INTRODUCTION A partir de l’an 479 avant le Christ, Athènes connaît presque cinq
INTRODUCTION A partir de l’an 479 avant le Christ, Athènes connaît presque cinquante ans de paix et de prospérité croissante, jusqu’au commencement des guerres du Péloponnèse, l’an 431. La décadence s’installe par la suite, l’effondrement de la démocratie, qui cède le pas au pouvoir aristocratique jusqu’à l’an 403, quand Euclide essaie de la rétablir, sans succès. C’est celui-là le cadre de la vie de Socrate, né à Athènes l’an 470, fils de Sophronisque, sculpteur, et de Phénarète, sage-femme. La personnalité de Socrate pourrait être recomposée à partir des nombreux traits de son caractère qui sont présents dans la presque totalité des dialogues platoniciens ; cependant, deux motifs nous poussent à ne pas le faire : premièrement, parce qu’il faudrait clarifier préalablement la valeur du témoignage platonicien ; mais, surtout, parce que la vie de Socrate est si fortement liée à sa doctrine que c’est seulement après avoir examiné celle-ci que nous serons en mesure de comprendre la dimension humaine de sa personne. I- SOCRATE ET SA PHILOSOPHIE Socrate est sans doute la figure la plus mystérieuse de la philosophie occidentale. Il est à la fois le plus connu des philosophes et celui dont on ignore presque tout. Mentor de Platon, sa place dans les dialogues de ce dernier est centrale, notamment dans la République. 1- Biographie de Socrate : De sa biographie, on peut retenir qu’il est né à Attique en -470 et qu’il est mort à Athènes en -399, suite à sa condamnation à mort. Son père était sculpteur et sa mère sage-femme. Il n’a rien écrit, ses pensées nous ont été retransmises par son élève Platon. On représente toujours Socrate en train de discuter, vêtu d’un manteau grossier, parcourant les rues pieds nus. De son physique, on sait qu’il était extrêmement robuste et laid. Comparé aux sophistes, généralement riches, ou aux sages classiques, qui occupent souvent des fonctions importantes dans la Cité, Socrate apparaît comme un marginal, sans fonction ni attraits extérieurs. 2- La philosophie de Socrate Socrate se rencontre partout où se massait les citoyens, se présentant comme celui “qui ne sait rien”, interrogeant les gens sur ce qu’ils croient savoir et détruisant leurs illusions et fausses connaissances, les poussant à penser par eux- mêmes. Par exemple, il démontrera au héros Lachès qu’il ignore ce qu’est le courage ou aux hommes politiques qu’ils méconnaissent l’essence du politique. On parle ainsi de l’ironie socratique, dans la mesure où Socrate cherche à éveiller, ou accoucher les âmes comme il l’affirme lui-même. 1 Mais son enseignement sera condamné par ses contemporains, lesquels le jugent et le poussent à boire la cigüe. Mais dans cette épreuve (dont Platon témoigne dans l’Apologie de Socrate), Socrate accepte sa condamnation, continue à discuter et meurt dans la sérénité. Cette mort, exemplaire, fera dire à Hegel que Socrate est un “héros de l’humanité”. Socrate fonde sa philosophie sur la critique impitoyable des opinions humaines, ce qui va devenir un modèle pour toute la pensée occidentale. II- L’APPORT DE SOCRATE DANS LA CONSTRUCTION DU SAVOIR PHILOSOPHIQUE 1- L’éthique socratique Les témoignages que nous possédons sont d’accord pour qualifier d’éthique la philosophie de Socrate, en soulignant qu’il ne s’occupait pas de la philosophie de la nature. Il ne discourait point, comme la plupart des autres philosophes, sur la nature de l’univers, recherchant l’origine spontanée de ce que les sophistes appellent cosmos. Cela n’est pas une nouveauté : c’est plutôt une démarche qui s’inscrit en continuité avec la perspective qui avait été inaugurée par les sophistes. Comme eux, Socrate a dû se désintéresser de la recherche naturaliste comme conséquence des fortes contradictions qui découlaient des théories proposées par les philosophes de la nature. Cependant, cela ne veut pas dire qu’il ne se soit pas consacré dans une première étape à ce type de recherches. Plus encore, tout semble suggérer que la philosophie de Socrate n’est devenue éthique que dans une deuxième période de sa vie, après s’être consacré à l’étude de la nature ; son enseignement, en revanche, n’a eu comme objet que des questions éthiques. Les sophistes, comme nous l’avons vu, ont initié le chemin de la philosophie morale mais, ne trouvant aucun fondement sur lequel s’appuyer, ils finissaient par soutenir une éthique sceptique, utilitariste et pragmatique. Le mérite de Socrate consiste précisément en cela, en donner une réponse sans équivoque à la question sur la nature de l’homme. L’homme est son âme. C’est sur cette vérité que Socrate bâtira toute son éthique. 