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See discussions, stats, and author profiles for this publication at: https://www.researchgate.net/publication/279679706 La théorie interpretative de la traduction: un résumé / Article · January 1997 CITATIONS 7 READS 5,310 1 author: Some of the authors of this publication are also working on these related projects: Simultaneous Interpretation : Units of Meaning and other features" in/ D. GERVER, H.W. SINAIKO (eds) View project Marianne Lederer Université de la Sorbonne Nouvelle Paris 3 33 PUBLICATIONS 264 CITATIONS SEE PROFILE All content following this page was uploaded by Marianne Lederer on 18 June 2016. The user has requested enhancement of the downloaded file. 1 La théorie interprétative de la traduction - origine et évolution Ballard Michel (dir.) Qu’est-ce que la traductologie, Artois Presses université, 2006, pp. 37-52. Marianne LEDERER Il faut féliciter les organisateurs de ce colloque pour le thème qu'ils ont choisi : qu'est ce que la traductologie ? Le moment est bien venu pour poser la question, car il semble que la traductologie s'étende à l'heure actuelle dans toutes sortes de directions, sociologie, histoire, philosophie, anthropologie, politique, au risque peut-être bientôt d'oublier son objectif principal, la traduction. Je vais, quant à moi, me concentrer sur ce qui est au cœur même de la traductologie, le processus de la traduction, et décrire la théorie générale de la traduction que nous avons élaborée à l'ESIT au cours des trente dernières années sous le nom de théorie interprétative de la traduction. 1. Au départ, une théorie de l’interprétation (traduction orale) On ne peut parler de la Théorie interprétative de la traduction sans parler de son fondateur, Danica Seleskovitch. Celle-ci, ayant vécu dans sa jeunesse successivement dans plusieurs pays, connaissait et parlait le français, l'allemand, le serbe et l'anglais sans jamais avoir eu à apprendre véritablement ces langues à l'école. Passant sans difficulté d'une langue à l'autre, elle allait donc droit au sens véhiculé par les signes linguistiques, qui pour elle, ne représentaient que le moyen au travers duquel le sens pouvait être appréhendé. Cette connaissance intime de plusieurs langues est le premier élément de la théorie qu'elle a fondée : les langues, à condition qu'elles soient maîtrisées par le traducteur, ne sont pas l'objet de la traduction. Cette certitude fut confortée par sa pratique de l'interprétation consécutive puis simultanée : ne portant attention aux significations linguistiques que juste ce qui était nécessaire pour que s'en dégage le vouloir-dire de l'orateur, elle reformulait ensuite 2 celui-ci de façon idiomatique dans la langue d'arrivée, dans l'abandon quasi total des signes originaux. C'était bien le sens qui était transmis, et non la langue. L'enseignement de l'interprétation, auquel elle s'adonna à partir de 1957, la poussa à réfléchir pour expliquer à ses étudiants les raisons des principes pédagogiques qu'elle avançait. Le premier ouvrage que Danica Seleskovitch publia, en 1968, L'interprète dans les conférences internationales, qui contient déjà en germes ce qu'elle allait développer dans les 30 années suivantes, est une somme commentée des observations tirées de son expérience personnelle. Son second livre, en revanche, tiré de la thèse principale de son doctorat d'état, Langage, langues et mémoire - étude de la prise de notes en interprétation consécutive (1975), n'est plus seulement fondé sur l'intuition et sur l'observation. Il représente la toute première expérimentation objective faite sur l'interprétation consécutive. Cette étude peut être considérée pour l'oral comme le précurseur des recherches faites aujourd'hui pour l'élucidation détaillée de ce qui se passe dans la tête du traducteur de l'écrit, à l'aide des Think Aloud Protocols (TAP) et des logiciels permettant de noter les pauses, les hésitations, les corrections de celui qui traduit… 2. Les premiers principes La théorie ne s’est vu donner un nom que vers la fin des années 1970. Ce sont les recherches de Danica Seleskovitch qui ont dégagé les premiers principes constituant la base de ce qui deviendra la théorie interprétative de la traduction (pour ses disciples, la ‘théorie du sens’). 2.1. Correspondances et équivalences 2.1.1. Leur coexistence dans toute traduction Au départ, Danica Seleskovitch (1975) a constaté l'existence en interprétation (existence qui a été plus tard démontrée pour la traduction écrite) de deux stratégies du traducteur, différentes bien que coexistant dans chaque texte : d'une part la traduction par correspondances entre langues de certains éléments linguistiques sur lesquels le contexte n'exerce pas d'influence, tels que les noms propres, les chiffres, les termes techniques, et de l'autre la traduction par établissement d'équivalences entre segments de discours ou de textes, dans lesquels les significations linguistiques, sous l'effet du contexte, perdent leur polysémie et, sous l'effet des connaissances extralinguistiques du traducteur, révèlent le vouloir dire du locuteur. 