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Permanence Bar des Célébrités Hôtel Carlton Chaque samedi 16h 18h Président Serge Basilewsky tél. : 06 99 94 31 87 www.cinecroisette.com www.cinecroisetteblog.com émail info@cinecroisette.com Courrier postal Ciné Croisette Résidence Ascot B, 2 avenue Beauséjour 06400 Cannes "Le Cinéma, c'est un monde qui substitue à nos regards un monde qui s'accorde à nos désirs." André Bazin « Le spectateur engagé » tous droits réservés à Ciné Croisette Introduction Ce feuilleton se propose de définir un idéal du spectateur. Etre un bon spectateur, c'est être capable de puiser dans l'intimité de la rencontre avec l'œuvre, le sens nécessaire à la conduite de sa vie. De cet aller retour entre le temps du quotidien et l'éternité de l'œuvre, le spectateur peut atteindre une ontologie du politique. Le sens du monde dans lequel nous vivons peut se trouver dans l'art. L'art est même l'un des révélateurs les plus adéquats de la confrontation entre l'individuel et le collectif. Le cinéma construit du symbolique. Il dresse des valeurs collectives à partir de signes particuliers. Il autorise l'identification, et en même temps, ouvre sur du neuf. Il opère, à des degrés divers selon les œuvres, la confrontation entre soi et le monde. Il répond à des questionnements identitaires, et à des problématiques politiques. On peut prendre le cinéma comme un divertissement et contempler ses œuvres sans intégrer leur sens dans la réalité quotidienne. Mais on peut aussi, et c'est tout l'enjeu de cet exposé, chercher à tirer des films des leçons qui donneront sens à notre vie et au politique. Qu'est ce qui nous engage par rapport aux films que nous voyons ? Quelles valeurs, quels comportements, quelle attention faut-il observer pour tirer des œuvres qui nous entourent un sens capable de guider nos vies ? L'exemple de quatre des plus importants critiques de cinéma français peut nous donner des réponses. Louis Delluc entretient un rapport intime à l'art et l'exprime sous la forme de témoignages. André Bazin vit le cinéma comme une fenêtre sur le monde, et adopte un discours militant. François Truffaut prend le cinéma comme un mode de vie, et s'engage aux côtés des artistes. Serge Daney revient à l'expérience première du spectateur et défend une morale du regard. Tous ces critiques sont des spectateurs qui se sont engagés dans leur vie d'une manière particulière, à partir des films qu'ils ont vu. Grâce à eux, une recherche sur les conditions à remplir pour l'engagement du spectateur contemporain devient possible. 1 Etre spectateur Etre spectateur est une expérience banale. La permanence des images dans notre quotidien fait de leur réception un réflexe inconscient. Pourtant, l’image reste porteuse de sens, et s’exposer à elles nous engage trop souvent malgré nous, vers des valeurs qui ne sont pas les nôtres. A quoi nous engagent les innombrables spectacles que l’on nous donne à voir ? Prendre conscience du sens d’un spectacle, de ce qui nous lie aux images, de ce à quoi l’on participe, pour mieux comprendre notre place dans le monde. A l’heure où l’image est devenue omniprésente, il peut s’avérer utile de revenir sur l’expérience du spectateur, et sur la liberté dont il dispose. Pour aborder un tel sujet, il y a de nombreuses approches possibles. Une approche historique pourrait rendre compte, à la manière de Regis Debray dans Vie et mort de l’image, de la perte de valeur conférée à l’image, la banalisation du voir, par rapport aux temps où la représentation était sacralisée, qu’elle avait le pouvoir magique de rendre présent l’objet absent. Une approche philosophique emprunterait sans doute beaucoup à la phénoménologie, la science de la perception. L’approche sociologique nécessiterait quelques études de terrain qui mettraient en relief la nature du processus de sélection de l’image dans la réception du spectateurs, ou les attentes d’un spectateur à l’égard de ce qu’il voit... Pourquoi choisir ? J’ai voulu risquer quelques pistes de réflexions libres, sans m’attacher à un champ de recherche particulier. La critique de cinéma sert de fil directeur parce qu’elle fait une profession de la position du spectateur. Elle rend compte publiquement des expériences intimes du rapport à l’œuvre. Ses exigences à l’égard d’un film sont celles que tout spectateur peut avoir. Elle propose de nouveaux points de vue, et parfois, de nouvelles manières de voir. Dans le vaste paysage de la critique cinématographique française, j’ai limité mes recherches à quatre critiques : Louis Delluc, André Bazin, François Truffaut, et Serge Daney. On peut les rattacher à la ligne éditoriale de l’une des revues les plus importantes de l’Histoire de la critique : les Cahiers du cinéma.1 Leurs articles soulèvent la problématique