Lorenzo.lattanzi@mail.com Nous allons approcher l’idée de tolérance à partir du
Lorenzo.lattanzi@mail.com Nous allons approcher l’idée de tolérance à partir du mot. D’abord, étymologiquement, du latin, tolere, c’est supporter, la patience des Hommes dans les difficultés, d’ordre physique d’abord. « L’homme qui résiste à la physique », une résistance naturelle. Il ne s’agit pas uniquement du rapport de l’homme à la nature mais aussi à la société, aux autres hommes. C’est toléré une manière de vivre, une société, pas uniquement les autres. Il y a une contradiction entre pensée et conduite. Dans le Larousse on retrouve ces deux sens primitifs du terme, on parle par exemple de tolérance au bruit. C’est aussi l’attitude de quelqu’un d’admettre les idées des autres, ce sera ici l’indulgence. Il y a donc l’attitude à supporter d’une part, et à admettre, à accepter, d’une autre. C’est une disposition qui nous conduit à accepter un écart entre un fait (situation, opinion) et une norme. Tolérer serait accepter ce qui nous parait anormal, ce qui n’est pas conforme à une norme régulière, en opposition à une certaine idée de la normalité d’un point de vue social, au sens d’un ensemble de valeurs, mais aussi anormal comme non conforme à une norme qui représente un devoir être (norme morale, politique, religieuse). Dans le sens d’une norme au sens d’une régularité, d’une normalité, on parle des usages plutôt techniques du mot tolérance, on parle du mot tolérance dans le cas d’aller contre une loi, un règlement. On parle d’une tolérance orthographique, la possibilité de ne pas respecter une règle de grammaire ou d’orthographe, une licence. L’autre sens, après la régularité, c’est celui du devoir-être. En droit public, le terme « tolérance » désigne un certain nombre de cas où une administration à connaissance d’une situation d’illégalité mais ne fait rien pour y remédier : elle tolère cette illégalité. La tolérance de l’indulgence de l’administration, admise pour certaines raisons. Ce n’est pas le même sens que « permessibilité », la tolérance ce n’est pas un droit permissif, la tolérance ne s’applique qu’à des normes impératives (un devoir-être à respecter) mais pas aux normes permissives (faire ou ne pas faire quelque chose). En droit public la tolérance est comprise comme une modalité d’application d’une norme, qui en permet une application moins rigide. Tolérer contient également la forme primitive de supporter plutôt que d’admettre, dans ce genre d’usage la tolérance suppose la fixation d’un seuil de limite au-delà duquel l’écart à la norme devient insupportable. Dans le langage médical, la tolérance est le seuil jusqu’au quel un animal supporte un traitement sans conséquence grave. A l’inverse, l’intolérance sera problématique (intolérance à un médicament, un aliment), c’est donc ici supporter quelque chose jusqu’à un certain seuil, une certaine limite. En théologie, la tolérance est l’indulgence d’une Eglise à ceux qui professent une croyance différente à celle de l’Eglise mais touchant des points du dogmes que l’Eglise ne considère pas comme essentielle, raison pour laquelle elle tolère un écart à la norme. L’intolérance serait cette marge d’indulgence entre un fait et la norme, entre l’opinion d’autrui et ma propre opinion. S’il y a tolérance, c’est que ce qu’on tolère est supportable et ne remet pas en cause la règle générale, comme en théologie : elle ne touche pas à l’essence, au dogme essentiel. En philosophie, la tolérance est généralement conçue comme la capacité d’un individu, d’un groupe, à respecter une conduite, un comportement, contraire aux leurs, ou simplement étrange, bizarre, nouveau : capacité à respecter, accepter. En philosophie on prend surtout le côté admission que supporter quelque chose. Elle peut être définie comme une vertu, et Jankélévitch, dans son Traité de vertu relève quatre caractéristiques de la tolérance en tant que vertu. - En premier lieu, la tolérance est négative, c’est une vertu négative : elle laisse l’autre penser, dire et faire, ce qu’on désapprouve pour autant. 1 - Elle est extérieure, elle ne regarde pas à l’intention ou au motif de l’action, elle peut être inspirée par des nobles sentiments ou par des calculs d’intérêts. Elle ne touche pas forcément à notre intériorité. - Elle est hypothétique, elle n’a de valeur qu’en précisant son objet. Par exemple, on ne peut pas tolérer en général ce qui nuit à la vie d’autrui. En cas de meurtre on ne peut pas tolérer la violence, mais dans le cas du suicide cela dépendra, si c’est le fruit d’un libre choix ou non. Ne pas porter assistance à quelqu’un qui a sauté dans la rivière pourra être considérée comme une non-assistance, on considérera que la personne est en danger immédiat. Dans le cas d’un suicide assisté, elle sera