François Chenique, A propos des Etats multiples de l’être et des Degrés du savo
François Chenique, A propos des Etats multiples de l’être et des Degrés du savoir, (note de lectura) Paru dans René Guénon, Cahier de l’Herne, 1985. http://elkorg-projects.blogspot.com/2005/04/franois-chenique-propos-des-etats.html Introduction La même année, paraissent à Paris les Etats multiples de l’Etre de René Guénon et le volume de Jacques Maritain, Distinguer pour unir, ou les Degrés du savoir, DDB, Paris, 1932. Guénon condense et précise la métaphysique telle qu’il l’a développée dans ses précédents ouvrages, surtout dans l’Homme et son devenir selon le Védânta et dans le Symbolisme de la croix. Jacques Maritain écrase de son savoir scolastique toute la philosophie au nom du néo-thomisme. Il ajoute de longues considérations sur la mystique qui constitue pour lui le troisième degré du savoir après la philosophie réaliste et la théologie. Sur l’Homme et son devenir selon le Védânta: “Nous disposons aujourd’hui d’une documentation bien supérieure à celle dont Guénon disposait à l’époque où il écrivait, ce qui nous permet d’apprécier d’autant plus la qualité et la rigueur de son travail. Une remarque toutefois s’impose: il s’agit moins du Védânta strictement «sankarien» que d’une synthèse du Védânta et du Samkhya, telle que l’ont développée les écoles tardives de Vallabha (XVe siècle) et de Vijñana-Bhiksu (XVIIe siècle0. Est-ce avec des swâmis issus de ces écoles que Guénon est entré en relation? La question n’a pas encore été élucidée en dépit des recherches patientes et minutieuses de Jean Robin et de Marie-France James.” (p. 242-243) Dans certains milieux initiatiques le Symbolisme de la Croix a été interdit parce que trop «mathématique». La doctrine des états multiples de l’Etre, développée plus tard dans un ouvrage spécifique, se trouve condensée dans les sept premiers pages du premier chapitre. L’Homme et son devenir selon la Vedanta parle un langage védantin. Le Symbolisme de la Croix utilise un symbolisme géométrique. Les Etats multiples de l’Etre utilisent un langage philosophique, celui de la philosophie scolastique. Quand même, il ne cite jamais un scolastique avec précision. Selon François Chenique, il n’a pas lu Somme théologique de saint Thomas d’Aquin, autrement il y aurait trouvé des phrases à l’appui de ses idées. “Le retour à saint Thomais datait précisément de l’encyclique Aeterni Patris, promulguée par Léon XIII en 1879, et de la création à Rome l’année suivante d’une Académie thomiste. L’abbé Gombault avait obtenu le doctorat de philosophie de cette Académie Saint-Thomas vers 1890; Guénon a donc pu apprendre certaines choses sur le thomisme – ou plutôt sur le néo-thomisme, nuance non négligeable – au cours des visites qu’il rendit au curé de Montlivault pendant plus de trente ans; mais il semble qu’il se soit contenté ou de l’enseignement oral de l’abbé, ou des manuels médiocres de l’époque, mais qu’il n’ai jamais directement lu saint Thomas, saint Bonaventure ou Duns Scot.” (p. 243) Deux frères ennemis La querelle Guénon-Maritain a éteint chez Guénon tout espoir de restauration de l’intellectualité traditionnelle par le catholicisme. La première rencontre En 1915, Guénon, fraîchement licencié en philosophie, entreprend la Sorbonne la préparation d’un diplôme d’études supérieures en vue de l’agrégation. Le sujet a été «la notion d’infini». En 1925 il prononce en Sorbonne une conférence sous le titre «La métaphysique orientale», qui enthousiasme une jeune thomiste, Noële Maurice-Denis, brillante élève de Mauritain à l’Institut catholique de Paris. Elle organise une rencontre entre Guénon, Maritain et le R.P. Emile Peillaube, doyen de la faculté de philosophie de l’Institut catholique et directeur-fondateur de la Revue de philosophie d’inspiration thomiste. Les rapports entre les deux ne furent jamais bons. Maritain refusa de paraître dans la Revue de philosophie le mémoire de Guénon sur l’infini, en dépit du nihil obstat du P. Blanche et de l’avis favorable du P. Peillaube, directeur de la revue. Maritain appuya chaudement la publication du Théosophisme, Histoire d’une pseudo- religion, mais ce cas est unique. L’ouvrage avait été précédé de plusieurs articles dans la Revue de philosophie et Maritain avait recommandé ces articles en citant le nom de René Guénon. Cette citation est unique, les attaques qui s’étaient déclenchées en juillet 1921 lors de la parution de l’Introduction générale à l’étude des doctrines hindoues continueront pendant près de cinquante ans sans que jamais le nom de Guénon soit prononcé. Les premières attaques: la gnose La conclusion rédigée par J. Maritain à l’article publié par Noële Maurice-Denis le 15 juillet 1921 dans La Revue Universelle (reproduit en James, vol. I, p. 199): “R. Guénon voudrait que l’Occident dégénéré allât demander à l’Orient des leçons de métaphysique et d’intellectualité. C’est seulement au contraire dans sa propre tradition et dans la religion