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Page 1  EduKlub S.A. Tous droits de l’auteur des œuvres réservés. Sauf autorisation, la reproduction ainsi que toute utilisation des œuvres autre que la consultation individuelle et privée sont interdites. Culture Générale La présence, la présentation, la représentation Analyse conceptuelle La présence, la présentation, la représentation Analyse conceptuelle Ces trois termes semblent s'imposer de prime abord selon un ordre de complexité croissante : d'une simple réalité de fait, la pure présence, à une opération élaborée et redondante, la représentation. Cette progression dans la complexité s'accompagne d'un mouvement corrélatif : plus on s'éloigne de la présence plus le rôle du sujet s'accroît. Il semble, en effet, que la présence soit une réalité immédiate, alors que la présentation est déjà une opération supposant un sujet actif; de toute évidence, cela est plus vrai encore pour la représentation. Tout se passe comme si la plénitude d'être était inversement proportionnelle au rôle du sujet : le sujet est discret face à la présence qui se donne à lui; à l'inverse, il a un rôle fondamental dans la représentation : il est celui par qui advient l'objet… mais cet objet n'est justement pas là de façon immédiate. Cette « loi de proportionnalité » est, à certains égards, pertinente; mais elle soulève au moins deux difficultés : • D'une part, est-il pertinent de penser une continuité entre ces trois termes, comme si le premier était inclus dans le second et le second dans le troisième? N'y a-t-il pas au contraire des différences de nature qui interdisent de les penser comme homogènes ? • D'autre part, peut-on aussi facilement minimiser le rôle du sujet dans la présence et, en retour, vider la représentation de la plénitude d'être, la penser irrémédiablement à distance de la présence ? • Il importe donc au plus haut point de clarifier chacun de ces termes ainsi que leurs relations. Faut-il voir dans la représentation un accomplissement de la présence ou un travestissement? La présentation est-elle intermédiaire entre la présence et la représentation ou bien a-t-elle un rôle plus subtil? Du présent à la présence. Si l'on se réfère à l'étymologie la plus simple, la présence vient du verbe être (esse ) précédé du préfixe prae , en avant. Cette racine est aussi celle du « présent ». Examinons d'abord les modalités du présent pour comprendre, par différence, la signification du mot présence. Le mot « présent » est d'abord un adjectif, le plus souvent employé comme attribut du sujet: « adsum» , je suis présent. L'arbre sous ma fenêtre est présent. Il est là que je le Page 2  EduKlub S.A. Tous droits de l’auteur des œuvres réservés. Sauf autorisation, la reproduction ainsi que toute utilisation des œuvres autre que la consultation individuelle et privée sont interdites. Culture Générale La présence, la présentation, la représentation Analyse conceptuelle veuille ou non. En ce sens, le mot présent signifie une réalité singulière indépendante de la conscience, dénuée de toute signification. Il est l'attribut caractéristique du simple fait: on le constate et rien de plus. Dans cette mesure, il peut s'imposer comme absurde : tout autre fait à sa place s'imposerait de la même façon, avec la même nécessité ( je ne peux pas ne pas dire qu'il est présent) … et avec la même contingence ( il n'y a pas de principe de raison suffisante susceptible de me montrer pourquoi ce fait est présent et pas plutôt un autre ). A y regarder de plus près, les choses ne sont pas aussi simples: le fait d'être présent ne peut se limiter à une réalité brute. En effet, le ad de adsum, le prae de prae-esse indiquent une orientation : la chose présente est comme offerte à l'attention. Le mot présent renvoie au participe présent du verbe esse, ens : le présent est l'étant qui est là, donné. En ce sens, il désigne d'abord une réalité singulière : telle chose est présente; elle est là devant moi, je la constate, je ne la rêve pas, je n'ai pas à m'en souvenir. La langue française opère ici un glissement intéressant : on désigne volontiers ce fait, telle chose est présente, par le mot « donné » : le fait présent est un donné avec lequel il faut compter. On désigne ainsi paradoxalement le présent par le participe passé du verbe donner. Cela peut se comprendre de la façon suivante: le présent me précède toujours parce que je ne l'invente pas; en ce sens, il est toujours déjà là parce qu'il n'est