Logos et Lemme, œuvre de maturité du philosophe japonais Yamauchi, nourrit l’am

Logos et Lemme, œuvre de maturité du philosophe japonais Yamauchi, nourrit l’ambition de relier ces « deux ailes de la pensée mondiale » que sont l’Orient et l’Occident. L’auteur propose ainsi de faire se rencontrer la pensée occidentale, qu’il identifie au logos grec, et la pensée orientale, dont il voit le principe dans le lemme, soit ce que l’on saisit intuitivement ou que l’on se donne pour acquis afin de poursuivre un raisonnement. Si, en effet, d’Aristote à Kant, le logos se manifeste par une logique ramenée au principe d’identité, au principe de (non)contradiction et au principe du tiers exclu, Yamauchi entreprend de montrer que le lemme représente un mode de pensée de plein droit, qui prend notamment la forme d’une discipline mentale rigoureuse dans le bouddhisme du Grand Véhicule. Il en trouve le modèle dans le Traité du milieu de Nagarjuna, qui incorpore le lemme dans un raisonnement en quatre moments – le tétralemme, lequel enveloppe, selon le philosophe japonais, le tableau complet de l’esprit humain. Parcourant de manière à la fois érudite et spéculative le champ mondial de la pensée, l’auteur convoque et interroge la logique d’Aristote et le bouddhisme indien, Parménide et le taoïsme, la dialectique hégélienne et la philosophie de Nishida, faisant dialoguer le rationalisme occidental et la pensée « lemmique », en vue de bâtir par-delà les déchirures tragiques du XXe siècle un véritable pont entre l’Orient et l’Occident. Germaniste, helléniste, grand connaisseur des classiques chinois, sanskrits et palis, le philosophe japonais Yamauchi Tokuryû (1890-1982) fut l’élève de Husserl et celui de Nishida. Il enseigna la philosophie occidentale à l’Université de Kyôto, avant de s’intéresser à l’histoire de la pensée bouddhique. Il est l’auteur d’une vingtaine d’ouvrages, et d’une monumentale Histoire de la philosophie grecque en cinq volumes, 1944- 1960. Tout le projet de sa vie aura été de construire une logique qui fasse dialoguer pensée occidentale et pensée orientale. YAMAUCHI Tokuryû Logos et Lemme Pensée occidentale, pensée orientale Traduit du japonais et commenté par AUGUSTIN BERQUE avec le concours de ROMARIC JANNEL Collection « Réseau Asie » dirigée par Jean-François Sabouret RIGOSU TO RENMA (山内得立著『ロゴスとレンマ』) by Yamauchi Tokuryü © 1974, Iwanami shoten, Publishers, Tokyo © CNRS Éditions, Paris, 2020 ISBN : 978-2-271-13148-5 Sommaire Yamauchi Tokuryū, un portrait philosophique Avertissement du traducteur Introduction Chapitre I. Les trois logiques I II III Chapitre II. Le déploiement du logos I II III IV V VI VII Chapitre III. Le tétralemme I II III IV V VI Chapitre IV. Vis-à-vis et coattente I II III IV V Chapitre V. Structure de la co-suscitation I II III IV V Chapitre VI. Le mondain et le Sens Vainqueur I II III Chapitre VII. La logique de Dignāga I II III IV Chapitre VIII. La pensée de la négation I II Chapitre IX. Le concept de « milieu » I II III Chapitre X. Les quatre vérités et les quatre choix I II III IV Chapitre XI. La logique du soku 即 I II III IV Chapitre XII. L’agencement I II III IV Chapitre XIII. La logique du dilemme I II III Postface Index Colophon Yamauchi Tokuryū, un portrait philosophique Vie et Œuvre de Yamauchi Tokuryū{1} Les premières années Né le 12 juin 1890 à Tenma-mura{2} (département de Nara), Nakagawa Tokuryū est admis, en 1911, au département de philosophie de l’Université Impériale de Kyōto dont il sort diplômé d’une licence en 1914. En 1916, il publie la première traduction japonaise d’un ouvrage du néo-kantien Heinrich Rickert : Der Gegenstand der Erkenntnis : ein Beitrag der philosophischen Transcendenz{3}. Il change de nom et devient en 1918 Yamauchi Tokuryū{4}. En 1920, il est désigné étudiant non boursier envoyé pour deux ans au Royaume-Uni, en Allemagne et en France. Parti en septembre, il suit à Fribourg (Allemagne) les enseignements de Husserl et de Heidegger{5}. Le 11 mai 1921, son séjour aurait été prolongé pour conduire, aux États-Unis, des recherches en sciences naturelles et en philosophie{6}. En octobre, il obtient un poste, qu’il n’occupe pas physiquement, de professeur assistant à l’Université des sciences économiques de Tōkyō{7}. Il aurait ainsi poursuivi son séjour aux États-Unis pendant encore deux ans. De retour au Japon en octobre 1923, il devient conférencier en 1924, puis professeur en 1925, à l’Université des sciences économiques de Tōkyō. En 1929, il publie La phénoménologie expliquée{8}, sa première monographie. Élève de Nishida Kitarō, il reçoit en 1930 le titre de Docteur ès lettres de l’Université Impériale de Kyōto avec sa thèse Fondements ontologiques de la connaissance{9}. Il y discute une tripartition entre forme possible de l’être{10}, forme nécessaire de l’être{11} et forme