du Christ, que l’Occident trouvera la force de se réformer lui-même en l’ordre véritable, et d’enseigner l’orgueilleuse sagesse de l’Orient. Et si le pseudo-orientalisme théosophiste dont la propagande inonce actuellement l’Occident représente pour l’intelligence une menace de déliquescence et de corruption radicale, il faut bien avouer que le remède proposé par R. Guénon – c’est-à-dire, à parler franc, une rénovation hindouiste de l’antique Gnose, mère des hérésies – ne serait propre qu’à aggraver le mal.” A part l’accusation de gnosticisme, Guénon a été accusé aussi de «panthéisme». Les limites de René Guénon Les approches de Noële Maurice-Denis sur l’œuvre de René Guénon sont dépourvus des accusations stupides existantes dans la littérature antiguénonienne. Une condamnation définitive Dans les Degrés du Savoir, dont la première édition date de 1932, Jacques Maritain attaque Guénon sans le nommer: “Les doctrines que certains Occidentaux nous proposent au nom de la sagesse de l’Orient – je ne parle pas de la pensée orientale elle-même, dont l’exégèse demande une foule de distinctions et de nuances – ces doctrines arrogantes et faciles sont une négation radicale de la sagesse des saints. Prétendant parvenir par la métaphysique seule à la contemplation suprême, cherchant la perfection de l’âme hors de la charité, dont le mystère leur reste impénétrable, substituant à la foi surnaturelle, et à la révélation de Dieu par le Verbe incarné […] une soi-disant tradition secrète héritée des maître inconnus de la Connaissance, elles mentent parce qu’elles disent à l’homme qu’il peut ajouter à sa taille, et entrer par lui-même dans le suhumain. Leur hyperintellectualisme ésotérique, fait pour donner le change sur la véritable métaphysique, n’est qu’un spécieux mirage, et pernicieux. Il mène la raison à l’absurde, l’âme à la seconde mort.” (Les Degrés du savoir, p. 17) Olivier Lacombe et le panthéisme Lors de la table ronde qui eut lieu en juillet 1924 autour de Ferdinand Ossendowsky, auteur des Hommes, Bêtes et Dieux, Guénon rencontre Grousset et Maritain. Olivier Lacombe laisse planer sur l’hindouisme un soupçon de panthéisme. Il met en garde en avril 1931 les lecteurs des Etudes carmélitaines contre les thèses d’Orient et Occident paru en 1924: “L’advaita védantique et la métaphysique chrétienne s’affrontent ici et se nient sur un point essentiel. Le terme de panthéisme est équivoque et ne met pas assez l’accent sur la transcendance de Brahman. Mais force nous est de constater qu’un accord profond est impossible, que la distinction réelle et essentielle de Dieu et du Monde est compromise ici par la spéculation hindoue […] l’Inde du fier intellectualisme des Unpanishads et de çankara se nourrit de la plus ardente passion d’être qui soit au monde […] mais son caractère non spirituel est trop éclatant. L’Inde sait que le désir même de Dieu n’est divin qu’au moment où il le renonce; elle éprouve la brûlure d’une soif de l’esprit qui n’est point spirituelle. Et c’est pourquoi elle s’est réfugiée dans le divin […] Le panthéisme transcendant et transpersonnel des Upanishads et du Védânta n’est pas la position théologique de toutes les écoles orthodoxes; le Sâmkhya-Yoga, qui le cède à peine à celui-ci en importance, s’est orienté très nettement vers le théisme […] Ce théisme doctrinal, de même que la fusion du personnalisme divin et du panthéisme […] est en relation étroite avec les cultes et les sectes populaires et les religions d’amour, du bhakti.” La même année, préfaçant l’ouvrage de René Guénon, Les Philosophies indiennes, Lacombe écrit: “Il ne faut pas conclure à notre avis que le Védânta soit panthéiste ou même moniste, surtout au sens que ces mots ont chez nous”. Aparemment, pour Lacombe il y a deux vérités. Une autre production du tandem Maritain-Lacombe est l’invention de la «mystique naturelle» - c’est-à-dire toute ce qui n’est pas «mystique catholique». Des difficultés réelles La collaboration de Guénon à la revue Regnabit de P. Anizan n’a pas duré longtemps. Le refus de la publication d’un article, «Le grain de sénevé», repris dans Symboles fundamentaux de la science sacrée. En dépit de son hostilité à Guénon, Maritain témoigne dans le Journal de Raïssa de son désir de connaître l’Orient. “Maritain connaissait-il l’Orient? Vraisemblablement pas. L’effort à faire pour y parvenir était trop grand, sans parler de cette condition préalable qu’était l’étude du sanskrit. Son ami Lacombe aurait pu l’aider, mais ses idées antiguénoniennes de ce dernier formaient un obstacle supplémentaire et confortaient encore Maritain dans sa position. Pourtant, Maritain a vécu longtemps et il a eu toute sa vie une position privilégiée; il aurait pu, ainsi que d’autres l’ont fait, uploads/Philosophie/ rene-guenon-notes-sur-les-etats-multiples-de-l-x27-etre-et-des-degres-du-savoir-clan9.pdf
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- Publié le Aoû 28, 2022
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