Didactique du lexique : du modèle sémantique à la cohérence textuelle 1 Didacti
Didactique du lexique : du modèle sémantique à la cohérence textuelle 1 Didactique du lexique : du modèle sémantique à la cohérence textuelle Marion PESCHEUX Université Jean Monnet St Étienne, France Les recherches qui cadrent ce colloque s’attachent à décrire les liens entre l’instruction – ou encore enseignement du lexique – en FLE/S et la production de structures signifiantes par des apprenants en FLE/S. La présentation qui va être faite est en quelque sorte directement en amont de cette préoccupation, et vise à développer auprès des enseignants de FLE/S un certain type d’approche des textes littéraires, une approche instructionnelle (i.e. didactique) de ces textes, ancrée non dans une herméneutique extralinguistique mais au contraire linguistique. En effet, nous allons suggérer le développement d’une approche sémantique linguistique dans l’analyse de textes ; cette approche est aujourd’hui proposée en formation des enseignants de FLE/S dans le cadre de cours portant sur la didactique de la littérature. Tout ceci suppose qu’au préalable, plusieurs disciplines se rejoignent : la didactique du lexique ; la linguistique ; l’analyse de textes littéraires. 1- Ce sont ces préalables que nous exposerons dans un premier temps : En problématisant la didactique du lexique dans le champ de la didactique du FLE/S, En justifiant l’intérêt d’utiliser les textes littéraires dans l’acquisition du lexique En justifiant l’intérêt de rapprocher linguistique et analyse des textes. 2- Dans un second temps, seront présentés les deux cadres théoriques adoptés : d’une part le cadre linguistique, avec le modèle sémantique linguistique de la Sémantique des Possibles Argumentatifs (SPA) développé par Galatanu ( Galatanu, 1999, 2002, 2006), qui fait l’objet d’une didactisation dans le cadre d’une formation initiale d’enseignants de FLE/S ; d’autre part, pour mémoire, le cadre didactique qui met en œuvre l’« approche globale » selon Moirand en didactique de l’écrit, et l’approche « lexiculturelle » du lexique selon Galisson. 3- Ensuite, seront présenté des analyses sémantiques puis didactiques de textes littéraires, réalisées par des enseignants ainsi que leurs commentaires sur cette approche. 4- Enfin, on signalera en quoi le modèle SPA permet de rendre compte de mécanismes discursifs constitutifs de la cohérence textuelle : cette dernière permettant la compréhension des textes, même lacunaires. Il manque donc, pour remplir le programme évoqué plus haut, d’observer les mises en œuvre de cette approche et les productions orales ou écrites des apprenants afin de savoir si et comment l’acquisition du lexique peut s’effectuer selon l’approche proposée : la communication, on l’aura compris, est donc programmatique. I. Pourquoi une approche sémantique linguistique du texte littéraire en FLE/S ? On tentera de tisser les liens entre d’une part la didactique du FLE et le lexique ; entre l’enseignement de la linguistique et le texte littéraire; entre la sémantique et l’analyse de texte. Lien entre didactique du FLE/S et didactique du lexique Les didacticiens du FLE/FLS se sont préoccupés d’une « désaffection » du lexique. Lors d’un colloque récent sur la didactique du lexique, des équipes conjointes (Grenoble 2003), établissent le bilan d’un lexique, je cite : « négligé dans l’apprentissage de la langue, réduit à un enseignement soit fossilisé dans des routines pédagogiques, soit annexé à d’autres apprentissages considérés comme plus fondamentaux ». Un des constats souligne que « l’apprentissage du lexique se fonde souvent sur une conception simpliste de la référence » et regrette que « l’abondance des travaux universitaires n’implique pas l’existence, [d’] une didactique du lexique Didactique du lexique : du modèle sémantique à la cohérence textuelle 2 ». Nous aurions donc une relative carence de didactisation des théories ou recherches linguistiques vers l’enseignement du FLE/S. C’est à cette lacune de didactisation en FLE/S que nous tentons d’adresser la présente communication : le modèle théorique sémantique présenté plus loin guidera l’analyse des textes. Lien entre l’enseignement linguistique et le texte littéraire Un autre colloque « Linguistique et Littérature, Cluny, 40 ans après », (Besançon 2007) pose la question de «la place aujourd'hui du texte littéraire dans l'enseignement de la linguistique, et des méthodes linguistiques chez les littéraires ». Une fois encore, ces attendus sont le reflet d’interrogations non résolues, de problèmes pratiques pour les enseignants de FLE/S : peut-on et comment mobiliser le texte littéraire dans un enseignement de langue ? Ce questionnement est en définitive fort proche de celui auquel Ducrot répondait déjà en 1980, et permet d’introduire un lien entre sémantique et texte littéraire. Lien entre sémantique et analyse de texte Ducrot1: « la linguistique peut-elle être utile pour l’analyse de textes. L’analyse de textes