du spectateur engagé, à travers les relations qu’il entretient avec l’œuvre et le monde. Le fondateur de la critique de cinéma s’appelle Louis Delluc.2 Ses écrits marquent le début de l’institutionnalisation du cinéma. Louis Delluc est sans doute l’un des premiers critiques à donner au cinéma ses lettres de noblesse. Ses articles prenant souvent la forme de témoignage subjectifs, ils nous permettent de suivre au plus près le processus de reconnaissance du cinéma en tant qu’art.3 Delluc commence ainsi sa carrière en défendant le théâtre contre le cinéma. Puis, il change progressivement d’avis en découvrant des films qui le marquent. Avec lui, le cinéma cesse d’être une attraction foraine, un sous-genre de théâtre. A 1 L’œuvre de Delluc se situe avant la création des Cahiers du cinéma, mais elle est participe, selon Pierre Lherminier, de la même filiation. Voir : Louis DELLUC, Ecrits cinématographiques I : le Cinéma et les Cinéastes, Cinémathèque Française, Paris, 1985, p.15. Les autres critiques firent partie de la rédaction des Cahiers. André Bazin fonda la revue en avril 1951. François Truffaut y entra sous sa protection en mars 1953. Serge Daney arriva en 1964. 2 René JEANNE et Charles FORD, Le Cinéma et la presse, 1895 – 1960, Armand Colin, Paris, 1961, p.54 : « Le 22 mars 1924 Louis Delluc mourrait. Vingt-cinq ans plus tard, l’Association française de la Critique de Cinéma fera poser (…) une plaque où il est rappelé qu’il fut « le créateur de la Critique cinématographique ». 3 René JEANNE et Charles FORD, Le Cinéma et la presse, 1895 – 1960, p.125 : « Sans doute est-il incontestable que les articles d’un Delluc ont amené jusqu’aux écrans des catégories de spectateurs qui, sans lui et quelques uns de ses confrères, auraient continué à regarder le cinéma comme une attraction foraine. » l’artisanat des planches et des acteurs en chairs, se confronte la force des illusions de l’image cinématographique. Il fallait probablement quelqu’un de semblable à Delluc, d’abord complètement voué à l’art « majeur » : le théâtre, puis conquis par le cinéma, pour opérer officiellement ce passage de relais entre la reconnaissance de deux arts. « Allons, c’est fait ! J’admire le cinéma ! En attendant de l’aimer. Je sais que je l’aimerai un jour ! Car je l’ai hai et je note quasi inconsciemment, les étapes de la haine à l’affection. » 4 L’œuvre de Delluc s’articule souvent autour d’un lexique sentimental, d’une approche subjective, de thématiques métaphysiques. Avec lui, nous assistons à la naissance d’une idéologie : celle qui permettra aux futurs critiques d’invoquer toutes leurs expériences, connaissances et opinions autour du film vu. La passion pour le cinéma est dorénavant possible. André Bazin introduit le cinéma dans le monde. Il est le maître à penser de l’engagement politique du spectateur. Voir des films est un acte militant. Fondateur des Cahiers du cinéma, Bazin rassemble autour de lui des communautés de cinéphiles croyant en une puissance politique des images. Le cinéma invite à l’action. Le spectateur puise dans l’œuvre le sens de ses actes, et part ensuite accomplir sa mission dans l’élaboration du monde. François Truffaut est un spectateur devenu cinéaste. Le cinéma lui a ouvert les portes de nouveaux milieux professionnels. Il est passé du voir au faire, du spectateur, à l’artisan, en passant par la critique. Truffaut est habité par ses expériences de spectateur. Il est reconnaissant, admiratif envers les artistes. Son parcours témoigne d’une volonté de s’engager à leur côté. Serge Daney est de la génération suivante. Il est le témoin du déclin de la liberté individuelle face aux enjeux industriels du cinéma et de la télévision. Il lutte contre l’aliénation du spectateur, et défend la nécessité de son jugement critique. Il dessine les tenants d’une éthique du regard. Il place le spectateur en face de ses responsabilités, et lui donne les clés pour comprendre le monde derrière celui qu’on lui donne à voir. Les écrits de ces critiques peuvent délivrer des clés pour nos propres expériences de spectateur. Contre l’idée que nos valeurs esthétiques, politiques, ou morales, soient aliénées par l’industrialisation des images, nous espérons que les écrits critiques du passé puissent servir encore aujourd’hui de modèle dans notre rapport au cinéma. 4 Louis DELLUC, Cinéma et Cie, Grasset, Paris, 1919. 2 Témoigner « Les premières salles de cinéma avaient honte ; elles se cachaient dans des boyaux noirs de la cité comme ces lieux louches où l’on n’entre qu’en relevant le col de uploads/Philosophie/ qu-x27-es-ce-que-c-x27-est-le-spectateur.pdf
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- Publié le Jui 15, 2021
- Catégorie Philosophy / Philo...
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