1.1- L’âme, centre de la personnalité morale C’est peut-être ici que se trouve la nouveauté principale des études modernes sur Socrate : axer leur attention moins sur sa méthode que sur le contenu de sa doctrine, en voyant en lui le premier philosophe qui établit d’une façon définitive le centre de la personnalité intellectuelle et morale de l’homme dans son âme. A partir de ce point de départ on comprend non seulement la doctrine mais la vie entière de Socrate ; son activité d’éducateur et sa façon particulière de l’envisager. Les témoignages sur ce point sont aussi unanimes. Socrate se présente 2 devant les jeunes Athéniens comme un éducateur, mais pas comme un sophiste. Son seul intérêt est d’apprendre aux hommes à se connaître, à découvrir la place privilégiée que l’âme a en eux et, par conséquent, à lui accorder la plus grande attention. Athéniens, je vous honore et je vous aime, mais j'obéirai plutôt au dieu qu'à vous; et tant que je respirerai et que j'aurai un peu de force, je ne cesserai de m'appliquer à la philosophie, de vous donner des avertissements et des conseils, et de tenir à tous ceux que je rencontrerai mon langage ordinaire : ô mon ami! comment, étant Athénien, de la plus grande ville et la plus renommée pour les lumières et la puissance, ne rougis-tu pas de ne penser qu'à amasser des richesses, à acquérir du crédit et des honneurs, sans t'occuper de la vérité et de la sagesse, de ton âme et de son perfectionnement? Platon, Apologie de Socrate Du caractère de la mission qu’il s’accorde découle comme une conséquence logique son aversion pour les sophistes, dont les discours n’aident en rien pour ce qu’il considère la seule chose importante, cultiver et améliorer son âme. 1.2- La vertu comme connaissance C’est aussi depuis sa conception de l’âme que l’on comprend la vertu socratique, identifiée avec la science, avec la connaissance, qui seule permet à l’homme de rendre son âme bonne, atteindre sa fin et donc être heureux. En opposition à l’éthique grecque, qui considérait que les biens suprêmes étaient la santé, la force physique, les richesses, le pouvoir, la renommée, Socrate, en accordant la primauté à l’âme par rapport au corps, invertit l’ordre des valeurs éthiques, en mettant au premier plan les biens de l’âme et, surtout, la science. En réalité, Socrate inclut dans la science toutes les vertus, de la même façon que l’ignorance englobait pour lui tous les vices. C’est la science qui permet d’agir bien, et l’ignorance est la cause du mal moral. D’après cela, à première vue, Socrate tomberait dans un intellectualisme grave ; la volonté n’aurait aucun poids sur l’agir humain et les mauvaises actions seraient excusées pour être involontaires. Sans pour autant absoudre complètement l’intellectualisme socratique, on peut le nuancer avec quelques explications qui le rendent moins paradoxal. D’une part, lorsque Socrate identifie la vertu avec la science, il n’entend pas par science n’importe quel type de connaissance, mais seulement la plus élevée, la science de ce que l’homme est son âme et de ce qui par conséquent est bon et convenable pour lui les biens de l’âme . D’autre part, lorsque Socrate rend l’ignorance seule responsable du mal moral, il veut dire que c’est seulement l’homme ignorant qui peut considérer comme étant un bien ce qui est en réalité un mal, ce qui l’amène à préférer le bien apparent aux biens réels, ceux de l’âme. Cependant, il demeure un point dans lequel l’intellectualisme persiste, parce que pour lui il suffirait de 3 connaître le bien pour le mettre en pratique : selon Socrate, il ne serait pas possible de connaître le bien et ne pas le faire. Cependant, il convient de tenir compte que les concepts socratiques de maîtrise de soi, de liberté intérieure et d’autarchie, s’ils sont exprimés avec des termes à forte connotation intellectualiste, ne peuvent pas pour autant cacher une certaine présence des dimensions appétitives. La maîtrise de soi, enkrateia, signifie la domination de l’âme sur le corps, de la raison sur les instincts, une domination qui donne à l’homme sa liberté intérieure, une liberté de la raison qui impose ses propres principes à l’irrationalité corporelle. Par cette voie l’homme vertueux se rend aussi autonome, autosuffisant pour atteindre le bonheur avec sa raison, sans besoin des biens terrestres. 2- La théologie Socrate est mort précisément à cause d’une accusation d’impiété. Nous avons souvent admiré par quels arguments les accusateurs de Socrate ont jadis persuadé aux Athéniens qu’il méritait la mort, comme criminel d’État. Voici, en effet, quels étaient à peu près les termes de l’accusation uploads/Philosophie/ apport-de-socrate-dans-la-construction-du-savoir 3 .pdf
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- Publié le Dec 09, 2021
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