peut elle être utile à la linguistique ? [..] la linguistique qui peut servir l’analyse de textes, c’est et c’est seulement une linguistique qui se sert de l’analyse de texte ». Ducrot souligne le rôle du linguiste qui consiste à attribuer aux phrases de la langue qu’il étudie (i.e. entités linguistiques abstraites, distincte des énoncés qui sont leurs réalisations dans un discours) une valeur sémantique ou signification (i.e. valeur théorique, distincte du sens qui est la valeur sémantique résultant de l’interprétation d’un discours) et se demande comment accéder à cette signification. Il critique notamment l’illusion de l’« intuition » du locuteur francophone, donc compétent. Ducrot suggère que le vrai problème est d’attribuer une signification à chaque phrase telle que cette signification permette de prévoir le sens qu’aura l’énoncé de cette phrase dans telle ou telle situation d’emploi (op.cit.). Et la seule solution, c’est de prendre l’analyse de textes pour instrument nécessaire. La linguistique, pour être « servante » de l’analyse de texte, doit aussi « s’en servir ». C’est par les productions discursives, comme matériau, que l’on peut accéder au sens du texte, mais c’est par l’attribution d’une signification que l’on peut élaborer ce sens ; la signification, pour lui, et pour nous désormais, « contient des instructions données à ceux qui devront interpréter un énoncé de la phrase ». Ainsi, on considérera d’une part la signification lexicale comme instructionnelle, comme un moyen de construire le sens de l’énoncé ; d’autre part, on considérera qu’il est utile de sensibiliser des enseignants de FLE/S à cette structuration lexicale, afin de permettre aux interprètes de faire eux-mêmes la construction du sens. Mais pour faire valider cette signification, il faut la tester sur des textes, et notamment se servir des textes littéraires. Il faut au préalable disposer d’une signification, d’un modèle de structure lexicale. Dès lors, si l’on considère que (a) des avancées peuvent être faites dans la didactique du lexique, (b) linguistique et littérature ont partie liée, et qu’en outre, (c) sémantique linguistique et textes sont liés dans la compréhension du sens textuel, comment enseigner l’accès au lexique en FLE/S au moyen de textes littéraires ? II. Comment « servir » et « se servir » des textes littéraires en didactique du FLE/S ? Deux cadres théoriques. Le point de départ de la démarche est didactique : il consiste à se servir de textes littéraires dans l’enseignement du FLE/S, en s’appuyant sur un couple d’options théoriques didactiques : « approche globale » et « lexiculture ». Mais pour déboucher sur une compréhension des textes étudiés (i.e. une construction du sens) de la part des apprenants, l’enseignement pourrait appuyer la préparation didactique sur un modèle sémantique explicite de la signification lexicale des mots. 1 Ducrot, O., Les mots du discours, Paris, Editions de Minuit, 1980, p. 7. Didactique du lexique : du modèle sémantique à la cohérence textuelle 3 A. Cadre théorique didactique : un couple d’options pour la didactique de la littérature en FLE/S 1. Première option didactique : l’approche « globale » de l’écrit L’approche globale est liée aux recherches cognitives dans le domaine de la lecture2. Moirand3 souligne que « comprendre, c’est produire de la signification (et non en recevoir comme on a longtemps cru en didactique des langues) », ce que Cuq et Gruca4 reprennent : « on essaie de développer chez les apprenants leur capacité de compréhension globale du sens d’un texte (alors qu’ils sont encore incapables d’en comprendre chaque mot et chaque détail) » Rappelons que les deux premières étapes sont les suivantes : « 1) Perception des signes visuellement prégnants : on part des signifiants : tout texte écrit a une fonction iconique et les photos, les dessins, les titres, les effets typographiques sont autant de signes pertinents ». Ensuite est proposée une approche pour ainsi dire sémantique : « 2) Repérage des mots-clés et des points forts du texte : on procède au relevé soit d’éléments formellement proches, -les dérivés par ex., soit d’éléments sémantiquement proches – parasynonymes, hyperonymes, etc. » (Moirand, op.cit.) L’approche globale en FLE/S cible l’activation consciente du processus de construction de sens par les apprenants, dans la compréhension écrite. Le texte littéraire constitue un des éléments utile du répertoire de texte, parce qu’il permet d’articuler à la fois, à cause de la présence de thématiques prégnantes, construction et acquisition de sens des textes et mobilisation et acquisition de la signification lexicale dans la langue cible. Il se trouve que dans le cadre théorique de la didactique du FLE/S, la question de l’acquisition du « vocabulaire » a été abordée uploads/Philosophie/ pescheux.pdf
Documents similaires
-
21
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Mai 24, 2022
- Catégorie Philosophy / Philo...
- Langue French
- Taille du fichier 0.2625MB