3 Cette première constatation, fondée d’abord sur la pratique, puis sur l'expérimentation, permet une avancée importante aussi bien en théorie qu'en didactique de la traduction. Nous-mêmes et nos doctorants successifs avons pu vérifier la régularité du phénomène sur d'innombrables textes de genres différents. Le fait que cette coexistence se retrouve dans toutes les traductions quelles qu’elles soient peut être considéré comme une des lois universelles du comportement traductif que recherche Gideon Toury (1995). Voici deux brèves illustrations de l’alternance des correspondances et des équivalences, tirées de l'ouvrage que j'ai publié en 1994 chez Hachette , La traduction aujourd'hui - le modèle interprétatif. Je m'y appuie sur un chapitre de Cannery Row de Steinbeck, paru en 1945 et traduit en français en 1948. On assiste à la promenade matinale de deux soldats, et des deux filles avec lesquelles ils ont passé la nuit à danser et à boire. L'auteur décrit leur apparence : The ties were pulled down a little so the shirt collars could be unbuttoned. Ils avaient défait leur cravate afin de pouvoir ouvrir leur col. On voit mal comment cette scène, cette situation concrète, aurait pu être décrite sans que la correspondance des deux mots ties et collars n'y apparaisse en français. En revanche, le reste a été reformulé librement par Magdeleine Paz, la traductrice. On pensera peut-être que la forme prise par la traduction française découle du fait que le passif, courant en anglais, n'est pas usuel en français et que le traducteur a consciemment appliqué une stratégie de traduction préétablie en mettant la phrase à la forme active. Ce serait là raisonner en comparatiste et non en traductologue ; une rapide enquête faite auprès de quelques traducteurs professionnels confirmés permet de penser qu’ils n’agissent pas ainsi. Il leur est beaucoup plus rapide et naturel, disent-ils, d'imaginer la scène et de la restituer en un français spontané à partir de l’image qu’évoque le texte qu'en appliquant une règle de transfert. Pour la Théorie interprétative de la traduction, il y a eu, visant une identité de sens, réexpression idiomatique dans la langue d'arrivée, création discursive, ce que nous appelons équivalence de texte, avec inclusion ponctuelle de deux correspondances. 2.1.2 Les équivalences s’appuient sur le contexte Un autre bref exemple nous fera progresser d'un pas dans le compte rendu de la théorie interprétative. Après la description de l'apparence physique des protagonistes, on les voit en mouvement : 4 They walked holding hands Soldats et filles se tenaient par la main. On remarque ici l'influence du contexte sur la traduction. Le pronom "they" est explicité en français par "soldats et filles", dont la connaissance provient d'un passage précédent ; en revanche "walked" est omis. Pourquoi ? La traductrice sait depuis le début du récit que les jeunes gens déambulent, les lecteurs de l'original comme de la traduction le savent aussi. On s'aperçoit, à comparer les deux textes, qu'ils véhiculent chacun un non dit différent : "they" renvoie à "soldats et filles", alors que "walked", omis dans la traduction, est néanmoins sous entendu grâce au contexte. Les lecteurs de l'original et de la traduction imaginent la même scène. L'explicite linguistique et le non-verbal des connaissances des lecteurs se conjuguent dans les deux cas pour constituer un même sens. Là encore nous sommes en présence, pour un sens identique, d'une équivalence entre segments de textes. Nous en verrons d'autres plus loin. 2.2. Comment comprend-on ? Les praticiens de l'interprétation savent, pour avoir interprété quantité d'orateurs, que ceux-ci ajustent l'explicite de leur dire aux connaissances qu'ils supposent à ceux auxquels ils s'adressent. C'est aussi ce que font les écrivains, c'est ce que fait ici Steinbeck. Les signes linguistiques, l'explicite d'un texte, ne sont jamais compris seuls, ils appellent de la part des auditeurs ou des lecteurs l'apport de connaissances pertinentes pour les compléter et en extraire le sens (à cet égard, on peut dire que les interprètes ont détecté, avant Grice et Eco, la nécessaire coopération de l'auditeur à la compréhension du discours, du lecteur à celle du texte). Illustrons ce phénomène, qui passe généralement inaperçu en communication unilingue, d’un exemple tiré d'un article de revue traitant de l’ABS (automatic braking system) . Whether they admit it or not, most drivers react to a sudden emergency by slamming on the brakes in a blind panic, hoping to stop before crashing. Unfortunately, in many cases the result is that the brakes lock - especially on wet roads - causing the car to skid right into whatever is uploads/Philosophie/ 2006lathorieinterprtativedelatraduction-pdf.pdf

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