Alain (1868-1951), Politique, Presses universitaires de France, 1962, p. 23-24

Alain (1868-1951), Politique, Presses universitaires de France, 1962, p. 23-24 ................................. 2 Robert Antelme (1917-1990), L’Espèce humaine, Gallimard, 1957, pages 229-230........................... 2 Pierre Bayle (1647-1706), Commentaire philosophique sur ces paroles de Jésus-Christ : « Contrains-les d’entrer », 1686 .......................................................................................................... 3 Beaumarchais (1732-1799), Le Mariage de Figaro, 1784 ................................................................... 3 Abdennour Bidar (né en 1971), Plaidoyer pour la fraternité, Albin Michel, 2015 .............................. 4 Léon Blum (1872-1950), « Discours au 9e Congrès national de la Ligue internationale contre l’antisémitisme », 26 novembre 1938 ................................................................................................. 4 Albert Camus (1913-1960), « Les quatre commandements du journaliste libre », article censuré de 1939, et publié par Le Monde, 18 mars 2012 ...................................................................................... 6 Guy Carcassonne (1951-2013), « Liberté », in Guide républicain, Scéren-CNDP, Delagrave, 2004 .... 7 Andrée Chédid (1920-2011), « L’espérance », Une salve d’avenir, Gallimard, 2004 .......................... 8 Michel Delattre, Portail des valeurs de la République, https://www.reseau-canope.fr/les-valeurs- de-la-republique, 2015 ........................................................................................................................ 8 Droits fondamentaux .......................................................................................................................... 9 Paul Éluard (1895-1952), « Liberté », Au rendez-vous allemand, Les éditions de Minuit, 1945 ...... 10 Jules Ferry (1832-1893), « Lettre aux instituteurs », 1883 ............................................................... 12 Grand corps malade, « Je suis Charlie », 2015 .................................................................................. 12 Nazim Hikmet (1901-1963), « Don Quichotte », 1948 ...................................................................... 13 Étienne de la Boétie (1530-1563), Discours de la servitude volontaire, 1576 .................................. 13 Montesquieu (1689-1755), De l’esprit des lois, 1748 ........................................................................ 14 Salman Rushdie, lors d’une conférence à l’Université du Vermont, 14 décembre 2015 (rapporté par Le Monde, 15 janvier 2015) ............................................................................................................... 14 Voltaire (1694-1778), Questions sur l’Encyclopédie, « Liberté d’imprimer », 1758 .......................... 14 Voltaire (1694-1778), Dictionnaire philosophique, « Fanatisme », 1764 .......................................... 15 Voltaire (1694-1778), Traité sur la tolérance à l’occasion de la mort de Jean Calas, 1763 .............. 16 Gao Xingjian (né en 1940), interview sur le site de Radio Prague, https://francais.radio.cz/gao- xingjian-jai-besoin-de-la-liberte-decrire-pour-sentir-que-je-suis-encore-8572945, 2010 ............... 17 Émile Zola (1840-1902), « Réponse à l’enquête sur les responsabilités de la presse contemporaine », Revue politique et littéraire, 18 décembre 1897 ................................................. 17 Ressources en ligne ........................................................................................................................... 18 Alain (1868-1951), Politique, Presses universitaires de France, 1962, p. 23-24 « La démocratie n’est pas le règne du nombre, c’est le règne du droit. » Cette formule, que j’ai rencontrée ces jours, est bonne à méditer dans ce moment de notre histoire. […] Il n’y a point de tyrannie légitime ; et la force du nombre ne peut point créer le plus petit commencement de droit. Le droit est dans l’égalité. Par exemple, tous ont un droit légal à pratiquer telle religion qu’ils auront choisie ; le droit de l’un limite le droit de l’autre. Il serait contre le droit qu’une majorité, aussi écrasante qu’on voudra, et unanime, supposons-le, sur le problème religieux, voulût imposer son culte à une douzaine de dissidents. Pour parler plus précisément encore, dans une démocratie, non seulement aucun parti n’a le pouvoir, mais bien mieux, il n’y a plus de pouvoir à proprement parler. Il y a des magistrats qui ont pour charge de maintenir l’égalité, la paix, l’ordre ; mais ces magistrats ne doivent pas agir au nom d’un parti. […] Mais, direz-vous, il y a les lois elles-mêmes, qui sont faites par le parti le plus fort ? C’est une erreur. Les lois sont faites d’un accord commun et sans aucun esprit de parti. La loi sur les accidents du travail, la loi sur les retraites ouvrières, la loi sur les associations, sont des formules de bon sens, suggérées par des circonstances qui ne dépendent point de ce que tel parti ou tel autre est au pouvoir. […] Si nous faisons l’impôt sur le revenu, nous ne pouvons pas dire non plus que la République en aura