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Presses Universitaires de France is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Revue de Métaphysique et de Morale. http://www.jstor.org ÉMILE BRÉHIER (1876-1952) Author(s): M. Gueroult Source: Revue de Métaphysique et de Morale, 57e Année, No. 1 (Janvier-Mars 1952), pp. 114-116 Published by: Presses Universitaires de France Stable URL: http://www.jstor.org/stable/40899619 Accessed: 03-01-2016 06:13 UTC Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at http://www.jstor.org/page/ info/about/policies/terms.jsp JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact support@jstor.org. This content downloaded from 141.209.100.60 on Sun, 03 Jan 2016 06:13:56 UTC All use subject to JSTOR Terms and Conditions 114 REVUE DE MÉTAPHYSIQUE ET DE MORALE. Il est certain que ces deux perspectives alternées ne résultent pas d'ob- servations nouvelles (bien que notre époque, encore très imbue de posi- tivisme, soit assez disposée à le croire, et bien que les époques où le mythe est « pris au sérieux » s'accompagnent invariablement de recherches sur la tradition non hellénique, chez Damascius, sur les mythes orien- taux, comme aujourd'hui sur ceux de l'Afrique noire et de l'Océanie). Aussi me semble-t-il que la question très grave que pose votre article sur les rapports du mythe et de la philosophie est une question non pas de fait, mais de valeur ; et c'est à cette question que je ne trouve pas dans votre article une réponse nette. Car, d'une part, il y a une parenté certaine entre le mythe comme pensée engagée et la philosophie existen- tialiste de nos jours ; et j'admets volontiers que cette philosophie permet de mieux comprendre les mythes ; autrement dit, je vois comment les mythologues et ethnologues en tirent profit. Mais, d'autre part, vous ne songez pas du tout à revenir à la mentalité mythique, dans ce qu'elle a de spécifique, dont vous marquez fort bien les bornes, p. 179 : « Les mythes ne comportent guère d'échelonnement en profondeur, et paraissent d'ail- leurs comme soudés à l'individu et à son groupe.... Il est quasi impossible au primitif de comprendre une existence en un autre lieu ou en un autre temps que son lieu propre ou son temps actuel ». Vous paraissez donc juger notre philosophie actuelle comme supérieure en valeur à la pensée mythique. Mais, dans la perspective où vous vous placez, en quoi peut consister cette supériorité ? Est-ce dans la raison ? « La raison, dites- vous, chasse le mythe, mais elle ne le remplace pas » (p. 181). Voudriez- vous alors voir naître, à côté de la raison, un mythe nouveau ou un substitut du mythe ? Mais cette combinaison est impossible, car si la raison chasse le mythe, l'inverse est vrai : le mythe chasse la raison ; et nous n'en avons que trop d'exemples. Puis-je croire, d'autre part, que nos ethnologues, aient à l'égard du mythe, une autre attitude que l'atti- tude contemplative et objective ? Et pourraient-ils sans cela comprendre le mythe ? Le philosophe doit se garder d'aller plus loin qu'eux, ne serait-ce que pour pouvoir comprendre le mythe lui-même. Donc, si je vous suis entièrement dans les très heureuses remarques que vous faites sur le développement de l'étude des mythes, je ne vois pas encore clai- rement la réaction que vous voulez que ce développement ait sur la phi- losophie. Croyez, cher Monsieur Gusdorf, à mes dévoués et sympathiques senti- ments et a mon bon souvenir. Emile Bréhier. NÉCROLOGIE EMILE BRÉHIER (1876-1952) La mort d'Emile Bréhier est pour la philosophie française un deuil cruel. Emile Bréhier, soit comme professeur, soit comme philosophe, a marqué toute une génération. D'une rigide probité intellectuelle, d'une érudition, aussi vaste que solide, il avait le don d'animer d'une vie philosophique intense les doctrines les plus étrangères à notre temps sans altérer leur originalité historique. Nul n'excella mieux que lui à prouver, par le fait, que l'histoire de la philosophie est avant tout philosophie, mais qu'elle n'a de prix pour la philosophie que si elle reste intransigeante sur la vérité historique. This content downloaded from 141.209.100.60 on Sun, 03 Jan 2016 06:13:56 UTC All use subject to JSTOR Terms and Conditions NÉCROLOGIE, 11.5 De famille universitaire (son père était provi wtnr, Fun de ses frères, Louis, fut un Byzantiniste de réputation mondiale), E. Bréhier, né en avril 1876, agrégé de philosophie en 1900, débute ea 1901 à Coutances. Docteur en 1908, avec deux thèses sur les Idées philosophiques et religieuses de Philon d'Alexandrie, et sur la Théorie des Incorporels dans V Ancien Stoïcisme, il enseigne à la Faculté de Rennes en 1910, puis