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UNIVERSITÉ PARIS-OUEST-NANTERRE-LA DÉFENSE 200, Avenue de la République 92001 NANTERRE CEDEX Année 2008-2009 NOTES DE COURS A DIFFUSER sur Kant et la critique de la métaphysique dans la Critique de la raison pure. 1ère Partie. LLPHI 414 & LLHUM 432 — PHILOSOPHIE MODERNE Enseignant : M. Jean SEIDENGART -2- Kant et la critique de la métaphysique dans la Critique de la raison pure. Il serait inexact et contraire à la pensée de Kant de réduire la "révolution copernicienne" à l’idée que les objets de l’expérience se règlent sur les concepts purs de l’entendement, ne laissant plus de place qu’à une connaissance phénoménale. Ce serait oublier que c’est précisément dans le but de constituer la métaphysique comme science que Kant mit en œuvre sa révolution coperni- cienne. La preuve en est que dès l’instauration de la solution critique, Kant rédigea une Méta- physique de la Nature et une Métaphysique des Mœurs. Ainsi, toute l’œuvre de Kant est domi- née par un unique problème : « Ist Metaphysik überhaupt möglich ? », la métaphysique est-elle seulement possible ? Or, pour répondre à une telle question il est indispensable de dégager les conditions de possibilité de la connaissance scientifique afin de pouvoir déterminer en quel sens la métaphysique peut légitimement emprunter la voie sûre de la science et en quel sens elle doit définitivement y renoncer, même si elle doit permettre de « s’orienter dans la pensée ». L’objectif de ce cours sera d’étudier tout particulièrement la Dialectique transcendantale en nous référant de très près au texte de Kant, mais une fois seulement que les grandes lignes de l’Esthétique transcendantale et de l’Analytique transcendantale auront été tracées. Bibliographie sommaire : 1°) Nous travaillerons le texte de la Critique de la Raison pure, 1781/1787, de préfé- rence, dans la nouvelle traduction de A. Renaut, revue et corrigée (par rapport à son édition de 1997 et de 20012), Paris, Garnier-Flammarion, 2006 ; mais on pourra égale- ment utiliser l’ancienne traduction Tremesaygues & Pacaud des PUF, rééditée dans la collection « Quadrige ». Au cours des TD avec les étudiants de la Licence d’Humanités, nous travaillerons les Prolégomènes à toute Métaphysique future de Kant (1783), dans la traduction de Louis Guillermit, Paris, éd. Vrin, 19932, nouvelle édition revue et corrigée. Terxte allemand aux éditions Reclam de Stuttgart : Kant, Prolegomena zu einer jeden künftigen Meta- physik, die als Wissenschaft wird auftreten können. La connaissance de l’allemand n’est pas requise, mais elle permet de vérifier les choix interprétatifs effectués par le traduc- teur français. 2°) Texte allemand en édition de travail commode : Die Kritik der reinen Vernunft, en édition Reclam, avec un index utile à la fin de chaque volume, ou chez Meiner (à Hambourg), ou, mieux encore, chez Walter de Gruyter & Co, édition savante de l’Académie des sciences de Berlin (en paper back). 3°) Ouvrages généraux sur le kantisme et sur la première Critique : V. DELBOS, La philosophie pratique de Kant, PUF, rééd. 1980. J. VUILLEMIN, Physique et Métaphysique kantiennes, Paris, PUF, 1955. G. DELEUZE, La philosophie critique de Kant, PUF, 1967. A. PHILONENKO, L’Œuvre de Kant, tome 1, Vrin, 1969. F. MARTY, La naissance de la métaphysique chez Kant, Beauchesne, 1980. F. ALQUIÉ, La critique kantienne de la métaphysique, PUF, 1968. J. RIVELAYGUE, Leçons de métaphysique allemande, Grasset, t. II, 1992. E. WEIL, Problèmes kantiens, Vrin, 1963. 4°) Quelques grandes interprétations : H. COHEN, La théorie kantienne de l’expérience, 18852, tr. fr., Paris, Cerf, 2001. M. HEIDEGGER, Kant et le problème de la métaphysique, 1929, tr. fr. 1953, rééd. Gallimard, TEL, 1981. E. CASSIRER/M. HEIDEGGER, Débat sur le kantisme et la philosophie, Davos, 1929, tr. fr. Paris, Beauchesne, 1972. -3- Kant et la critique de la métaphysique dans la Critique de la raison pure. I Introduction : De la philosophie des « lumières » à la philosophie critique. En Europe, au cours de la première moitié du XVIIIe siècle, se développe le courant appelé les "Lumières". Mais, pour éviter un très grave contresens, il faudrait se garder de voir dans l’Aufklärung la simple traduction des "Lumières" telles qu’elles furent dif- fusées en France. Ainsi, en France, par exemple, le courant des "Lumières" est profon- dément antireligieux et matérialiste. Au contraire, ce que l’on appelle l’"Aufklärung" revêt en Allemagne un caractère hautement spéculatif où le religieux et le philosophique sont étroitement liés. De plus, en France, on se passionne pour la psychologie, la morale et la politique en affectant du dédain pour la métaphysique et pour la religion. Ces deux dernières, au contraire, sont prépondérantes, du moins dans la formation universitaire en Allemagne. La philosophie allemande se développe