pas mon opération. Je m'y heurte; il me résiste parce qu'il me transcende. Le présent désigne donc essentiellement le caractère de ce qui m'apprend, par la résistance, que je ne suis pas une conscience enfermée en elle-même : le présent opère le dépassement du solipsisme. L'être de ce qui est présent ne peut donc pas être pensé comme une pure passivité : la chose présente agit dans la mesure où elle est constitutive de mon monde, où elle est elle-même inscrite dans un réseau de relations avec les autres choses. Cet être comme puissance active, caractéristique de l'être présent, se manifeste plus encore lorsqu'il s'agit d'un sujet : répondre présent, c'est répondre à l'appel de son nom : premier degré de la responsabilité. Répondre présent, c'est déjà s'engager personnellement vis-à-vis de l'autre qui appelle et du monde au sein duquel je suis impliqué. Etre présent ne se limite donc pas à occuper l'espace comme une chose parmi les choses : il faut une tension de la conscience pour viser ce qui est là, « être présent à » ce qui est. En un mot, il n'est pas possible d'être présent sans attention, sans une tension de la conscience. Ainsi à l'orientation des choses présentes, qui s'imposent dans la résistance qu'elles offrent au sujet, répond l'orientation du sujet qui fait attention à ce qui est pour y être présent. Cette dynamique du présent est encore plus nette si l'on considère le présent comme substantif désignant une des trois dimensions du temps. Le présent doit être distingué de l'instant : l'instant est une limite séparant le passé du futur et servant à mesurer le temps. Comme tel, il n'a pas d'épaisseur et ne dure pas: il est une apparition aussitôt Fichier généré pour Visiteur (), le 09/01/2020 Page 3  EduKlub S.A. Tous droits de l’auteur des œuvres réservés. Sauf autorisation, la reproduction ainsi que toute utilisation des œuvres autre que la consultation individuelle et privée sont interdites. Culture Générale La présence, la présentation, la représentation Analyse conceptuelle disparaissante; ou, pour mieux dire, une pure idéalité. A l'inverse, le présent n'existe que dans la mesure où la conscience s'en aperçoit: pour cela, il ne peut se borner à l'instant parce que la conscience n'est pas discontinue; elle n'est pas une suite de fulgurations dissociées les unes des autres. Je ne peux m'apercevoir de quelque chose qu'à la condition de pouvoir relier entre eux les faits de conscience. Ainsi, le présent est-il constitué par la liaison du passé immédiat et de l'avenir immédiat : il n'y a pas de présent sans mémoire et anticipation. Il apparaît clairement ici que l'être du présent n'est pas pure factualité brute : il est constitué par une opération de la conscience. Il n'est pas possible pour autant de conclure que la conscience invente le présent : elle ne sort pas de son propre fond ce à quoi elle fait attention; simplement, le présent n'existe pour elle que dans la mesure où elle s'en aperçoit. L'expérience courante le montre éloquemment; ne serait-ce que dans la contre- épreuve de l'indifférence: la conscience indifférente n'est pas affectée par ce qui est donné; cela n'est donc pas présent pour elle. En résumé, nous voyons apparaître ici une ambiguïté du présent : d'une part, un sens péjoratif qui renvoie à ce qui «est là », selon un mode de pure passivité et d'inconscience; d'autre part, un sens éthique qui renvoie à l'activité effective d'être au monde, selon la coïncidence de l'orientation de la chose et de la conscience. Le deuxième sens semble être le plus conforme à la réalité de ce qui est visé par le mot présent. « La présence », un terme ambigu : « faire de la présence »ou « avoir de la présence » ? La même ambiguïté se retrouve dans le mot présence. « Faire acte de présence », « faire de la présence » évoque un désengagement du sujet qui se considère comme une chose, « fait partie des meubles », dira-t-on familièrement. Mais on voit bien ici que la présence est ravalée à son plis bas degré. L'acteur qui a « une bonne présence sur scène » ne fait pas seulement « acte de présence ». Dire d'un acteur qu'il a une réelle « présence sur scène», ce n'est pas simplement mentionner le fait qu'il a joué son rôle ce soir là. C'est dire qu'il s'impose à l'attention : il «retient» l'attention, la polarise. On passe ainsi du simple fait d'être là à l'intensité d'un être-au-monde qui subsiste uploads/Philosophie/ klubprepa-2076.pdf

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