à celle de Bor- deaux en 1912. Parti pour le front en 1914, il perd un bras à Verdun, revient à Bordeaux, est appelé en 1919 à la Sorbonne, entre en 1944 à l' Institut, où il succède à Bergson. Associé étranger de V Académie des Lincei et de la British Academy, vice-président de la Société Française de Philosophie, il dirigeait depuis 1939 la Revue Philosophique, il présidait aux destinées de la Bibliothèque de Philosophie Contemporaine. Travailleur infatigable (sa bibliographie tient difficilement en 10 pages), il a cultivé tous les genres d'histoire : la traduction et le commentaire (Philon, Platin), la monographie (Chrysippe, Philon, Plotin et Schelling), Thistoire des ensembles nationaux et des périodes (Philosophie du Moyen- Age, Philosophie allemande, Transformation de la philosophie française, Thèmes actuels de la philosophie), l'histoire générale de la philosophie (œuvre magistrale en 7 volumes). Comme il nous l'explique lui-même (Comment je comprends Vhistoire de la philosophie, Études philosophiques, avril-juin 1945), ces divers travaux marquent les étapes de sa pensée relativement à l'essence de la philosophie et au rapport de celle-ci avec son passé. De Philon, qui flotte entre tant d'influences et ne se constitue pas en système, du Stoïcisme et de la philosophie de Schelling, qui se donnent pour des systèmes achevés, mais qui naissent de crises et ne sub- sistent que comme points de départ pour des élans spirituels indéfiniment renouvelés, de la philosophie de Plotin, qui pose le problème de la renais- sance et de la continuité des doctrines, il retient que toute philosophie est au fond moins système qu'impulsion et progrès, moins aboutissement que passage. D'où l'idée d'une histoire générale de la philosophie surtout attentive à ces grands faits généraux que sont les décadences, où l'intuition géniale s'enferme dans une formule apprise, et les rajeunissements, qui sont le retour à l'intuition créatrice. Loin de se confiner dans « ces palais d'idées » qui sont les points fixes de la pensée humaine, une telle histoire médite sur les variations infinies des thèmes fondamentaux. Au terme de cet itinéraire, E. Bréhier aperçoit que la fin dernière de l'histoire est de « dégager progressivement dans sa pureté l'essence de la philosophie ». Le caractère dynamique et vivant que la philosophie donne à son devenir, commande la méthode de son histoire : celle-ci doit décrire, non un progrès nécessaire, mais de libres mouvements ; elle doit aboutir à des jugements de valeur fondés sur le degré de dynamisme spirituel qui fait surgir chaque philosophie. D'où trois postulats indispensables : l'histoire doit viser à l'essentiel, non au complet ; elle devra donc se borner à la pensée occi- dentale depuis l'époque gréco-latine jusqu'à nos jours ; elle doit observer le contact, variable selon les époques, de la philosophie avec les autres énergies spirituelles (art, religion, etc.), éviter l'isolement de l'histoire abstraite ; elle répugne à la régularité, soit des évolutions, soit des cycles qui se répètent ; à la mosaïque du philologue comme à l'impressioni sine ; bigarré du critique. Elle met en évidence, non une unité de plan, mais une pluralité de schemes possibles de développement : « catégories his- toriques et modifiables », qui t doivent remplacer les catégories massives dont usaient autrefois les historiens éclectiques et hégéliens ». E. Bréhier pense par là mettre un terme à l'antagonisme mortel de la philosophie et de son histoire (cf. La Philosophie et son Passé). Si chaque doctrine, loin d'emprisonner la philosophie dans des solutions achevées est un appel à la liberté de la réflexion, la tradition n'est plus un poids, mais un tremplin où la pensée vivante peut prendre son élan. Mais il faut que son histoire This content downloaded from 141.209.100.60 on Sun, 03 Jan 2016 06:13:56 UTC All use subject to JSTOR Terms and Conditions 116 REVUE DE MÉTAPHYSIQUE ET DE MORALE. vation de concepts neutres, ni commentaire de vérités acquises, ni froide revête une forme adéquate à, cette exigence. Elle ne saurait être ni conser- étude de phénomènes du passé. L'objet ici n'étant ni chose, ni événement accompli, mais énergie expansive d'un sujet, requiert une histoire interne et comprehensive qui Yise l'intemporel à travers le temporel. Toutefois, l'ambiguïté propre à. la compréhension philosophique rend difficile la détermination de cette histoire. Dans les autres sciences humaines, la compréhension, uploads/Philosophie/ m-gueroult-e-mile-bre-hier-1876-1952.pdf
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- Publié le Apv 15, 2021
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