surtout dans les universités et dans les égli- ses, présentant un caractère pesamment scolaire. Comme le dit à juste titre G. Tonelli : c’est "une philosophie de professeurs". En effet, ceci vient surtout du fait du contrôle omnipuissant de l’administration sur la culture et sur l’enseignement. Enseigner <vorle- sen>, c’était obligatoirement paraphraser le manuel imposé par les instances gouverne- mentales du moment. Parmi ces manuels classiques Kant a dû utiliser la Métaphysique de Baumgarten (1739 et 1757) et l’Extrait de la théorie de la raison (manuel de logi- que) de G.F. Meier (1752). Précisons, enfin, que le trait caractéristique de la pensée allemande de cette époque, c’était l’absence de connaissance approfondie des sciences nouvelles. Ce qui plaçait l’Allemagne très loin derrière l’Angleterre, la France, les Pays-Bas et l’Italie. Car les travaux de Newton ne commenceront à être connus sérieusement qu’à partir de 1740- 1750. En Allemagne, l’Aufklärung se développe en suivant non pas Newton, mais Leibniz qui conduit à une réhabilitation de la métaphysique et de la religion. Les Aufklärer considèrent, comme Leibniz le fit auparavant, que la vérité ne saurait contredire la véri- té. Mais, comme ils sont rationalistes et pensent que la raison est la pierre de touche de la vérité, ils considèrent que les mystères de la religion doivent être rationalisés. Il ne peut y avoir contradiction entre la vérité philosophique et la vérité religieuse. La vérité religieuse doit se rationaliser. Ainsi, on admet (comme Leibniz) que le principe de rai- son (qui est un principe d’intelligibilité totale) a une portée universelle. Ainsi, un philo- sophe dogmatique comme Wolff réduit le principe de raison suffisante au principe de non-contradiction. La méthode de la philosophie doit être aussi synthético-déductive que celle des mathématiques. Enfin, entre les vérités intellectuelles et religieuses, il y a la même différence qu’entre la connaissance claire et la connaissance confuse. Dès sa période "précritique", Kant a combattu les "Schwärmer", c’est-à-dire les en- thousiastes, les exaltés, qui prétendaient dépasser les limites de la raison humaine. Il condamne ces curiosités malsaines des visionnaires (cf. Les rêves d’un visionnaire, 1766). Kant reconnaît les mérites de l’Aufklärung qui combat aussi bien le mysticisme sentimental ou "Schwärmerei" que le scepticisme et la misologie. Toutefois, -4- l’Aufklärung, selon Kant, a tort d’ignorer les limites de la raison humaine, et c’est en cela qu’il faut placer les Aufklärer au-dessous de Socrate. Kant condamne la science lorsqu’elle devient insatiable et vaine : il faut qu’elle re- nonce aux projets qui sont hors de la portée des hommes. Il n’est pas question de condamner la métaphysique en général, il faut qu’elle devienne la compagne de la sa- gesse. Pour qu’un scientifique prenne conscience de ses limites, il ne faut pas dénoncer l’inutilité d’une science, il faut que la philosophie elle-même recule ce fantôme de con- naissance et nous persuade qu’il est situé hors de l’horizon humain (par exemple, la vie future). Ces thèmes de rêveries mettent en activité l’entendement humain avec ses facultés, ils attirent les hommes dans des assauts de spéculation où ils dogmatisent et réfutent, le tout indistinctement, comme c’est le cas quand il s’agit d’une recherche illu- soire. Il faut le retour à une philosophie qui connaît ses démarches, ses objets, le rapport à l’entendement humain : alors, les limites se resserrent. Ces thèmes de rêverie, Kant les reprendra dans ses œuvres critiques : tout se jugera devant le tribunal de la raison, à condition qu’elle se soit d’abord jugée elle-même. La raison, en effet, est une activité à la fois investigatrice et critique. - Elle est investigatrice en ce sens qu’elle s’efforce d’étendre le champ de connais- sance aussi loin que possible. - Mais, si elle est ce qu’elle doit être, elle est en même temps critique, en s’interrogeant sur les conditions d’une connaissance valable. La critique de la rai- son par elle-même vise à déterminer la possibilité et l’étendue de notre connais- sance a priori. Selon Kant, l’unique moyen d’extirper la "Schwärmerei", c’est de découvrir les limites de la raison. * * * -5- II La position du problème critique. a) La lettre de Kant à Marcus Herz de 1772 : Après avoir écrit sa célèbre Dissertation Inaugurale sur la forme et les principes du monde sensible et intelligible (1770), Kant reçoit plusieurs critiques de ses amis (Men- delssohn, Lambert et Sulzer) qui le conduisirent à formuler dans toute sa plénitude le problème critique. Voici comment Kant formula lui-même le problème dans une uploads/Philosophie/ llhum432-seidengart-notes-de-cours-sur-kant-2.pdf
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- Publié le Jui 05, 2021
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