le monopole. Les lois sur le « bien de famille » ou sur les habitations à bon marché traduisent ou traduiront aussi des nécessités, et des solutions de bon sens. Aussi, je crois que les querelles des partis sont plus académiques que réelles. On peut le voir dans les discussions législatives. Chacun parle au nom de la raison commune, et non pas au nom d’un parti nombreux. […] Dans l’ordre législatif, je ne vois pas que la majorité fasse sentir sa pression ; c’est plutôt l’unanimité, qui exige des débats publics, un travail suivi et impartial, et la liberté entière pour toute opinion et pour toute critique. Le peuple veut des législateurs, et non des tyrans. Robert Antelme (1917-1990), L’Espèce humaine, Gallimard, 1957, pages 229-230 Nous sommes au point de ressembler à tout ce qui ne se bat que pour manger et meurt de ne pas manger, au point de nous niveler sur une autre espèce, qui ne sera jamais nôtre et vers laquelle on tend ; mais celle-ci qui vit du moins selon sa loi authentique — les bêtes ne peuvent pas devenir plus bêtes— apparaît aussi somptueuse que la nôtre « véritable » dont la loi peut être aussi de nous conduire ici. Mais il n'y a pas d'ambiguïté, nous restons des hommes, nous ne finirons qu'en hommes. La distance qui nous sépare d'une autre espèce reste intacte, elle n'est pas historique. C'est un rêve SS de croire que nous avons pour mission historique de changer d'espèce, et comme cette mutation se fait trop lentement, ils tuent. Non, cette maladie extraordinaire n'est autre chose qu'un moment culminant de l'histoire des hommes. Et cela peut signifier deux choses : d'abord que l'on fait l'épreuve de la solidité de cette espèce, de sa fixité. Ensuite, que la variété des rapports entre les hommes, leur couleur, leurs coutumes, leur formation en classes masquent une vérité qui apparaît ici éclatante, au bord de la nature, à l'approche de nos limites : il n'y a pas des espèces humaines, il y a une espèce humaine. C'est parce que nous sommes des hommes comme eux que les SS seront en définitive impuissants devant nous. C'est parce qu'ils auront tenté de mettre en cause l'unité de cette espèce qu'ils seront finalement écrasés. Mais leur comportement et notre situation ne sont que le grossissement, la caricature extrême — où personne ne veut, ni ne peut sans doute se reconnaître — de comportements, de situations qui sont dans le monde et qui sont même cet ancien « monde véritable » auquel nous rêvons. Tout se passe effectivement là-bas comme s'il y avait des espèces — ou plus exactement comme si l'appartenance à l'espèce n'était pas sûre, comme si l'on pouvait y entrer et en sortir, n'y être qu'à demi ou y parvenir pleinement, ou n'y jamais parvenir même au prix de générations —, la division en races ou en classes étant le canon de l'espèce et entretenant l'axiome toujours prêt, la ligne ultime de défense : « Ce ne sont pas des gens comme nous. » Eh bien, ici, la bête est luxueuse, l'arbre est la divinité et nous ne pouvons devenir ni la bête ni l'arbre. Nous ne pouvons pas et les SS ne peuvent pas nous y faire aboutir. Et c'est au moment où le masque a emprunté la figure la plus hideuse, au moment où il va devenir notre figure, qu'il tombe. Et si nous pensons alors cette chose qui, d'ici, est certainement la chose la plus considérable que l'on puisse penser: « Les SS ne sont que des hommes comme nous »; si, entre les SS et nous — c'est-à-dire dans le moment le plus fort de distance entre les êtres, dans le moment où la limite de l'asservissement des uns et la limite de la puissance des autres semblent devoir se figer dans un rapport surnaturel — nous ne pouvons apercevoir aucune différence substantielle en face de la nature et en face de la mort, nous sommes obligés de dire qu'il n'y a qu'une espèce humaine. Que tout ce qui masque cette unité dans le monde, tout ce qui place les êtres dans la situation d'exploités, d'asservis et impliquerait par là-même, l'existence de variétés d'espèces, est faux et fou ; et que nous en tenons ici la preuve, et la plus irréfutable preuve, puisque la pire victime ne peut faire autrement que de constater que, dans son pire exercice, la puissance du bourreau ne peut être autre qu'une de celle de l'homme : la puissance de meurtre. Il peut tuer un homme, mais il ne peut pas le changer en autre chose. Pierre Bayle (1647-1706), Commentaire philosophique sur ces paroles de Jésus-Christ : « Contrains-les d’entrer », 1686 Il n’y a pas dit-on de plus dangereuse peste dans un État que la multiplicité des religions, parce que cela met en dissension les voisins avec les voisins, les pères avec les enfants, les maris avec les femmes, le prince avec ses sujets. Je réponds que bien loin que cela fasse contre moi, c’est une très forte preuve pour la tolérance ; car si la multiplicité des religions nuit à un État, c’est uniquement parce que l’une ne veut pas tolérer l’autre, mais l’engloutir par la voie des persécutions. Hinc prima mali labes, c’est là l’origine du mal. Si chacun avait la tolérance que je soutiens, il y aurait la même uploads/Philosophie/ anthologie-de-textes-sur-la-liberte-et-sur-la-republique-2-novembre-2020-1-1.pdf

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