, sur les promotions, sur les quotas de production ou encore sur un partage géographique du marché. Quoi qu’il en soit, les ententes de ce type constituent une cible majeure des autorités de la concurrence. En effet, d’un point de vue économique, ces ententes favorisent la hausse des prix et conduisent, la plupart du temps, à une diminution de surplus des consommateurs et même à une perte de surplus social. De ce fait, s’impose de plus en plus aux Etats d’adopter des mesures pragmatiques mettant en avant l’efficacité économique de la sanction dans le cadre d’une politique de concurrence performante. Pour autant, uploads/Marketing/1-pb 23 .pdf
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- Publié le Aoû 03, 2021
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