POUR L’HISTOIRE DU PROBLEME DE L’AMOUR AU MOYEN AGE Thèse présentée à la Facult

POUR L’HISTOIRE DU PROBLEME DE L’AMOUR AU MOYEN AGE Thèse présentée à la Faculté des Lettres de l’Université de Paris par Pierre Rousselot Alain.Blachair@ac-nancy-metz.fr Cliquez sur le lien ci-dessus pour signaler des erreurs. Münster i[n] W[estfalen] Aschendorffsche Buchhandlung ABRÉVIATIONS EMPLOYÉES. ............................................................................................. 3 PRÉFACE. ................................................................................................................................. 4 PREMIÈRE PARTIE : LA CONCEPTION PHYSIQUE, OU GRÉCO-THOMISTE. ............. 8 CHAPITRE I : SOLUTION THOMISTE DU PROBLEME DE L’AMOUR. ...................... 8 I. .......................................................................................................................................... 8 II. ...................................................................................................................................... 14 III. ..................................................................................................................................... 17 CHAPITRE II : REMARQUES SUR ES ELEMENTS DE LA SOLUTION THOMISTE DANS LA PENSEE GRECQUE ET LA PENSEE MEDIEVALE. .................................... 22 § 1 : LA THÉORIE DU TOUT ET DE LA PARTIE. ..................................................... 22 § 2 : LA THÉORIE DE L’APPÉTIT UNIVERSEL DE DIEU. ...................................... 29 § 3 : LA COINCIDENCE DU BIEN DES ESPRITS ET DU BIEN EN SOI. ................ 35 CHAPITRE III : DEUX EBAUCHES MEDIEVALES DE LA THEORIE « PHYSIQUE ». HUGUES DE S. VICTOR ET S. BERNARD. .................................................................... 39 § 1 : HUGUES DE S. VICTOR. ...................................................................................... 39 § 2. S. BERNARD. ........................................................................................................... 43 SECONDE PARTIE : LA CONCEPTION « EXTATIQUE » ................................................ 49 CHAPITRE I : PREMIER CARACTERE : DUALITE DE L’AMANT ET DE L’AIME . 51 § 1. .................................................................................................................................... 51 § 2. SPÉCULATIONS SYSTÉMATIQUES ISSUES DU PREMIER CARACTÈRE DE L’AMOUR ....................................................................................................................... 54 A. Théorie Abélardienne de la Création ....................................................................... 54 B. Théorie Richardienne de la Trinité .......................................................................... 55 CHAPITRE II : SECOND CARACTÈRE : VIOLENCE DE L’AMOUR. ......................... 58 § 1. .................................................................................................................................... 58 § 2. SPÉCULATIONS SYSTÉMATIQUES. .................................................................. 61 A. Théorie de l’ordre de la charité ............................................................................... 61 B. Théorie de la charité parfaite ................................................................................... 64 CHAPITRE II : TROISIÈME CARACTÈRE : L’AMOUR IRRATIONNEL. ................... 67 § 1. .................................................................................................................................... 67 § 2. SPÉCULATIONS SYSTÉMATIQUES. .................................................................. 70 CHAPITRE IV : QUATRIÈME CARACTÈRE : L’AMOUR FIN DERNIÈRE. ............... 71 § 1. .................................................................................................................................... 71 § 2. SPÉCULATION SYSTÉMATIQUE. L’ESSENCE DE LA BEATITUDE : LA POSSESSION PAR L’AMOUR. ..................................................................................... 72 APPENDICE I. LA POSITION DU PROBLÈME DE L'AMOUR CHEZ LES PREMIERS SCOLASTIQUES. ................................................................................................................... 78 APPENDICE II. L’IDENTIFICATION FORMELLE D’AMOUR ET D’INTELLECTION CHEZ GUILLAUME DE SAINT THIERRY. ........................................................................ 84 A. Première explication ........................................................................................................ 86 B. Seconde explication ......................................................................................................... 87 C. Troisième explication ...................................................................................................... 87 TABLE DES NOMS PROPRES. ............................................................................................. 90 ABRÉVIATIONS EMPLOYÉES. Pour citer S. Thomas, on a usé des abréviations suivantes : 3, d. 28 q. 1 a. 6 ad 2 = In 3um Sententiarum, distinctione 28a, quaestione 1a, articulo 6o, ad secundum. I, q. 28 a. 3 c = Prima pars Summae theologicae, quaestione 28a, articulo 3o, in corpore articuli. 3 CG. 50 = Summa contra Gentiles, libro 3o, capite 50o. Pot. = Quaestiones disputatae de Potentia. Ver. = de Veritate. Mal. = de Malo. Car. = de Caritate. Virt. Com. = de Virtutibus in communi. Quodl. 