CAHIERS DU CENTENAIRE DE L’ALGÉRIE III L’ÉVOLUTION DE L’ALGÉRIE PAR M. E. F. GA
CAHIERS DU CENTENAIRE DE L’ALGÉRIE III L’ÉVOLUTION DE L’ALGÉRIE PAR M. E. F. GAUTIER Professeur à la Faculté des Lettres d’Alger PUBLICATIONS DU COMITÉ NATIONAL MÉTROPOLITAIN DU CENTENAIRE DE L’ALGÉRIE CAHIERS DU CENTENAIRE de l’Algérie I. L’Algérie jusqu’à la pénétration Saharienne. II. La pacification du Sahara et la pénétration Saharienne. III. L’évolution de l’Algérie de 1830 à 1930. IV. Les Grands Soldats de l’Algérie. V. Le Gouvernement de l’Algérie. VI. L’art antique et l’art musulman en Algérie. VII. L’Algérie touristique. VIII. Les liaisons maritimes, aériennes et terrestes de l’Algérie. IX. Les productions algériennes. X. La vie et les mœurs en Algérie. XI. La France et les œuvres indigènes en Algérie. XII. Cartes et Index. de 1830 à 1930 En tant qu’utilisateur de ce site, vous vous engagez à respecter les règles de propriété intellectuelle des divers contenus proposés. 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Parce que, de tous les chefs d’Etat qui ont successivement présidé aux destinées de la France à travers le siècle dernier, Charles X semble bien avoir été celui qui fait ait la plus pauvre figure. On peut faire une comparaison curieuse. Dans la suc- cession de ce colosse génial que fut Napoléon Ier, la France n’a absolument rien trouvé. Elle a trouvé l ’Algérie dans la succession de Charles X. C’est à vous dégoûter d’être un homme de génie. Une nation n’a probablement pas intérêt à être conduite par un homme exceptionnel, par trop disproportionné avec la taille moyenne de l’humanité. Un peuple intellectuel à l’excès, comme le nôtre, ne sent pas assez quel rôle immense et bienfaisant tiennent les hommes ordinaires dans la conduite des grandes affaires. Peut-être sont-ils une matière amorphe, et en quelque sorte un meilleur conducteur, à travers lequel passent sans résis- tance les effluves des forces profondes. Ils résistent moins aux poussées de la destinée, aux lois générales inexprimées qui régissent l’évolution des organismes politiques et sociaux. Au cours de ce siècle, la France a changé cinq fois de gouvernement et par conséquent de politique. CHAPITRE PREMIER LA POLITIQUE FRANÇAISE Restauration — 7 — — 6 — Le gouvernement de Louis-Philippe a continué et achevé la conquête de l ’Algérie. Il l’a achevée parce qu’elle était commencée, et qu’il était pris dans l’engrenage ; parce qu’il n’a pas pu trouver de demi-mesure satisfai- sante ; parce que le roi avait du sens politique ; mais sans l’appui de 1’opinion, indifférente et même hostile. On a pu dire que nous sommes restés en Algérie parce que nous n’avons pas pu en sortir. Ce fut une conquête à contre-cœur, par à-coups, sans plan préconçu, avec des alternatives de découragement et de recul. L’homme même à qui on finit par confier les effectifs et l’autorité nécessaires pour la mener à bien, le maréchal Bugeaud, avait commencé sa carrière en signant le traité de la Tafna, qui était un demi-abandon. Ce même Bugeaud pourtant avait pris pour devise un aphorisme latin : Ense et aratro ; qu’on pourrait traduire à peu près : l’épée n’a de sens que si elle cède la place à la charrue. On entrevoit déjà l’avenir de l’Algérie qui était d’être une colonie au sens étymologique du mot, une colonie de colons, une colonie de peuplement. Louis-Philippe La courte existence de la seconde République s’est écoulée dans un tumulte d’émeutes françaises et euro- péennes. Elle a pourtant laissé sa trace en Algérie. Les déportations qui suivirent l’insurrection de juin y ont déposé des germes, dont on ne songe pas assez peut-être combien ils furent intéressants. Une grande place en Algérie est occupée par les colons d’origine italienne et surtout espagnole, dont l’éducation politique était peu avancée, dans l’atavisme desquels le préjugé religieux antimusulman était prépondérant. Les déportés, aux convictions politiques ardentes, ont apporté 1’esprit civique et laïc. Ils ont été un ferment de grande importance. La seconde République La politique du second Empire fut en Algérie, encore que négativement, extrêmement intéressante. A titre d’expé- rience avortée elle éclaire le sens de l’évolution. Le second Empire a suivi une politique exactement inverse de celle du gouvernement précédent, et surtout du suivant. Il a vigoureusement remonté le courant. C’était l’époque du « Royaume Arabe » : Napoléon III, empereur des Français, était conçu comme sultan des musulmans algériens, à