1 L’introduction de dissertation Vous avez déjà sûrement entendu des dizaines d
1 L’introduction de dissertation Vous avez déjà sûrement entendu des dizaines de fois que l’introduction d’une dissertation consiste à analyser les termes du sujet pour faire apparaître un problème philosophique. Les deux questions sont : qu’est-ce que ça veut dire ? Comment qu’on fait pour faire ça ? 1.1 Les problèmes philosophiques L’introduction est très importante parce qu’elle aboutit à poser le problème qui légitime toute la dissertation par la suite. Mais à quoi ressemble un problème de dissertation de philosophie ? C’est un petit peu différent de ce que vous pouvez trouver dans les autres matières, comme en littérature par exemple. Exemple : "Il peint comme il sent" →Sujet tiré d’un des Salons de Diderot. C’est un sujet-citation et il vous faut en tirer une problématique qui porte sur l’art, la littérature en particulier, et encore plus précisément sur l’oeuvre et l’écriture de Diderot. Un problème de philosophie se distingue par les trois caractéristiques sui- vante : 1. C’est une question que tout un chacun pourrait se poser ou trouver inté- ressante →c’est pour cela que je vous déconseille très fortement d’utiliser des termes techniques de philosophie en introduction. 2. C’est une question universelle en ce qu’elle ne porte jamais sur telle ou telle période de l’histoire ou sur telle ou telle région du monde. →c’est pour cela que je vous déconseille toute référence à un auteur ou à un contexte historique pour problématiser le sujet d’une dissertation. 3. C’est une question qui ne peut pas être résolue directement par une pro- cédure technique ou scientifique, si difficile soit-elle, sans argumentation. Ces trois caractéristiques distinguent un problème philosophique d’un problème technique. La question ’comment démontrer que la somme des angles d’un tri- angle = 180 ˚?’ par exemple est une question technique pour un mathématicien. Il a tous les moyens à sa disposition pour y répondre d’une manière qui fasse l’unanimité sans discussion. Par contre la question ’peut-on dire qu’il est vrai que la somme des angles d’un triangle 180 ˚?’ est un problème philosophique, car il n’y a rien dans l’arithmétique ou dans la géométrie qui vous dise comment il faut définir le terme ’vrai’. Celui-ci pouvant prendre plusieurs sens différents il est soumis à discussion, et toute réponse à cette question ne peut se passer d’une argumentation, elle ne fera pas d’emblée l’unanimité. Normalement à votre niveau vous savez faire la différence entre un problème philosophique et un problème d’un autre ordre, donc je vais passer au problème suivant : comment trouver le problème philosophique qui se cache derrière le su- jet ? Et pour répondre à cette question il faut voir ce que l’on appelle l’analyse du sujet. 1 1.2 L’analyse des termes du sujet C’est le morceau de bravoure de la dissertation, en lettres comme en philo- sophie : c’est le moment où l’on va savoir si vous avez bien compris le sujet ou non. Comme en lettres, il faut montrer qu’il y a un problème avec ce sujet en montrant qu’il peut être compris de différentes manières parce que son énoncé ou "intitulé", contient des termes qui son susceptibles de plusieurs interpréta- tions, plusieurs significations. Mais à votre niveau en philosophie il faut aller un peu plus loin que juste montrer que le sujet est ambigu. Il faut montrer que les termes qui y apparaissent sont susceptibles de plusieurs conceptualisations différentes. 1.3 Notions et Concepts Il y a deux termes que l’on confond souvent, ce sont ceux de concept et de notion. Ils sont pourtant très différents. Un concept est quelque chose de précis en philosophie et en logique. C’est un nom commun, c’est-à-dire un terme qui désigne une catégorie de choses. Mais à la différence des noms que l’on emploie dans la vie courante un concept est défini rigoureusement. Rigoureusement, c’est-à-dire que cette définition est un critère suffisamment précis pour que l’on puisse dire, pour chaque objet qui passe devant nous, si cette définition lui est applicable ou non, et si cette chose peut être appelée par le nom du concept ou non. L’énoncé de cette définition est ce que l’on appelle son intension. Comment faire énoncer un tel critère ? A quoi reconnaissez-vous par exemple un mammifère ? Au fait qu’il a une propriété - avoir des mammelles - que tous les mammifères et seulement les mammifères ont en commun. On dit souvent que cette propriété est l’essence de ces choses, car si elles ne l’ont pas, on ne peut plus les appeler ainsi et considérer que ce sont toujours les mêmes choses. Un animal qui n’a pas de mammelles ne peut être appelé un "mammifère" : on dira donc que les mammelles sont l’essence des mammifères. L’intension d’un concept est ainsi l’énoncé d’une propriété qu’un ensemble d’ob- jets ont en commun. Cet ensemble d’objets réunis par un point commun est appelée l’extension du concept. Extension dun concept = l’ensemble des objets qu’il regroupe Intension dun concept = énoncé de la propriété que ces objets ont en commun Essence ou propriété essentielle = cette propriété commune Un concept est donc quelque chose de très précis, très rigoureusement déli- mité. Un même mot peut être susceptible de recevoir des définitions, des inten- sions différentes, c’est-à-dire d’être conceptualisé de manières très différentes. Lorsqu’on parle d’un tel mot, qui a une grande importance mais qui peut être défini de manières très différnetes, on parle d’une notion et non d’un concept. Par exemple, la notion de "nature" peut être définie de manières très différentes : 1. Nature = L’ensemble des phénomènes réels, l’Univers 2 2. Nature = Tout ce qui n’a pas été produit par l’être humain (s’oppose à la culture) 3. Nature = L’essence ou la réalité d’une chose A chaque fois que l’on fournit une définition différente du terme "nature" on en fournit une intension et donc une extension différentes. On a donc affaire ici à 3 concepts de la Nature différents. 1 Une fois cela posé on peut définir avec rigueur ce qu’est l’analyse d’un sujet. 1.3.1 l’analyse "Analyser" en chimie correspond à la décomposition de substances com- plexes, comme l’eau, en substances simples, comme l’hydrogène et l’oxygène. En mathématique, analyser une fonction revient à décomposer sa formule en élé- ments simple pour étudier ses propriétés comme ses limites, sa continuité, etc. En psychanalyse, une analyse est un traitement dans lequel le patient raconte ses rèves et/ou hallucinations afin que le médecin les décompose en symboles simples pour en trouver l’origine inconsciente. Dans tous les cas : analyser = décomposer quelque chose de complexe en des composants plus simples. C’est exactement cette méthode que l’on va appliquer en introduction de dissertation de philosophie : tel qu’il est posé le sujet est complexe, il ne peut admettre une solution, il est trop confus, on pourrait aussi bien soutenir une chose que l’autre. Pourquoi ? Parce qu’un sujet de philosophie contient des notions et que ces notions sont susceptibles de plusieurs conceptualisations différentes. D’où l’ambiguité et l’impossiblité de se comprendre et de s’entendre sur ce sujet. L’analyse du sujet consiste à définir de plusieurs manières différentes chacun des termes et des notions du sujet afin de montrer que l’on peut en extraire plusieurs concepts différents. Il faut faire exactement ce que l’on a fait pour la notion de Nature ci-dessus, et le répéter pour toutes les notions du sujet. C’est parce que l’on peut conceptualiser les notions d’un sujet de différentes manières que l’on peut soutenir différentes thèses à son égard. Exemple : 1. Travail = Activité de transformation d’une matière ou d’un objet en un autre (pensez au travail d’une force) 2. Travail = Activité pénible visant à répondre à un besoin social et en tant que telle salarié (pensez au sens du mot travail comme métier, ou à l’étymologie comme tribalium) Vous voyez bien que ces deux concepts de la notion de travail ne sont pas à strictement parler opposés et que pourtant ils peuvent amener à soutenir des thèses opposées sur le sujet "Le travail est-il une aliénation ?" 1. Les étudiants confondent souvent concepts et notions. Ils pensent souvent que ce qu’af- firme un philosophe sur un sujet est le fin mot sur ce sujet. S’ils ont étudié ce que Descartes dit de l’esprit par exemple et qu’ils ont bien compris ses arguments, ils peuvent avoir l’impression que ces arguments sont définitifs et que la thèse de Descartes sur l’esprit est la seule qui puisse être soutenue. Cela vient selon moi du fait qu’ils ne se rendent pas compte que l’on peut avoir un autre concept d’esprit que celui de Descartes, i.e. que la notion d’esprit est susceptible d’autres conceptualisations que celle de Descartes. 3 Pensez à Ulysse rentrant à Ithaque et se faisant reconnaître par Pénélope grâce à son travail : c’est lui qui a fait dans un arbre le lit à coucher de la chambre royale. Là c’est le concept 1. de travail qui est employé et clairement il n’y a rien d’aliénant là-dedans. Mais pensez aussi au Chaplin des Temps Modernes dans son usine à la chaîne, à uploads/Philosophie/ introduction-de-la-dissertation 1 .pdf
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- Publié le Jui 29, 2022
- Catégorie Philosophy / Philo...
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