plus tolérée : hypothétique signifie que cela dépend des cas, des hypothèses qui se présentent. - Elle est auto-limitatrice, elle s’est donné une limite elle-même : une tolérance illimitée serait suicidaire dit Jankélévitch. Elle irait contre son principe si est tolérée toute la violence, des fous et des meurtriers. Karl Popper, en 1945, dans son Essai sur la tolérance, définit le paradoxe de la tolérance. La tolérance illimitée mène à la disparition de la tolérance : si on tolère l’intolérance, l’intolérance finira par détruire la tolérance. Il faut un droit, au nom de la tolérance, de ne pas tolérer l’intolérance. La question est aujourd’hui très actuelle, c’est à l’arrière-plan de ce paradoxe que plusieurs auteurs ont posé la question des limites, voire des frontières, de la tolérance. En 2016, Y-C Zarka publie Jusqu’où faut-il être tolérant. Il y redéfinit le caractère auto-limitateur de la vertu par la notion de réciprocité. La tolérance, sur le plan moral, comporte une double exigence : adressée à soi-même et à autrui, ce qui est le similaire est la réciprocité. La tolérance est une vertu mais minimale, dont la valeur est qu’elle doit assurer la coexistence d’individu. La tolérance est une vertu comme disposition à la réciprocité. Elle est une vertu médiocre (au sens de moyen ou minimal chez Aristote), sans amour, mais essentiel au vivre ensemble à travers cette notion de réciprocité. Il s’agit de déterminer ce qui n’est pas tolérable, ce qui est intolérable. Mais il n’est pas plus simple de fixer les limites de l’intolérable que celles de ce qui est tolérable. On peut soutenir que certaines opinions ou pratiques, qu’on juge intolérables, ne devraient pas être admises et qu’on devrait empêcher qu’elles arrivent a priori ou les punir après. Mais cela pose des problèmes dans une société démocratique : l’intolérance va à l’encontre de la liberté de pensée et d’expression, garantie dans ces sociétés démocratiques. En 2016 paraissait également Les frontière de la tolérance, écrit par D. Lacorne. Il rappelle que la limite de la tolérance qui convient pour sauvegarder la libre expression des idées varie d’un pays à l’autre. Par exemple, aux Etats-Unis, la liberté d’expression est différente de celle des pays européens, qui peuvent être choqués par ce qui s’y passe : les manifestations néo-nazies y sont autorisées par exemple. Pour certains, la survie de la démocratie présuppose un débat plus extensif, ou pour d’autres la tolérance est si en danger qu’il faut la pousser à ses limites pour relever l’horreur des idées extrémistes : l’autorisation de la manifestation néo-nazie ne dit pas qu’on les approuve mais qu’on veut démontrer son absurdité. En général, dans la jurisprudence américaine, la censure du discours de la haine est jugée incompatible avec le premier article de la Constitution, même si on stigmatise des citoyens pour leur origine. Le principe de tolérance est appliqué de manière très large et la liberté d’expression en Europe de ce point de vue est moins protégée. La DDHC considère que la libre pensée de la libre expression est un droit des plus précieux, sauf un abus de liberté dans les cas déterminés par la loi. Ces limites visent notamment l’injure, la diffamation, l’apologie des crimes de guerre ou contre l’humanité. Dans cette perceptive, en France, on insiste surtout sur la question des crimes de guerre ou contre l’humanité, sur la question du discours de haine qui doit être empêché. En France, depuis 1972, il y a une répression du discours à 2 la haine, de discrimination en raison d’appartenance ou non appartenance à une ethnie ou religion. Une loi de 2012 étend cela aux minorité ethniques et sexuelles. Un autre risque d’une tolérance qui ne soit pas auto-limitatrice (Jankélévitch) ou réciproque (Zarka) est l’indifférence : on parle de deux stades de tolérance. Dans le premier stade, originaire, de la tolérance, il s’agit de supporter avec passion et indulgence ce qu’on ne peut pas empêcher. La tolérance demeure une sorte d’indulgence pour ce qui est perçu comme faiblesse, erreur, de la part de l’autre. Tolérer revient à supporter. Ce premier stade constitue un moment important de l’histoire européenne, celle qui énonce la liberté des consciences et conduit à la coexistence pacifique des religions. Mais cette conception sous-entend qu’il existe qu’une vérité face à laquelle tout ce que je tolère est une erreur, une faiblesse, qu’on désapprouve. Le second stade de la tolérance consisterait à se défendre de ces attachements exclusifs à sa propre liberté pour comprendre ce qui uploads/Politique/ philo-politique-la-personne.pdf
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- Publié le Aoû 21, 2022
- Catégorie Politics / Politiq...
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