peu près comme François-Joseph était empereur d’Autriche et roi de Hongrie. Il mettait un simple lien personnel entre deux entités politiques aussi indépendantes que possible. Pratiquement, cela signifiait une barrière aux progrès de la charrue européenne. Les colons étaient parqués dans des réserves autour de quelques grandes villes. Tout le reste était le royaume arabe. Les indigènes, gouvernés par les officiers des bureaux arabes, y étaient efficacement séparés de la colonisation, tenus sous cloche, abandonnés à leur propre puissance évolutive. C’était une idée intéressante. Une certaine analogie est évi- dente avec ce que nous appelons aujourd’hui le protectorat. Le second Empire, gouvernement autoritaire, a tenu solidement le gouvernail algérien. Il fut même un temps où il a voulu le prendre directement en main. Il créa à Paris un ministère de l’Algérie, qui fut confié au prince Napoléon. La grande innovation était que l’Algérie dût être gouvernée à distance, de Paris directement, par un ministre. C’est l’effort d’administration directe le plus marqué qui ait été jamais fait par la métropole. Qu’il ait été fait par l’Empire, rien de plus normal. Cet effort échoua très vite. On dut reconnaître l’impos- sibilité de gouverner d’aussi loin, hors de tout contact avec les réalités. L’esprit faux que fut le prince Napoléon était tout désigné pour une entreprise chimérique. Son cousin l’empereur, qui ne l’aimait pas, la lui a confiée peut-être avec l’arrière-pensée qu’elle était condamnée à léchec. Mais après comme avant le prince Napoléon, l’Algérie fut aux mains d’un gouverneur général tout puissant, qui fut invariablement un militaire, chef naturel des bureaux arabes, tout dévoué à l’idée du royaume arabe. Les colons, contenus et bridés, ont eu pour les bureaux arabes une haine passionnée. injurieuse. Ils en ont dit Le second Empire verneur général, qui avait toujours été jusque-là un militaire, fut pour la première fois un civil, Albert Grévy, le frère du président. L’événement fut accueilli par les colons comme un triomphe et c’en était un. L’Algérie a pris alors sa curieuse figure de prolongation de la France métropolitaine, au point de vue administratif, et électoral. Trois départements français avec tous leurs organes, préfectures et sous-préfectures, dont une attribution essentielle est naturellement la préparation des élections à la Chambre et au Sénat. Cette conquête du bulletin de vote pour les Chambres françaises, l’Algérie l’avait saluée avec enthousiasme, mais elle ne s’en contenta pas longtemps. Le 15 décembre 1898, le gouverneur-général, M. Lafer- riere, inaugurait les Délégations financières, petit parlement algérien. C’était une concession aux émeutes dites anti- juives. L’Algérie désormais, tout en conservant sa repré- sentation au parlement français, a son autonomie financière. Un résultat de cette création fut que l’Algérie, qui avait été jusque-là plus ou moins à la charge de la France, en est venue bien vite à ne plus coûter un sou au contribuable métropolitain. Tels sont les grands tournants de l’histoire politique algé- rienne sous la IIIe République. Le sens général de cette évolution a été manifestement l’extension à l’Algérie des principes politiques de la démocratie métropolitaine. La direction politique de la colonie a été mise progressivement aux mains des colons eux-mêmes. En face des résultats obtenus, il est difficile de nier que les colons ont fait un bel usage du pouvoir qui leur était confié. — 9 — — 8 — beaucoup de mal, ce qui était de bonne guerre. Mais il ne faut pas les en croire : les violences de polémique sont nécessairement d’une extrême injustice. Les officiers de bureaux arabes furent et sont encore dans l’ensemble un corps magnifique d’hommes pénétrés de leurs devoirs, admirablement au courant de leur besogne. Ils ont fait et ils font encore dans la société indigène une très belle œuvre de pacification des esprits. L’expérience du royaume arabe a donc été faite dans les meilleures conditions, continuée pendant près de vingt ans, avec esprit de suite, par des hommes dévoués et compétents. Or, voici les résultats qu’elle a donnés. On les trouvera exposés plus en détail aux chapitres II et III. En gros, dans le royaume arabe, pendant uploads/Politique/ 1930-evolution-de-l-x27-algerie-de-1830-a-1860.pdf
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- Publié le Sep 27, 2022
- Catégorie Politics / Politiq...
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