6 n. 4 = Quodlibetum 6um, articulo 4o. In. Div. Nom. c. 4 l. 9 = Commentarius in librum beati Dionysii de divinis Nominibus. In caput 4um, lectione 9a. S. Thomas est cité d'après l'édition Fretté (Paris, Vivès.). PL. et PG. désignent les Patrologies latine et grecque de Migne. - Les chiffres qui suivent renvoient an volume et à la colonne. Quelques abréviations employées dans l'appendice II sont expliquées au début de cet appendice. PRÉFACE. [1] Ce qu'on appelle ici le « problème de l'amour » pourrait, en termes abstraits, se formuler ainsi : un amour qui ne soit pas égoïste est-il possible ? Et, s'il est possible, quel est le rapport de ce pur amour d'autrui a l'amour de soi, qui semble être le fond de toutes les tendances naturelles ? Le problème de l'amour est donc analogue à celui de la connaissance ; d'un côte, l'on se demande si et comment l'être peut avoir conscience de ce qui n'est pas lui-même ; de l'autre, si et comment l'appétit d'un être peut tendre à ce qui n'est pas son bien propre ; de part, et d'autre, une réponse affirmative semble de plus en plus difficile quand on approfondit davantage et la notion de conscience et la notion d'appétit. Au Moyen Age, le problème de l'amour se posait principalement sous la forme suivante : Utrum homo naturaliter diligat Deum plus quam semetipsum ?1 La Scolastique n'aurait pu, ce semble, concentrer la question dans une formule plus heureuse, parce qu'aucune n’eût été tout à la fois aussi concrète et aussi profonde. Pour ces hommes, Dieu était, par excellence, l'Etre réel, personnel, vivant ; la question de son amour était incessamment pressante et actuelle. De plus, ce Dieu, objet de l'amour vertueux commandé aux créatures libres, était en même temps l'auteur des appétits naturels, et la seule fin dernière, réunissant en lui la totalité du bien : si donc la conciliation de l'amour propre et du pur amour d'autrui était possible, il semble que c'est dans l'amour de Dieu qu'on devait la trouver, et que l'analyse de cet amour donnerait aussi les principes qui permettraient de juger des autres affections « désintéressées ». [2] On le voit facilement, d'ailleurs : l'unanimité à proclamer que Dieu seul est la fin qui béatifie l'homme laissait subsister le problème de l’amour : tous pensaient que la meilleure façon, pour l’homme, de s'aimer soi-même, c'est de se livrer tout entier à l’amour de Dieu. Mais d’affirmer, pour la vie éternelle, la convergence réelle des deux amours (amour du bonheur personnel ; amour pur, de bienveillance, d’amitié), ce n’était point résoudre cette gestion spéculative : les deux espèces d’Amour sont-elles irréductibles, ou peut-on les ramener à un principe commun ? J'ajoute, pour délimiter la question telle qu'elle se posait, alors qu'on était encore unanime à exclure une des réponses les plus radicales au problème, celle qui aurait, consisté à faire de l'amour de Dieu, purement et simplement, un moyen par rapport à l'amour de soi. La tradition disait trop haut qu’il faut aimer Dieu pour lui-même, et plus que soi-même2 ; si un tel amour 1 Voir à l’appendice I les références des premiers scolastiques. 2 Il suffit de renvoyer au fameux chapitre de S. Augustin sur les fruenda et les utenda ; cette distinction, comme on sait, a fourni au Maître des Sentences le début et la division de son ouvrage. Remarquer spécialement l'affirmation : « sed nec se ipso quisquam frui debet, si liquide advertas ; quia nec se ipsum diligere, sed propter illum quo fruendum est. » (Aug. De Doctrina Christiana, l. I, c. 22 n. 21, PL. 34, 26). Un texte souvent, cité est aussi celui du Pseudo- Prosper (Julianus Pomerius, De vita contemplativa, c. 25, PL. 59, 508) : « si était commandé, il était donc possible, et nul scolastique n’eût songé à le nier. Voilà précisément ce qui rendait difficile la position de ceux qui, disciples d'Augustin ou d'Aristote, définissaient la volonté de l'homme par l'appétit du bonheur : il leur fallait concilier avec ce premier principe la possibilité d'un amour de Dieu tel, que l’homme fût prit à sacrifier à cet Etre distinct de lui tous ses biens du corps et de l'esprit, et son bonheur même3. [3] En présence du problème ainsi défini, deux conceptions de l'amour se partagent les esprits au Moyen Age ; on peut les appeler la conception physique et la conception extatiques. Physique, cela va de soi, ne signifie pais ici corporel : les partisans les plus décidés de cette manière de voir ne regardent l'amour sensible que comme un reflet, une faible image de l'amour spirituel. Physique signifie naturel, et sert ici à désigner la doctrine de ceux qui fondent tous les amours réels ou possibles sur la nécessaire propension qu’ont les êtres de la nature à rechercher leur propre bien. Pour ces auteurs, il y a entre l’amour de Dieu et l'amour de soi une identité foncière, quoique secrète, qui en fait la double expression d’un même appétit, le plus profond et le plus naturel de tous, ou, pour mieux dire, le seul naturel. Cette manière de voir est celle, par exemple, de Hugues de S. Victor dans son traité De Sacramentis ; c'est celle de S. Bernard dans le de Diligendo Deo ; elle trouve un appui très ferme dans les doctrines néo-platoniciennes du Pseudo-Denys. Elle fut, enfin, précisée et systématisée par S. Thomas. C'est S. Thomas, s'inspirant d'Aristote, qui en dégage le principe fondamental, en montrant, que l’unité (plutôt que l’individualité) est la raison d’être, la mesure et l'idéal de l'amour ; il rétablit, du même coup, la continuité parfaite entre l’amour de convoitise et l'amour d’amitié. – La conception physique pourrait encore s'appeler la conception gréco-thomiste. vero propter illa quae praestat amatur, non utique gratis amatur : quia iam illud propter quod diligitur, ei, quod dicta quoque nefas est, antefertur. 3 L'amour de Dieu, tel que le présentait le christianisme, impliquait nécessairement un certain mépris de soi, un renoncement à soi-même. Cette habitude de la pense chrétienne amena plusieurs écrivains à considérer le sacrifice et la souffrance comme des éléments essentiels de tout amour (v. 2e partie, ch. 2). Pour ceux qui voulaient concilier l'amour de Dieu et l'amour de soi, tant qu'il ne s'agissait uploads/Philosophie/ rousselot-probleme-de-l-amour.pdf

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