réelle de l’être{12}. Cette thèse doctorale préfigure ses travaux sur l’ontologie et révèle des interrogations quant à la notion d’être qui ne quitteront jamais sa pensée. Un jeune historien de la philosophie occidentale En 1931, il est nommé professeur à l’Université Impériale de Kyōto et devient titulaire de la cinquième chaire de philosophie et d’histoire de la philosophie. Il publie Systèmes et phases de développement{13} en 1937, un ouvrage réunissant plusieurs articles dont un sur l’analogie. En 1940, il est désigné pour effectuer une mission en Mandchourie et en République de Chine. Ce voyage, dont nous ignorons les objectifs précis, se déroule du 17 mars au 16 avril 1940. En juin 1941, il partage la quatrième chaire de philosophie et d’histoire de la philosophie. Il publie en 1944 le premier volume d’une étude consacrée à la philosophie grecque sobrement intitulé : La philosophie grecque{14}. Cet ouvrage porte sur les présocratiques et Socrate. En 1944, il participe à l’édition japonaise des œuvres complètes d’Aristote, et plus précisément, avec Taga Zuishin, à la traduction des Topiques{15}. Il publie en 1946 Les trois principes de la culture occidentale{16} et est nommé à la première chaire de philosophie et d’histoire de la philosophie. Avant lui, elle fut notamment occupée par Nishida Kitarō et Tanabe Hajime. Elle le fut aussi de mars à août 1945 par Kōyama Iwao qui fut contraint, par le commandement suprême des forces alliées, de démissionner. En décembre 1946, Yamauchi voit sa position de fonctionnaire confortée par l’annonce de son maintien en poste par le commandement suprême des forces alliées. Ce maintien intervient alors que la période d’après-guerre avait vu le renvoi de plusieurs universitaires auxquels il était reproché d’avoir soutenu le régime impérial{17}. En 1947 est publié le deuxième volume de La philosophie grecque{18}, consacré à Platon. L’année suivante, il publie La philosophie de l’existence{19}, sa première étude traitant de l’existentialisme. Paraît ensuite, en 1949, le troisième volume de La philosophie grecque{20}, également consacré à Platon. L’éclosion d’une philosophie originale En 1950, il publie Les trois pommes : production, création, formation{21}, un essai semblant ouvrir la voie à ce que seront ses réflexions sur la pensée bouddhique. Il est nommé directeur de l’Université des arts éducatifs de Kyōto{22} en avril 1953. En juin, il reçoit le titre de Professeur émérite de l’Université de Kyōto, puis publie en août une étude intitulée Existence et possession{23} dont le titre est inspiré de celui de l’essai du philosophe Gabriel Marcel{24} paru en 1935, Être et avoir. Yamauchi y poursuit, pour partie, ses réflexions sur la pensée bouddhique. Il quitte en 1959 ses fonctions de directeur de l’Université des arts éducatifs de Kyōto et devient professeur spécial à l’Université Ryūkoku{25}. En 1960, la série La philosophie grecque est rééditée avec deux volumes supplémentaires consacrés à Aristote{26}. En 1965, il est décoré de l’Ordre du Soleil Levant de seconde classe. Il publie, en 1967, Métaphysique de la signification{27}. Outre la présentation de ses réflexions sur la signification, il y poursuit ses considérations sur la pensée bouddhique. Yamauchi reçoit en 1973 le titre de citoyen émérite de la ville de Kyōto, puis est désigné l’année suivante personne ayant rendu des services méritoires dans le domaine de la culture. C’est en 1974 qu’il publie Logos et Lemme{28}. En 1980, il quitte ses fonctions à l’Université Ryūkoku. Yamauchi disparaît le 19 septembre 1982 à l’âge de 92 ans. Il est élevé dignitaire de troisième classe auprès de l’Agence impériale et reçoit la Coupe d’argent de première classe. Parmi ses ouvrages publiés à titre posthume, il faut mentionner Philosophie de la latence{29} paru en 1993. Logos et Lemme Les questionnements d’un philosophe De la publication de la traduction de Rickert en 1916 à celle de Philosophie de la latence en 1993, la production écrite de Yamauchi fait preuve d’une diversité remarquable. Outre ses essais sur la phénoménologie qui firent de lui, comme le signale Gino K. Piovesana en 1963, « un des premiers pourvoyeurs de la phénoménologie au Japon{30} », il fut également connu pour ses travaux sur l’existentialisme et même réputé pour ceux sur la philosophie grecque{31}. Il était mû par la volonté de faire découvrir au public japonais des auteurs que celui-ci ne connaissait pas encore ; ce que rappelle Yamada Akira, citant Yamauchi qui aurait déclaré : « En Occident, il y a encore des philosophes que les Japonais ne connaissent pas{32}. » Plus que d’une simple diversité, son approche philosophique relève sans doute de l’éclectisme. Non uploads/Philosophie/ logos-et-lemme-by-augustin-berque-z.pdf

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